Max and Helen

1-In Memory 1.45
2-Chopin Piano
Etude #3 In E (excerpt) 1.36
3-Stories Must Be Told 3.33
4-Heart Lost 4.30
5-Zloczow Square 1.39
6-Zalesie 4.50
7-Must Continue 3.01
8-Forgiveness Of Sins 2.39

9-Masses 32.52

10-Koku-Ryû 18.05

Musique  composée par:

Christopher Young

Editeur:

Bay Cities BCD 3014

Produit par:
Christopher Young
Producteur du CD:
Nick Redman
Producteurs exécutifs:
Bruce Kimmel, Alain Silver,
Michael Rosen

Artwork (c) 1990 Turner Pictures, Inc. (Max and Helen) & 1991 Gilchrist Music. All rights reserved.

Note: ***
MAX AND HELEN
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Christopher Young
‘Max and Helen’ est un obscur téléfilm de 1990 réalisé par Philip Saville, inspiré du roman homonyme de Simon Wiesenthal, le célèbre chasseur de nazi. Rescapé de l’Holocauste, Wiesenthal (Martin Landau) a consacré toute sa vie à pourchasser les criminels de guerre nazi et à les traîner devant les tribunaux pour qu’ils paient enfin pour tous leurs crimes. En 1962, le vieux chasseur de nazi découvre qu’une usine polonaise est actuellement dirigée par Werner Schultze (Jonathan Phillips), l’ancien commandant d’un camp de concentration nazi. Afin de traîner Schultze devant les tribunaux, Wiesenthal doit constituer un dossier en béton sur l’individu en question. Pour cela, il lui faut le témoignage de deux survivants de l’Holocauste qui ont connus le camp de concentration de Zalesie, en Ukraine. En menant son enquête, Wiesenthal retrouve la trace de Max Rosenberg (Treat Williams), un médecin d’origine polonaise vivant à Paris, qu’il réussit à convaincre de raconter toute son histoire. Après moult hésitations, Max commence à évoquer ses souvenirs douloureux à Zalesie en 1942. Avec l’arrivée du sadique Werner Schultze au camp de concentration de Zalesie, la vie de Max tourna très vite au cauchemar. Sa fiancée Helen Weiss (Alice Krige) et sa jeune soeur Miriam (Jodhi May) étaient ensemble auparavant, mais Schultze fit séparer les hommes et les femmes et les fit travailler à une fréquence infernale comme des bêtes, s’en prenant sauvagement aux plus faibles d’entre eux. En 1943, Max décida de s’évader du camp en compagnie d’autres prisonniers. Hélas, Helen refusa de quitter le camp et d’abandonner sa jeune soeur, de plus en plus affaiblie. C’est à contre-coeur que Max décida de s’évader du camp sans sa fiancée. Réfugié plus tard en URSS, Max fut enrôlé par l’armée rouge et combattit sur le front de l’est. Dans les années 50, il fut condamné par les soviétiques à exécuter des travaux forcés pendant près d’une dizaine d’années, et ce bien après la fin de la guerre. Lorsque son calvaire fut enfin terminé, Max se mit en tête de retrouver Helen à tout prix. Il découvre que cette dernière a survécue au camp de concentration et qu’elle vit aujourd’hui à Kassel, en Allemagne du nord. Hélas, Max ne s’attend pas encore à ce qu’il va découvrir chez elle. Selon lui, Wiesenthal perd son temps, car il ne peut rien faire contre Schultze. Il est inattaquable. Il faudra alors beaucoup de persévérance au vieux chasseur de nazi pour finir par percer le douloureux secret de Max Rosenberg.

Le téléfilm de Philip Saville ne paie peut-être pas de mine en apparence (on est loin ici du prestige de ‘Schindler’s List’ de Steven Spielberg), mais il s’impose néanmoins comme un excellent long-métrage sur les méfaits de l’Holocauste et le traumatisme qu’il suscite toujours aujourd’hui chez les survivants des camps de concentration nazis. Martin Landau est excellent et très convaincant dans la peau de Simon Wiesenthal (dont le film s’inspire de ses propres écrits), la palme revenant à Treat Williams, qui s’impose magistralement ici dans la peau de Max Rosenberg, un médecin brisé et anéanti qui considère que son âme est définitivement morte dans le camp de concentration de Zalesie. Le film se concentre en réalité sur une poignante histoire d’amour entre Max et Helen (excellente Alice Krige), deux amants séparés par les horreurs de la guerre et la folie des hommes, pour qui la vie ne sera plus jamais la même après ce traumatisme. Evidemment, ‘Max and Helen’ est un film sur la mémoire, sur le besoin de ne pas oublier l’une des plus grandes atrocités de toute l’histoire de l’humanité, mais aussi sur l’idée du pardon, car, la morale de cette histoire est peut-être finalement qu’il y a un temps pour se souvenir et un temps pour pardonner. Poignant, sombre et douloureux. Voilà les mots qui pourraient résumer cet excellent téléfilm sobre et modeste qui, par sa force de suggestion, rend le sujet encore plus profondément grave et tragique.

La musique de Christopher Young est à l’image du téléfilm de Philip Saville: sobre, sombre et tragique. La partition orchestrale de Young respire la souffrance, la douleur, la tristesse, l’amertume. Evidemment, la gravité du sujet imposait à la musique une certaine retenue et une subtilité de ton loin de toute envolée lyrique mélodramatique. Au contraire, le compositeur a opté pour une approche orchestrale restreinte et plus froide, sombre et distancée, utilisant une voix féminine soliste et solitaire, des cordes, des cors, une harpe et un piano. Cette idée de la distance, du souvenir et du passé transparaît dès le début du téléfilm avec l’introduction d’une chanteuse soliste sur fond de cordes lugubres. La voix féminine est évidemment associée au souvenir d’Helen et évoque la séparation entre les deux amants. La chanteuse énonce alors un thème sombre et tourmenté, mit en valeur par une figure de chromatisme renversé assez saisissante (synonyme de souffrances quasi inavouables). Dans ‘In Memory’, la voix semble surgir de l’au-delà, comme un fantôme, personnifiant les vieux démons qui hantent les survivants de l’Holocauste. A noter que l’utilisation de la voix féminine et l’atmosphère cafardeuse et amère de la partition s’inspire grandement du score que Christopher Young écrivit pour ‘Flowers In The Attic’ en 1987. La musique se devait alors d’évoquer le caractère tourmenté de Max et l’horreur de ses souvenirs. Ces sentiments transparaissent très vite dans ‘Stories Must Be Told’, lorsque Max commence à se confier à Wiesenthal. Un exemple flagrant est l’utilisation de cordes sinistres et dissonantes qui imposent une certaine de climat horrifique et glacial lors de l’arrivée de Schultze dans le camp de concentration.

A noter l’intrusion d’éléments musicaux qui installent une vraie atmosphère de chaos dans la musique. On ressent une certaine angoisse, une tension psychologique assez saisissante dans cette musique qui apporte un indispensable complément émotionnel au téléfilm. Durant la première scène avec Schultze, Young utilise même des sonorités électroniques particulièrement sombres et menaçantes, qui installent un vrai sentiment de malaise sur fond de cordes dissonantes ('Zalesie') dont l'ambiance cauchemardesque est extrêmement amplifiée par l'intrusion d'éléments sonores éparses comme des sons de cris des victimes des camps nazis ou l'intrusion d'une pièce populaire juive (empruntée au morceau 'Zloczow Square' et sa petite valse populaire polonaise pour violon et accordéon) ou d'une pièce de Chopin, une manière plus directe et viscérale d'évoquer l'horreur des camps de concentration (le morceau s'avère être particulièrement dérangeant). Mais c’est la voix féminine qui continue de traverser et de hanter toute la partition, évoquant ce besoin de se souvenir et de ne pas oublier. On constatera d’ailleurs à quel point les formules mélodiques de la chanteuse soliste tendent à se modifier tout au long du film, le premier motif initial se transformant en un autre motif différent vers la fin du film, ce qui permet habilement au spectateur/auditeur de mieux suivre l’évolution psychologique des protagonistes principaux. Les moments plus sombres et angoissants de la partition installent un malaise saisissante tout en renforçant la gravité de l’histoire de ce téléfilm. Heureusement, l’horreur et la noirceur trouvent un indispensable pendant émotionnel avec l’introduction de la très belle 'Etude N°3’ de Frédéric Chopin, qui revient régulièrement tout au long du film comme un véritable leitmotiv de l’amour entre Max et Helen (dans le film, il s’agit du morceau que les deux amants écoutent ensemble au début du film et qui reste leur morceau de musique fétiche).

A noter que l’album publié par Bay Cities contient aussi un enregistrement de deux autres oeuvres de Christopher Young, deux pièces avant-gardistes qui résument bien le côté expérimental du compositeur: le terrifiant ‘Masses’ (adapté et réinventé à partir de sa musique rejetée pour ‘Invaders from Mars’ – 1986) qui ravira sans aucun doute les amateurs de musique concrète, et ‘Koku-ryû (Black Dragon), où le compositeur expérimente autour des sonorités de la musique traditionnelle japonaise. Avec ‘Max and Helen’, Christopher Young confirme son sérieux penchant pour les ambiances psychologiques sombres et morbides et nous livre un score orchestral modeste et envoûtant, dans la lignée de ‘Flowers In The Attic’. Une petite partition méconnue du compositeur, pas indispensable mais néanmoins très réussie!


---Quentin Billard