1-The World That Only
Lovers See (Love Theme
from The Chairman) 2.25*
2-Main Title 2.23
3-Good-bye for Now 1.45
4-A Late Visitor 2.44
5-The Tour 2.37
6-Soong Chu 2.17
7-The Red Guard 3.15
8-Hathaway's Farewell 2.45
9-Escape 3.02
10-Fire Fight 3.20
11-The Fence 1.40
12-End Title 3.13

*Piano solo de
Jerry Goldsmith.

Musique  composée par:

Jerry Goldsmith

Editeur:

Prometheus Records PCD 158

Album produit par:
Luc Van de Ven

(c) 1969 20th Century Fox Film Corp. All rights reserved.

Note: ***1/2
THE CHAIRMAN
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Jerry Goldsmith
John Hathaway (Gregory Peck) est un éminent professeur d’Université spécialiste des enzymes biologiques. Un jour, il se voit confier une importante mission par les services secrets américains : aller en Chine afin de récupérer la formule d’un nouvel enzyme révolutionnaire qui aurait la capacité de résister au plus grand froid et de permettre de développer l’agriculture dans n’importe quelle région du monde. Seul problème, la Chine est soumise à cette époque à la révolution culturelle communiste de Mao Tse-Tung et ne voit pas d’un très bon oeil l’arrivée d’un américain dans leur pays. Hathaway doit donc réussir à s’emparer de la précieuse enzyme pour la ramener ensuite à bon port. Pour se faire, on l’équipe d’un transmetteur miniature implanté dans son crâne. Ce que le professeur ne sait pas, c’est que le dit transmetteur contient aussi un explosif que les services secrets américains pourraient activer à tout instant si jamais la mission venait à échouer. ‘The Chairman’ (L’homme le plus dangereux du monde) est donc un thriller d’espionnage hollywoodien typique de l’époque. Nous sommes à ce moment là en 1969, en pleine période de la guerre froide. Le réalisateur J. Lee Thompson nous livre donc un film qui tombe à point nommé, révélant un portrait peu flatteur mais assez crédible de la Chine communiste de Mao Tse-Tung, même si le film semble prendre quelques licences par rapport à la réalité historique de l’époque (les chinois parlent tous curieusement un parfait anglais!). Le suspense atteint son paroxysme dans la dernière demi heure du film, et ce même si on est loin ici du brio d’un thriller d’espionnage à la Alfred Hitchcock, on demeure captivé de bout en bout par cette intrigue solide et très soignée. A noter ici l’excellente performance de Gregory Peck, acteur fétiche de J. Lee Thompson et qui tournera dans pas moins de 4 films du même réalisateur.

Jerry Goldsmith se voit offrir l’occasion avec ‘The Chairman’ d’écrire une musique faisant référence à la culture musicale asiatique, un élément qu’il avait déjà parfaitement mis en valeur dans l’inoubliable ‘The Sand Pebbles’ en 1966. Goldsmith reprend donc les éléments asiatiques de ‘The Sand Pebbles’ pour une nouvelle partition centrée essentiellement autour du suspense et de l’action. Pour se faire, le compositeur nous offre deux thèmes principaux majeurs. Le premier, est un thème aux consonances asiatiques/chinoises introduit dès l’excellent ‘Main Title’ qui s’avère être le premier morceau incontournable de la partition. Reposant sur une instrumentation incluant flûte exotique, cithare, temple blocks, percussions asiatiques et orchestre symphonique, le thème principal associé à la Chine est développée sous la forme d’une spectaculaire et imposante marche militaire puissante révélant la grandeur d’une nation soumise à une importante révolution culturelle à l’époque. A noter que le compositeur utilise ici les harmonies et les stéréotypes du pentatonisme asiatique pour construire son thème principal. Le second thème de la partition est entendu en ouverture de l’album publié par Prometheus (mais en réalité bien plus loin dans le film) : il s’agit d’un traditionnel ‘Love Theme’ associé à la romance entre John Hathaway et Kay Hanna (Anne Heywood). Goldsmith nous propose un arrangement spécial du ‘Love Theme’ pour l’album (un peu comme il le fera plus tard dans ‘Coma’ ou ‘Logan’s Run’), confié à un piano sur fond d’orchestrations très étoffées. Ce thème romantique particulièrement riche et savoureux digne des grands thèmes romantiques du Goldsmith des années 60 (citons celui, tout aussi fameux, de ‘The Sand Pebbles’) possède un charme rétro évoquant par moment le Golden Age hollywoodien traditionnel. Mais son côté trop appuyé et intense ne pouvait pas coller à l’ambiance sombre du film de J. Lee Thompson, ce qui explique probablement que le compositeur ait décidé de lui offrir une seconde jeunesse sur l’album de la musique du film.

Le thème romantique est repris aux cordes avec une grande douceur dans ‘Goodbye For Now’, lorsque Hathaway dit adieu à sa fiancée avant de partir en mission. A noter que l’on trouve déjà quelques touches asiatiques dans ce ‘Love Theme’, qui annonce à l’avance les péripéties du professeur lors de son périple en Chine. Idem pour ‘A Late Visitor’ qui reprend le thème romantique dans une nouvelle version plus feutrée, avant de déboucher sur une partie à suspense plus sombre et inquiétante. On entre alors dans la seconde partie tendance ‘thriller’ de la musique de ‘The Chairman’. Goldsmith développe des orchestrations comme toujours très inventives, utilisant toutes les ressources de l’orchestre, que ce soit les notes graves martelées au piano, la harpe, les bois dissonants, les percussions asiatiques, etc. ‘The Tour’ dévoile la partie plus sombre et asiatique de la partition avec des élans rythmiques saisissants et des sonorités exotiques particulièrement savoureuses. On reste néanmoins frappé ici par la richesse des harmonies et de l’instrumentation, nous rappelant à quel point Jerry Goldsmith était plus que jamais au sommet de son art dès la fin des années 60. La tension demeure dans ‘Soong Chu’ avec ses effets de dialogue entre les différents instruments, que ce soit les tremolos de cordes, la harpe, les flûtes ascendantes aux sonorités asiatiques, le hautbois ou les quelques notes de cithare chinoise. La musique apporte tout au long du film une certaine tension sous-jacente et omniprésente, comme pour rappeler le danger qui pèse constamment sur Hathaway tout au long de sa mission.

L’action débouche enfin sur le frénétique ‘The Red Guard’, qui nous propose un excellent contrepoint de qualité entre cordes aigues et graves. La tension reste largement entretenue par les différents effets orchestraux menaçants qu’utilise ici Goldsmith pour renforcer le danger de cette poursuite effrénée entre Hathaway et les troupes rouges vers la fin du film (à noter que le caractère asiatique du morceau annonce très clairement les partitions de ‘Tora ! Tora ! Tora !’ et ‘The Challenge’). Le compositeur entretient aussi parfaitement le suspense durant la dernière partie de ‘The Red Guard’, avec une utilisation très inventive de ces instruments à la fois asiatiques et occidentaux. La poursuite se prolonge avec l’impressionnant ‘Escape’ où les rythmes martiaux du ‘Main Title’ sont repris sur un ton plus urgent et menaçant. L’écriture orchestrale du morceau s’avère être ici incroyablement maîtrisée, Goldsmith créant une fluidité saisissante et quasi fantaisiste entre les différents pupitres instrumentaux, opposant majoritairement deux blocs au sein de l’orchestre ici : les percussions d’une part (xylophone, temple blocks, piano, percussions métalliques, caisse claire) et les cordes/bois/cuivres. Enfin, la dernière partie de la poursuite continue dans ‘Fire Fight’ pour la séquence de la fusillade. L’orchestre entame alors une sorte de danse virtuose saisissante avec des piccolos aigus, des percussions endiablées et un motif d’action déjà présent dans ‘Escape’. La musique capte à merveille toute l’intensité de cette poursuite particulièrement agitée, ‘Fire Fight’ demeurant incontestablement le morceau d’action ultime de la partition de ‘The Chairman’, étonnant par sa modernité d’écriture extrêmement complexe assez typique du Jerry Goldsmith de la fin des années 60. Finalement, la poursuite touche à sa fin avec le frénétique ‘The Fence’, lorsque Hathaway tente de rejoindre la frontière russe en passant sous les barbelés à haute tension. Le film se conclut alors avec une ultime reprise du ‘Love Theme’ dans le ‘End Title’, idéal pour conclure la partition sur une note plus optimiste et paisible.

‘The Chairman’ démontre une fois encore toute l’étendue des talents de Jerry Goldsmith, qui, à la fin des années 60, a déjà triomphé avec quelques partitions monumentales telles que ‘Freud’, ‘The Blue Max’, ‘Papillon’ ou bien encore ‘Planet of the Apes’. Le film de J. Lee Thompson a finalement permis au maestro de faire référence à la musique asiatique mélangée à son goût traditionnel pour les orchestrations inventives et complexes. Grâce à la récente réédition de l’album par Prometheus, les auditeurs peuvent enfin redécouvrir cette excellente partition qui, bien que très incomplète sur le CD (à peine une demi heure alors que le film contient bien plus de musique), n’en demeure pas moins très riche et constitue une écoute solide et durable. La musique apporte donc suspense, tension et action au film de J. Lee Thompson sans négliger pour autant la partie plus romantique, pourtant assez mineur dans le film. Voilà en tout cas une partition solide typique du Jerry Goldsmith de la fin des années 60, à découvrir sans hésiter!



---Quentin Billard