1-The Poet Acts 3.40
2-Morning Passages 5.30
3-Something She Has To Do 3.09
4-"For Your Own Benefit" 2.00
5-Vanessa and
The Changelings 1.45
6-"I'm Going to Make
a Cake" 4.01*
7-An Unwelcome Friend 4.08
8-Dead Things 4.21
9-The Kiss 3.54
10-"Why Does Someone
Have To Die?" 3.53
11-Tearing Herself Away 5.00**
12-Escape! 3.48***
13-Choosing Life 3.58
14-The Hours 7.44

*Basé sur un thème de
'Protest' (Act II, Scene 3)
extrait de l'opéra Satyagraha
composé par Philip Glass
**Basé sur 'Islands' extrait de
l'album 'Glassworks'
de Philip Glass
(n'apparaît pas dans le film)
***Basé sur 'Metamorphosis II'
extrait de l'album 'Solo Piano'
de Philip Glass.

Musique  composée par:

Philip Glass

Editeur:

Nonesuch Records
79693-2

Produit par:
Kurt Munkacsi, Michael Riesman
Producteur exécutif pour
Dunvagen Music:
Jim Keller
Producteur exécutif de l'album:
Scott Rudin
Assistant de Mr. Glass
et Mr. Riesman:
Nico Muhly
Coordinateur de la post-production
de l'album soundtrack:
Kara Bilof
Monteur de la musique:
Tony Lewis
Superviseur de production:
Karina Beznicki

Artwork and pictures (c) 2002 Paramount Pictures/Miramax Film Corp. All rights reserved.

Note: ***
THE HOURS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Philip Glass
Trois générations de femmes, trois tragédies. 'The Hours' est un film dur et poignant signé Stephen Daldry qui, après son très remarqué 'Billy Elliot', signe un drame intimiste adapté du roman homonyme de Michael Cunningham se déroulant dans trois époques différentes autour de trois femmes affectées chacune à leur tour par la souffrance et les tourments en tout genre. En 1923, dans Richmond, une banlieue de Londres, l'écrivaine Virginia Woolf (Nicole Kidman) tente de lutter contre la dépression nerveuse et la folie qui la guette en écrivant un dernier ouvrage majeur, 'Mrs. Dalloway'. En 1951, Laura Brown (Julianne Moore) doit préparer l'anniversaire de son mari pour le soir mais est dans l'incapacité de préparer un gâteau correctement, omnubilée par la lecture de 'Mrs. Dalloway', l'ouvrage de Virginia Woolf. Dépressive, Laura ne sait plus où elle en est malgré une excellente situation familiale et envisage de se suicider dans une chambre d'hôtel. En 2001, Clarissa Vaughn (Meryl Streep) doit préparer une cérémonie d'hommage pour son ami et ancien amant Richard (Ed Harris), un célèbre poète atteint du SIDA et en train de mourir lentement, isolé seul dans une pièce d'un immeuble. Bouleversée par le poids émotionnel de ce qu'elle doit porter à l'intérieur d'elle, Clarissa est sur le point de craquer et ne sait plus à son tour où elle en est. Chacune d'entre elle cherche à donner à sens à sa vie.

'The Hours' nous propose un concept narratif fort intéressant: trois histoires se déroulant à trois époques différentes et qui nous proposent de suivre la journée de la vie d'une femme à travers trois générations, trois femmes réunies par deux points communs majeurs: le roman 'Mrs. Dalloway' et la lutte contre leurs démons intérieurs. C'est avec une certaine habileté que le réalisateur tisse une connexion entre ces trois femmes, mettant ainsi en parallèle Virginia Woolf et Laura Brown à travers le roman de 'Mrs. Dalloway', comme si Laura Brown était une sorte d'incarnation de l'héroïne née de l'imagination de l'écrivaine anglaise au début des années 20. Chacune d'entre elle doit lutter contre une dépression éprouvante et une tragique envie de suicide (le film s'ouvre sur le suicide de Virginia Woolf). Le personnage de Clarissa Vaughn est un peu à part, car de son côté, celle que son ami séropositif Richard surnomme 'Mrs. Dalloway' (autre point commun avec le personnage de Nicole Kidman) doit supporter ses propres tourments intérieurs alors qu'elle ne sait plus très bien où elle en est d'un point de vue sentimental et moral. Le film évoque bien évidemment la littérature à travers le roman de Virginia Woolf mais aussi le concept narratif du film qui évoque indubitablement une structure littéraire assez classique. Le réalisateur joue aussi sur les couleurs évoquant les différentes époques dans lesquelles vivent les trois héroïnes principales du film. Evidemment, 'The Hours' est entièrement porté par les performances remarquables de trois des plus grandes actrices américaines du moment, Nicole Kidman, Julianne Moore et Meryl Streep, trois actrices passées maîtres dans l'art de camper des rôles tragiques et difficiles (à noter que Nicole Kidman est méconnaissable avec son faux nez). Le film aborde des sujets graves comme la quête de soi, l'homosexualité féminine, la névrose, l'incommunicabilité, la séropositivité, le suicide, Stephen Daldry apportant au film une poésie poignante, une sensibilité à fleur de peau, une fluidité narrative classique mais étonnante. Evidemment, 'The Hours' est un film triste et déprimant, qui s'apprécie avant tout par la qualité de sa mise en scène, de l'exceptionnel jeu des acteurs et de la délicatesse poétique qui enveloppe ces trois histoires tragiques. A noter pour finir la participation d'autres grands acteurs tels que Stephen Dillane, Miranda Richardson, John C. Reilly, Toni Collette, Jeff Daniels, Claire Danes, Eileen Atkins, etc.

La partition de Philip Glass pour 'The Hours' a sans aucun doute contribué au succès du très beau film de Stephen Daldry. Fidèle à son style répétitif/minimaliste habituel, le compositeur, soucieux de dépouiller au maximum sa musique pour un impact musical plus viscéral sur les images du film, a fait appel à une petite formation pour quatuor à cordes et un piano, tout en faisant référence au passage à certaines de ses précédentes oeuvres de concert (et plus particulièrement dans les pistes 6, 11 et 12 de l'album). Le thème principal du score, annoncé dès l'introductif et émouvant 'Poet Acts', est suggéré par un violoncelle avec quelques cordes et un piano, un thème que l'on reconnaît surtout grâce à son enchaînement harmonique empreint d'une certaine tristesse, d'une mélancolie intimiste parfaitement ancrée dans l'esprit du film et de ses trois héroïnes principales. A noter que le morceau accompagne avec une certaine subtilité la scène introductif du suicide de Virginia Woolf, la musique jouant sur une certaine retenue émouvante, sans élans orchestraux larmoyants ou mélodramatiques. Philip Glass poursuit son travail dans 'Morning Passages' où il développe son thème en ajoutant aux cordes un piano soliste dont l'écriture semble faire référence à un certain classicisme proche de Schumann ou de Schubert, rendant ici ces trois histoires quasiment intemporelles (le même style de musique pour trois époques différentes). Glass nous fait alors ressentir l'émotion et les tourments des trois protagonistes principales à travers la mélancolie de pièces pour cordes telles que 'Something She Has to Do' ou l'émouvant 'For Your Own Benefit' et ses harmonies de cordes sombres.

Glass évoque les tourments de Virginia Woolf dans 'Vanessa and the Changelings' à l'aide des cordes dont le classicisme d'écriture semble déjà plus proche ici du caractère affecté de certaines pièces romantiques du 19ème siècle, un classicisme qui renvoie inévitablement au classicisme de la structure narrative du film. Glass évoque alors Laura Brown dans 'I'm Going to Make a Cake' avec un ostinato de cordes et un piano solitaire, les cordes répétitives faisant régner ici une certaine gravité amère et profondément triste évoquant la dépression de Laura. C'est avec une certaine poésie que Philip Glass fait ainsi ressortir l'émotion des trois personnages principaux tout en apportant au film une même poésie qui rejoint la qualité du jeu des actrices et de la mise en scène. On appréciera par exemple la réutilisation du thème principal dans 'Dead Things' pour la scène émouvante avec Virginia et l'oiseau mort. Il y a dans cette musique une sorte de quiétude quasi envoûtante, une lenteur toute en retenue et affectée, que Philip Glass ancre au plus profond des images du long-métrage et ce jusqu'à la fin du film. A l'aide d'arpèges de piano et de cordes répétitives évoquant par moment Michael Nyman, Glass évoque dans 'Kiss' la quête de soi des trois principales protagonistes qui se cherchent sans savoir où elles vont. Le caractère grave de 'Why Does Someone Have to Die?' nous renvoie à son tour aux tourments de l'écrivaine anglaise au centre de cette histoire tandis que 'Escape!' apporte de nouveau une certaine tristesse toute en retenue avec cordes et piano lorsque Virginia s'échappe de sa banlieue de Richmond avant d'être rattrapé par son mari Leonard, qui ne sait plus ce qu'il doit faire pour tenter d'apaiser sa dépression et sa souffrance. Seule ombre au tableau, on pourra regretter le fait que la plupart de la musique écrite par Glass pour 'The Hours' soit en fait empruntée à bon nombre d'oeuvres précédentes du compositeur, comme 'I'm Going to Make a Cake' basé sur un thème de la scène 3 de l'Acte II de l'opéra 'Satyagraha' de Glass, 'Escape' basé sur un thème de 'Metamorphosis II' de l'album 'Solo Piano' du même compositeur, ou 'Tearing Herself Away' tiré de 'Islands' de l'album 'Glassworks'.

Partition intimiste et répétitive, 'The Hours' nous prouve à quel point Philip Glass possède un talent certain pour évoquer l'émotion et les sentiments à travers des structures musicales simples et répétitives avec peu de moyens. Dans 'The Hours', il fait ressortir toute la mélancolie et l'amertume des trois héroïnes du film et les transcrit le plus simplement du monde à travers sa formation pour quatuor à cordes et piano. Il paraît dès lors évident que ceux qui sont allergiques au style minimaliste et répétitif de Philip Glass risquent d'avoir du mal à apprécier 'The Hours' à sa juste valeur, mais nul ne peut nier que le compositeur a apporter une certaine poésie au film de Stephen Daldry, une poésie discrète mais réelle, et ce même si l'on pourra reprocher l'abondance de musique dans le film et son caractère extrêmement monotone. Effectivement, chaque morceau semble faire redondance par rapport au morceau précédent, créant une oeuvre continue sans relief, sans accident, sans changement. La monotonie de cette musique peut ainsi autant jouer en sa faveur qu'en sa défaveur, car, en dehors des images, il paraît évident que la musique de Glass survit difficilement à cause de son caractère plat et monotone. Néanmoins, il serait injuste de s'arrêter à ce seul élément et ne pas voir dans 'The Hours' une BO simple et émouvante pour un film de très grande qualité!


---Quentin Billard