1-Bogota 1.38
2-The Bedroom 1.11
3-Playing House 1.35
4-Assignments 1.12
5-His and Her Hits 2.46
6-Office Work 2.10
7-Desert Foxes 2.37
8-John and Jane's Identity 2.02
9-Dinner 4.15
10-Hood Jump 1.46
11-Mutual Thoughts 1.01
12-John Drops In 2.31
13-Tango de Los Asesinos 4.26
14-Two Phone Calls 1.51
15-Kiss and Make Up 1.54
16-Minivan Chase 2.13
17-Shopping Spree 4.19
18-Dodging Bullets 1.21
19-The Next Adventure 3.28

Musique  composée par:

John Powell

Editeur:

Lakeshore Records
LKS 33828

Produit par:
John Powell
Montage musique:
Tom Carlson, Shannon Erbe

Artwork and pictures (c) 2005 20th Century Fox Film Corporation. All rights reserved.

Note: ***1/2
MR. AND MRS. SMITH
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by John Powell
Remake d’une série télévisée homonyme de 1996, ‘Mr. and Mrs. Smith’ reprend le concept du ‘True Lies’ de James Cameron, à savoir l’histoire d’un couple qui mène en secret une double vie, sauf qu’ici, le mari et la femme sont tous les deux concernés par ce secret. Cela fait maintenant 5 à 6 ans que John Smith (Brad Pitt) et Jane Smith (Angelina Jolie) vivent ensemble, dans la plus parfaite des routines. Leur mariage semble battre de l’aile alors qu’ils s’ennuient mutuellement et en sont réduits à suivre une thérapie de couple. Pourtant, leur existence est loin d’être aussi banale car ils sont tous les deux de redoutables tueurs à gage à la solde d’une organisation secrète, chacun ignorant en réalité les activités de l’autre. Un jour, ils reçoivent tout les deux le même contrat: abattre un certain Benjamin Danz (Adam Brody). Arrivés sur le terrain, John et Jane se retrouvent en compétition et s’affrontent brièvement sans que l’un puisse voir le visage de l’autre. Ils cherchent alors à en savoir un peu plus sur l’individu qui leur a mit des bâtons dans les roues en se trouvant là au mauvais moment. John et Jane finissent alors par découvrir l’étonnante vérité. A la demande de son organisation, Jane a 48 heures pour éliminer John et inversement. Après une violente fusillade basculant dans l’entretuage version scène de ménage musclée, les deux tueurs à gage ne sont définitivement pas résolus à s’entretuer et apprennent alors à se redécouvrir mutuellement avec leur nouvelle existence. Ils comprennent alors qu’on leur a tendu un piège et que le contrat ‘Benjamin Danz’ n’était qu’un appât destiné à les supprimer tout les deux en s’entretuant. Le scénario du film oscille ainsi habilement entre comédie et action dans un cocktail détonnant et judicieusement épicé d’humour et de baston. Mais si le film est un remake direct de la série ‘Mr. and Mrs. Smith’ datant de 1996 avec Scott Bakula et Maria Bello dans les rôles principaux, le film de Doug Liman est aussi un remake direct du fameux ‘Prizzi’s Honor’ de John Huston, dans lequel Jack Nicholson et Kathleen Turner campaient deux tueurs à gage tombant amoureux l’un de l’autre alors qu’ils sont chargés de s’entretuer par leurs employeurs respectifs. Ici, le réalisateur Doug Liman (‘The Bourne Identity’) apporte un humour considérable au film, métaphore de la guerre des sexes et de la routine du mariage mélangé à une trame plus hollywoodienne d’esprit, avec son lot de fusillades, de complots, de retournements de situation, d’explosions et de poursuites endiablées. On appréciera au passage deux scènes particulièrement réjouissantes: celle de la confrontation entre John et Jane dans la maison, où entre deux coups de feux, l’un balance à l’autre ‘toujours vivant mon chéri?’, la scène du dîner emplit de tension et de non-dits, ou la scène dans le restaurant lorsque John et Jane entament un tango ambigu sur fond du jeu du chat et de la souris. Dommage que la seconde partie, bien moins intéressante, s’essouffle considérablement pour retomber dans les travers hollywoodiens habituels et les invraisemblances à la pelle. ‘Mr. and Mrs. Smith’ n’en demeure pas moins un bon divertissement estival!

John Powell signe là sa deuxième collaboration à un film de Doug Liman après un ‘The Bourne Identity’ pas vraiment mémorable. Pour ‘Mr. and Mrs. Smith’, Powell nous offre un score teinté de sonorités hispanisantes, d’humour et de rythmes électro/techno chers aux musiciens de Media-Ventures, avec, comme toujours, la ‘John Powell’s touch’ qui tend de plus en plus à asseoir la personnalité musicale de l’un des meilleurs compositeurs officiant actuellement sous l’égide du studio de Hans Zimmer. Dès le premier morceau, ‘Bogota’ (introduction du film pour la rencontre entre John et Jane à Bogota), Powell se fait plaisir en nous offrant un sympathique thème principal introduit ici par une guitare sèche avec accordéon et rythmes flamencos (claquements de main, guitares, etc.), des rythmes que l’on retrouvera tout au long de la partition, associé au couple Smith et à leurs péripéties mouvementées, avec au passage, un soupçon de fantaisie inattendue pour un blockbuster de ce genre. Dans ‘The Bedroom’, Powell développe son thème de guitare pour évoquer la routine qui s’installe rapidement dans le couple Smith, faisant la part belle au passage aux solos du guitariste Heitor Peirera, un habitué de Media-Ventures, qui nous avait déjà offert de beaux passages de guitare dans ‘Mission: Impossible 2’ de Hans Zimmer, les passages hispanisants de ‘Mr. and Mrs. Smith’ n’étant d’ailleurs guère loin d’un morceau comme ‘Seville’ ou ‘Nyah’ du score de ‘MI2’. ‘Playing House’ paraît alors plus personnel dans son style comédie avec une rythmique entraînante faite de claquements de main et de petites percussions avec une utilisation assez inventive des instruments, que ce soit les cordes, la trompette en sourdine jazzy ou l’orgue hammond. Powell évoque alors la vie secrète des deux tueurs à gage avec un certain humour indissociable de sa musique, et qui tend à rendre le film particulièrement agréable et distrayant. Dans ‘Assignments’, Powell nous dévoile un second thème plus sérieux associé aux missions des deux tueurs à gage, repris à la guitare dans ‘Office Work’ lorsque les deux tueurs préparent leur mission dans le désert. On retrouve ici les rythmes flamencos mais dans un style plus atmosphérique. De la même façon, ‘His and Her Hits’ mélange gros rythmes électro et flamencos avec habileté, la partie orchestrale, plus orientée ‘action’ ici, évoquant le score de ‘Paycheck’ du même compositeur.

L’action n’est d’ailleurs pas en reste avec ‘Desert Foxes’ pour la scène de l’affrontement dans le désert, où Powell nous dévoile un sympathique thème soutenu par une jolie descente harmonique qui illustre la confrontation entre les deux époux, avec une ligne mélodique faussement mélancolique et malicieuse, qui pourrait presque faire penser à un air de tango. Powell nous propose ici une série de variations autour de ce thème amplifié par les rythmes flamencos puis par les rythmiques électro chères au compositeur (à noter une reprise de ce thème dans ‘John and Jane’s Identity’ lorsque les deux époux commencent à avoir des soupçons sur l’identité de l’un et l’autre), avec ces percussions toujours synonymes ici de tension et d’action. Aucun doute possible, avec ‘Desert Foxes’, on retrouve du John Powell à 100%, une sorte de croisement entre ‘The Bourne Identity’ pour les percussions et ‘Paycheck’ pour l’utilisation toujours aussi personnelle de l’orchestre. On appréciera alors ‘Dinner’, où pendant plus de 4 minutes, John Powell maintient une certaine tension durant la scène du dîner entre John et Jane en se livrant à une véritable illustration musicale du jeu du chat et de la souris. Pizzicati, cordes, piano, guitares, cuivres, castagnettes, tout est mis en oeuvre ici pour évoquer non sans malice ce jeu des non-dits auquel se livrent le couple dans cette séquence mémorable, la musique donnant par moment l’impression de marcher sur la pointe des pieds avec ses rythmes furtifs et ses cordes discrètes mais bien présentes. Les amateurs de flamenco devraient alors se réjouir de l’entraînant ‘Hood Jump’ pour la scène de la brève confrontation entre John et Jane dans la rue sur le toit de la voiture de Jane, Powell retrouvant ici l’ambiance de ‘Bogota’ mais en bien plus frénétique. Mention spéciale à ‘Tango De Los Asesinos’ où Powell se livre à l’exercice périlleux du tango à l’espagnol à la façon d’un Isaac Albeniz. Le tango accompagne la scène où John et Jane se livrent à une danse malicieuse tout en se mettant en tête de s’éliminer mutuellement. A noter l’ajout sur ce tango d’une loop de batterie électro qui rappelle inévitablement le dernier album du groupe électro ‘Gotan Project’, ‘La revancha del Tango’. Il y a une mélancolie sous-jacente dans ce tango intimiste qui semble évoquer les sentiments des deux héros malgré leur antagonisme.

Les morceaux d’action deviennent alors plus présent au cours de la seconde partie du film alors que le côté comédie de la première partie du score commence à s’estomper progressivement bien que restant présent malgré tout. ‘John Drops In’ ouvre le bal avec ses rythmes électro/flamenco et sa guitare et son orchestre agité, tandis que ‘Kiss and Make Up’ évoque la scène de la confrontation dans la maison à grand renfort de percussions solos du plus bel effet (brillante utilisation ici des darboukas), qui traduisent la violence de la fusillade ‘conjugale’. Quand à ‘Minivan Chase’, il s’agit sans aucun doute du meilleur morceau d’action de tout le score (scène de la poursuite explosive en minivan vers la fin du film), qui n’a certainement rien à envier au ‘Hog Chase’ du score de ‘Paycheck’. Powell conserve toujours un côté mélodique sans jamais tomber dans la cacophonie. Ses rythmes endiablés sur fond de loops électro lui permettent de renforcer un orchestre inventif et agité traduisant tout le talent et l’inventivité du compositeur, qui semble s’être définitivement bien amusé sur le film de Doug Liman. La confrontation finale a lieu dans ‘Dodging Bullets’ où les rythme s’amplifient dans une brillante montée de tension orchestrale aboutissant à ‘The Next Adventure’ (générique de fin) et ses rythmes électro entraînants lors d’une reprise finale puissante du thème principal à l’orchestre.

Force est donc de constater qu’une fois encore, John Powell, sans signer là un chef-d’oeuvre impérissable, continue de se faire remarquer en imposant une personnalité musicale de plus en plus forte et perceptible. Maniant tous les genres avec une aisance rare, Powell est décidément un compositeur aux multiples facettes, aussi à l’aise dans les déchaînements orchestraux, les musiques d’action survitamniées ou les passages intimistes et romantiques. Ici, Powell estompe le côté action en y apportant une énergie rythmique considérable effaçant le traditionnel côté ‘violent’ de ce type de musique. Il faut aussi reconnaître qu’après avoir oeuvré pendant plusieurs années dans le style ‘Media-Ventures’, John Powell parvient finalement à échapper au style et à l’influence de Hans Zimmer en imposant sa propre personnalité musicale qui ne doit finalement pas grand chose à son mentor. Le compositeur ne se prend donc jamais trop au sérieux et accompagne continuellement le film de Doug Liman avec un certain second degrés fort appréciable et rare dans une production hollywoodienne aussi formatée. Ses rythmes hybrides flamencos/électros apportent un charme considérable à sa musique, John Powell s’étant incontestablement fait plaisir sur un film qui l’a relativement bien inspiré. Ceci étant dit, on aimerait parfois que l’inventivité de certains passages soit d’avantage exploitée et poussée encore plus loin. Mais ne boudons pas notre plaisir, car pour une production hollywoodienne aussi formatée, le résultat musical s’avère être assez surprenant et, contre toute attente, parfaitement agréable sans être hautement mémorable. Décidément, John Powell n’a pas fini de nous surprendre!


---Quentin Billard