Hollywood n’aura décidément de cesse de nous balancer à toutes les sauces des comédies nunuches banales et insipides. ‘For Richer or Poorer’ (Les Sexton se mettent au vert) est une énième comédie U.S. signée Bryan Spicer (à qui l’on doit -hélas- ‘Power Rangers: The Movie’). Un richissime couple new-yorkais, Brad (Tim Allen) et Caroline Sexton (Kirstie Alley), dont la vie de mariage se résume à des disputes à répétition et des soirées foireuses, se voit contraint de s’exiler de la ville, poursuivi par des agents du fisc alors que Bob Lachman (Wayne Knight), l’un des employeurs de Brad, s’est enfui en lui dérobant une quantité impressionnante d’argent et en falsifiant ses comptes financiers à son insu. Brad et Caroline se réfugient alors en pleine campagne, dans la petite communauté Amish d’Intercourse en Pennsylvanie, où ils vont se faire passer pour les cousins de Samuel (Jay O. Sanders) et Levinia Yoder (Megan Cavanagh), une famille locale, en attendant que les choses se calment en ville. Si la vie dans la communauté Amish s’avère être difficile pour les deux parvenus new-yorkais, ils vont très vite prendre goût à leur nouveau mode de vie, se liant d’amitié avec les Yoder et le reste de la communauté. Malheureusement, deux agents obstinés du fisc sont sur leurs traces et sont sur le point de retrouver les deux fugitifs. ‘For Richer or Poorer’ est une sympathique comédie sans prétention, avec son lot d’humour, de gags et de bons sentiments. Le film se veut aussi comme une sorte de (mauvaise) parodie du ‘Witness’ de Peter Weir, les deux films ayant en commun la communauté Amish dans laquelle des étrangers se réfugient pour fuir quelqu’un qui les poursuit. Le clin d’oeil devient même clairement explicite lorsque l’un des personnages du film fait carrément référence au célèbre film de Peter Weir! Tim Allen et Kirstie Alley forment un joli couple, oscillant entre disputes non-stop et bons sentiments. C’est amusant et gentillet, point final. En tout cas, pas de quoi sauter au plafond!

Randy Edelman n’a décidément pas son pareil pour nous livrer des sympathiques et rafraîchissantes musiques de comédie, son genre de prédilection (‘Kindergarten Cop’, ‘My Cousin Vinny’, ‘Beethoven’, ‘The Distinguished Gentleman’, etc.). ‘For Richer or Poorer’ est de loin l’une de ses plus agréables musiques de comédie, alliant la simplicité mélodique chère au compositeur avec une excellente ambiance oscillant entre bonne humeur et romantisme. Randy Edelman s’attache à suivre les péripéties des Sexton, péripéties amorcées sous le ton de la bonne humeur avec le très entraînant ‘Bubble Shuffle’ aux rythmes jazz/pop urbain que le compositeur affectionne tant, avec saxophone, batterie et piano. Dès le début, Edelman met en place son ambiance comédie enjouée héritée manifestement ici de ‘While You Were Sleeping’, sorte de cousin musical proche de ‘For Richer or Poorer’. ‘The Heart of America’ nous plonge dans l’univers de la communauté Amish, évoqué brièvement au détour de quelques sonorités ‘americana’ incluant guitares, banjo et harmonica avec l’orchestre traditionnel et le piano (cf. ‘Hopalong City Boy’ aux accents country/blues). On retrouve ici un style plus intime typique de la facette romantique des musiques comédies de Randy Edelman, qui sied à merveille à l’ambiance du film de Bryan Spicer. De la même façon, ‘A Perfect Place to Stay Forever’ évoque le rapprochement entre le couple Sexton qui commence à prendre goût à leur nouvelle existence. Le traditionnel ‘Love Theme’ de piano assure la continuité des scènes plus intimistes entre Brad et Caroline, comme dans le tendre et paisible ‘A Warning Trend’ où l’on retrouve tout le talent de mélodiste de Randy Edelman, à l’instar du nostalgique ‘Planting Season’.

Loin d’être une simple musique de comédie romantique, ‘For Richer or Poorer’ contient aussi quelques moments plus énergiques comme le sympathique ‘Check Your Portfolio’ avec son petit thème cool de saxophone/synthé/guitare basse/batterie qui évoque les déboires de Brad avec les agents du fisc au début du film, ou l’entraînant ‘Sainthood’ qui dévoile un thème tendance ‘chevauchée western’ du score lors de l’arrivée des Sexton à la communauté Amish, avec orchestre, percussions et harmonica, à la manière de l’entraînant ‘Get Down Pennsylvania Hoe’ qui dispense une certaine bonne humeur dans le film. Ces morceaux plus rythmés et entraînants alternent alors dans le film avec les parties intimistes traditionnelles comme le mélancolique ‘Turning Away’ ou ‘Mid-Life Jersey Crisis’ et son ‘Love Theme’ de piano simple et délicat.

Assurément, e compositeur a pris un certain plaisir évident en écrivant la musique du film de Bryan Spicer, plaisir qu’il nous fait partager dans cette petite comédie sans prétention. C’est donc avec un certain plaisir que l’on retrouve le très attachant thème jazzy/pop de ‘Bubble Shuffle’ dans l’agréable ‘The Winding Lonesome Highway’ au piano, de même que ‘Tangonobango’ nous dévoile un petit tango pour une scène de danse au début du film, tandis que ‘Sneaky’ nous permet de retrouver le thème ‘cool’ de ‘Check Your Portfolio’ avec synthé, basse et batterie, soutenue par des harmonies qui évoquent le célèbre thème de ‘James Bond’ de Monty Norman. On retrouve même le style plus ‘action’ de Randy Edelman dans ‘Fade from Satin’ avec ses traditionnelles percussions électroniques et un motif de cordes/cuivres qui évoque irrémédiablement un motif similaire entendu dans ‘Anaconda’. Pour finir, le compositeur nous offre un agréable fox-trot rétro jazzy dans ‘Anniversary Fox Trot’ avec piano, saxophone et trompette en sourdine, le film se concluant agréablement sur une ultime reprise du thème ‘western’ et du thème jazz/pop urbain dans ‘Paradise Road’, autant d’éléments qui font de ‘For Richer or Poorer’ l’une des plus attachantes et des plus belles partitions comédie de Randy Edelman, qui semble avoir pris ici un malin plaisir à écrire cette musique enjouée, rythmée et charmante pour la comédie de Bryan Spicer. C’est simple, frais et sans prétention, idéal pour tous fans des musiques de comédie de Randy Edelman, un genre dans lequel le compositeur semble être passé maître depuis quelques années déjà!


---Quentin Billard