Trevor Jones

1-Main Title 1.44
2-Elk Hunt 1.49
3-The Kiss 2.47*
4-The Glade Part II 2.34**
5-Fort Battle 4.20
6-Promentory 6.13*
7-Munro's Office/Stockade 2.30
8-Massacre/Canoes 6.52
9-Top Of The World 2.44

Randy Edelman

10-The Courrier 2.27
11-Cora 2.30
12-River Walk & Discovery 5.30
13-Parlay 2.05
14-The British Arrival 2.00
15-Pieces of a Story 4.58
16-I Will Find You 1.42***

*Inspiré de 'The Gael'
Ecrit par Dougie MacLean
**Inspiré de Orchestral Mohican
Ecrit par Daniel Lanois
***Interprété par Clannad
Ecrit et produit par
Ciaran Brennan.

Musique  composée par:

Trevor Jones/
Randy Edelman

Editeur:

Edel/Morgan Creek
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Producteur exécutif:
Michael Mann
Superviseur de la musique pour 20th Century Fox:
Elliot Lurie

Artwork and pictures (c) 1992 Morgan Creek Music Group. All rights reserved.

Note: ****
THE LAST OF THE MOHICANS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Trevor Jones/
Randy Edelman
Après un 'Manhunter' remarqué en 1986 et un détour par la télévision, le grand Michael Mann nous revenait en pleine forme sur 'The Last of The Mohicans', nouvelle adaptation du roman homonyme de James Fenimore Cooper qui a déjà été adapté à plusieurs reprises au cinéma - on retient généralement la version de 1936 réalisé par George B. Seitz avec Randolph Scott dans le rôle principal. Mann nous livre une vision plus épique et romantique de 'The Last of The Mohicans', une grande fresque historique teintée de violence, de sauvagerie et de scènes d'une qualité rare. L'histoire nous propulse dans la guerre opposant les Anglais et les Français pour la domination des colonies américaines en 1757. Nathanaël Poe, surnommée 'Hawkeye' (Daniel Day-Lewis), vit parmi les indiens Mohicans en Amérique. Il a été recueilli par Chingachgook (Russell Means) après avoir perdu sa famille lorsqu'il n'avait que deux ans. Un jour, Hawkeye et ses amis sauvent le major Duncan Hayward (Stecen Waddington) et les deux jeunes filles qu'il accompagne, attaqués par les indiens hurons dirigés par le sanguinaire Magua (Wes Studi). Alice (Jodhi May) et Cora (Madeleine Stowe) sont les deux filles du colonel Munro (Maurice Roëves), qui dirige les troupes anglaises contre celles de Montcalm (Patrice Chéreau). Nathanaël et ses amis acceptent alors d'accompagner Hayward, Alice et Cora jusqu'au fort de Munro, mais lorsqu'ils arrivent sur place, ils découvrent un gigantesque champ de bataille dans lequel le fort anglais est sur le point de céder aux français. Hawkeye et ses amis doivent alors faire un choix: vont-ils se mêler de cette guerre qui n'est pas la leur et venir en aide à Cora et Alice, ou vont-ils décider de rentrer chez eux comme des lâches?

Considéré à juste titre comme l'un des meilleurs films de Michael Mann, 'The Last of The Mohicans' est un film entièrement porté par une mise en scène digne de mention. Le cinéma de Michael Mann a toujours été particulièrement apprécié pour la qualité de ses mises en scène, l'utilisation de sa caméra, du développement de ses personnages, de la touche humaine qu'il a toujours apporté à ses protagonistes et ce quelque soit le sujet ('Heat', 'The Insider', 'Ali', 'Collateral', etc.). Evidemment, 'The Last of The Mohicans' ne déroge pas à la règle. A cela s'ajoute les performances remarquable d'acteurs tels que Daniel Day-Lewis, Madeleine Stowe, Wes Studi sans oublier notre Patrice Chéreau national dans le rôle du général des troupes françaises. Loin de se contenter d'une simple fresque épique et brutale, Mann apporte aussi une certaine poésie dans l'art de filmer certaines scènes, comme pour l'anthologique final d'une dizaine de minutes, entièrement porté par l'excellente musique de Trevor Jones. La romance entre Hawkeye et Cora est magnifiquement représentée à l'écran, sans lourdeur, sans facilité, tout comme les scènes d'action d'une violence parfois assez crue pour un film d'aventure de ce genre (cf. scène où Magua arrache le coeur de Munro). De par la qualité de sa mise en scène, la poésie sauvage du récit et le développement dramatique de ses personnages, 'The Last of The Mohicans' possède tous les éléments qui font de lui le grand classique qu'il est encore aujourd'hui.

Evidemment, lorsqu'on parle de 'The Last of The Mohicans', il est rare que l'on ne fasse pas mention de l'incontournable musique de Trevor Jones (et Randy Edelman), qui a signé là l'une de ses plus célèbres partitions pour le cinéma. Il faut dire qu'à l'origine, le projet s'annonçait pourtant bien mal. Effectivement, Michael Mann avait pensé avec Trevor Jones à élaborer une partition électronique et moderne qui apporterait un certain contre-poids musical et sonore aux images de son film. Mais de nombreux problèmes durant la post-production du film ont obligé le réalisateur et le compositeur à remanier la musique et à opter pour une approche musicale plus orchestrale et plus conventionnelle. Du coup, Trevor Jones a du changer ses plans de bataille et réadapter sa partition aux nouvelles exigences de la production. Mais il faut croire qu'il n'a pas été capable d'accomplir à temps sa mission puisque le réalisateur, visiblement mécontent d'une partie de son travail, a décidé de faire appel au tout dernier moment à Randy Edelman, qui a composé le reste de la musique, même si au final, plus de la moitié du score est signé Trevor Jones. C'est la première fois que les deux compositeurs voient leur nom associé à un même film, d'autant qu'Edelman et Jones ne se sont jamais croisés une seule fois durant la post-production du film.

Le résultat appartient désormais à l'histoire. 'The Last of The Mohicans' est une des bandes originales les plus vendues au monde durant les années 90, au même titre que 'Le grand Bleu' d'Eric Serra, 'The Piano' de Michael Nyman ou 'Dances with Wolves' de John Barry. A cela s'ajoute un thème principal incontournable devenu particulièrement célèbre du fait de sa réexploitation dans divers domaines tout au long de cette dernière décennie (publicité, remix techno, campagnes électorales américaines, évènements sportifs, etc.). Pour beaucoup, le célèbre thème de Trevor Jones est quasiment l'unique responsable du grand succès de cette partition orchestrale auprès du public, mais ce serait aller bien vite en besogne que de se limiter à une simple conclusion aussi sommaire, car si la musique a trouvé un écho aussi favorable auprès du public, c'est avant tout qu'elle a su magnifiquement accompagner et transcender de bout en bout le film de Michael Mann, qui, on le sait dorénavant, a toujours eu le nez pour trouver des musiques de qualité pour ses films. Pour ce qui est du thème principal en lui-même, Jones nous le dévoile dans son 'Main Title' après un début sombre introduisant des tambours synonymes de guerre. La soudaine apparition du thème dès les premières images du générique de fin asseoit le spectateur dans un univers aventureux dominé par une nature sauvage et une âme épique. La mélodie du thème, confiée à des cordes amples (doublées par les trompettes) est posée ici de manière épurée sur ses harmonies de cuivres en ré mineur toutes aussi simples mais qui font mouche à chaque fois. La mélodie est façonnée de telle sorte qu'il est difficile de se l'ôter de la tête même après une première écoute. Epique, elle véhicule à elle toute seule toutes les idées d'aventure épique, de drame, d'héroïsme, de romantisme, etc. Difficile de ne pas sentir les frissons parcourir l'échine dès la première écoute de ce thème dans l'excellente ouverture du film. Jones prolonge ce travail dans le mémorable 'Elk Hunt' accompagnant la scène de la chasse au début du film. On notera ici un excellent travail d'arpèges de cordes tournant autour des harmonies du thème et qui offre une certaine grandeur à cette scène de chasse qui semble en dire long sur le côté aventureux du film.

Trevor Jones emprunte le motif du fameux 'The Gael' issu du répertoire musical du compositeur écossais Dougie MacLean dans 'The Kiss' et l'incontournable 'Promentory'. Il faut dire que le thème de Trevor Jones doit beaucoup au thème de MacLean (duquel il a repris texto les mêmes harmonies), à tel point que l'on est même en droit de se demander jusqu'où Trevor Jones est allé par rapport à l'inspiration de son thème, sans pour autant remettre en cause la paternité de sa mélodie. Mais personne ne pourra en vouloir au compositeur qui a quand même eu le courage de créditer son emprunt honnête, et ce à l'inverse de certains musiciens qui n'hésitent pas à s'inspirer de tel ou tel compositeur sans jamais citer un seul nom (devinez qui...). Le thème de 'The Gael' (qui a connu à son tour une certaine popularité auprès des DJ de techno/dance en 1999) est interprété par un violon aux accents celtiques qui convient très bien à l'univers anglo-saxon du film et apporte une certaine touche d'authenticité à la musique. Dans 'The Glade Part II', Jones évoque la nouvelle famille de Hawkeye avec l'utilisation de 'Orchestral Mohican' du compositeur/producteur Daniel Lanois. A noter ici l'utilisation de synthétiseurs et d'une flûte de pan douce qui apportent chacun à leur tour une tonalité plus distancée et intimiste à cette scène, malgré l'utilisation de basse de synthé assez sombres, et qui semblent déjà annoncer une suite bien plus agitée.

Puisqu'on parle d'agitation, c'est sans tarder que l'on découvre le martial 'Fort Battle' décrivant la séquence de bataille opposant les troupes anglaises et françaises pour la domination du fort de Munro. Trevor Jones met ici l'accent sur un ostinato de percussions martiales et un pupitre de cuivres plus massif, tandis que le thème principal reste omniprésent pour décrire la détermination de Hawkeye et ses compagnons lorsqu'ils ramènent Alice et Cora à bonne destination, malgré l'ampleur brutale des combats. L'action culmine lors de l'agressif 'Massacre/Canoes' pour la séquence particulièrement brutale où les hurons de Magua tendent une embuscade à Munro et ses troupes, obligeant Hawkeye et ses amis à s'enfuir par les canoës. Ce long morceau de plus de 6 minutes s'inspire indiscutablement ici du célèbre 'O Fortuna' des 'Carmina Burana' de Carl Orff, à tel point que l'on aussi reproché au compositeur de ne pas avoir été plus honnête par rapport à cet emprunt plus discutable (il faut croire que l'urgence de la composition a obligé le compositeur à avoir recours à quelques facilités de ce genre). Le compositeur utilise, comme dans le 'O Fortuna', un ostinato qui parcourt tout l'ensemble de la pièce tout en mettant l'accent sur des cuivres massifs avec un excellent contrepoint des cordes/vents et de quelques percussions. Evidemment, 'Massacre/Canoes' décrit toute la violence des combats tout en créant un certain sentiment d'urgence, de danger. A noter que dans le film, le morceau intervient aussi lors de la première scène d'embuscade vers le début du film, où Hawkeye et ses compagnons sauvent Alice et Cora, ce qui explique la présence du thème principal développé sous diverses variantes (à noter une reprise grandiose du thème à 3.38, en plein coeur de l'action!).

Il paraît aussi difficile de passer à côté de l'excellent 'Promentory', qui accompagne durant 6 bonnes minutes inoubliables le grand final pour la confrontation finale avec Magua dans la montagne. Comme annoncé précédemment, cette scène est entièrement portée par la musique de Trevor Jones au son du violon celtique/guitares de 'The Gael', à tel point que Mann a décidé de minimiser ici les dialogues et les bruitages pour laisser la musique exprimer son grand crescendo épique durant les 6 bonnes minutes qui restent pour beaucoup un exemple de référence de mariage entre musique et images (la dernière partie passé les 4 minutes 30 se veut néanmoins plus calme et mélancolique). Pour beaucoup, cette partie finale est même restée LA scène-clé incontournable du film, une vraie leçon de mise en scène portée par une intensité sans égale, par un savoir-faire filmique incontestable. Ici, la musique se veut l'âme même de la scène. Loin de vouloir exprimer la violence de cet affrontement final, elle propose au contraire un décalage émotionnel évident avec le crescendo du thème qui ne cesse d'augmenter en intensité tout au long de la scène. Si nous devions néanmoins formuler un reproche vis-à-vis de cette musique, ce serait néanmoins à cause de l'utilisation un peu trop répétitive du thème principal, sans cesse rabâché tout au long du film et qui finit parfois par devenir un peu lassant. Trevor Jones, qui a pris le défi de n'utiliser qu'un seul et unique thème tout au long du film, a du faire face aux difficultés de ce genre d'exercice, et même s'il s'en tire haut la main, il est vrai que le thème est un petit peu trop répété tout au long du film. Peut-être qu'il aurait été préférable d'apporter un peu plus de relief en ayant recours à un second thème, mais étant donné les problèmes qu'a eu le compositeur pour la composition de sa musique, on ne peut pas trop lui en vouloir.

Le reste de la musique, confié à Randy Edelman, n'atteint évidemment pas la qualité de la composition de Trevor Jones, mais ne mérite pas forcément les mauvaises critiques qu'elle a pu recevoir de la part de certains béophiles. Il est évident que Randy Edelman n'est pas Trevor Jones. Son style, empreint d'une irrévocable envie de non-sophistication et de simplification extrême limite puérile de ses thèmes n'a jamais joué en sa faveur. Pourtant, des pièces comme 'The Courier' ou 'The British Arrival' ont leur mot à dire dans le film. 'The Courier' accompagne de manière agréable avec un petit thème sympathique de cordes et des guitares la scène du type qui sort du fort pour emmener le courier. On reconnaît ici le style d'Edelman avec sa façon d'utiliser systématiquement le synthétiseur par-dessus son orchestre, un tic du compositeur qui a aussi tendance à agacer certains béophiles. Dans 'Cora', Edelman nous dévoile même un petit thème romantique et nostalgique pour Cora (brillamment interprété par Madeleine Stowe), comme le musicien sait si bien en faire (là aussi, le synthétiseur reste présent). A côté de cela, Edelman nous réserve quelques parties atmosphériques plus sombres comme 'River Walk & Discovery' qui s'ouvre au son d'un thème de flûte de pan/guitares mais qui se prolonge sur une partie plus sombre lors de découvertes macabres. Le côté plus électronique et atmosphérique de la partie de Randy Edelman ne peut évidemment pas prétendre soutenir la comparaison avec celle de Trevor Jones. Néanmoins, même si le compositeur ne réutilise pas le thème de Jones, sa musique accompagne parfaitement certains moments du film, et plus particulièrement au début. Il serait donc fort injuste de dénigrer le travail (fait dans l'urgence, certes) de Randy Edelman, sous-prétexte qu'il s'éloigne de la qualité du travail de Trevor Jones. Le film se conclut sur 'I Will Find You', fameuse chanson finale de Clannad qui semble aussi avoir attiré l'attention du public.

Faire une conclusion sur la musique de 'The Last of The Mohicans' paraît à la fois fort simple et assez difficile. Evidemment, on connaît tous la popularité de cette musique et plus particulièrement de son incontournable thème principal épique et hautement mémorable, qui a tant apporté au film de Michael Mann. Mais il est difficile de résumer toute notre pensée tant la musique recèle de divers points passionnants qui mériteraient une étude plus approfondie. Néanmoins, il est primordial de savoir relativiser et de reconnaître les points plus négatifs de cette composition magistrale comme un certain recours facile à quelques références musicales dans la partie de Jones ou l'utilisation un peu brouillonne du synthétiseur et d'un style atmosphérique plus ennuyeux pour Randy Edelman. Néanmoins, malgré les conditions difficiles dans lesquelles la musique a été composée, il est difficile d'être déçu par un résultat bien au-delà de nos attentes, et qui semble décidément avoir conquis aussi bien le public lambda que celui des béophiles qui s'accordent à considérer 'The Last of The Mohicans' comme l'oeuvre maîtresse de Trevor Jones aux côtés de 'The Dark Crystal' ou 'Dark City'. Vous l'aurez donc compris, 'The Last of The Mohicans' est un très grand classique de la musique de film que vous ne devez surtout pas manquer!


---Quentin Billard