1-Manchester 1866 5.15
2-The Chase 5.04
3-Unexpected Meeting 2.22
4-Scarlet 1.32
5-Raid by the Airship 2.29
6-London World Exposition 3.35
7-The Atelier of Ray 1.42
8-Crystal Palace Waltz 2.14
9-Ray's Dilemna 5.39
10-The Sortie of
Scotland Yard 1.48
11-Fight in the
Exposition Ground 3.46
12-Launch! 5.25
13-Temptation 3.50
14-Fly in the Sky 1.09
15-Two Delusions 4.02
16-Collapse and Rescue 8.26
17-Ray's Theme 2.53

Musique  composée par:

Steve Jablonsky

Editeur:

Colosseum CAS 8502.2

Score produit par:
Steve Jablonsky
Album produit par:
Alan Meyerson, Kei Momose
Montage de la musique:
Tom Trafalski

Artwork and pictures (c) 2004 Colosseum. All rights reserved.

Note: ***1/2
STEAMBOY
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Steve Jablonsky
Véritable évènement cinématographique japonais, 'Steamboy' est le nouveau film d'animation de Katsuhiro Otomo, réalisateur du mythique 'Akira'. Pour concevoir cette gigantesque production d'animation aux effets spéciaux colossaux, le film nécessita près de 8 ans de travail au réalisateur et son équipe pour accoucher de sa nouvelle oeuvre, une période de gestation très longue qui s'explique par le simple fait que le projet, prévu à l'origine en 1994, ne put se concrétiser pour des raisons techniques et budgétaires. A l'époque, la technologie des effets spéciaux numériques n'était pas encore suffisamment évoluée pour permettre la réalisation de ce film. Otomo, qui avait très clairement en tête le concept du film depuis qu'il réalisa 'Memories' en 1994 (avec l'épisode 'Cannon Fodder'), souhaitait révolutionner l'animation en faisant appel aux techniques de 2D et de 3D afin de retranscrire toute l'ampleur de sa vision. Le résultat final est assez éloquent: 'Steamboy' a battu le record du plus gros budget jamais accordé à un film d'animation japonais: 20 millions de dollars, avec un total de plus de 180000 dessins utilisés pour l'animation. Le scénario, assez simpliste, nous plonge dans l'Angleterre victorienne de 1866. Ray Steam, un jeune garçon doué pour la mécanique, reçoit par la poste un colis contenant une puissante petite machine à vapeur, que lui a envoyé son grand-père. Ce dernier le met en garde et lui demande de prendre soin de cette machine et de la donner au scientifique Robert Stevenson, qui se chargera d'en faire bon usage. Mais Eddy Steam, le père de Ray, convoite aussi la précieuse machine et envoie des hommes la récupérer de force chez Ray, qui s'enfuit avec elle. Au terme d'une longue poursuite agitée, Eddy finit par récupérer la machine et compte l'utiliser pour alimenter la tour Steam, une colossale tour entièrement animée par la vapeur et qui a la faculté de s'élever dans les airs malgré une taille démesurée et un poids énorme. Pour Eddy, la tour Steam est la concrétisation de tout ce que peut offrir la science moderne. Pour lui, la vapeur est l'énergie de demain, capable d'alimenter toutes les machines du monde entier, et il projette d'en faire la démonstration le jour de la prestigieuse exposition universelle. Mais Loyd Steam, le grand-père de Ray, réapparaît et compte bien s'opposer aux plans mégalomaniaques d'Eddy.

A travers l'affrontement entre Eddy et Loyd, c'est l'opposition entre deux visions de la science que le réalisateur a voulu montrer dans 'Steamboy'. L'un cherche à utiliser la science pour démontrer toute sa puissance aux yeux du monde, l'autre cherche à combattre la perversité de la science moderne, qui doit servir l'homme et non pas l'asservir. Entre eux se trouve Ray, jeune héros intrépide qui n'hésitera pas à se lancer dans l'aventure pour récupérer la précieuse machine à vapeur qu'il apprendra à maîtriser aux côtés de la jeune mais agaçante et capricieuse Scarlett. Le film, terriblement époustouflant d'un point de vue technique à la limite de l'orgie visuelle furieuse, déçoit par la faiblesse de son scénario qui prouve à quel point Katsuhiro Otomo a tout misé sur l'aspect visuel en oubliant qu'il devait raconter avant tout une histoire qui puisse tenir la route comme celle d'Akira. Les décors, absolument grandioses, sont très rigoureusement inspirés des villes de Manchester, Londres et York dans l'Angleterre de la seconde partie du 19ème siècle, à l'époque de la locomotive à vapeur. Ce sont d'ailleurs les machines à vapeur qui sont les rois dans 'Steamboy', Otomo nous proposant une vision à la fois réaliste et totalement futuriste de cette technologie de la vapeur qui va même jusqu'à alimenter des soldats à vapeur tout droit sortis d'un film de science-fiction hollywoodien. Très long, le film possède cet aspect visuel écrasant, surpuissant, qui peut s'avérer lourdingue à la longue mais qui ne peut laisser indifférent, à moins d'être totalement insensible à ce type de film d'animation grandiose. Dans 'Steamboy', on retrouve le même goût pour les destructions en masse chaotiques et l'appétit de surpuissance que l'on retrouvait déjà dans 'Akira'. Si certains considéraient 'Akira' comme un film particulièrement bourrin, on n'ose imaginer ce qu'ils vont penser de 'Steamboy', où l'on assiste par moment à une demi-heure non-stop de destructions massives et d'action pour fou furieux. Une fois encore, le cinéma d'animation japonais nous prouve son indéniable maîtrise technologique et s'affirme comme une puissante alternative au cinéma d'animation américain, tout en conservant le style graphique qui fait le charme de tous les 'animes' traditionnels nippons. Reste que, pour un film censé être le nouveau chef-d'oeuvre de Katsuhiro Otomo, on était en droit de s'attendre à un film au scénario moins linéaire et un peu plus profond (le discours sur la science paraît un peu simplet et manichéen bien que très soutenu tout au long du film, parfois un peu trop d'ailleurs), ne se limitant pas à une simple et banale démonstration d'orgies visuelles et de puissance des images. Reste que 'Steamboy' est un film d'animation grandiose et colossal, qui mérite très largement d'être apprécié à sa juste valeur!

La surprise concernant 'Steamboy' vient du fait que Katsuhiro Otomo a décidé de faire appel à un compositeur américain pour écrire la musique de son nouveau film. Ce compositeur n'est autre que Steve Jablonsky, jeune protégé de Hans Zimmer tout droit issu de l'écurie de Media-Ventures. On pourrait être intrigué par la perspective de voir se mélanger film d'animation japonais et musique à la Media-Ventures dans un même film, mais les deux axes cohabitent pourtant sans problème et aboutissent à un résultat assez probant bien que très loin là aussi du chef-d'oeuvre annoncé. Pour la petite histoire, Otomo a décidé d'engager Jablonsky après que ce dernier ait envoyé une démo au réalisateur japonais. C'est la première fois qu'un réalisateur japonais décide de faire appel à un compositeur américain pour écrire la musique de son film d'animation. Jablonsky, jusqu'ici cantonné au rôle de compositeur de musiques additionnelles pour les productions Media-Ventures, s'est vu offrir l'opportunité d'écrire une partition orchestrale en solo, après un premier essai guère mémorable sur 'The Texas Chainsaw Massacre' de Marcus Nispel. Pour sa seconde partition en solo, Jablonsky rattrape le coup et nous offre une grande partition symphonique d'aventure et d'action à l'ancienne, apportant une énergie considérable à un film qui, de toute évidence, n'en manquait déjà pas à l'origine. L'ouverture du film, loin de dévoiler le côté spectaculaire et massif de la partition, nous invite à partager une aventure agréable avec un 'Manchester 1866' introductif plutôt léger et enjoué. Otomo plante le décor de l'Angleterre victorienne tandis que Jablonsky joue à fond la carte de l'orchestre classique traditionnel, dominé ici par les cordes, les vents (clarinette soliste, flûtes, etc.), les cors, les percussions, etc. Le premier thème est introduit par une clarinette légère qui plante le décor avec un sympathique thème pastoral, sur fond de percussions légères (à la fois acoustiques et électroniques), avant que le morceau ne prenne une plus grande ampleur orchestrale/percussive pour la scène de la machine à vapeur au tout début du film, permettant à Jablonsky de dévoiler le sympathique thème du jeune Ray Steam aux cordes/vents. A noter que le compositeur fait aussi une brève allusion au thème d'aventure à la fin du morceau, sous une ferme lente et douce, loin des envolées héroïques du final, annonçant les prémisses d'une grande aventure.

Evidemment, une aventure d'une telle ampleur devait indispensablement contenir de très gros morceaux d'action. En ce sens, 'The Chase' fait office de premier déchaînement orchestral massif et tonitruant, accompagnant la première scène de poursuite avec le train au début du film. Le morceau est écrit pour orchestre dominé par cordes et cuivres avec une importance accordée aux percussions électroniques qui rythment le morceau durant toute cette course-poursuite effrénée. Si vous aimez les scores d'action orchestraux signés Media-Ventures, le massif 'The Chase' ne devrait pas vous laisser indifférent, un véritable rouleau-compresseur musical de plus de 7 minutes pour une séquence purement spectaculaire (trop peut-être) et ce à quelques minutes seulement du début du film. L'ambition est claire: Otomo veut nous offrir un spectacle grandiose où prime le visuel, et c'est en ce sens que la musique de Jablonsky est en parfaite adéquation avec le sujet (exit donc toute subtilité et finesse dans cette musique!). Le compositeur dévoile un nouveau thème dans le sympathique 'Scarlet' qu'il associe à la jeune Scarlet. Le thème de la jeune fille se veut plus innocent, mélodique et léger, exposé ici aux cordes/flûtes à bec et rythmé par un tambourin, le thème ne reflétant d'ailleurs nullement le côté irritant du personnage (qui passe la majeure partie du film a faire des commentaires stupides dont on se passerait volontiers). Très vite, c'est l'action qui reprend alors le dessus avec un nouveau déchaînement orchestral dans 'Raid of The Airship' qui reste une fois encore associé à une nouvelle grosse scène d'action massive du film.

'London World Exposition' illustre la séquence à l'exposition universelle de Londres, introduite par une nouvelle jolie variante lente du thème d'aventure aux cordes/flûtes à bec et qui, par la même occasion, est aussi associé aux rêves d'exploit et d'évasion de Ray Steam, qui reste passionné par les machines et le ballon à vapeur. Pourtant, très vite, cette atmosphère plutôt douce et rêveuse est très vite brisée par une ambiance plus inquiétante où se profile un nouveau thème plus dramatique basé sur un motif ascendant, qui deviendra par la suite un motif apparaissant dans le climax dramatique final du film, et qui est ici associé aux ambitions démesurées d'Eddy Steam. Pour Steve Jablonsky, 'Steamboy' lui permet ainsi de revenir à la bonne vieille époque des grandes partitions d'aventure orchestrales avec plusieurs thèmes, une chose qui devient bien rare de nos jours, surtout à Hollywood. Dans 'Crystal Palace Waltz', Jablonsky s'offre une petite pause entre deux moments agités pour une petite valse basée sur le thème de Scarlet lorsque Ray et sa nouvelle amie viennent se balader dans le palais de cristal de l'exposition universelle de Londres, donnant l'occasion au compositeur de nous proposer une sympathique variation sur le thème de Scarlet exposé par un piano et une flûte à bec avec quelques cordes et un tambourin, illustrant une fois encore l'innocence et la fougue de la jeune fille, malgré son côté fillette gâtée agaçante.

La musique de Jablonsky suit alors la progression du film, car, après les premiers moments d'aventure et les quelques passages thématiques plus calmes du début, la seconde partie de la partition s'oriente davantage vers l'action pure et dure, à commencer par 'Ray's Dilemna' qui évoque les premiers ennuis à l'exposition universelle et les méfaits d'Eddy Steam. Dans 'The Sortie of Scotland Yard', l'arrivée de la police anglaise se fait au son de grosses rythmiques électroniques et d'un orchestre faisant monter la tension comme pour suggérer un affrontement devenu inévitable. C'est ainsi qu'on en arrive à l'explosif 'Fight in The Exposition Ground' pour la confrontation entre Scotland Yard et l'armée personnelle d'Eddy, qui démontre par la même occasion la puissance de la technologie liée à la vapeur devant des investisseurs étrangers. Malgré la qualité et l'efficacité redoutable de ces morceaux d'action à l'écran (hélas bien souvent noyés sous des tonnes d'effets sonores comme d'habitude), on regrettera le fait que le compositeur abandonne provisoirement le travail autour de la thématique, car en dehors d'une brève allusion au thème de Scarlet vers la fin de 'Fight in The Exposition Ground', les thèmes deviennent moins présents, leurs apparitions étant bien souvent trop morcelés, manquant de développement alors que Steve Jablonsky aurait largement pu accentuer le côté 'leitmotiv' récurrent de ces thèmes (c'est en tout cas ce que laissait suggérer les premiers morceaux de l'oeuvre). On entre alors dans la toute dernière partie avec l'envol de la tour Steam dans 'Launch!' qui accompagne le décollage de l'immense tour sur fond de grosses rythmiques martelées et d'orchestre déchaîné renforçant le gigantisme de la séquence en question. Jablonsky évoque les exploits héroïques de Ray dans 'Fly in The Sky' illustrant l'envol du jeune garçon sur son ballon à vapeur à l'aide d'une superbe reprise héroïque du thème de Ray.

La tension liée à l'affrontement final est suggérée dans 'Two Delusions' alors que la partition (et le film) atteint son climax sur le superbe 'Collapse and Rescue', véritable clef de voûte de la partition de 'Steamboy' décrivant la chute de la tour et le final du film. C'est l'occasion pour Jablonsky de laisser s'exprimer son thème dramatique qui prend ici une proportion plus sombre et quasi tragique alors qu'il ne cesse de prendre une plus grande ampleur au cours d'un long crescendo dramatique qui semble annoncer un destin bien sombre pour la tour et ses occupants. Le morceau illumine la scène d'une puissance musicale dramatique assez forte, jusqu'à atteindre un point culminant où interviennent les choeurs dans un registre encore plus tragique et poignant avant une explosion de triomphe final où le thème d'aventure prend une superbe envolée héroïque très cuivrée et assez épique, évoquant les exploits du jeune Ray. On ressent donc ici l'espoir vainquant le désespoir au cours d'un long crescendo musical de près de 8 minutes, amenant une coda plus triomphante avec un retour plus aérien et majestueux du thème de Ray pour le générique de fin (à suivre jusqu'au bout, le générique faisant défiler de nombreuses images nous racontant l'avenir des personnages dans le début du 20ème siècle).

Que l'on soit fan ou non de Media-Ventures, il ne fait nul doute que le score de 'Steamboy' saura attirer l'attention de certains béophiles sur Steve Jablonsky, compositeur discret de l'écurie de Hans Zimmer cantonné jusqu'ici aux musiques additionnelles et autres travaux peu glorieux. Certes, si le compositeur ne signe pas là un chef-d'oeuvre qui confirme le fait qu'il possède une personnalité musicale et un talent sûr, Steve Jablonsky nous prouve néanmoins qu'il sait s'attaquer à une grande partition orchestrale en solo, tout en délaissant les synthétiseurs habituels de chez M-V. Il s'agit en tout cas d'une expérience assez rare, celle d'un réalisateur japonais engageant un compositeur américain sur son film, qui apporte à 'Steamboy' une dimension hollywoodienne qui pourra autant satisfaire que décevoir ceux qui s'attendaient à une musique plus expérimentale, plus originale et plus 'nippone' (genre 'Akira'). Donc, pour peu que l'on soit réceptif à ce type de compromis, ce sympathique score d'action/aventure pour le nouveau film de Katsuhiro Otomo constituera ainsi une bonne surprise pour tous ceux qui ne s'attendaient pas à voir Steve Jablonsky atterrir sur ce projet, sans être pour autant la révélation de l'année!


---Quentin Billard