1-Main Title 2.46
2-No Sorcerers/No Dragons 1.47
3-Ulrich's Death and Mourning/
The Amulet 3.29
4-Forest Romp 1.32
5-Maiden's Sacrifice 4.25
6-Visions and Reflections/
Hodge's Death 4.46
7-The Lair/Landslide 4.14
8-Galen Jailed/Galen's Escape 2.20*
9-Jacopus Blasted 2.25
10-Burning Village 1.10**
11-The Lance/The Lottery 4.40*
12-Galen's Search for the Amulet 1.09
13-Valerian's Dragon Scales 1.29
14-Still A Virgin 1.57
15-Elspeth's Destiny/
Tyrian-Galen Fight 3.12
16-3 Darling Dragonettes/
Triumphant Dragon 2.38
17-A Slight Skirmish 3.15
18-Dejection/Eclipse/
Resurrection of Ulrich 5.27
19-Dragon Sore-ing 1.13
20-Destroy That Amulet! 2.46
21-'Tis The Final Conflict 4.13**
22-Intro To End Credits/
End Credits 4.35**

Bonus Tracks

23-Dance Montage 2.53
24-A Slight Skirmish (Alternate) 3.22
25-Main Title (original)
(With Hidden Bonus) 1.22

*Not used in film
**Contains material not used in film.

Musique  composée par:

Alex North

Editeur:

La La Land Records LLLCD 1128

Producteurs exécutifs de l'album
pour La La Land Records:
MV Gerhard, Matt Verboys
Album produit pour La La Land par:
Dan Goldwasser
Direction de la musique pour
Paramount Pictures:
Randy Spendlove
Monteur musique:
June Edgarton
Period Music:
Christopher Page
Music Contractor:
Sidney Sax

Artwork and pictures (c) 1981 Paramount Pictures. All rights reserved.

Note: ****
DRAGONSLAYER
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Alex North
Quand on dit que les années 80 ont permis au cinéma de divertissement hollywoodien de se dérider un bon coup et de se livrer à quelques audaces que l’on ne revoit quasiment plus aujourd’hui, vous pouvez être sur qu’il ne s’agit nullement d’une invention! ‘Dragonslayer’ (Le dragon du lac de feu) est l’exemple même de ce type de production formatée pour un grand public avec des audaces qui s’avéreraient bien impensables aujourd’hui dans l’esprit des producteurs devenus frileux. Ce long-métrage produit par Disney et réalisé par Matthew Robbins s’inscrit dans la lignée des productions d’heroic fantasy typique des années 80, comme on en trouvait alors à la pelle à cette époque à Hollywood, avec son lot de héros guerriers, d’armes mythiques, de sorciers maléfiques et de magiciens surpuissants (‘Conan the Barbarian’, ‘The Beastmaster’, ‘Deathstalker’, ‘Ladyhawke’, ‘The Sword and Sorcerer’, ‘Krull’, etc.). L’histoire se déroule dans un univers médiéval sombre et plein de mystères. Un dragon maléfique sème la terreur dans la région d’Urland, gouvernée par le roi Casiodorus (Peter Eyre). Ce dernier a passé une sorte de pacte avec le dragon et lui offre régulièrement des jeunes vierges sacrifiées afin de satisfaire son insatiable appétit. Pendant ce temps, les villageois décident de faire appel au vieux sorcier Ulrich (Ralph Richardson) qui accepte d’entamer un long périple pour aller combattre le dragon. Mais au moment du départ, il s’oppose à Tyrian (John Hallam), chef de la garde du roi Casiodorus qui le défie afin de tester la réelle étendue de ses pouvoirs. A l’issue de ce test, Ulrich meurt. C’est Galen (Peter MacNicol), son jeune apprenti, qui va prendre sa place afin d’accomplir lui-même la mission qui avait été confié à son vieux maître. Il va devoir apprendre à maîtriser ses pouvoirs magiques acquis au cours de longues années d’apprentissage auprès d’Ulrich afin de terrasser le dragon qui sème la terreur depuis trop longtemps sur la région d’Urland.

Film d’heroic-fantasy dans la plus pure tradition du genre, ‘Dragonslayer’ possède l’avantage et les inconvénients de l’époque: tout d’abord des effets spéciaux assez kitsch mais néanmoins efficaces estampillés ‘eighties’, avec un dragon animé à l’ancienne (c’est le premier film à utiliser le procédé innovant à l’époque du ‘go-motion’, une variante du ‘stop-motion’ durant lequel le modèle mécanique filmé est animé par ordinateur) qui s’avère être particulièrement monstrueux et plus proche d’un monstre de film d’horreur que d’un conte d’heroic fantasy. En revanche, on appréciera le côté sombre et sec du ton et de l’esthétique du film. Ici, pas d’humour, pas de second degré et encore moins de fantaisie infantilisante, cet univers médiéval est montré avec une certaine noirceur qui rappelle ‘Excalibur’, réalisé la même année par John Boorman. D’autre part, pour une production Disney, ‘Dragonslayer’ s’avère quand même être bien violent puisque le réalisateur va même jusqu’à nous livrer une scène gore particulièrement audacieuse où l’on voit un des bébés dragons dévorer le pied sanguinolent d’une jeune vierge récemment sacrifiée (en plus de montrer brièvement la nudité de deux personnages lors d’une scène assez insolite dans une production Disney!). A cela s’ajoute quelques beaux combats et quelques scènes spectaculaires sympathiques comme l’affrontement entre Galen et le dragon dans la cave du lac de feu ou la confrontation finale avec Ulrich ressuscité. Bref, ‘Dragonslayer’ est la preuve qu’à l’aube des années 80, les producteurs de chez Disney avaient réellement envie de relever des défis, comme nous le prouvent des films tels que ‘Tron’, ‘Something Wicked this Way Comes’ ou ‘The Black Cauldron’ (l’un des plus sombres dessins animés jamais réalisés par Disney!). Un petit film obscur du début des années 80 à redécouvrir!

‘Dragonslayer’ fait partie des derniers films mis en musique par le célèbre Alex North, figure emblématique du Golden Age hollywoodien qui décédera 10 ans plus tard en 1991. Alors que l’on aurait pu s’attendre à une musique empreinte de magie et de grands thèmes épiques et héroïques, North a décidé de prendre le contre-pieds total du style musical habituel des films d’heroic-fantasy en nous livrant une partition symphonique massive et résolument sombre. Ceux qui s’attendent donc à un score entraînant et épiques seront donc surpris, tant le compositeur joue la carte de la noirceur et des effets de masse sonore très éloigné de ce que l’on peut entendre habituellement sur une production Disney de cette envergure, preuve que la production a décidément tout misé sur l’aspect sombre du film. L’orchestre est composé d’une section de cuivres particulièrement impressionnante avec des cuivres graves accentuant le côté massif du film. A cela s’ajoute une importante partie de percussions incluant timbales, caisse claire, tambours, percussions en bois traditionnelles, etc. On ressent dans la partition d’Alex North l’influence du répertoire ‘contemporain’ du 20ème siècle, quelque part entre les effets sonores d’un Ligeti, le langage orchestral d’un Stravinsky ou le vocabulaire atonal d’un Schoenberg. Rappelons qu’une partie du score de ‘Dragonslayer’ provient en fait de la musique que composa Alex North pour ‘2001 A Space Odyssey’ de Stanley Kubrick en 1968, et qui fut rejeté par la suite par le réalisateur (sans même avoir pris la peine d’en informer le compositeur!). Avec le film de Matthew Robbins, North a enfin eu l’occasion de revisiter son travail sur le film de Kubrick, qu’il réadapte partiellement pour les besoins du film. A l’aide de cinq thèmes difficile à discerner à la première écoute, North élabore une oeuvre sombre et brutale et ce dès l’ouverture du film dans le ‘Main Titles’. Des cuivres graves et massifs ouvrent le film au son d’un motif menaçant très vite rejoint par contrebassons, contrebasses, vents stridents et percussions en bois, une ouverture atmosphérique empreinte de mystère et d’inquiétude, parfait pour se plonger dans cet univers médiéval où se cachent mille dangers. Puis très vite, les cordes installent une ambiance sombre qui se prolonge dans le mystérieux ‘No Sorcerers, No Dragons!’ qui rappelle à quel point Alex North a eu une influence incontestable sur le style musical de Jerry Goldsmith, à l’aide de sonorités vaporeuses (et une brève touche d’électronique) évoquant cet univers de magie mais avec une touche toujours sombre et quelques effets de dissonances.

North développe cette ambiance sombre et empreinte de mystère dans ‘Ulrich’s Death – Mourning’ pour la séquence de la mort d’Ulrich avec de multiples effets orchestraux et un langage musical empreint d’une touche impressionniste et d’effets modernes hérités de la musique savante du 20ème siècle, un savant mélange entre tonalité dense et atonalité complexe. On appréciera par exemple la façon dont North évoque la menace du dragon dans ‘Maiden’s Sacrifice’ à l’aide d’orchestrations de qualité privilégiant les différents pupitres de l’orchestre avec une fluidité typique du compositeur. Les premières apparitions du dragon sont accompagnés à l’écran par un premier déchaînement orchestral atonal et brutal alors que le motif de cuivres de l’introduction marque ici son retour à travers de multiples variations, soutenu par un orchestre massif et intense agrémenté de quelques vagues sonorités électroniques. On ne pourra qu’apprécier la qualité de l’écriture orchestrale du compositeur qui témoigne d’un savoir-faire exemplaire et d’une science d’écriture incontestable, North maniant l’orchestre avec une dextérité rare. Le compositeur nous offre malgré tout quelques moments plus légers mais non moins denses comme ‘Forest Romp’ pour la scène de la traversée de la forêt soutenu, sous la forme d’un scherzo enjoué, par un rythme entraînant de caisse claire suggérant l’aventure et des instruments sautillants empreints d’une certaine ironie qui n’est pas sans rappeler par moment le style du ‘Petrouchka’ d’Igor Stravinsky. Comme toujours, North évite la facilité et nourrit même ses passages plus légers d’une écriture instrumentale dense et complexe, une complexité qui fait écho à la noirceur et l’intensité du film de Matthew Robbins.

Dès lors, le compositeur a eu l’occasion de poser les bases de sa partition, multipliant ainsi les moments sombres et mystérieux où l’agressivité des déchaînements orchestraux associés à la terreur qu’inspire le dragon côtoient quelques passages orchestraux plus inquiétants où règne cette atmosphère à la fois sombre et brumeuse. Un morceau comme ‘Hodge’s Death’ témoigne parfaitement du côté élaboré de ces passages atmosphériques où le compositeur joue à loisir sur les différentes sonorités de sa palette orchestrale au travers de multiples variations de brefs motifs associés aux différents protagonistes du film (Galen, le dragon, Valerian, etc.), comme ce petit motif illustrant l’amulette magique d’Ulrich dans ‘Galen Search for the Amulet’ avec son jeu de couleurs instrumentales particulièrement complexe et inventif, suggérant cet univers de magie chez le vieux sorcier. Puis, rapidement, la partition de ‘Dragonslayer’ s’enfonce dans une noirceur de plus en plus intense débutant avec ‘Vermithrax’s Lair – Landslide’ et son climat atonal particulièrement glauque et saisissant, suggérant l’inquiétante menace du monstrueux dragon (surnommé Vermithrax par les habitants d’Urland). Idem pour l’affrontement pour des pièces comme ‘Galen’s Jailed – Galen’s Escape’ et ‘Dragon Flight – Burning Village’ avec sa série de variations brutales autour du motif du dragon, ou bien encore le sombre ‘Elspeth At the Stake – Vermithrax’s Triumph – Galen’s Encounter’ où North exprime sur plus de 5 minutes tout le danger et la noirceur de la scène où Galen s’infiltre dans la caverne de Vermithrax et découvre le cadavre de la jeune vierge récemment sacrifiée. On appréciera ici la façon dont les différents motifs (celui du dragon, de Galen et le motif d’aventure de ‘Forest Romp’) s’entrechoquent avec une qualité d’écriture toujours très dense et extrêmement élaborée. A noter que l’on retrouve ici le motif menaçant de cuivres graves repris de l’introduction, personnifiant le danger alors que Galen est sur le point d’affronter le dragon et sa progéniture. North nous offre néanmoins quelques moments plus apaisés loin de toute cette tension orchestrale avec un très beau ‘Love Theme’ pour ‘Valerian & Galen’s Romance’ écrit dans la plus pure tradition des thèmes romantiques hollywoodiens, avec un lyrisme sous-jacent poignant et des harmonies de qualité, le tout évoquant la romance entre Galen et Valerian à l’aide d’un très beau thème qui apporte une poésie salvatrice à une oeuvre résolument sombre, complexe et agressive, trouvant sa conclusion sur deux morceaux de qualité, la confrontation finale (‘Destroy That Amulet! Ulrich Explodes – Vermithrax’s Plunge’) avec ses faux rythmes de valse inventifs et ses effets orchestraux massifs et le traditionnel générique de fin (‘The White Horse – Into The Sunset (End Credits)’) où le compositeur en profite une dernière fois pour rappeler son très beau ‘Love Theme’ alors que Galen et Valerian quittent ensemble les terres d’Urland pour suivre leur destinée, le morceau trouvant une conclusion plus légère et apaisée sous la forme d’une petite valse légère agrémenté de l’utilisation astucieuse et très discrète d’un clavecin.

Partition complexe, sombre et intense, la musique de ‘Dragonslayer’ reste sans aucun doute l’une des oeuvres majeures d’Alex North dans les années 80. Force est de constater qu’à 71 ans, le légendaire compositeur de ‘A Streetcar Named Desire’ n’avait encore rien perdu de son talent et de son inspiration, lui qui a toujours défendu un langage musical complexe et cérébral, souvent très éloigné des canons hollywoodiens et autres conventions du genre. Hérité d’une partie de sa musique rejetée pour ‘2001 A Space Odyssey’, ‘Dragonslayer’ n’échappe pas à la règle et confirme le génie d’un musicien dont le talent à manier l’orchestre et des couleurs harmoniques, modales et instrumentales trouveront écho auprès d’un compositeur comme Jerry Goldsmith, qui a toujours considéré Alex North comme son mentor, son père spirituel. Voilà en tout cas une oeuvre symphonique d’une qualité rare pour un film de ce genre, un score difficile d’accès qui, bien que très répétitif et plombé par de nombreuses lourdeurs, n’en demeure pas moins une partition assez fascinante de par sa construction assez libre et sa science d’écriture quasiment inégalée à l’époque en dehors de grands musiciens comme Jerry Goldsmith, Miklos Rozsa (qui composait encore au début des années 80), John Scott ou, dans un style plus postromantique, John Williams. Il n’est d’ailleurs pas surprenant que le score ait été nominé aux Academy Awards en 1981 aux côtés de ‘Raiders of the Lost Ark’ et ‘Chariots of Fire’. Voilà en tout cas une partition de qualité à (re)découvrir, surtout en ces temps de carences créatrices et musicales!


---Quentin Billard