1-Destiny 2.03
2-The Cross Over 2.42
3-Meet John Constantine 2.39
4-Confession 2.31
5-Deo Et Patri 1.17
6-Counterweight 2.48
7-Into The Light 2.53
8-I Left Her Alone 1.41
9-Resurrection 2.05
10-Circle of Hell 5.36
11-Last Rites 1.56
12-Encountering a Twin 1.05
13-Flight To Ravenscar 0.53
14-Humanity 2.58
15-John 1.31
16-Someone Was Here 1.46
17-Hell Freeway 2.43
18-Ether Surfing 1.14
19-The Balance 2.27
20-Absentee Landlords 1.35
21-John's Solitude 1.26
22-Lucifer 1.56
23-Rooftop 1.20
24-Constantine End Titles 2.39

Musique  composée par:

Brian Tyler/Klaus Badelt

Editeur:

Varèse Sarabande
302 066 636 2

Produit par:
Brian Tyler, Klaus Badelt
Score co-produit par:
Christopher Brooks
Producteur exécutif:
Robert Townson
Programmation sonore:
Robert Williams
Montage musique:
Joe Lisanti, Gary L. Krause,
Daryl Kell

Coordinateur de production
du score:
Sinead V. Hartmann

American Federation of Musicians.

Artwork and pictures (c) 2004 Warner Bros. All rights reserved.

Note: **
CONSTANTINE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Brian Tyler/Klaus Badelt
Et si Dieu et Satan s’étaient mutuellement lancé le défi de posséder toutes les âmes humaines de la terre? C’est sur ce concept que s’articule l’histoire de ‘Constantine’, grosse production hollywoodienne réalisée par Francis Lawrence qui nous livre ici son premier long-métrage après avoir fait ses armes sur des clips vidéos. Adapté du comics book ‘Hellblazer’, ‘Constantine’ évoque les aventures de John Constantine (Keanu Reeves), un détective extralucide spécialisé dans l’occulte. Après avoir fait un aller-retour aux enfers, Constantine, marqué à jamais par cette expérience, chasse les démons de l’enfer qui tentent d’entrer dans notre monde malgré l’impossibilité apparente de ces derniers à venir dans notre univers. Un jour, il croise le chemin de Katelin Dodson (Rachel Weisz), une policière dont la soeur jumelle, Isabel, s’est récemment suicidée en se jetant du toit d’un hôpital. Incrédule, Katelin ne peut se résoudre à croire que sa soeur s’est suicidé, et elle finit par convaincre Constantine de l’aider à enquêter sur la mort d’Isabel. L’enquête les mène alors en plein coeur d’un Los Angeles peuplé de démons de toute forme, dont certains, les hybrides, vivent sur terre sous une apparence humaine, tandis que d’autres n’ont pas choisi leur camp. Constantine découvre finalement que le fils de Satan prépare sa venue sur terre à l’aide de la mythique lance du destin qui tua le Christ, et que possède un mexicain qui a découvert par hasard l’objet mythique au cours d’une fouille. Désormais, le temps presse. La compétition entre Dieu et Satan devient extrême, tandis que les démons s’affairent à préparer l’arrivée du fils du diable en tentant continuellement de s’en prendre à Katelin, qui semble posséder quelque chose qui les intéresse, un pouvoir supranaturel qu’elle refoulait alors mais qu’elle partageait avec sa soeur.

‘Constantine’ est un film d’action fantastique brassant thèmes religieux et théologiques pour le plus grand bonheur des fans du comics d’origine. Evidemment, c’est ici le personnage de Keanu Reeves qui constitue l’attraction principale du film de Francis Lawrence, Reeves campant un anti-héros décadent à qui il ne reste plus que quelques mois à vivre alors qu’il se sait atteint d’un cancer, provoqué par sa consommation excessive de cigarettes (certains ont ironisés en voyant dans ‘Constantine’ un faire-valoir de la campagne anti-tabac). Bien loin des super-héros habituels, John Constantine est un être tourmenté, cynique et complexe, ravagé par une âme noire qui tente de conserver le minimum d’intégrité qui lui reste en combattant sans relâche les démons qui tentent d’entrer dans notre monde (et de combattre au passage ses propres démons intérieurs, d’où la métaphore du film). Keanu Reeves, toujours égal à lui-même, campe ici un personnage qui n’est pas sans rappeler son rôle de ‘Néo’ dans ‘The Matrix’, à cela prêt que Néo était un vrai héros. Pour le reste, le film explore des thèmes religieux comme les concepts du paradis et de l’enfer, de Dieu et Satan, de l’ange Gabriel, etc. On y retrouve aussi une certaine morale chrétienne sur la rémission des pêchés, la quête de la rédemption, etc. Hélas, le script paraît souvent embrouillé, accumulant des pistes qui partent dans tous les sens et des scènes pas toujours justifiées, d’autant que le film est constamment noyé sous des tonnes d’effets spéciaux et d’images de synthèse qui frôlent ici l’overdose visuelle, même si la beauté esthétique des images ne peut que séduire les puristes (les scènes en enfer sont incroyablement spectaculaires!). On appréciera le soin apporté par le réalisateur à la complexité des protagonistes principaux, jamais tout noir ou tout blanc, à commencer par Constantine lui-même, un être sombre et tourmenté, finalement plus humain qu’il n’y paraît. Même Satan apparaît à la fin du film vêtu d’un costume blanc, une fausse ‘pureté’ qui semble en dire long sur la complexité des personnages (on pourrait aussi parler de l’ange Gabriel...). Mais à force de trop vouloir essayer d’en mettre plein la vue, le film se perd dans une histoire brouillonne et bavarde, accentuée par un montage vif mais un peu trop épileptique, des touches d’humour maladroitement amenées (le film se prend quand même un peu trop au sérieux) et une déferlante d’effets spéciaux énormes qui alourdissent le rythme du film et décrédibilisent constamment le récit, transformant ‘Constantine’ en un gigantesque foutoir abrutissant, d’autant que le film comporte des longueurs et s’avère être finalement bien long (un peu plus de 2h pour finalement évoquer le sempiternel duel du bien et du mal). Dommage, car ‘Constantine’ possédait un potentiel qui n’a certainement pas été suffisamment exploité!

Alors que le site de Varèse Sarabande annonçait le nouveau score de Brian Tyler et Klaus Badelt comme une véritable « tempête symphonique apocalyptique qui ouvrait les portes de l’enfer », la déception est une fois de plus au rendez-vous tant le produit final est totalement dénué d’originalité, d’imagination, d’ambition artistique. Bien loin d’être la nouvelle grande partition annoncée, ‘Constantine’ n’est rien de plus qu’un énième score fonctionnel hollywoodien comme on en entend des tonnes aujourd’hui dans le cinéma de divertissement U.S. La seule véritable originalité du film vient de l’association inédite entre Brian Tyler et Klaus Badelt, même si Tyler fut engagé en premier par la production et assura la majeure partie de la musique du film. Badelt fut quand à lui appelé en renfort à la dernière minute pour peaufiner et arranger la musique au cours d’un remontage sévère du film. Le résultat d’une telle association n’est finalement pas à la hauteur de nos espérances, et ce n’est pourtant pas faute d’y avoir mis les moyens! Le score se compose d’un orchestre symphonique traditionnel, auquel Tyler et a ajouté une bonne dose d’électronique, des choeurs/chanteurs aux accents religieux et des sonorités ethniques orientalisantes, Badelt se chargeant bien évidemment des morceaux aux rythmiques électroniques héritées ici de Media Ventures. ‘Destiny’ annonce d’emblée la couleur en nous plongeant dans une atmosphère sombre à l’aide de cordes et de sonorités électroniques pesantes. ‘The Cross Over’ inaugure l’utilisation de percussions ethniques qui renforcent l’atmosphère sombre et mystique du film, tandis que ‘Meet John Constantine’ s’efforce d’apporter de la dynamique au film à l’aide de rythmiques électroniques modernes associés ici à Constantine.

‘Confession’ dévoile l’un des premiers thèmes du score, un thème de piano plutôt fragile et mélancolique associé dans le film à Katelin Dodson et qui évoque sa tristesse et son amertume après la mort de sa soeur jumelle. On regrettera ici le côté quelconque et atrocement banal de ce thème sans personnalité qui, bien que répété à de nombreuses reprises durant la première partie du film, finit par échapper complètement à notre souvenir. Quand à la partie religieuse du score, il est dommage qu’elle se limite finalement à quelques rares morceaux comme ‘Deo et Patri’ où le compositeur utilise une très belle écriture chorale a cappella dans la plus pure tradition du genre durant la scène où Constantine et Katelin rendent respectivement visite à Gabriel et un prêtre. Là aussi, le score déçoit tant les choeurs apocalyptiques pourtant annoncés à l’origine manquent cruellement à l’appel ici, se limitant finalement à quelques minutes chorales par-ci par là, une timidité quasi honteuse pour un film qui méritait certainement plus une approche chorale beaucoup plus audacieuse et recherchée. Un morceau comme ‘Counterweight’ déçoit par son côté quelconque, son utilisation banale de l’orchestre (cordes dissonantes, cuivres, etc.) et des rythmiques électroniques qui n’apportent rien au film hormis le fait de nous rappeler que nous avons une fois de plus à faire à un pur produit de consommation parfaitement calibré. A noter que ‘I Left Her Alone’ nous propose une nouvelle reprise du thème de piano de Katelin pour évoquer sa tristesse lorsqu’elle évoque ses souvenirs de jeunesse avec Isabel, un morceau plus intimiste permettant de respirer entre deux morceaux sombres et agités.

‘Circle of Hell’ se veut plus sombre et massif afin d’évoquer l’une des séquences d’exploration de l’enfer à l’aide du second thème associé dans le film à Constantine, un motif de 7 notes ascendantes principalement dominé par des cordes et qui évoque la partie noire et maudite du personnage, et son combat contre les démons. Là aussi, on regrettera le côté quelconque et finalement peu inspiré de ce thème, qui prendra une plus grande ampleur tout au long de la seconde partie du film. La rencontre entre Constantine et Isabel en enfer est illustrée dans ‘Encountering a Twin’ par une nouvelle reprise du thème de piano de Katelin sur fond de sonorités électroniques sombres et pesantes, malmenant la fragile mélodie de piano avec une certaine habileté. ‘Humanity’ se distingue quand à lui par l’utilisation du traditionnel duduk arménien et de cordes plus harmoniques évoquant l’humanité en proie aux démons de l’enfer. C’est finalement ‘John’ qui nous permet d’entendre le troisième thème, que Brian Tyler a aussi choisi de confier à un piano fragile et mélancolique qui évoque ici le côté plus tourmenté et solitaire du personnage. A noter que le thème rappelle par moment celui de Sidney dans le ‘Scream’ de Marco Beltrami. ‘Hell Freeway’ paraît quand à lui plus sombre et massif, évoquant une nouvelle excursion de Constantine en enfer, Tyler utilisant ici le thème de piano de Constantine qu’il fait interpréter ici par les instruments ethniques sur fond de cordes dissonantes et d’effets électroniques sombres et atmosphériques.

‘Ether Surfing’ se distingue un peu du reste du score avec ses sonorités ethniques/électroniques étrangement dissonantes, créant un climat d’oppression saisissant durant la scène de la chaise qui permet à John Constantine de voyager en enfer. On retrouve ici aussi cette tonalité atmosphérique qui caractérise si bien la partition de Brian Tyler et de Klaus Badelt. On retrouve alors les choeurs religieux dans ‘Absentee Landlords’ tandis que ‘Lucifer’ évoque l’apparition de Satan (Peter Stormare) à la fin du film, sur fond de cordes dissonantes, de percussions agressives et de sonorités électroniques oppressantes, un climat musical horrifique idéal pour évoquer le maître des enfers. ‘Constantine End Titles’ rompt avec le reste du score en permettant à Klaus Badelt d’utiliser ses traditionnelles rythmiques électro/techno modernes pour le générique de fin du film, un morceau aux ambitions plus commerciales ‘tendance’ qui n’apporte finalement rien de plus à une partition dont le niveau d’ambition artistique atteint déjà le degré zéro de la musique. Hélas, cent mille fois hélas, ‘Constantine’ est le triste reflet pourtant réaliste d’une production cinématographique/musicale à bout de souffle, qui n’avance plus, qui sombre de plus en plus dans des abîmes commerciales, dans la fadeur sans nom, dans les facilités les plus mercantiles, dans les recettes toutes prêtes, etc. On est bien loin ici de l’époque où les musiciens avaient encore une marge de liberté à Hollywood, où l’art musical avait encore une signification pour les réalisateurs et les producteurs hollywoodiens, où les musiciens avaient envie de se battre pour imposer leurs propres idées et leurs propres envies créatrices. Aujourd’hui, on cultive la médiocrité, les films et les musiques bâclés, le cinéma ‘fast-food’, aussi tôt consommé, aussi tôt oublié, car, après tout, il semblerait bien qu’un certain public se soit entiché de cette triste tendance, comme nous le prouve un récent exemple, celui des screen-tests du ‘Troy’ de Wolfgang Petersen, durant lesquels le public test rejeta en bloc la musique magnifique et ambitieuse de Gabriel Yared au profit d’une partition médiocre et sans imagination. Pour ‘Constantine’, c’est un peu la même chose, même si les screen tests n’ont pas eu autant d’influence cette fois-ci sur la qualité médiocre de la musique de Brian Tyler et Klaus Badelt, que l’on doit essentiellement ici à des producteurs mercantiles pour qui musique rime avec dollars. Quoiqu’il en soit, ce coup de gueule s’avérait nécessaire, tant la production hollywoodienne est en train de sombrer de plus en plus dans une sorte de déchéance artistique alarmante, un constat néanmoins tempéré aujourd’hui par quelques musiciens qui arrivent encore à fournir des partitions de qualité malgré le contexte ambiant. Mais ils se comptent pratiquement sur les doigts d’une main!


---Quentin Billard