1-Shade 3.27
2-Wisdom In Pain 3.42
3-Twin Turban Testimony 2.58
4-I Could Have Jumped 2.48
5-The Booze Buzz 5.43
6-Incapable of Choosing 2.24
7-Slippery When Wet 2.27
8-Dancing With A Wet
Handkerchief On Your
Mother's Grave 4.02
9-Dizzy Miss Mizzy 2.09
10-I Regret 2.21
11-Salamander Schmorgesborg 3.14
12-The Parlor of Prestidigitation 2.29
13-The Dean's With
The Professor 2.36
14-Sniffing Play Dough 2.15
15-Yachumflatz 2.49
16-Shades of Grey 3.33

Musique  composée par:

Christopher Young

Editeur:

Intrada Signature Edition ISE1002

Edition limitée 1000 exemplaire
CD Produit par:
Christopher Young, Flavio Motalla

Artwork and pictures (c) 2003 RKO Pictures. All rights reserved.

Note: ***
SHADE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Christopher Young
‘Shade’ (Les maîtres du jeu) s’inscrit dans la continuité des films de poker comme ‘The Cincinnati Kid’ ou bien encore ‘Rounders’. Premier long-métrage du réalisateur Damian Nieman, ‘Shade’ nous plonge dans l’univers très clos des escrocs du poker qui parcourent les clubs de jeu de Los Angeles en quête de gloire et d’argent. Trois associés, Charlie Miller (Gabriel Byrne), Tiffany (Thandie Newton) et le très rusé Vernon (Stuart Townsend) montent ensemble un coup périlleux visant à plumer ‘The Dean’ (Sylvester Stallone), légendaire arnaqueur du poker resté imbattable depuis ses débuts. Chacun possède sa spécialité : Vernon est un génie des cartes solitaire et déterminé, Charlie est le cerveau des opérations et Tiffany manipule ses futures ‘victimes’ pour organiser les combines. Un jour, ils montent un coup avec un certain Larry Jennings (Jamie Foxx), pro du poker mais aussi grande gueule. Au cours d’une partie qui tourne au vinaigre, Larry perd une importante somme d’argent qu’il avait misé impulsivement sur un coup de tête et qui appartenait en réalité à Malini (Patrick Bauchau), un dangereux mafieux de Los Angeles. Les hommes de main du mafieux retrouvent Larry et lui règlent son compte. Quand aux trois autres, Charlie, Tiffany et Vernon, ils sont dans une mauvaise passe alors que le mafieux jure de faire la peau à Charlie s’il ne lui rembourse pas la somme perdue d’ici quelques jours. Leur seule façon de s’en tirer, c’est de plumer The Dean avec le concours de Vernon, qui jouera sans aucun doute la partie la plus difficile et la plus dangereuse de toute sa carrière d’arnaqueur du poker. Le scénario est donc calqué sur ‘The Cincinnati Kid’ de Norman Jewison et ‘Rounders’ de John Dahl. On y retrouve un groupe d’escrocs qui tentent d’organiser le coup ultime, on y retrouve cette même ambiance des clubs de poker enfumés et ses parties effrénées sur fond de musique jazzy. ‘Shade’ récapitule ainsi tous les stéréotypes propres aux films de poker, avec une réalisation totalement impersonnelle – après tout, il s’agit d’un premier film! Damian Nieman, lui-même expert en manipulation des cartes au poker (c’est Damian Nieman en personne qui bat les cartes lors de l’excellent générique de début du film), s’est servi de ses propres expériences et de son impressionnant savoir-faire en la matière pour élaborer son film, soutenu par un casting impressionnant incluant Gabriel Byrne, Melanie Griffith, Thandie Newton, Stuart Townsend, Hal Holbrook et un Sylvester Stallone impeccable dans le rôle de cette star du poker indétrônable, charismatique et diablement rusé, au coeur d’une véritable bataille d’ego sur fond de tapis vert. Evoquant les thèmes du hasard, de la chance et de la manipulation (avec l’inévitable twist final – figure imposée du genre), ‘Shade’ est une série de jeux de dupe sur fond de poker qui, s’il ne restera pas dans les mémoires (le film, qui n’a pas eu une très bonne promo, est sorti en direct-to-video aux USA et a fait un bide, alors qu’il est quand même sorti dans quelques salles de cinéma en France durant l’été 2005, mais pendant une très courte durée), demeure malgré tout un bon divertissement qui ravira les amateurs de poker.

Christopher Young, qui signe la musique de ‘Shade’, a connu quelques déboires sur le premier long-métrage de Damian Nieman. Après une première mouture, les producteurs du film ont décidés de rejeter une partie de la musique originale de Young pour la remplacer par celle de Sascha Dikiciyan et James Johnzen lors de la sortie du film en direct-to-video. Curieusement, la musique qu’avait composé Young à l’origine collait parfaitement au film et il faut croire que les producteurs de la RKO Pictures ne croyaient définitivement pas au film de Damian Nieman et au travail de ses collaborateurs pour agir de la sorte (voilà ce qu’il se passe lorsqu’on a à faire à des producteurs frileux qui ne savent pas ce qu’ils veulent!). Quoiqu’il en soit, le travail fourni par Young sur ‘Shade’ a de quoi réjouir les amateurs d’ambiances jazzy rétro. Le score de Christopher Young s’inscrit dans la continuité de ses précédents travaux jazzy/funky, à commencer par ‘Rounders’, autre film sur le poker qui a probablement influencé la production sur le choix du compositeur sur ‘Shade’. On pense aussi à ‘The Man Who Knew Too Little’, ‘The Big Kahuna’ ou bien encore ‘Norman Jean and Marilyn’. Le générique de début est accompagné par le thème principal introduit dans ‘Shade’, sur fond de batterie funky avec guitare basse, orgue hammond B-3, guitares électriques, claviers fender rhodes, piano Wurlitzer, synthétiseurs, saxophones jazzy et trompettes avec sourdine. On pense inévitablement ici à maints partitions jazzy de Lalo Schifrin ou du Jerry Fielding des années 70, à l’instar du score de ‘Rounders’. Le morceau accompagne avec son rythme funky/groovy les plans où l’on voit les mains battre les cartes durant le générique de début et annonce clairement la couleur par son côté cool et rythmé. ‘Wisdom in Pain’ accompagne le début du film de façon plutôt détendue à l’aide de claviers électriques et d’une petite rythmique discrète. Young se la joue ici minimaliste et relègue sa musique en fond sonore fonctionnel mais néanmoins très agréable à écouter bien que sans grande surprise particulière. Il faut dire que la musique, présente tout au long du film, n’est jamais particulièrement mise en avant, à part lors de certaines scènes de poker plus frénétique.

Un morceau comme ‘Twin Turban Testimony’ nous permet de retrouver le thème principal funky avec ses saxophones et son orgue hammond pour illustrer la mise en route de la combine du trio d’arnaqueurs. A noter l’utilisation de dissonances dans la seconde partie du morceau, qui rappelle là aussi certains passages du score de ‘Rounders’ et qui tend à rappeler au spectateur que les héros jouent un jeu dangereux qui pourrait se retourner contre eux à tout moment. ‘I Could Have Jumped’ nous transporte quand à lui dans un style plus jazzy à l’aide d’une trompette en sourdine soliste sur fond de claviers électriques/basse/orgue/synthé, le tout dans une ambiance toujours très feutrée genre ‘musique d’ambiance de clubs de poker’. ‘The Booze Buzz’ est quand à lui plus dissonant et inquiétant, suggérant cet univers de manipulation et d’arnaqueur sur un ton plus sombre. A noter une utilisation plus originale des instruments vers le milieu du morceau, à l’aide de percussions plus agressives qui font monter la tension, la trompette en sourdine soliste nous offrant au passage quelques beaux moments jazzy. Mais on retombe très vite dans les ambiances feutrées et cool du début comme dans ‘Dancing With a Wet Handkerchief on Your Mother’ (à noter une fois encore l’humour que déploie le compositeur dans le titre farfelu de certains morceaux) qui accompagne une autre séquence de poker du film avec le jeu de la trompette en sourdine soliste jazzy qui continue de s’en donner à coeur joie, sur un rythme groovy plus cool. Le compositeur s’éclate même en nous offrant sur ‘Dizzy Miss Mizzy’ un bon moment de funk ‘seventies’ à l’aide d’un mélange batterie/basse funky/orgue hammond/clavinet et saxophones pour la seconde partie du film. A noter que le titre ‘Dizzy Miss Mizzy’ fait habilement référence à Vic Mizzy, fameux compositeur de musique de film américain des années 60 auteur du célèbre thème de ‘The Addams Family’ (une occasion comme une autre pour le compositeur de rappeler l’univers résolument rétro de sa musique pour ‘Shade’). On pourra aussi apprécier ‘Salamander Schmorgesborg’ dans un style funky similaire agrémenté de dissonances légères qui continuent de faire monter la tension et d’évoquer la détermination des trois protagonistes principaux qui doivent désormais gagner leur prochaine partie s’ils veulent éviter d’avoir à affronter le mafieux Malini. La scène où Vernon rencontre le professeur (Hal Holbrook) avant d’entamer son ultime partie contre The Dean est accompagnée quand à elle par une rythmique légère, un bref rappel du thème principal avec basse, orgue hammond, trompette en sourdine et claviers – les dissonances rappelant là aussi que tout va se jouer sur la partie contre The Dean. ‘Yachumflatz’ accompagne cette partie finale sur un rythme funky sympa mélangé aux couleurs jazzy de l’orgue hammond et de la trompette soliste, le tout aboutissant à un dernier rappel du sympathique thème principal dans ‘Shades of Grey’.

Partition mineure de Christopher Young, ‘Shade’ demeure malgré tout un bel effort de la part d’un compositeur qui s’en donne à coeur joie dans cette partition mélangeant ambiances jazzy et funky avec un enthousiasme toujours similaire, le tout sur une atmosphère irrémédiablement feutrée qui tend à rendre la musique assez accessoire dans le film, bien que très réussie sur un plan purement musical. Si ‘Shade’ n’atteint pas le brio de ‘Rounders’, il n’en demeure pas moins un score de qualité qui aurait largement mérité à être mieux mis en valeur dans le film au lieu d’être injustement charcuté par la production qui, curieusement, a demandé aux compositeurs qui ont pris le relais d’écrire une musique tout à fait similaire (on se demande alors à quoi cela pouvait bien servir de rejeter une partie des compositions originales de Christopher Young!). ‘Shade’ demeure malgré tout un petit score sympathique de la part d’un Christopher Young qui se plaît à sortir de temps à autre de son registre habituel des musiques d’horreur/thriller pour nous offrir une partition jazzy/groovy pour ce type de film. Au passage, on pourra remercier Intrada pour avoir eu la bonne idée d’éditer la musique de ce film en CD, une bonne nouvelle qui devrait logiquement laisser place à de futures éditions prometteuses de scores de Christopher Young!


---Quentin Billard