L'éternel duo Walter Matthau/Jack Lemmon n'aura jamais autant brillé que dans le célèbre 'The Odd Couple' (drôle de couple) de Gene Saks, adapté de la fameuse pièce de Neil Simon. Le film raconte comment deux amis de longue date, Félix (Jack Lemmon) et Oscar (Walter Matthau) se retrouvent obligé de cohabiter dans le même appartement après que la femme de Félix a décidé de plaquer ce dernier. Grand classique de la comédie des années 60, 'The Odd Couple' (1968) reste incontestablement le meilleur film auquel a participé le célèbre duo d'acteurs. 30 ans plus tard, Howard Deutsh décidé de donner une suite à ce film qui réunira pour la dernière fois Lemmon et Matthau, arrivés tous deux à la fin de leur vie. Après s'être perdu de vue pendant 17 ans, Félix et Oscar se retrouvent enfin à l'occasion du mariage de Brucey (Jonathan Silverman), le fils d'Oscar et d'Hannah (Lisa Waltz), la fille de Félix. Après s'être retrouvés à l'aéroport de Los Angeles, Oscar et Félix prennent l'autoroute pour rejoindre le lieu du mariage à San Malina. Sur le chemin, les ennuis commencent de plus belle pour les deux compères: Félix découvre avec horreur qu'il a oublié sa valise à l'aéroport, et, parce qu'il avait oublié de mettre le frein à main en se garant sur le bord de la route, Oscar perd sa voiture qui s'écrase au fond d'un ravin. Obligés de marcher à pied jusqu'à ce qu'ils trouvent un téléphone, les deux compères vont devoir se supporter durant tout le trajet, Félix étant toujours enclin à des tics agaçants qui ont un pouvoir d'irritabilité extrême sur les nerfs d'Oscar. Leur voyage va alors se transformer en véritable aventure lorsqu'ils embarquent à bord d'une camionnette d'un voleur de fruits ou lorsqu'ils se retrouvent mêlés à des histoires incroyables qui les ramènent toujours au bureau du shérif local (Jay O. Sanders) qui n'en peut plus de les revoir constamment dans son bureau. Avec beaucoup de patience, les deux compères finiront par arriver juste à temps pour le mariage de Brucey et Hannah.

'The Odd Couple II' prend une tournure différente, loin du style de la pièce de théâtre originale de Neil Simon. C'est l'artisan Howard Deutch (spécialiste de comédies nunuches) qui nous livrent une vision plus hollywoodienne de cette excellente histoire de deux compères qui ne cessent de se chamailler tout en étant les meilleurs amis du monde, et à qui il arrive toujours des péripéties rocambolesques. On regrettera le fait que le scénario de ce second opus ait abandonné l'intrigue de la cohabitation pour partir dans un style plus aventureux, limite pastiche de road-movie hilarante. Malgré le côté 'énorme' des gags (le coup de la perruque et du corbeau sur la route, le coup de la voiture qui tombe dans le ravin, les deux cow-boys qui retrouvent leurs fiancés qui avaient dansé la veille avec Oscar et Félix dans un bar, le running gag du bureau du shérif, etc.), le film fleure bon le ton comique un brin rétro des comédies à l'ancienne, tendance années 70/80, sans oublier quelques moments plus émouvants et plus particulièrement à la fin du film. Lorsque Félix et Oscar se disent au revoir une dernière fois, on sait que quelque part, les acteurs se disent au revoir dans la réalité, puisqu'ils ne tourneront plus jamais ensemble et quitteront ce monde quelques années plus tard. En ce sens, le final de 'The Odd Couple II' a quelque chose de particulièrement émouvant, en dehors de la scène très niaise du mariage. Howard Deutch, qui avait déjà dirigé Jack Lemmon et Walter Matthau sur 'Grumpier Old Men', s'en est donné à coeur joie en multipliant ici gags loufoques et péripéties rocambolesques. Une comédie agréable et sympathique qui marque la fin de l'un des meilleurs duo d'acteurs du cinéma hollywoodien!

Alan Silvestri, qui avait déjà écrit la musique de 'Grumpier Old Men', retrouve Howard Deutch pour la seconde fois sur 'The Odd Couple II'. Fidèle à son style comédie agréable et léger, Silvestri nous livre une sympathique partition orchestrale dans la lignée des précédentes partitions comédie du compositeur. Ainsi, le 'Main Title' annonce clairement le côté agréable du score avec ses cordes sautillantes, ses vents enjoués et son thème principal qui possède un côté à la fois léger et nostalgique, évoquant l'amitié entre Oscar et Félix. Comme toujours chez Silvestri, le score possède un certain classicisme d'écriture et une fraîcheur dans les orchestrations qui s'apprécie toujours à l'écran. Silvestri utilise aussi un thème plus jazzy entraînant repris du score de Neal Hefti pour le 'The Odd Couple' de 1968, auquel le compositeur associe une batterie légère et entraînante avec basse, piano, saxophone, etc. A l'écoute de cet arrangement de 'Odd Couple' un brin rétro - affichant clairement le style comédie des sixties -, difficile de ne pas avoir en tête les images de ce sympathique duo comique qui nous aura tant fait rire pendant près de 4 décennies. Le thème de Neal Hefti reste présent tout au long du film, accompagnant avec une certaine bonne humeur les aventures d'Oscar et Félix. Dans 'Parking Lot', Silvestri développe son thème principal avec cordes et vents, le thème étant très proche d'un autre thème entendu dans 'The Parent Trap', score comédie composé la même année que celui de 'The Odd Couple II'. Le morceau accompagne ici les deux compères dans la scène du parking de l'aéroport.

'Bruce's News' (scène où Brucey apprend à Oscar qu'il va se marier avec la fille de Félix) est plus typique du style sautillant de 'The Odd Couple II', avec ses orchestrations fines et légères reposant sur les cordes et les vents (flûtes, hautbois, clarinettes, bassons, etc.). On retrouve ce style mickey-mousing tout au long du film, illustrant au passage les gags et les scènes hilarantes du film sur un style un peu rétro, non dénué d'un certain humour, comme dans le très mickey-mousing 'Just Forget It' lorsque Félix s'aperçoit qu'il a perdu sa valise. Le reste du score va ainsi osciller entre mickey-mousing, moments humoristiques légers et passages plus émouvants. Ainsi, 'I Have To Pee' décrit avec humour la scène où Félix n'arrête pas d'enquiquiner Oscar sur le trajet, le morceau étant accompagné avec un rythme à la limite de la 'habanera' espagnole avec des castagnettes, une petite idée amusante qui approfondi le ton humoristique voulu par Silvestri dans le film. Plus mickey-mousing, 'Roadside Battle' (scène de la voiture qui tombe dans le ravin) nous renvoie au Silvestri de 'Who Framed Roger Rabbit' et de 'Richie Rich'. On notera l'utilisation amusante de l'harmonica dans le sautillant 'In The Slammer', qui réutilise au passage le sympathique thème de Neal Hefti.

A noter un 'Bus Siege' plus particulier puisque le morceau fait légèrement référence au Silvestri des thrillers, avec sursaut orchestral et cordes sombres et dissonantes dans la lignée de 'Shattered' ou de 'Ricochet' pour la scène où les deux cow-boys arrêtent le bus et viennent chercher leurs fiancées et les deux vieux compères. Silvestri s'amuse à faire un petit clin d'oeil à une autre facette de sa personnalité musicale, à laquelle il répond par l'humour en y incorporant malgré tout quelques passages sautillants. On ne résistera pas non plus au charme du thème repris aux hautbois et aux cordes dans un 'Felix Makes His Move' qui se rapproche plus clairement ici de 'Father of The Bride' avec son côté doux et nostalgique, amenant une dernière partie plus intimiste où le compositeur délaisse le mickey-mousing du début. 'I Really Love Her' fait place au piano, aux vents et aux cordes lorsque les deux compères sont enfin arrivés au mariage et qu'Oscar parle une dernière fois à son fils avant qu'il se marie. Le thème, repris de manière plus romantique aux cordes dans 'Wedding' (scène du mariage) avec un style proche de 'Grumpy Old Men', débouche sur le jazzy 'Oscar & Felix' (une marque de fabrique du compositeur, qui aime ainsi à glisser des pièces jazzy dans ses musiques de comédie) suivi de l'intimiste et sautillant 'Goodbye & Hello' pour les adieux finaux.

Vous l'aurez compris, 'The Odd Couple II' est ce style de musique de comédie fraîche et agréable qu'Alan Silvestri a l'habitude d'écrire pour ce genre de film. Si le compositeur ne marquera pas les esprits avec cette nouvelle composition orchestrale positive et enjouée, il confirme qu'il est malgré tout un maître dans l'écriture des musiques de comédie à la fois naïves, simples et pleine de fraîcheur. Un Silvestri mineur, certes, mais un bon!


---Quentin Billard