1-Entering the Inferno 2.06
2-If I Were Him 1.36
3-Goodbye Master 2.18
4-Who Are You 2.44
5-Let Me Quit 1.32
6-I Dreamt About You 1.23
7-Salute 1.56
8-Mission Abort 4.31
9-I Am a Cop 3.26
10-You Are The Only One 1.06
11-I Want to be a Good Guy 3.30
12-Goodbye Master, Goodbye 1.56
13-The Inferno 1.51

Musique  composée par:

Chan Kwong Wing

Editeur:

Click Music Limited CM001

Album produit par:
Chan Kwong Wing

(c) 2002 Basic Pictures/Media Asia Films Ltd. All rights reserved.

Note: ***
INFERNAL AFFAIRS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Chan Kwong Wing
Premier volet d’une trilogie à succès hongkongaise réalisé par Andrew Lau et Alan Mark, ‘Infernal Affairs’ évoque l’affrontement entre deux taupes, l’un planqué chez les triades chinoises et l’autre chez les policiers. Ming (Andy Lau) est une taupe infiltrée dans la police de Hong Kong par Sam (Eric Tsang), le chef des triades chinoises. Yan (Tony Leung Chiu Wai) est une taupe infiltrée chez les triades pour le compte de la police. Cela fait maintenant depuis quelques temps qu’il ne cesse de répéter à son supérieur l’inspecteur Cheung (Ting Yip Ng) qu’il veut raccrocher, mais la police a encore besoin de lui pour une dernière mission visant à démanteler un trafic de drogue organisé par le mafieux Sam. Les deux taupes jouent donc un rôle dans l’ombre, chacun espionnant le camp de l’autre dans le plus parfait secret, jusqu’au jour où une opération de police permet l’arrestation de Sam, qui a eu le temps de se débarrasser des preuves compromettantes du trafic de drogue avant d’être arrêté. La police comprend alors qu’il y a une taupe dans leur service et les mafieux comprennent qu’il y a aussi une taupe chez eux. La tension monte entre Sam et l’inspecteur Cheung jusqu’à ce le mafieux finisse par abattre l’inspecteur. Désormais, ce n’est plus qu’une question de temps jusqu’à ce que Yan et Ming finissent par se rencontrer et s’affronter.

Avec un scénario brillant inspiré de films tels que ‘Hard Boiled’ de John Woo ou ‘Heat’ de Michael Mann, ‘Infernal Affairs’ marque le début d’une trilogie désormais populaire dans le cinéma hongkongais contemporain, avec ce polar sombre et captivant teinté d’émotion et de suspense, un affrontement passionnant entre deux taupes infiltrés dans deux camps adverses. Si le film est techniquement très réussi, on pourra regretter les quelques facilités de la mise en scène comme par exemple cette utilisation souvent très appuyée et exagérée de la musique à plein volume dans certaines scènes intimes (comme le moment où Yan parle avec sa psychanalyste) ou dans certaines scènes d’action. Que dire aussi de certains effets de montage du début influencé d’Hollywood ou de la scène où la femme de Ming demande à son mari si le personnage du roman qu’elle écrit est bon ou mauvais, questionnant implicitement Ming sur sa vraie nature - la métaphore héros du film/personnage du livre est amenée très facilement et sent un peu le déjà vu. On appréciera néanmoins la façon dont le film montre les deux personnages enfermés dans un univers infernal (comme semble l’indiquer le titre du film), une sorte de spirale infernale comparée dans le film à l’enfer de Dante. Double jeu, manipulation, action et suspense sont les maîtres mots de ce polar somme toute très réussi et preuve que le cinéma hongkongais se porte bien et continue de prospérer, s’affirmant comme un rival idéal au cinéma américain moderne. A ce sujet, ‘Infernal Affairs’ vient de faire l’objet d’un remake U.S. intitulé ‘The Departed’ et réalisé par le grand Martin Scorsese, que du prometteur!

La musique du compositeur chinois Chan Kwong Wing pour ‘Infernal Affairs’ apporte une tension et une émotion particulière à ce polar 100% Hong Kong. Le compositeur attitré du réalisateur Lau Wai Keung signe un score riche et éclectique pour ‘Infernal Affairs’, entre orchestre, synthétiseurs, rythmiques modernes et voix soliste. D’entrée, le score étonne par son éclectisme et sa variété de styles assez frappante. Le générique de début – ‘Entering the Inferno’, débute sur des sonorités électroniques/orchestrales sombres et un thème de cordes assez majestueux, accompagnant les plans du générique de début associés à l’idée de la spirale infernale. Le morceau possède un côté étrangement majestueux que l’on ne retrouvera pas par la suite et que l’on a du mal à associer à l’univers très sombre de ce film (étrange…). A noter l’utilisation des percussions quasi tribales et d’un sample de cornemuse vers la fin du morceau, accentuant une fois de plus le mélange et la juxtaposition de styles et de sonorités dans le score de ‘Infernal Affairs’. Après cette ouverture assez spéciale et pas forcément très en adéquation avec le sujet du film, ‘If I Were Him’ s’avère être plus proche de l’histoire avec son ostinato rythmique obsédant et ses cordes martelées pour accompagner ici la lutte entre flics et criminels. ‘Goodbye Master’ fait intervenir quand à lui une voix soliste éthérée, une élégie poignante pour chant, piano et orchestre lors de la mort du commissaire Cheung vers le milieu du film, un peu d’émotion qui permet à la partition de respirer et d’affirmer une facette plus humaine autant dans le film que sur un plan purement musical. A noter que l’on retrouve une ambiance similaire dans le très beau ‘I Dreamt About You’ associée aux sentiments de Yan pour sa belle psychiatre à qui il rend visite régulièrement dans le film. Encore un changement de style avec ‘Who Are You’ qui possède un côté plus calme mais aussi tendu, avec des rythmiques électroniques/techno très présentes, une guitare et quelques cordes pour une pièce atmosphérique évoquant les deux taupes.

L’action ne tarde pas à se faire entendre dans le film avec un morceau tel que ‘Let Me Quit’ qui surprend par l’utilisation de sa guitare arabisante et de ses percussions orientales du plus bel effet. Le morceau accompagne la scène où Yan exprime au commissaire Cheung son envie de tout arrêter, le morceau accompagnant au passage la tension liée à l’opération de police au début du film. ‘Salute’ intervient quand à lui pour la scène des funérailles de l’inspecteur vers le milieu du film, et se distingue par son utilisation d’une trompette soliste avec choeurs et orchestre. Le morceau fait indéniablement penser ici à certaines musiques western-spaghetti du grand Ennio Morricone, avec une très belle sensation de solennité et de recueillement qui apporte une fois de plus beaucoup d’émotion aux images du film, révélant la partie plus humaine de l’histoire. L’action revient dans ‘Mission Abort’ alors que les flics resserrent les filets sur les hommes de Sam, espérant le coincer lui et ses hommes pour trafic de drogue. Les percussions électroniques sont ici très appuyées, avec un orchestre toujours très présent, dominé principalement par les cuivres et les cordes, et une tension parfaite pour cette scène d’opération policière. Chan Kwong Wing s’inspire ici du style des musiques de film d’action hollywoodiennes modernes, quelque part entre du Graeme Revell pour le côté ‘musique de série-B d’action’ et du Media-Ventures Team pour l’utilisation des percussions électroniques omniprésentes. La rencontre finale entre Yan et Ming est illustrée dans ‘I Am a Cop’ où le compositeur dévoile de façon inattendue une flûte exotique tendance indienne/orientale, Chan Kwong Wing aimant définitivement mélanger dans le film tous les styles avec parfois pas mal d’audace, même si à priori, rien n’indique à ce moment là dans le film une quelconque allusion à la culture orientale. A noter l’utilisation de choeurs dans ‘You Are The Only One’, reprenant la mélodie chantée de ‘I Dreamt About You’ avec beaucoup de poésie et de douceur.

Finalement, le score se conclura sur trois morceaux, ‘I Want to Be a Good Guy’ que l’on entend vers la fin du film, lorsque les deux taupes sont sur le point de se rencontrer enfin. On notera ici l’utilisation d’une rythmique de style rock avec batterie/basse/guitare électrique et d’un ostinato de 4 notes descendantes aux cordes qui souligne par son côté entêtant la détermination des deux personnages. La seconde partie tombe quand à elle dans un style plus électronique et atmosphérique (à noter un énorme couac fâcheux des trompettes vers 3.05!). Finalement, le score se termine sur une reprise de la poignante élégie simple et touchante de ‘Goodbye Master, Goodbye’, toujours portée par la chanteuse soliste, une ultime touche d’émotion pour conclure ce polar en beauté. L’album se termine sur le puissant ‘The Inferno’, pièce pour choeur et orchestre qui n’a finalement pas été retenue pour le film mais qui permet néanmoins de conclure la partition de façon épique. Dommage cependant que l’album délaisse quelques morceaux d’action entendus durant la scène de l’opération de police au début du film, qui auraient permis d’étoffer un peu la sélection des morceaux du CD, sélection qui mise indiscutablement sur la variété des styles à la limite ici du fourre-tout. Autre reproche que l’on pourrait finalement adresser à la musique, un mixage pour une fois généreux voire trop généreux puisque le score a parfois tendance à surcharger inutilement les images, alors qu’à certains moments, la musique aurait du se faire plus discrète, comme c’est le cas par exemple pour les passages de style plus romantique durant la scène chez la jolie psychiatre de Yan. La musique est à ce moment là exagérément romantique alors que la scène reste pourtant simple et sans grand artifice. Il s’agit bel et bien là d’un exemple flagrant de musique exagérément trop appuyée par rapport aux images, comme durant la scène de l’opération de police où les morceaux d’action sont souvent assez intenses, renforçant de façon démesurée le rythme de la scène, mais sans grande subtilité. Visiblement, les concepteurs du film et de la musique ne devaient pas connaître les mots ‘nuance’ et ‘subtilité’. Dommage!

Malgré ces quelques fautes de goût et un côté irrémédiablement fourre-tout qui peut laisser perplexe à la première écoute, la musique de Chan Kwong Wing pour ‘Infernal Affairs’ a néanmoins de quoi ravir les amateurs de musiques de polar made in Hong Kong. Entre action, tension et émotion, le score de ‘Infernal Affairs’ traduit bien à l’écran la tension de le double affrontement police/bandits et Yan/Ming avec une facette humaine et plus dramatique complètement assumée dans la musique. Une fois encore, le seul reproche que l’on pourrait faire ici, c’est cette certaine tendance à l’exagération dans l’association image/musique, un fait assez rare au cinéma mais qui existe néanmoins. Reste que le score de ‘Infernal Affairs’ s’inscrit néanmoins avec panache dans une trilogie riche et intéressante, menée par un Chan Kwong Wing inspiré bien qu’un peu trop brouillon dans sa manière de construire sa musique.


---Quentin Billard