1-Jack Palmer 4.02*
2-Services Spéciaux 1.15
3-Thème de Léa 3.49
4-Le Phare 2.50
5-Le Village Enchanté 3.38
6-Palmer prend le maquis 0.44
7-Palmer enquête 1.08
8-Les Poseurs de Bombes 2.18
9-Le Mini Moke 2.22
10-La Plage 3.26
11-Ange Leoni s'échappe 3.56*
12-Palmer rêve de Léa 4.10*
13-Le Village Désenchanté 1.09
14-L'Hélicoptère 2.36
15-Jack Palmer (reprise) 4.02
16-Thème de Léa
(version hi-fi stéréo) 3.56
17-Le Mini Moke est cassé 0.25

*Remix: Frédéric Rousseau

Musique  composée par:

Alexandre Desplat

Editeur:

Play Time 3099512

Album conçu et réalisé par:
Stéphane Lerouge,
Alexandre Desplat

Produit par:
Thierry Wolf, pour FGL
Musique dirigée par:
Alexandre Desplat
Copiste:
Guy-Paul Romby
Sequencing:
Frédéric Rousseau

(p) 2004 Légende/Gaumont (c) 2004 Editions La Marguerite. All rights reserved.

Note: ***
L'ENQUÊTE CORSE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Alexandre Desplat
A une époque où ce que l’on a baptisé ‘le problème corse’ revient systématiquement à l’ordre du jour dans les médias ou aux journaux, la sympathique comédie d’Alain Berberian aide à relativiser avec humour. ‘L’enquête corse’ n’est autre que l’adaptation cinématographique de la bande dessinée homonyme signée Pétillon, dessinateur du Canard enchaîné qui s’est aussi occupé du design de l’affiche originale du film. Sorti du succès de ‘Le Boulet’, Alain Berbérian retourne au genre de la comédie qu’il connaît bien (il fut autrefois réalisateur d’émissions des ‘Nuls’ et de ‘La cité de la peur’). Le film marque aussi les retrouvailles entre Jean Reno et Christian Clavier après ‘L’Opération Corned-Beef’, ‘Les visiteurs’, ‘Les visiteurs 2’ et ‘Just Visiting’. Hélas, si le duo fonctionne bien dans ‘L’enquête corse’, on est quand même loin de l’époque des ‘Visiteurs’. Malgré cela, ‘L’enquête corse’ n’en demeure pas moins une comédie agréable narrant l’histoire d’un détective parisien, Rémi François alias Jack Palmer (Clavier), envoyé en Corse pour rechercher le mafieux Ange Léoni (Reno), qui a hérité d’une fortune considérable. Arrivé en Corse, Palmer ne tarde pas à comprendre que l’île de beauté recèle de secrets et de mystères qui en font un endroit très particulier. L’accueil se veut froid envers les étrangers qui posent les mauvaises questions, certains sont au contraire plus expansifs et n’hésitent pas à proposer la tournée d’alcool au fringant détective parisien, tandis que d’autres, des indépendantistes organisés en bande, kidnappent Jack Palmer avant de se retrouver encerclé par les gendarmes, les services secrets français et les indépendantistes corses. Mais, de fil en aiguille, Palmer finira par rencontrer Léoni, avant de se laisser embarquer dans une série d’aventures rocambolesques, où il apprendra à mieux découvrir l’île de beauté et à apprécier ses beautés locales en la personne de Léa Léoni (Caterina Murino), la frangine d’Ange.

Sans être particulièrement subversif, ‘L’enquête corse’ aborde avec humour tous les stéréotypes associés au peuple Corse et à l’île de beauté: le problème lié aux mouvements indépendantistes évidemment, à une époque où les médias ne cessent de rapporter les méfaits de terroristes et d’assassinats de préfets – le récent problème de la grève à la SNCM a prouvé à quel point le ‘problème corse’ était devenu un sujet d’actualité de premier plan – mais aussi les traits de caractère, véridiques ou exagérés, de certains corses. Evidemment, il serait hasardeux de penser que le film critique les corses, une chose qu’il ne fait vraiment jamais, préférant opter pour l’humour et la caricature sans méchanceté. Christian Clavier reste égal à lui-même, face à un Jean Reno toujours à l’aise dans ce rôle de bandit au grand coeur. Quand à l’italienne Caterina Murino, outre le fait qu’elle apporte un charme féminin considérable au film, sa présence n’est guère due au hasard puisque le réalisateur, très attiré par les grandes belles actrices italiennes d’antan, souhaitait tourner avec une comédienne rivalisant de charme et d’élégance pour ‘L’enquête corse’, son personnage de Léa Léoni pastichant les grandes femmes fatales à l’ancienne, à la fois séductrice et manipulatrice, le reste du casting étant complété par de véritables corses. Mais à force de trop vouloir tirer sur la corde de la caricature corse, le film d’Alain Berbérian finit par devenir lassant et pas toujours drôle, surtout dans les scènes faisant intervenir les gendarmes (les proies faciles des caricaturistes), souvent très exagérées et grossièrement réalisées. Malgré ses défauts, ‘L’enquête corse’ n’en demeure pas moins un bon divertissement sans grande prétention qui ravira les amateurs du duo Clavier/Reno mais qui risque fort de laisser sur leur faim les fans de la BD de Pétillon.

Avec ‘L’enquête corse’, l’éclectique Alexandre Desplat s’autorise un petit détour du côté des musiques de film d’agent secret. Effectivement, dès les premières minutes du film, le compositeur assoit son thème principal, motif clairement orienté dans le style ‘James Bond’ et introduit par ‘Jack Palmer’. Confié à des cuivres, le motif est accompagné par des rythmes soutenus et une orchestration ‘sixties’ un brin rétro (petites percussions à la Lalo Schifrin, flûtes, batterie, etc.), le tout sur un remix de Frédéric Rousseau. Le thème de cuivres à la James Bond est ici bien évidemment associé au personnage de Jack Palmer incarné dans le film par Christian Clavier, la musique jouant alors clairement la carte du second degré en conférant au personnage un côté agent secret très classe pour un personnage qui est bien loin de posséder pareille envergure. Avec ‘Services Spéciaux’, Desplat prolonge cette ambiance espionnage à l’ancienne avec petites rythmiques électroniques, petites percussions, guitare électrique ‘sixties’ à la John Barry et cordes, le tout baignant une fois de plus dans le style orchestral cher au compositeur, qui, comme d’habitude, ne cesse d’apporter un soin tout particulier à ses orchestrations. Le second thème, ‘Thème de Léa’, est associé quand à lui à la séductrice incarnée par la ravissante et sexy Caterina Murino. Avec le thème de Léa, on change radicalement d’ambiance en se dirigeant vers un style plus lounge/bossa, quelque part entre François De Roubaix, Quincy Jones, et Lalo Schifrin. Confié à un cor, une petite batterie en rythme bossa, un accompagnement de guitare latino, des cordes et un piano, le thème de Léa confère un charme indissociable à la charmante Caterina Murino. La partition d’Alexandre Desplat oscille ainsi entre musique d’espionnage et lounge rétro. Avec ‘Le Phare’, Desplat s’autorise même un petit détour du côté de la musique d’action à l’hollywoodienne rappelant les récentes partitions de David Arnold pour les derniers opus des aventures de l’agent secret 007, avec rythmiques électroniques, percussions et orchestre énergique pour la scène du phare.

Idem pour ‘Les poseurs de bombe’ avec ses orchestrations très soignées et ses rythmiques toujours très soutenues dans le style musique d’espionnage pour la scène des poseurs de bombe dans le restaurant corse. On pourra aussi apprécier une reprise très sympa du thème principal dans ‘Palmer Enquête’ où Desplat imite le style du Lalo Schifrin ‘seventies’ à l’aide de petites percus, flûtes, guitares, trompettes en sourdine et cordes dans un style qui n’est guère loin par moment de ‘Bullitt’. Et que dire de ‘Ange Leoni s’échappe’ avec son orgue et ses rythmiques funky ‘seventies’ un peu kitsch, mélangé à quelques sons de scratch plus modernes sur fond d’orchestre pour un nouveau morceau d’action énergique et sans prétention, comme dans l’entraînant ‘L’Hélicoptère’. Desplat se fait véritablement plaisir en navigant d’une ambiance à l’autre en véritable touche à tout aussi à l’aise dans un genre comme dans l’autre.

L’autre facette du score de ‘L’enquête corse’, c’est bien évidemment la partie lounge kitsch dans laquelle le compositeur semble s’être particulièrement bien amusé, comme le suggèrent par exemple ‘Le village enchanté’ et sa rythmique oscillant entre la lounge et la bossa à l’aide de flûte, guitare et synthétiseur rétro dans un style mélodique un peu désuet et charmant, évoquant avec humour la beauté des paysages corses contrastant avec le caractère plus dur de certains habitants (d’où une touche d’humour entre le titre de la piste 5 et 13 : ‘Le village enchanté’ devient ‘Le village désenchanté’). Et que dire de ‘Le Mini Moke’ qui ravira tous les fans des kitscheries à la François De Roubaix, véritable petit hymne à la lounge music des ‘sixties’ résolument rétro, apportant ici aussi un humour considérable au film d’Alain Berbérian, qui fait un usage très généreux de la musique d’Alexandre Desplat. On retrouve le joli thème léger et insouciant de Léa dans le sensuel ‘La plage’ (scène de séduction entre Léa et Jack) où le thème est ici confié aux flûtes et à la trompette sur fond de rythmique bossa/lounge, à l’instar du chaleureux ‘Palmer rêve de Léa’, sans oublier une reprise finale de Mini Moke dans ‘Le Mini Moke est cassé’ qui conclut l’album sur une ultime touche rétro humoristique.

Véritable compositeur touche à tout, Alexandre Desplat nous a déjà prouvé à maintes reprises qu’il avait décidément plus d’un tour dans son sac. Avec ‘L’enquête corse’, le compositeur se prête à l’exercice de style de la caricature des musiques d’agent secret et de lounge music rétro, favorisant au passage son goût pour des orchestrations soignées et toujours très soutenues. La musique de Desplat apporte un charme et une fraîcheur essentielle aux images du film d’Alain Berbérian, même si l’ensemble peut paraître un peu simplet et sans grande prétention. C’est justement ce côté anti prise de tête de la musique de Desplat qui fait tout le charme du score de ‘L’enquête corse’, une musique qui confirme le talent de l’un des meilleurs compositeurs officiant à l’heure actuelle pour le cinéma français (et maintenant américain). A écouter!


---Quentin Billard