1-Noah Visits 2.35
2-What Are You Asking Me? 6.01
3-The Bad Color 3.57
4-Those We Don't Speak Of 3.59
5-Will You Help Me? 2.34
6-I Cannot See His Color 1.31
7-Rituals 2.01
8-The Gravel Road 4.31
9-Race to Resting Rock 1.16
10-The Forbidden Line 2.17
11-The Vote 6.03
12-It Is Not Real 3.36
13-The Shed Not to be Used 2.03

Musique  composée par:

James Newton Howard

Editeur:

Hollywood Records
HR 5050467-4883-2-8

Produit par:
James Newton Howard
Score électronique produit par:
James T. Hill
Assistant de
James Newton Howard:
Annica Ackerman
Producteur exécutif de l'album:
M. Night Shyamalan
Chargé de la musique pour
The Buena Vista Motion Pictures
and Music Group:
Mitchell Leib
Directeur des albums pour
The Buena Vista Music Group:
Desirée Craig-Ramos

Artwork and pictures (c) 2004 Touchstone Pictures. All rights reserved.

Note: ****1/2
THE VILLAGE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by James Newton Howard
---Attention, spoiler: si vous n'avez pas vu le film, ne lisez pas la suite de cette revue. Des éléments de l'histoire vont vous y être dévoilés!

Voici enfin le quatrième film tant attendu de Night M.Shyamalan, réalisateur prodige d'un nouveau cinéma américain plus subtil, plus honnête et surtout plus indépendant (Shyamalan a toujours tenu à se produire lui-même). Après les excellents 'The Sixth Sense', 'Unbreakable' et le génial 'Signs', on attendait Shyamalan au tournant avec 'The Village'. Cette attente aura t'elle été récompensée? Hélas, il semblerait bien que nous soyons obligés de répondre non, car 'The Village' déçoit finalement sur plus d'un point. L'histoire se déroule dans un petit village isolé autour d'une forêt. Une petite communauté semblable à des amish se sont installés ici il y a plusieurs années pour fuir la cruauté des villes. Des légendes racontent que des créatures mystérieuses peupleraient la forêt qui entoure le village. Selon le mythe, la couleur rouge les attirerait, obligeant ainsi les villageois à se débarrasser de tout ce qui est de couleur rouge. Un jour, Lucius Hunt (Joaquin Phoenix), l'un des habitants du village, décide de franchir la forêt interdite pour rejoindre la ville qui se trouve de l'autre côté. Il est persuadé que les créatures ne lui feront aucun mal. Quelques temps après, des évènements étranges commencent à se manifester dans le village. On retrouve des cadavres à moitié écorchés d'animaux laissant supposer qu'un prédateur dément rôde dans les parages. Puis, une des créatures sème la panique en pénétrant un soir dans le village pour inscrire de bien mystérieuses traces rouges sur les portes des maisons. Pour les villageois, il ne fait aucun doute que ces traces sont des avertissements et des mises en garde. Doté d'un courage exemplaire, Lucius n'a pas peur et reste persuadé qu'il doit franchir la forêt. Sa romance avec Ivy Walker (Bryce Dallas Howard), la fille d'Edward Walker (William Hurt), l'un des chefs du village, a tout pour déplaire Noah Percy (Adrien Brody), un simple d'esprit qui veille sur Ivy depuis toujours. Dans un ultime acte de folie, Noah poignarde Lucius. Désormais, il n'y pas d'autre solution, il va falloir que quelqu'un franchisse la forêt pour rejoindre la ville à l'extérieur et chercher des médicaments, et ce sera Ivy qui s'en chargera, mais elle ignore encore ce qu'elle va découvrir de l'autre côté.

'The Village' aurait pu être un nouveau tour-de-force de la part du grand Shyamalan, et pourtant, le film échoue là où il commençait pourtant à merveille: instaurer un suspense captivant du début jusqu'à la fin. Le problème vient surtout d'un scénario bancal qui, bien que captivant dans la première partie, s'essouffle très vite à partir du moment où Shyamalan décide de nous amener les révélations. Ces dernières arrivent bien trop vite dans le film, à tel point que l'on devine aisément comment le film se terminera au bout d'une demi-heure. Certes, il reste une révélation à la fin du film, mais elle est tellement mineure comparée à tout ce qui a été dit avant qu'elle paraît superflue et maladroite. Comment l'auteur des formidables 'twists' de 'Signs' ou de 'The Sixth Sense' a pu commettre une telle erreur? Comment le grand Shyamalan a t'il pu gâcher un tel film en nous promettant un suspense de maître pour finalement échouer là où on l'attendait. Le problème vient en partie du fait que la scène où Edward révèle la supercherie des créatures arrive trop tôt dans le film. Du coup, la scène où Ivy se fait attaquer par la créature dans la forêt perd tout de son intérêt: on sait qu'il s'agit d'un type déguisé, et par déduction, on peut aisément trouver qui se cache derrière le déguisement. Quant à la révélation finale, elle s'avère être redondante par rapport à tout ce que les anciens du village ont pu dire à propos de leur passé dans la ville (crime, meurtre, etc.). Evidemment, le film se rattrape sur une mise en scène toujours de qualité, avec des plans recherchés, réfléchis (scène géniale où Ivy tend la main dans le noir au moment où la créature arrive, avant d'être rejointe par Lucius, illuminé par un ralenti inspiré), et une atmosphère générale typique de Shyamalan. Le film est aussi porté par une poignante histoire d'amour entre Lucius et Ivy, incarnés respectivement par les excellents Joaquin Phoenix et l'inattendu Bryce Dallas Howard, et qui devient finalement prédominante durant la seconde partie, au détriment peut-être du suspense maladroitement entretenu. Bilan très mitigé donc pour 'The Village' qui déçoit finalement par rapport à nos attentes mais confirme néanmoins le fait que Night M.Shyamalan est décidément un réalisateur prometteur et inspiré, le nouveau maître d'un cinéma américain plus honnête et plus artistique!

James Newton Howard retrouve Shyamalan pour la quatrième fois sur 'The Village', pour lequel le compositeur nous offre une nouvelle grande partition de qualité, typique de ce que l'on pouvait attendre de meilleur sur un film de Shyamalan. Si le film déçoit quelque peu, il n'en est pas de même pour la musique qui renouvelle l'exploit d'une quatrième grande partition après les trois scores mémorables que sont 'The Sixth Sense', 'Unbreakable' et l'inoubliable musique hantée de 'Signs'. La nouvelle grande idée de James Newton Howard sur 'The Village' provient de l'utilisation de la violoniste soliste Hilary Hahn, fameuse violoniste classique de chez Deutsche Grammophon qui apporte à la superbe partition orchestrale d'Howard tout son talent et sa sensibilité. En ce sens, Hilary Hahn est la véritable héroïne du film, puisqu'elle est même créditée au générique de fin, ce qui est un fait exceptionnel dans l'histoire du cinéma. Rarement un musicien d'une partition de musique de film aura été tant soutenue par le compositeur et le réalisateur d'un film, qui va même jusqu'à rendre hommage à l'interprétation divine de la brillante musicienne en la créditant dans le générique de fin. Omniprésent, le violon soliste retranscrit ici toutes les émotions du film et plus particulièrement cette mélancolie poignante et retenue à fleur de peau, une caractéristique principale du superbe score de JNH. La partition de 'The Village' ainsi fait preuve d'une grande sensibilité, épousant la romance de l'histoire, les émotions et la psychologie des différents personnages. On s'éloigne donc ici du style suspense de 'Signs' même si les frissons ont ici leur mot à dire dans la BO de 'The Village'.

'Noah Visits' nous introduit au thème principal, un motif de cordes basé sur une cellule de 8 notes au ton mélancolique, et qui évoque l'univers des villageois et plus particulièrement des secrets douloureux que cache Edward Walker (William Hurt), le chef du village. Les cordes introduisent le thème, accompagnées par les arpèges virtuoses du violon soliste qui apporte cette couleur inimitable à la musique dans le film. Il est même incroyable de constater à quel point le violon apporte une dimension particulière au film, preuve du savoir-faire d'un James Newton Howard toujours aussi inspiré lorsqu'il s'agit d'écrire la musique d'un film de Shyamalan, loin de la médiocrité ambiante de certaines productions hollywoodiennes du moment. 'What Are You Asking Me?' introduit quant à lui le second thème du score, confié ici au violon soliste avec cordes et harpe. La musique surprend aussi de par la qualité de l'écriture et des harmonies très recherchées. Le score se rapproche ainsi par moment du style de 'Snow Falling on Cedars', auquel on compare très souvent le score de 'The Village' de par son côté mélancolique rêveur et l'utilisation d'un instrument soliste (dans 'Snow Falling on Cedars,' James Newton Howard avait fait appel au violoncelle de Ron Leonard). L'excellent second thème de violon surprend de par sa simplicité et sa pudeur qui ne le rend que plus émouvant, personnifiant à merveille l'histoire d'amour poignante entre Ivy et Lucius, elle aussi empreinte d'une certaine pudeur. On notera dans 'What Are You Asking Me?' l'intrusion de flûtes qui semblent être associés au caractère 'folklorique' du village et que l'on entend dès le sinistre générique de début (honteusement absent de l'album pour une raison totalement inconnu, si ce n'est que le score a été enregistré par les musiciens AFM, comme pour 'Signs'). 'What Are You Asking Me?' fait sans aucun doute partie des plus morceaux du score de 'The Village', représentant toute la dimension romantique, émotionnelle et mélancolique du film et de sa musique.

Plus sombre, 'The Bad Colors' fait régner un certain climat d'appréhension alors qu'Ivy découvre par terre une fleur rouge, la couleur interdite qui attire les créatures des bois. Après un début atmosphérique où intervenaient brièvement les flûtes et une partie électronique plutôt sinistre et dissonante, la musique prend très vite une tournure plus psychologique avec l'utilisation d'envoûtants traits de violon dans une ambiance qui rappelle une fois encore les moments sombre de 'Snow Falling on Cedars'. La terreur est alors magnifiquement suggérée dans l'incontournable 'Those We Don't Speak Of', illustrant l'une des meilleures scènes du film: une créature pénètre le village, obligeant les villageois à se cacher dans leurs maisons. Ivy, sur le pas de sa porte, tend la main dans l'obscurité, espérant réussir à toucher celle de Lucius, qui se trouve encore à l'extérieur. La terreur inspirée par la créature est suggérée ici par un bref sursaut introductif, des cuivres dissonants, des tambours tribaux agressifs et une partie électronique sinistre. Puis, en l'espace de quelques secondes, la terreur laisse la place à un pur moment d'émotion lorsque, filmé au ralenti, Lucius apparaît brusquement devant Ivy et l'entraîne dans la cave où ils vont se cacher, attendant que la menace soit passée. Les arpèges du violon d'Hilary Hahn viennent alors anéantir soudainement ce climat de terreur comme si l'on venait de changer brusquement d'univers au détour d'une brillante transition inspirée, l'émotion l'emportant magnifiquement sur les frissons, toujours avec ce sens de la retenue cher au compositeur et que l'on retrouvait déjà dans 'The Sixth Sense' ou 'Unbreakable'. La dernière partie de 'Those We Don't Speak Of', grand moment du score de 'The Village', est radicalement touché par la grâce, suggérant avec subtilité et par le biais d'harmonies de qualité l'amour entre Ivy et Lucius, personnifié à travers un effet de ralenti lui aussi très inspiré, preuve du talent de cinéaste de M. Night Shyamalan. A noter que le morceau se conclut sur une magnifique reprise au violon du thème 'romantique' qui semble en dire long sur la scène, d'où l'importance de la musique dans ce film, et comme dans tous les autres films de Shyamalan.

Des pièces comme 'Will You Help Me?' ou 'The Gravel Road' sont très représentatives du climat mélancolique qui s'installe très vite dans la partition, de même qu'une pièce comme 'I Cannot See His Color' se veut plus ambiguë, illustrant les tourments intérieurs d'Ivy, qui ne voit pas la 'couleur' de Lucius à travers son regard intérieur. Le travail autour des harmonies et du jeu du violon est ici fort remarquable, JNH jouant sur la subtilité de chacun des éléments sans jamais nuire à la retenue de la musique. On notera une très belle reprise du thème romantique au piano et accompagné par les arpèges du violon dans 'The Gravel Road', le piano et le violon dialoguant comme dans une véritable sonate 19èmiste, à laquelle vient s'ajouter la flûte. Dans la scène, Ivy poursuit son chemin dans les bois en quête du remède qui sauvera l'homme qu'elle aime. Puis, très vite, le climat s'assombrit soudainement, laissant place à un nouveau sentiment d'appréhension, de doute, d'angoisse. JNH suggère ici ce sentiment avec le piano, une tenue de synthé, des cloches et une tenue du violon, et ce n'est que par un nouveau rappel du thème principal aux cordes et au violon que le compositeur arrive à brillamment relâcher la tension malgré une fin plus ambiguë pour le morceau. Le motif sombre associé au mythe des créatures réapparaît au début de 'The Forbidden Line', sans aucun doute l'un des moments les plus sombres du score, lorsque Lucius, n'écoutant que son courage, décide de franchir la ligne interdite. JNH utilise alors des sonorités macabres du synthétiseur avec toute une série d'effets sonores sinistres qui installent clairement un climat de suspense et de danger quasiment angoissant. Une fois encore, l'effet à l'écran est saisissant, preuve incontestable de l'importance de la musique dans ce film qui, loin de s'avérer être un discours redondant de ce que présentent les images, rentre au coeur de chaque scène et arrive à susciter une émotion que les images seules ne sauraient être en mesure d'exprimer (cf. le magnifique et passionné 'The Vote' et son violon envoûtant).

'It Is Not Real' est le dernier grand moment de terreur incontournable du score. Introduit par un sursaut terrifiant, le morceau réutilise les effets électroniques glauques et les tambours sauvages de 'Those We Don't Speak Of' pour la scène où la créature attaque Ivy dans les bois. Comme à l'accoutumée, c'est l'émotion et la mélancolique qui prennent la place des frissons lorsque l'on découvre enfin le secret de Noah et celui du village, ce qui explique la reprise du thème du village avec cordes, harpe, flûtes et violon. Bizarrement, l'album se conclut sur une pièce atmosphérique particulièrement sombre, qui ne correspond en rien à la fin du film, 'The Shed Not To Be Used'. La pièce correspond en fait à la scène où Edward Walker révèle le secret de la grange interdite à Ivy. On notera ici l'utilisation de tenues dissonantes et envoûtantes avec piano, cloches, cordes, violon et harmoniques de la harpe. Après une écoute aussi riche d'émotion dans le film et une seconde écoute toujours aussi intense sur l'album (et ce malgré l'absence de nombreux morceaux du score - 42, 29 minutes, c'est peu, mais c'est mieux que rien!), comment conclure autrement que par une seule et même phrase: 'The Village' est sans aucun doute le nouveau chef-d'oeuvre de James Newton Howard! Sans atteindre pour autant le génie de l'inégalable 'Signs', la partition de 'The Village' témoigne de la sensibilité et de l'immense talent de l'un des meilleurs compositeurs officiant actuellement à Hollywood (pour ne pas dire LE meilleur!). Avec 'The Village', c'est un quatrième sans-faute dans la collaboration musicale entre James Newton Howard et M. Night Shyamalan, car, si le film déçoit par rapport à nos attentes, le score s'avère être une nouvelle grande surprise du compositeur, toujours aussi inspiré. A l'écoute de la partition de 'The Village', difficile de trouver un équivalent récent à Hollywood tant les harmonies, l'écriture et le style général relèvent de l'inspiration quasi divine. Poignante, la musique de 'The Village' reflète parfaitement toutes les dimensions du film (suspense, émotion, romance, mélancolie, etc.) en lui conférant un petit 'plus' typique des scores pour les films de Shyamalan, la 'JNH's touch', incomparable et inégalable. Difficile aujourd'hui de trouver des partitions aussi passionnantes, aussi poignantes, aussi envoûtantes, aussi artistiques, aussi passionnées que le nouvel opus musical de JNH, si ce n'est en comparant cette oeuvre aux précédentes écrites pour 'The Sixth Sense', 'Unbreakable' et 'Signs', des partitions indispensables qui s'avèrent déjà être des piliers fondamentaux dans la carrière très éclectique du compositeur. Vous l'aurez donc compris, nous sommes réellement en présence du nouveau chef-d'oeuvre de James Newton Howard!


---Quentin Billard