1-Minuit 5.51*
2-Lucky Eyes 2.43
3-A Thousand Kisses Deep 6.27**
4-Endorphin Spoon 2.30
5-Verité 6.07***
6-Ouverture Français 1.53
7-Parisien du Nord 3.31+
8-Snake 5 3.12
9-Noir c'est Noir 3.14++
10-Waltz for Anna 1.39
11-Flashback 6.21+++
12-36 Hadjini Street 1.50
13-Je t'aime...moi non plus 4.23#
14-Confession to JC with Love 1.17
15-That's Life 3.55##
16-Redemption Rehearsal 8.38

*Interprété par Cheb Khaled
Boutelia/Khaled
**Interprété par Leonard Cohen
Cohen/Robinson
***Ecrit et interprété par
Rachid Taha
+Interprété par Cheb Mami
et K-Mel
Kheillari/Houairi/Pérez
++Interprété par Johnny Hallyday
Grainger/Hayes/Wadey
+++Interprété par Intense
Duncan/Vispi/Thomas
#Interprété par Serge Gainsbourg
et Jane Birkin
Ecrit par Serge Gainsbourg
##Interprété par Bono
Gordon/Kaye
Produit par Elliot Goldenthal
et Phil Ramone.

Musique  composée par:

Elliot Goldenthal

Editeur:

Island Records CID8130

Score produit par:
Elliot Goldenthal
Supervision montage musique:
Michael Connell
Préparation de la musique:
Brian Byrne, Vic Fraser
Supervision musicale:
Karen Elliott

Artwork (c) 2003 Universal Island Records Ltd. Film Artworks & Logos (c) 2003 Double Down Productions Limited, TNVO S.A.R.L. & Metropolitan Film Productions Limited. All rights reserved.

Note: ***
THE GOOD THIEF
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Elliot Goldenthal
‘The Good Thief’ (L’homme de la Riviera) est le remake U.S. du célèbre ‘Bob le flambeur’ (1955) de Jean-Pierre Melville, réalisé par Neil Jordan. Le réalisateur de ‘Interview with the Vampire’ et ‘The Butcher Boy’ a décidé de rester en France par respect pour l’histoire d’origine, mettant en scène un casting impressionnant réunissant des acteurs de divers horizons tels que Nick Nolte, Marc Lavoine, Tchéky Karyo, Saïd Taghmaoui, Emir Kusturica, Gérard Darmon, Nutsa Kukhianidze, Ralph Fiennes, etc. Bob Montagnet (Nick Nolte) est un flambeur invétéré que la chance semble avoir abandonné et qui s’est réfugié dans la drogue et le jeu. Ancien voleur d’oeuvres d’art, Bob a tout perdu après avoir joué ce qui lui restait d’argent aux courses. Son ami et complice Raoul (Gérard Darmon) lui propose alors de faire un nouveau casse pour se refaire une petite santé. C’est alors que Bob a une idée de génie: il va monter avec l’aide de ses complices un plan audacieux visant à cambrioler deux endroits différents en même temps, l’un étant une diversion, un faux cambriolage qui va servir à cacher le vrai cambriolage qui se trouvera ailleurs. Bob projette alors le pari insensé de simuler un cambriolage au célèbre casino de la Riviera à Monte-Carlo, pendant que ses complices iront voler de luxueux tableaux de maîtres reposant dans le coffre-fort d’une villa située à quelques mètres du casino. Mais Roger (Tchéky Karyo), flic tenace qui épie les moindres faits et gestes de Bob, est bien déterminé à attendre que le flambeur fasse le moindre faux-pas pour pouvoir l’arrêter au bon moment. Selon le plan de Bob, un type devra servir de balance à son insu pour que la simulation du cambriolage au casino de la Riviera soit crédible aux yeux de la police et attire leur attention. Mais Bob ignore alors que Anne (Nutsa Kukhianidze), la fille dont est amoureux Paulo (Saïd Taghmaoui), l’un des complices de Bob, a commencé à parler de ce qu’elle savait à propos du double casse, ce qui n’est évidemment pas tombé dans l’oreille d’un sourd. Remi (Marc Lavoine), l’un des rivaux de Bob, apprend l’information et décide de la rapporter à Roger. Désormais, le plan de Bob est tombé à l’eau, mais il est trop tard. Bob sait que la seule chose qui lui reste à faire, c’est de laisser ses complices se débrouiller pour échapper à la police et de tenter une dernière fois sa chance au casino de la Riviera, en compagnie d’Anne, sa protégée qui, il l’espère, va lui porter chance.

‘The Good Thief’ est un polar à l’ancienne, Neil Jordan rendant hommage à sa façon au classique de Jean-Pierre Melville, avec un casting exceptionnel et un bon scénario. Reste que la mise en scène, assez sobre, est tout à fait quelconque et pas vraiment très personnelle, tandis que le montage possède un défaut particulièrement agaçant qui nuit gravement au film, se résumant en une sorte de très courte et étrange pause de quelques milli-secondes que l’on aperçoit régulièrement dans le film lors de la plupart des transitions majeures entre deux scènes du film. Ces pauses peuvent prétendre concourir à un effet de mise en scène plutôt hypnotisant, une sorte de très bref arrêt sur image qui pourrait servir à intensifier le récit si cela avait été mieux fait. Pour le reste, ‘The Good Thief’ est un énième film de cambrioleur dont on a rapidement fait le tour. Malgré le fait que le film se passe en France, comme pour le film original de 1955, on ne peut s’empêcher de penser ici à l’esthétique d’autres films de cambriolage comme le fameux ‘Ocean’s Eleven’ de Steven Soderberg, ou plus récemment avec le ‘The Score’ de Frank Oz. Les exemples ne manquent pas dans ce type de film (on pourrait aussi citer ‘Les spécialistes’ de Patrice Leconte) et le film de Neil Jordan n’est rien d’autre qu’un condensé de ces précédents films, sans aucun talent particulier, si ce n’est la performance des acteurs comme le toujours aussi excellent Nick Nolte, qui n’a d’ailleurs pas hésité à s’injecter de l’héroïne avant le tournage du film pour pouvoir se mettre dans la peau de son personnage drogué, un acte qui peut paraître totalement insensé mais qui prouve néanmoins que Nick Nolte est décidément un grand acteur à part entière, qui donne toujours le meilleur de lui-même dans chacun de ses rôles. ‘The Good Thief’ ne déroge donc pas à la règle. Pour le reste, le nouveau film de Neil Jordan reste plutôt ordinaire et sans surprise. Un remake tout à fait quelconque, en somme!

Elliot Goldenthal retrouve Neil Jordan après ‘Interview with the Vampire’, ‘Michael Collins’, ‘The Butcher Boy’ et ‘In Dreams’. Pour sa cinquième collaboration avec le réalisateur irlandais, Goldenthal délaisse l’artillerie lourde et nous propose un score un peu spécial, un peu minimaliste et expérimental sans être particulièrement extravagant. Le score s’articule autour d’un thème principal que le compositeur associe très rapidement dans le film à Bob, le protagoniste principal incarné par Nick Nolte dans le film. Ce thème apparaît dans ‘Lucky Eyes’, accompagné par une très jolie formation slow jazzy pour piano, contrebasse, saxophone, harmonica et quelques cordes douces. De par son côté doux et retenu, le thème évoque le caractère solitaire du personnage et sa quête de rédemption, d'où la présence de l'harmonica, que l'on a souvent associé dans l'imaginaire collectif à l'image des cow-boys solitaires du far-west. Dans ‘Endorphin Spoon’, on retrouve le Goldenthal expérimental de ‘The Butcher Boy’ ou ‘In Dreams’ avec toujours la présence du saxophone soliste baignant cette fois-ci dans une atmosphère atonale brumeuse et inquiétante. Les inflexions sonores quasi hypnotiques du saxophone renvoient au combat de Bob durant la scène où il tente de lutter contre sa dépendance à la drogue en se menottant lui même à un lit pendant quelques jours. On remarquera que le thème de Bob est toujours présent, évoqué par un second saxophone qui semble lutter contre le premier sax aux inflexions sonores répétitives et hypnotisantes.

Avec ces deux premiers morceaux, Goldenthal pose le ton de sa partition, qui cohabite dans le film avec de nombreuses chansons, à commencer par le sympathique duo rap ‘Parisien du Nord’ interprété par Cheb Mali et K-Mel, le raï de Cheb Khaled, ‘Minuit’ ou le funky ‘Vérité’ de Rachid Taha, ‘A Thousand Kisses Deep’ de Leonard Cohen, ‘Flashback’ par le groupe Intense, ‘That’s Life’ de Bono, sans oublier quelques tubes de variété française comme ‘Noir c’est noir’ de Johnny Hallyday ou ‘Je t’aime...moi non plus’ du mythique duo Serge Gainsbourg/Jane Birkin, un choix de chanson très éclectique qui complimente à merveille les images du film de Neil Jordan et contribuent à apporter, de par leur variété, une ambiance particulière au film. Quand au reste du score d’Elliot Goldenthal, il se prolonge avec ‘Ouverture français’ où l’on retrouve les couleurs jazzy du début avec pizz de contrebasse, piano, cordes et quelques nappes de synthé, Goldenthal développant ici un thème plus mélancolique qui évoquent le côté plus dramatique de cette histoire de trahison, de manipulation, de rédemption, toujours avec ce côté minimaliste et retenu. Dans ‘Snake 5’, Goldenthal utilise un udu (tambour de la famille des aérophones frappés fabriqué en terre cuite, originaire du Nigeria, et dont la particularité provient de ses sonorités graves et chaleureuses, le musicien frappant l'orifice de l'instrument du peaume de la main pour obtenir ce son si caractéristique) , très utilisé sur fond de synthétiseurs atmosphériques sombres et étranges permettant de faire monter la tension tout au long des préparatifs du hold-up final au casino de la Riviera. ‘Waltz for Anna’ apporte un peu de poésie à travers une valse lente et douce qui évoque la tendresse de Bob pour la jeune Anna qu’il cherche à protéger depuis le début, malgré le caractère ferme de l’adolescente. Un piano, une contrebasse, des cordes et un harmonica suffisent là aussi au compositeur pour évoquer les sentiments des personnages ou les différentes situations du film.

Le déroulement du casse est accompagné par un ’36 Hadjini Street’ plus étrange, avec l'udu de ‘Snake 5’, des synthétiseurs aux sonorités étranges et divers de sons de guitares aux sonorités orientales et modernes. ’36 Hadjini Street’ s’avère posséder un son global inhabituel chez Goldenthal, preuve que le compositeur aime innover lorsqu’il compose pour un film de son fidèle collaborateur de toujours, Neil Jordan. ‘Confession to JC with Love’ fait réintervenir quand à lui le saxophone soliste dans un nouvel environnement atonal à la limite ici du free-jazz façon ‘Naked Lunch’ d’Howard Shore pour finalement aboutir sur le final du film dans ‘Redemption Rehersal’, une grande montée de tension de plus de 8 minutes qui évoque le climax du film au casino de la Riviera, lorsque la police arrive pour arrêter les compères de Bob, tandis que ce dernier joue la carte du bluff en se baladant tranquillement dans une autre partie du casino en compagnie d’Anna, Bob cherchant ainsi sa propre rédemption dans une dernière partie où il jouera sa chance ‘légendaire’. Piano, cordes, harmonica, udu et synthé installent une ambiance mélancolique dramatique qui laisse présager une issue incertaine jusqu’à ce que la musique finisse par s’emballer au bout de quelques minutes, basculant dans un passage soudainement plus violent à la limite de la musique d’action/thriller, percussions, clusters et cordes frénétiques à l’appui pour la scène de l’échec du cambriolage. Goldenthal prolonge ses expérimentations en utilisant rythmes d'udu/électroniques dans un style qui lui est franchement inhabituel. Le suspense se prolonge grâce à l’apport des percussions et des synthétiseurs atmosphériques (on est guère loin par moment du style de ‘Heat’), avant d’aboutir à une partie finale plus paisible sur une dernière tenue de synthétiseur.

Sans être ce qu’Elliot Goldenthal a écrit de mieux pour un film de Neil Jordan, ‘The Good Thief’ s’avère être assez spécial et étonnant de la part du compositeur, qui nous dévoile ici une facette plus intimiste et introspective de son style musical (il s'agit aussi de l'une des partitions les plus méconnues du compositeur). Expérimentant avec ses synthétiseurs, ses traditionnels saxophones limite psychédéliques et ses sonorités jazzy et modernes à la fois, Goldenthal crée une ambiance musicale particulière et personnelle dans le film de Neil Jordan, bien loin de son style symphonique massif et gothique de ‘Interview with a Vampire’. Le compositeur évite aussi le style avant-gardiste/torturé de ‘In Dreams’ pour se concentrer davantage ici sur une toile musicale plus minimaliste et retenue, illustrant la psychologie des différents personnages et des diverses situations du film, le tout agrémenté des quelques chansons citées un peu plus haut. Certes, on ne trouvera rien ici de follement mémorable, mais on pourra néanmoins apprécier la personnalité de cette musique intimiste et inventive, dont l’unique défaut serait peut-être de ne pas laisser un grand souvenir après écoute, surtout dans le film, où le score est constamment envahi par les chansons. A réserver en priorité aux aficionados du compositeur!


---Quentin Billard