1-Cleopatra 3.19
2-Egypt Is Yours Only One Day 6.07
3-The Tomb of Kings 6.55
4-Rome Decrees 8.27
5-The Roman Forum 6.47
6-The Eyes of Horus 5.07
7-Temple of The Sun 4.44
8-Prayer To Isis 4.01
9-To Speed You On Your Way 2.32
10-In The Eyes Of The Gods
We Are One 6.55

Musique  composée par:

Trevor Jones

Editeur:

Contemporary Media Recordings
CMR-1991-1

Album produit par:
Trevor Jones
Montage musique:
Simon Rhodes
Coordination:
Trudy White, Victoria Seale,
Peter Bullick

Synthétiseurs programmés par:
Gareth Cousins, CMMP Studios
Préparation de la musique:
Tony Stanton
Coordinateur de la musique
pour CMMP:
Victoria Seale

Artwork and pictures (c) 1999 Hallmark Entertainment. All rights reserved.

Note: ***1/2
CLEOPATRA
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Trevor Jones
L’histoire de la célèbre reine Cléopâtre fut adaptée à de nombreuses reprises au cinéma, incluant les versions de Cecil B. DeMille (1934) avec Claudette Colbert dans le rôle clé, la version produite par la Fox en 1917 et réalisée par J. Gordon Edwards avec Theda Bara dans la peau de la célèbre reine, etc. Mais la version la plus célèbre reste sans aucun doute celle de Joseph L. Mankiewicz (1963) avec une Elizabeth Taylor totalement inoubliable (il s’agit aussi de l’un des films les plus chers de toute l’histoire du cinéma – du moins pour l’époque). Difficile de passer après un film aussi monstrueux et démesuré, qui fait désormais partie des plus grands chef-d’oeuvres du septième art. C’est pourtant ce à quoi s’est risqué le réalisateur anglais Franc Roddam (‘K2’, ‘Moby Dick’, ‘The Bride’, etc.) et les producteurs de chez Hallmark Entertainment dans ce grand téléfilm en deux parties retranscrivant la vie agitée et tragique de la reine Cléopâtre.

Tout commence en l’an 47 avant J.C. L’Egypte est soumise à la tutelle de l’empire Romain par le biais d’une importante dette que le pays, affamé et appauvri, ne peut payer. Cléopâtre (Leonor Varela), jeune reine de 21 ans, a été écartée du trône par la conspiration de son frère et de sa soeur. Julius César (Timothy Dalton) se rend alors personnellement en Egypte pour réclamer son dû, où il fait la connaissance de Cléopâtre. Cette dernière le séduit et les deux individus finissent par tomber amoureux l’un de l’autre. Grâce à cela, Cléopâtre peut passer un marché avec l’empereur romain: épargner son pays et la laisser gouverner l’Egypte dans la paix. De cette union extra conjugale naît alors un enfant que César refuse de reconnaître, alors qu’il est déjà marié à une femme de Rome. Cléopâtre est ensuite accueillie à Rome où elle est considérée comme la putain de César. Excédée, elle décide de révéler à tous l’existence de l’enfant, que l’empereur se doit désormais de reconnaître devant tout le monde. C’est le début d’une grave crise politique qui secoue tout l’empire et provoque la haine et la jalousie de l’héritier de César, Octave (Rupert Graves). Ce dernier ne veut pas trahir son empereur mais apprend l’existence d’un complot visant à assassiner César, auquel il ne s’oppose pas. Une fois César tué, c’est son plus fidèle bras droit, Marc Antoine (Billy Zane), qui se lance dans une croisade effrénée pour venger la mort de son empereur. Pendant ce temps, Octave a pris le pouvoir à Rome. Après une croisade vengeresse victorieuse, Marc Antoine passe un marché avec Octave et devient le nouveau consul auprès de l’Orient et de l’Egypte, ce qui lui permet de se rapprocher de Cléopâtre et de protéger son royaume. Mais Marc Antoine, envoûté par le charme de la reine égyptienne, décide d’annuler ses fiançailles à Rome et de prendre Cléopâtre pour épouse. Octave l’interprète comme une trahison et décide de déclarer la guerre à l’Egypte. Voilà en tout cas une adaptation très réussie de l’histoire de Cléopâtre, mêlant amour, sensualité, manipulation, batailles, trahison et tragédie avec une intensité dramatique sans cesse présente durant les 177 minutes du film. Certes, techniquement, on sent bien que le budget est bien loin d’égaler celui du film de 1963, mais qu’importe, les acteurs sont tous très convaincants (Leonor Varela interprète une Cléopâtre formidable de sensualité et d’émotion) et l’histoire est parfaitement développée, même si une fois encore, on est quand même bien loin ici de la maestria du film de Mankiewicz.

La participation de Trevor Jones à ‘Cleopatra’ n’est guère anodine puisque le compositeur a déjà écrit les musiques d’autres productions Hallmark pour la télévision telles que ‘Merlin’ ou ‘Dinotopia’, qu’il composera deux ans après le téléfilm de Franc Roddam. La partition musicale de‘Cleopatra’ n’est guère éloignée de ce que Trevor Jones a déjà fait sur ‘Merlin’. On y retrouve ce même souffle épique/dramatique et cette même écriture orchestrale typique du compositeur. Le score de ‘Cleopatra’ retranscrit toute la dimension dramatique, romantique et épique du film de Roddam, à commencer par l’inévitable thème principal qui parcourt l’ensemble du film. Le prélude de ‘Cleopatra’ débute sur des sonorités orientales à l’aide de la voix arabisante de la soliste Belinda Skyes, agrémenté de quelques percussions ethniques et d’une chalemie, sorte de hautbois à anche double très utilisé au Moyen-âge et qui est issu de l’Espagne musulmane. L’instrument a été choisi par le compositeur car il était très utilisé à une époque en Egypte. Trevor Jones utilise donc dès le début du film les couleurs si particulières de la chalemie pour nous plonger dans cet univers oriental aux parfums mystérieux et rêveur, associé aux paysages d’Alexandrie et à la grâce sensuelle et envoûtante de la belle Cléopâtre. Le thème principal est ensuite annoncé lors de l’arrivée de César en Egypte au début du film. Le thème de ‘Cleopatra’ s’affirme très clairement dans la lignée des grandes mélodies de Trevor Jones, et plus particulièrement ici ‘The Last of the Mohicans’, qui semble avoir inspiré le thème de ‘Cleopatra’ (on pense aussi aux thèmes de ‘Merlin’ ou de ‘Cliffhanger’). Ce thème ample et majestueux sera repris tout au long du film, associé dans un premier temps à la romance entre Cléopâtre et César puis à la dimension plus tragique de l’histoire. Il évoque aussi le sentiment de grandeur et de détermination de la reine égyptienne. Bref, voilà un thème mémorable typique des grandes mélodies amples de Trevor Jones.

Avec ‘Egypt Is Yours For Only One Day’, Trevor Jones confirme l’orientation arabisante/exotique de sa partition avec la voix féminine éthérée, quelques percussions ethniques légères, des cordes et quelques synthétiseurs, un très beau morceau dans lequel règne une certaine sensualité, alors que Cléopâtre se donne à César pour une nuit vers le début du film. Jones évoque la sensualité de la scène avec une certaine retenue et des sonorités orientales légères et vaporeuses, parfaites pour cette scène d’amour. Les sonorités arabisantes reviennent en toute beauté dans ‘The Eyes of Horus’ avec percussions, vocalises orientales et chalemie, un morceau qui devrait ravir les amateurs d’ambiances musicales arabisantes. A noter quelques belles reprises plus intimes du thème principal dans ‘The Tombs of Kings’ qui continue de souligner les sentiments de César pour la belle reine égyptienne. ‘Rome Decrees’ rompt alors avec l’ambiance intime du début pour asseoir une atmosphère orchestrale plus sombre et massive alors que César retourne à Rome pour régler d’importantes affaires. L’action pointe alors le bout de son nez dans des passages rythmés et agités qui rappellent par moment le style de ‘Massacre/Canoes’ ou ‘Fort Battle’ de ‘The Last of the Mohicans’. A noter que le thème est toujours très présent, mais développé sous différentes variantes (et notamment sous la forme d’un très beau Love Theme pour César/Cléopâtre), un peu comme Jones l’avait déjà fait dans ‘Cliffhanger’ en 1993.

Autre tic du compositeur que l’on retrouve depuis pas mal d’année déjà dans bon nombre de partitions de Trevor Jones : l’utilisation de l’EWI (Electronic Wind Instrument), toujours interprété par l’excellent Philip Todd, grand spécialiste de cet instrument électronico-acoustique moderne. L’EWI possède des couleurs particulières que Trevor Jones utilise systématiquement depuis quelques années déjà dans des scores tels que ‘Desperate Measures’, ‘Merlin’, ‘From Hell’, ‘Dark City’, ‘Loch Ness’, etc. ‘Cleopatra’ n’échappe donc pas à la règle. L’EWI apporte des sonorités particulières et familières dans la musique de Jones, nous rappelant à quel point le compositeur a toujours tenu à retrouver ses tics et ses sonorités habituelles dans la plupart de ses musiques de film. Il réussit en tout cas à créer une ambiance particulière grâce à cet instrument, complété par quelques touches électroniques supplémentaires.

‘The Roman Forum’ évoque de son côté la conspiration contre Cléopâtre et son fils puis César avec une très grande noirceur. La tension devient ici carrément palpable, avec un orchestre plus sombre et massif dominé par des tambours menaçants, des cordes dissonantes et des cuivres plus agressifs (on retrouve ici le Trevor Jones de ‘Dark City’). Les scènes de bataille permettant aussi au compositeur de nous offrir quelques grands morceaux d’action comme ‘Roman Forum’ ou ‘Rome Decrees’. Il est d’ailleurs assez regrettable que l’album n’inclut pas plus de morceaux d’action que cela, alors qu’il y a quelques musiques de bataille intéressantes dans le film mais absente sur le CD. Les musiques de bataille sont accompagnées de variantes assombries du thème principal et dominé par les percussions et les cuivres pour le côté guerrier de ces scènes. Après une reprise poignante du thème dans le dramatique ‘To Speed You On Your Way’ qui annonce clairement un dénouement plus tragique de l’histoire de Cléopâtre et Marc Antoine, ‘In The Eyes of The Gods We Are One’ nous propose l’inévitable conclusion dramatique de l’histoire, Jones reprenant les principaux éléments de son score pour un climax forcément prenant, mélangeant ainsi sonorités orientales, passages atmosphériques sombres et reprises dramatiques et puissantes du thème principal.

‘Cleopatra’ s’affirme donc dans la parfaite continuité des précédentes partitions de Trevor Jones. On pense par moment à ‘Merlin’, parfois à ‘The Last of the Mohicans’ et parfois encore à ‘Dark City’. Une fois encore, Trevor Jones nous fournit une partition symphonique de qualité pour un téléfilm produit par Hallmark, bien que l’ensemble, tout en étant indissociable du style de Trevor Jones, manque toujours d’originalité, de surprise. Jones applique néanmoins toutes les recettes du genre en faisant preuve d’une certaine habileté dans le maniement des touches orientales/arabisantes qui apportent beaucoup à la musique de ‘Cleopatra’. Evidemment, le score vaut surtout par son excellent thème principal mémorable, une autre grande mélodie ample et majestueuse de plus à rajouter dans la filmographie de Trevor Jones. Voilà en tout cas un score qui, sans révolutionner la musique de film hollywoodienne, devrait assurément séduire les fans de Trevor Jones et tout ceux qui s’intéressent aux travaux du compositeur de ‘Excalibur’ et ‘The Dark Crystal’!


---Quentin Billard