1-A Reversal of Fortune 4.40
2-The Mystery Unfolds 1.38
3-Coma 1.25
4-A Search Reveals 3.19
5-Ice Cream, Bullion,
and a Scotch and Soda 7.06
6-The Letters 1.34
7-What Sunny Wants,
Sunny Gets! 0.35
8-Sunny, Claus
and a Tiger 3.51
9-Claus, The Bad Guy 2.15
10-This Is All
You Can Know 3.40

Musique  composée par:

Mark Isham

Editeur:

Milan America
CD CH 528

Musique produite par:
Mark Isham
Co-produit par:
David Torn
Album conçu et réalisé par:
Emmanuel Chamboredon

Artwork and pictures (c) 1990 by Edward R. Pressman Production. All rights reserved.

Note: **1/2
REVERSAL OF FORTUNE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Mark Isham
Pour son second film hollywoodien, le réalisateur iranien Barbet Schroeder s’inspire pour ‘Reversal of Fortune’ (Le mystère Van Bülow) de l’ouvrage d’Alan M. Dershowitz, avocat interprété dans le film par Ron Silver qui enquêta sur la mort de Sunny von Bülow (Glenn Close), pour laquelle son richissime époux Claus von Bülow (Jeremy Irons) fut accusé et condamné pour meurtre. Schroeder s’inspire de ce fait divers survenu en 1985 et retrace les préparatifs du procès qui permirent d’innocenter Claus von Bülow, et ce même si son propre avocat, Alan Dershowitz (Ron Silver), reste persuadé qu’il était réellement coupable de ce dont on l’accusait. Mais l’histoire contient ses zones d’ombre et ses mystères qui restent bien flous même encore aujourd’hui. A l’origine, ce sont les enfants de Sunny von Bülow qui accusèrent leur beau-père d’avoir administré une très forte dose d’insuline à son épouse, qui la plongea par la suite dans un profond coma dont elle n’est jamais ressortie. Les enfants engagèrent alors un détective privé qui se chargea de réunir des preuves contre Claus von Bülow. Condamné à trente ans de prison, Claus décide d’entamer une procédure d’appel et engage l’avocat new-yorkais Alan Dershowitz et son équipe d’étudiants. Ensemble, ils vont devoir enquêter et reconstituer toute l’affaire en analysant les pièces du dossier point par point. Le film se propose donc de suivre la longue reconstitution de cette enquête et des préparatifs de la procédure d’appel qui permit d’innocenter Claus von Bülow, l’originalité étant que, pour une fois, le réalisateur a choisi d’éviter de filmer les sempiternelles scènes de procès même si elles restent brièvement suggérées de temps en temps, préférant se concentrer sur la trentaine de jours de préparatifs menés par Dershowitz et son équipe. Jeremy Irons, toujours aussi inspiré, campe un Claus von Bülow à la fois posé, calme et énigmatique (récompensé par l’Oscar du meilleur acteur en 1991). Face à lui, Glenn Close paraît presque plus terne dans le rôle de cette femme accroc à toute sorte de drogue. Quant à Ron Silver, il reste pleinement convaincant dans le rôle de cet avocat qui cherche à innocenter un homme qu’il croit coupable depuis le début, le film nous montrant ainsi la difficulté et les problèmes d’éthique que rencontrent parfois les avocats dans leur métier, qui sont parfois amenés à défendre des meurtriers dont ils soupçonnent éperdument leur culpabilité. Avec un ton lent et une précision dans la mise en scène quasi chirurgicale limite machinale, ‘Reversal of Fortune’ est un film froid et cynique que l’on appréciera pour la qualité de sa mise en scène lente au demeurant, et du jeu des comédiens.

La partition de Mark Isham pour ‘Reversal of Fortune’ est tout à fait caractéristique des travaux atmosphériques habituels du compositeur. A l’orchestre à cordes habituel, Isham ajoute quelques synthétiseurs avec une guitare et quelques percussions (souvent discrètes). La musique installe une véritable ambiance de mystère tout au long du film, tout en créant une certaine tension qui renforce l’intrigue du film. Le thème principal du score apparaît dès le générique de début dans le sombre ‘A Reversal of Fortune’, thème envoûtant confié à des cordes doublées par une guitare électrique, sur fond de mystérieuses nappes de synthétiseurs. Il se dégage de cet excellent thème principal une atmosphère de mystère particulière, une ambiance énigmatique et incertaine renforcée par les timbales entendues en arrière fond sonore. La seconde partie de l’ouverture pose les prémisses du mystère de l’affaire von Bülow avec des cordes sombres et des sonorités électroniques mystérieuses. Avec ‘The Mystery Unfolds’, Isham développe l’atmosphère sombre et énigmatique de l’ouverture avec nappes de synthé et cordes qui dominent le morceau en installant une atmosphère noire. La première scène de coma (‘Coma’) confirme l’orientation atmosphérique et noire du score de ‘Reversal of Fortune’ avec nappes de synthé prédominantes et cordes sombres. On notera ici l’intrusion d’un motif de 4 notes de cordes repris de la fin de ‘A Reversal of Fortune’, installant une certaine ambiance de panique (renforcée par le martèlement des timbales) lorsque Sunny von Bülow tombe dans son premier coma.

‘A Search Reveals’ évoque les préparatifs de l’enquête et de la reconstitution de cette sombre affaire par Dershowitz et ses compagnons, en vue de la procédure d’appel pour tenter d’innocenter von Bülow. Les cordes sont ici prédominantes, suggérant une véritable ambiance de mystère et de suspense, soutenue par des textures électroniques toujours aussi froides et sombres. ‘Ice Cream, Bullion, and a Scotch and Soda’ se distingue un peu du reste du score lorsque Claus commence à raconter sa version des faits au sujet de ses disputes régulières avec Sunny. Les cordes semblent résonner ici de manière isolée, les instruments évoquant une certaine ambiance de solitude avec comme seul accompagnement des sonorités électroniques mystérieuses en arrière fond sonore. On ressent même ici une certaine amertume doublée d’un profond sentiment de mélancolie et d’une atmosphère de désolation (évoquant les tourments de Sunny avec ses problèmes de santé et son mari). La seconde partie du morceau paraît même plus inquiétante, encore plus mystérieuse. A vrai dire, tout est ici relatif au terme-clé d’atmosphère, un concept musical tout à fait caractéristique du style de Mark Isham. La séquence où Sunny découvre les lettres de l’amante de son mari est accompagnée par une musique encore plus sombre, mystérieuse et morose, où les cordes suggèrent une tension psychologique noire relativement intense à l’écran. ‘Sunny, Claus and a Tiger’ se distingue un peu du reste du score en amorçant une brève touche d’intimité pour la scène où Claus évoque sa toute première rencontre avec Sunny. Les cordes semblent ici plus apaisées et plus attendries, Isham favorisant une écriture lente et harmonique des cordes malgré une certaine densité omniprésente tout au long de la partition de ‘Reversal of Fortune’.

‘A Possible Explanation’ entame la dernière partie du score (et du film) lorsque Dershowitz et ses amis formulent leurs propres hypothèses au sujet du second coma de Sunny. Cordes et textures électroniques renforcent une fois encore cette atmosphère de mystère et de désolation comme dans ‘Another Possible Explanation’ où l’écriture harmonique des cordes paraît plus morose et ambiguë, hésitant entre des accords majeurs et mineurs qui renforcent le mystère de la scène sur la reconstitution du second coma de Sunny von Bülow, Dershowitz étant intimement convaincu, lui et ses amis, de la culpabilité de l’homme qu’ils cherchent à faire innocenter, idées reprises dans le sombre ‘Claus, The Bad Guy’ et le conclusif ‘This Is All You Can Know’ reprenant le thème principal pour le générique de fin, thème qui aurait certainement gagné à être plus présent et mieux développé tout au long du film, au lieu de n’être qu’un simple faire-valoir musical du générique de début et de fin du film. ‘Reversal of Fortune’ est donc tout à fait représentatif de ce genre de partition atmosphérique lente et sombre que Mark Isham aime écrire pour ce genre de film. Néanmoins, le score possède un côté répétitif et ennuyeux qui lasse aux fils des écoutes et fait de ‘Reversal of Fortune’ une partition intéressante dans le contexte du film mais difficilement détachable des images du long-métrage de Barbet Schroeder. Certes, Mark Isham a parfaitement réussi à créer une ambiance noire et mystérieuse pour ‘Reversal of Fortune’, amplifiant les sentiments du film. Hélas, il n’arrive pas à captiver une seule fois l’attention de l’auditeur/spectateur, reléguant sa musique dans le film à un statut fonctionnel pour le moins monotone et ennuyeux. Etant donné la qualité du sujet du film, on se serait donc attendu à quelque chose d’un peu plus passionnant!


---Quentin Billard