1-Mrs. Doubtfire 2.58
2-Divorce 2.56
3-My Name Is Elsa Immelman 2.55
4-Meeting Mrs. Doubtfire 2.14
5-Tea Time With Mrs. Sellner 3.58
6-Dinner Is Served 2.18
7-Daniel and the Kids 2.29
8-Cable Cars 4.56
9-Bridges Restaurant 6.13
10-The Show's Over 3.26
11-The Kids Need You 3.21
12-Figaro*/Papa's Got A
Brand New Bag 3.23**

*Composé par G. Rossini
Interprété par Robin Williams
**Composé et interprété par
James Brown.

Musique  composée par:

Howard Shore

Editeur:

Fox Records 07822-11015-2

Produit par:
Howard Shore
Montage musique:
Ellen Segal

Artwork and pictures (c) 1993 20th Century Fox. All rights reserved.

Note: **
MRS. DOUBTFIRE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Howard Shore
Grand classique de la comédie américaine des années 90, ‘Mrs. Doubtfire’ est de loin l’une des meilleures comédies de Robin Williams, qui parvenait alors à nous faire oublier l’énorme bide de son précédent film, ‘Toys’ de Barry Levinson. Réalisé par Chris Colombus, Mrs. Doubtfire évoque les péripéties de Daniel Hillard (Robin Williams), un acteur excentrique et survolté qui, à la suite d’un divorce, se voit retirer la garde de ses trois enfants qu’il adore par dessus tout. Daniel va tout mettre en oeuvre pour revoir ses enfants. Avec l’aide d’un ami spécialisé dans le maquillage au cinéma, il va se transformer en une vieille gouvernante anglaise nommée Mme Doubtfire et va répondre lui-même à l’annonce de sa propre femme (Sally Field) qui cherche une gouvernante pour s’occuper de ses enfants durant son absence au travail. A son arrivée, Mme Doubtfire est accueillie favorablement et fait une telle bonne impression que la famille Hillard semble l’accepter à l’unanimité. Elle devient alors l’amie et confidente de Miranda qui semble respirer en sa compagnie. Mais Daniel/Mme Doubtfire ne voit pas d’un très bon oeil la présence de Stuart (Pierce Brosnan), le nouveau compagnon de sa femme à qui il va mener la vie dure, irrité par la jalousie. Et c’est ainsi que, jour après jour, Daniel va être obligé de jouer ce drôle de numéro d’acteur afin de profiter à nouveau de la présence de ses enfants et de sa femme. L’intrigue principale, originale, fait néanmoins référence à d’autres comédies du même genre comme ‘Tootsie’ de Sidney Pollack dans lequel un homme – Dustin Hoffman – se déguisait en femme afin d’obtenir un rôle dans un soap-opera. Ici, Robin Williams incarne un père prêt à tout pour revoir ses enfants. Comme souvent chez Chris Colombus, le film est empreint de bons sentiments, mais, loin de se cantonner au sirupeux, le réalisateur apporte un humour véritable à son film grâce à la performance remarquable et inégalée d’un Robin Williams ad libitum, improvisant pendant plus de la moitié du film, à la demande du réalisateur. Mais il faut dire que ce dernier n’a pas eu grand mal à convaincre Williams d’improviser, l’acteur ayant ce goût de l’improvisation par nature. Les scènes d’anthologie ne manquent donc pas, comme celle où Daniel/Doubtfire, recevant la visite inappropriée de l’enquêtrice sociale, est obligé de jouer les deux rôles en même temps, faisant croire qu’il habite avec sa soeur dans son appartement, sans oublier un final d’anthologie dans le restaurant, où Daniel, se retrouvant dans une situation très compliquée (un repas d’affaire avec son futur embaucheur et un repas avec la famille en même temps!), accumule quelques verres d’alcool de trop et finit par multiplier les gaffes et autres bévues hilarantes. Sans le génie et l’énergie enthousiasmante de Robin Williams, ‘Mrs. Doubtfire’ ne serait certainement pas devenu le grand classique de la comédie américaine qu’il est aujourd’hui, même s’il serait injuste pour le film de Chris Colombus de ne se limiter ici qu’aux simples vertus du jeu d’acteur de Williams.

Seule ombre au tableau: la musique d’Howard Shore, curieusement peu inspirée, fait tâche sur les images. Howard Shore, que l’on connaît aujourd’hui pour ses somptueuses partitions de la trilogie des ‘Lord of the Rings’ et pour ses collaborations avec David Cronenberg, a eu sa période musique de comédie au début des années 90. En 1993, lorsqu’il compose la partition originale pour ‘Mrs. Doubtfire’, Shore a déjà écrit des scores comédies tels que ‘Prelude to a Kiss’, ‘She-Devil’ ou bien encore ‘Big’. Hélas, sa capacité à expérimenter et à travailler de nouvelles sonorités seront malheureusement incompatibles avec ses travaux artisanaux appliqués mais sans réel génie. A l’écoute du score de ‘Mrs. Doubtfire’, on se demande même s’il s’agit du même compositeur de chef-d’oeuvres avant-gardistes/expérimentaux tels que ‘The Fly’, ‘Crash’ ou bien encore ‘Naked Lunch’. Shore nous livre ici une composition symphonique dans la lignée de ‘Big’, mais sans numéros jazzy, le score s’axant essentiellement autour d’un style léger/intimiste traversé par quelques passages de mickey-mousing traditionnel. Shore a cherché à retranscrire l’émotion et l’humour du film, sans vraiment apporter la moindre profondeur, le moindre relief à une musique qui, curieusement, semble totalement dénuée d’ambition, d’inspiration. Les morceaux s’enchaînent dans le film sans qu’on les remarque vraiment. Certains associent cela à un gage de qualité, mais quand on est un amoureux de musique de film, doté d’oreilles averties et qu’on parvient quand même difficilement à apprécier la musique dans le film, qui semble d’une platitude désespérante, on se dit qu’il y a forcément un problème avec la musique. Pourtant, à première vue, l’ensemble n’a rien de particulièrement mauvais en soi. Comme souvent chez Chris Colombus (qui a fait appel à divers compositeurs pour ses films et plus particulièrement John Williams), la musique se veut mélodique, enjouée et intime, Shore basant sa partition autour d’un thème principal très quelconque associé à Daniel/Doubtfire. A l’instar du personnage de Robin Williams, la musique possède une certaine fraîcheur, une jovialité toute à l’image du héros du film. ‘Mrs. Doubtfire’, première piste de l’album, introduit cette ambiance fraîche et enjouée à l’aide d’orchestrations légères faites de cordes, de flûtes, de quelques bois et d’un piano, l’aspect mélodique étant privilégié ici au maximum (on découvre ici le thème de Daniel), dans un style comédie qui évoque maints partitions de Marc Shaiman, James Newton Howard ou Randy Edelman. Le thème est repris dans ‘Divorce’, mais sous un angle plus doux et intime, alors que Miranda apprend à Daniel qu’elle souhaite divorcer. Shore utilise toujours le mélange bois/cordes avec un piano et une harpe, des sonorités feutrées et délicates alors que Shore nous donne à entendre son second thème, un motif de 6 notes de flûtes que le compositeur associera dans le film à Mrs. Doubtfire, et, parallèlement, à l’amour de Daniel pour ses enfants.

‘My Name Is Ilsa Immelman’ évoque avec une grande légèreté la scène où Daniel téléphone à Miranda à plusieurs reprises en se faisant passer pour diverses domestiques à la recherche du job. On retrouve le thème principal dans une série de variantes toujours aussi enjouées et légères, les orchestrations faisant intervenir ici quelques cuivres en plus d’une utilisation plus remarquable du célesta et d’un glockenspiel, sans oublier un passage mickey-mousing à base de cordes/vents/glockenspiel et pizzicati de cordes sautillants associés aux facéties de Daniel et à son humour sans limite. ‘My Name Is Ilsa Immelman’ est tout à fait représentatif du score de ‘Mrs. Doubtfire’ avec son côté léger, sautillant et frais. ‘Meeting Mrs. Doubtfire’ ne fait alors que confirmer ce qui a déjà été suggéré précédemment, accompagnant la scène où la famille rencontre Mrs.Doubtfire pour la première fois. On retrouve le motif de 6 notes qui passe d’un instrument à un autre, le tout dans un style toujours très intime et frais. ‘Tea Time With Mrs. Sellner’ est plus typique du côté humoristique/mickey-mousing de la partition, pour la scène hilarante où Daniel reçoit la visite de Mrs. Sellner chez lui, obligé d’enlever son costume puis de le remettre dans la précipitation. A noter l’utilisation des pizzicati de cordes qui suggèrent comme toujours à travers ce style sautillant les facéties de Daniel. On notera au passage l’inclusion d’un petit piano électrique qui apporte une sonorité légère supplémentaire au morceau, dominé par les vents légers, les sonorités cristallines et les pizzicati sautillants (‘Tea Time With Mrs. Sellner’ étant sans aucun doute l’un des meilleurs morceaux du score d’Howard Shore). On retrouve une ambiance similaire dans l’amusant ‘Daniel and the Kids’ qui évoque la complicité qui s’installe très vite entre Mrs. Doubtfire/Daniel et ses enfants, nous permettant au passage de retrouver une nouvelle variante du thème principal. Le score atteint son climax avec ‘Bridges Restaurant’, sorte de variante de ‘Tea Time With Mrs. Sellner’ en beaucoup plus long. Le morceau accompagne la fameuse scène du restaurant vers la fin du film, lorsque Daniel se fait démasquer dans de bien pitoyables conditions. Pizzicati sautillants, variantes légères du thème au piano ou aux bois, tempo accélérant pour suggérer avec humour les embrouilles dans lesquelles se retrouve un Daniel de plus en plus saoul, et ce style mickey-mousing parfaitement adapté à l’esprit ‘musique de cartoon’ traditionnel (chose amusante: au début du film, on voit justement Daniel doubler un cartoon). Plus doux et apaisé, l’émouvant ‘The Show’s Over’ marque la fin de l’aventure de Daniel/Doubtfire, renouant avec le style intime et introverti du début (le morceau se rapproche beaucoup du score de ‘Big’ par moment), avec de nouvelles variantes du thème principal et du motif de Mrs. Doubtfire, variantes que l’on retrouve dans la coda, ‘The Kids Need You’.

Hélas, même si le score de ‘Mrs. Doubtfire’ est bien écrit et sans problème particulier, on ne peut que s’empêcher d’être déçu par la fadeur de cette musique mickey-mousing étonnamment peu inspirée, alors que l’on était en droit d’attendre autre chose de la part d’Howard Shore, qui nous a pourtant habitué à mieux. A la réflexion, Howard Shore n’était peut être pas le compositeur idéal pour ce film. Dommage que Chris Colombus n’ait pas fait plutôt appel à John Williams, qui aurait certainement écrit un score bien plus inventif et inspiré. Le compositeur se contente simplement ici de nous offrir le strict minimum en apportant un peu de fraîcheur et d’humour au film mais sans plus particulier. Sa musique semble stagner continuellement dans le film, sans jamais vraiment réussir à décoller – même la musique durant la scène du restaurant semble plus vivante sur l’album que dans le film. Cette impression de mollesse, de manque d’inspiration flagrant (qui ressent même dans l’écriture globale de la partition, très standard, très tonale, prévisible et sans surprise) fait que le score de ‘Mrs. Doubtfire’ nous laisse complètement sur notre faim et nous incite à nous questionner sur les réelles motivations du compositeur canadien sur ce projet somme toute très alimentaire et totalement dénué d’originalité, d’audacité. Même un score comédie dans la même veine comme ‘Big’ paraissait bien plus inspiré que cette partition académique et passe-partout, qui pourrait fonctionner sur n’importe quelle comédie du même acabit (le score manquant aussi cruellement de personnalité). Vous l’aurez donc compris, c’est cette réunion de défauts qui fait de ‘Mrs. Doubtfire’ une bien triste déception de la part d’un compositeur brillant que l’on a pourtant connu bien plus inspiré. Rassurons-nous en nous disant que ce type de déception est peu fréquent chez Howard Shore, qui continue d’être aujourd’hui l’un des meilleurs compositeurs travaillant à Hollywood!



---Quentin Billard