1-Redemption 3.25
2-Gunfight Montage 1.41
3-Couldn't Tell Us Apart 1.17
4-John Herod 1.22
5-Ellen's First Round 1.10
6-Lady's The Winner 0.47
7-Dinner Tonight 2.11
8-Cort's Story 1.02
9-Ellen vs. Dred 1.10
10-Kid vs. Herod 4.17
11-I Don't Wanna Die 2.00
12-The Big Day 2.27
13-Ellen Returns 3.54
14-The Law's Come Back
To Town 0.49
15-The Quick and the Dead
(End Credits) 3.30

Musique  composée par:

Alan Silvestri

Editeur:

Varèse Sarabande
VSD-5595

Album produit par
Alan Silvestri
Producteur exécutif pour l'édition sur Varèse Sarabande:
Robert Townson
Montage de la musique:
Ken Karman

Artwork and pictures (c) 1995 Columbia/TriStar Films. All rights reserved.

Note: ***1/2
THE QUICK AND THE DEAD
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Alan Silvestri
Réalisateur éclectique qui s'est imposé en l'espace d'une dizaine d'années comme un cinéaste touche-à-tout virtuose de la caméra et de la mise en scène, Sam Raimi s'attaque avec 'The Quick and The Dead' (Mort ou vif) au genre du western, dont il nous propose ici une relecture intéressante et plus personnelle. Chaque année, dans la petite ville de Redemption au fond de l'ouest sauvage, le tyrannique John Herod (Gene Hackman), qui gouverne la ville d'une main de fer, organise un tournoi de duels avec à la clé une somme coquette de 123000 dollars. Un jour, une belle et farouche étrangère nommée Ellen (Sharon Stone) débarque en ville et participe malgré elle à la compétition. Personne ne connaît cette mystérieuse femme cow-boy rapide de la gâchette, taciturne et vive d'esprit. Tout le monde ignore d'ailleurs ce qu'elle est venue faire à Redemption. Lorsqu'elle aperçoit enfin Herod pour la première fois, elle reconnaît celui qui, 20 ans plus tôt, tua son père en plein exercice de ses fonctions de shérif (Gary Sinise). Décidée à venger sa mort, Ellen prépare lentement mais sûrement sa vengeance. Hélas, Herod est bien entouré et semble impossible à atteindre. Pendant ce temps, la compétition se déroule comme prévu, et alors que la poudre parle et que les corps tombent les uns après les autres, Ellen envisage sérieusement de tuer le meurtrier de son père, mais en vain. Au même moment débarque en ville Cort (Russell Crowe), ancien membre de la bande à Herod devenu aujourd'hui pasteur et adepte de la non-violence et que l'impitoyable tyran a violemment obligé à participer à la compétition, et ce malgré son obstination à ne plus toucher une seule arme à feu. Lorsqu'Ellen s'aperçoit qu'elle n'est finalement pas assez forte, elle décide de quitter la ville. Puis, convaincue qu'elle fait fausse route, elle revient une dernière à Redemption pour participer au duel comme prévu et préparer son inexorable vengeance.

'The Quick & The Dead' nous propose donc une habile relecture des westerns spaghettis à l'italienne, Sam Raimi s'étant inspiré ici du style des westerns de Sergio Leone modernisé et remit au goût du jour. A travers cette intrigue d'une héroïne solitaire qui parcourt l'ouest sauvage pour venger la mort de son père, Sam Raimi nous renvoie astucieusement au 'C'era una volta il West' (Il était une fois dans l'ouest) de Sergio Leone, dans lequel on trouvait déjà une intrigue similaire à travers le personnage de Charles Bronson. Raimi s'inspire aussi du style et de l'esthétique des westerns façon Clint Eastwood, 'The Quick & The Dead' ressemblant par moment à 'Unforgiven' (qui mettait déjà en scène Gene Hackman dans le rôle d'un méchant tout à fait similaire à son personnage dans 'The Quick & The Dead'). Mais l'originalité du film réside ici dans la présence d'une femme en tant qu'héroïne principale. Le genre du western a toujours été plus ou moins machiste et sexiste, les femmes ayant souvent été reléguées au plan des demoiselles en détresse ou des sempiternelles prostituées de saloon. A contrario, Sharon Stone s'impose radicalement ici dans le rôle de cette femme cow-boy en quête de vengeance (un an auparavant, Jonathan Kaplan s'était essayé au genre du western féminin avec 'Bad Girls'). L'actrice dégage une beauté saisissante à l'écran, une beauté qui contraste brillamment avec la sauvagerie du duel et la violence (très contenue) du film - un peu de poésie dans un monde de brute en somme! Pourtant, cette héroïne est loin d'être une jolie femme au grand coeur. Ellen est une femme blessée, traumatisée par la mort de son père qu'elle ne peut oublier. Toutes ses pensées convergent dorénavant vers un seul et même objectif: tuer John Herod à tout prix. Ce dernier est campé par un Gene Hackman magistral une fois de plus, parfait dans la peau de ce tyran sadique et sans scrupules qui se retrouve confronté au cours du duel à son propre fils, le kid, interprété par un jeune Leonardo DiCaprio qui, en 1995, n'avait pas encore été révélé au public par le succès planétaire du 'Titanic' de James Cameron (il n'était âgé que de 21 ans au moment où il tourna dans le film de Sam Raimi). Si le film se concentre essentiellement sur une succession de duels magistralement mis en scène (on pourra d'ailleurs apprécier le jeu sur les zooms rapides, les angles de caméra plus resserrés sur les visages des duellistes, l'aisance des mouvements de caméra, les panoramiques, etc.), 'The Quick & The Dead' vaut aussi par le portrait des différents protagonistes que nous livre le réalisateur tout au long du film. Chaque personnage semble suivre un but, chaque personnage possède un passé sombre qui pèse sur sa conscience et qui finit par le rattraper. Ajoutons à cela un casting de qualité (Sharon Stone, Gene Hackman, Russell Crowe, Leonardo DiCaprio, Kevin Conway, Keith David, Lance Henriksen, Gary Sinise, etc.), et l'on obtient 'The Quick & The Dead', une relecture moderne et intéressante du genre du western et une bonne surprise de la part de Sam Raimi, qui, au milieu des années 90, manifestait déjà son envie de se tourner vers d'autres horizons cinématographiques.

Avec 'The Quick & The Dead', Alan Silvestri a put travailler de nouveau sur une musique de western après un premier essai concluant sur 'Young Guns II' de Geoff Murphy. Si 'Young Guns II' montrait une volonté évidente de moderniser l'univers musical des westerns, 'The Quick & The Dead' s'avère être plus traditionnel et plus conventionnel d'esprit, une sorte de retour au source du genre (à l'instar du film lui-même). Silvestri utilise pour les besoins du film l'orchestre symphonique traditionnel avec quelques guitares et, de temps à autre, un harmonica qui se fait très discret. La partition s'articule autour de deux thèmes majeurs. Le premier, exposé dès le début du film dans 'Redemption', est accompagné par des guitares et un orchestre, présenté ici par un sifflet à la Ennio Morricone et agrémenté de quelques coups de fouets. Evidemment, l'ombre du maestro italien plane ici sur ce thème, bien que ce dernier soit finalement plus proche de certains passages entendus dans 'Young Guns II' que des partitions western de Morricone, car, malgré l'influence incontournable du maestro italien dans le domaine des musiques de western spaghetti, Alan Silvestri reste Alan Silvestri et nous offre une vision musicale plus personnelle du western de Sam Raimi. Ce thème est ici attribué à Lady Ellen, évoquant son inexorable vengeance accentuée par le caractère solitaire et majestueux du thème. Sa reprise par une trompette de caractère 'musique de mariachi' dans 'The Quick & The Dead (End Credits)' résume d'ailleurs à merveille tout ce que cet excellent thème peut représenter à l'écran: la solitude d'Ellen, sa souffrance, sa détermination, son obsession de vengeance, etc. Le second thème, plus sombre, est attribué à John Herod et apparaît lors de la quatrième piste de l'album. Le motif se distingue par son côté plus menaçant, suivi d'un second motif sur un balancement de deux notes de piano/flûtes particulièrement mystérieux et qui n'est pas sans rappeler certains passages mystérieux de 'Predator'. Le motif est ici associé à la crainte que suscite Herod auprès des habitants de Redemption, ce qui explique certainement la ressemblance avec certains motifs de 'Predator', dans lequel on retrouvait cette même ambiance d'inquiétude calme mais profonde. On appréciera d'ailleurs la façon dont Silvestri s'amuse à juxtaposer le thème de guitare mélancolique d'Ellen au motif sombre d'Herod dans 'Dinner Tonight', lorsque la lady vient dîner chez le tyran et se prépare à le tuer. Le compositeur suggère habilement ici la tension de la scène et le face à face ambigu et pesant entre les deux personnages.

Les duels sont représentés ici à travers l'excellent 'Gunfight Montage', véritable crescendo de tension suggérée par un inexorable ostinato rythmique de cordes hérité de celui du 'Mars' des 'Planètes' de Gustav Holst (une influence des temp-tracks du film?). Silvestri greffe à cet ostinato un motif de vents/cuivres sombres qui ne cesse de s'amplifier tout au long de la séquence montage des duels. Le compositeur évoque les différentes confrontations sur le ton de l'inexorabilité, justifiant à merveille ce grand crescendo de tension au son d'un ostinato symbolisant la violence des duels. On appréciera alors la façon dont Silvestri alterne continuellement tout au long du film entre passages mélancoliques et intimistes comme 'Couldn't Tell Us Apart' et la reprise du thème d'Ellen par une guitare solitaire, ou les moments plus sombres comme 'Ellen's First Round' lorsque l'héroïne passe avec succès son premier duel. Les timbales et le piano suggère ici une certaine appréhension, tandis que résonne au même moment le thème d'Ellen et sa fidèle guitare solitaire, Silvestri libérant la tension dans le bref mais entraînant 'Lady's The Winner'. On pourra apprécier l'apport d'une phrase de basson plutôt amère et mélancolique dans l'intimiste 'Cort's Story' lorsque Cort raconte son histoire à Ellen au sujet de son passé dans la bande d'Herod. Silvestri reprend ce thème de basson mélancolique que l'on pouvait déjà entendre à la fin de 'Redemption'.

On sent néanmoins une nette progression de la musique tout au long du film. Ainsi, plus l'histoire avance et plus la musique se veut sombre, tourmentée, mélancolique et agressive. L'exemple le plus flagrant reste sans aucun doute 'Ellen vs. Dred' illustrant la scène où Ellen abat Dred sous l'effet de la rage, une rage motivée par sa propre haine envers Herod, mais qu'elle ne peut pas encore exprimer. Le morceau nous permet ici de retrouver le style action plus percussif typique d'Alan Silvestri, évoquant ici avec brio la fureur d'Ellen. La musique prend tout son sens dans le film lorsqu'elle évoque les sentiments ou la psychologie de l'héroïne du film, ce qui explique la montée de tension de la musique tout au long de l'histoire. L'affrontement entre Herod et le kid ('Kid vs. Herod') nous permet de retrouver une nouvelle et très sombre variante du thème d'Herod, tandis que le compositeur suggère ici une tension permanente évoquant l'appréhension des deux duellistes. Silvestri se fait même plaisir en nous offrant une nouvelle et très réussie variante du thème principal exposé par la trompette 'mariachi' avec cordes et guitares, et qui accompagne pour l'occasion les préparatifs des duels. La mort du kid est d'ailleurs suggérée de manière tendre et mélancolique dans le très beau 'I Don't Wanna Die' et ses guitares en tierces parallèles d'une infime douceur (la musique affirme ici une certaine pudeur pour la scène de la mort du jeune homme, évoquant en même temps la mort de son 'innocence').

Les préparatifs du duel final sont illustrés dans le sombre 'The Big Day' où Silvestri installe un certain suspense à travers une série de variantes du sombre thème d'Herod. Le compositeur nous fait clairement ressentir ici l'inexorabilité du duel très attendu entre Herod et Cort, le fait qu'il n'est désormais plus possible de faire marche arrière. C'est avec 'Ellen Returns' que Silvestri suggère le retour d'Ellen avec une nouvelle variante du thème de la guitare solitaire et un bref morceau d'action dominé par les percussions, les cordes et les cuivres chers au compositeur, lorsqu'Ellen fait sauter les bâtiments et se débarrasse des gardes d'Herod, avec l'aide de Cort. Le duel final se conclut même de manière très sombre avec un bref cluster de cordes dissonantes, avant que 'The Law's Come Back To Town' ramène le calme avec une dernière reprise du thème de guitare solitaire avant l'excellent 'End Credits' qui résume à merveille tout l'esprit de la composition d'Alan Silvestri pour le western de Sam Raimi.

Vous l'aurez donc compris, 'The Quick & The Dead' est une partition de qualité de la part d'Alan Silvestri qui, pour sa toute première collaboration à un film de Sam Raimi, marque un point à défaut de signer là un grand chef-d'oeuvre. Si le style du compositeur transparaît à merveille à travers les orchestrations, les thèmes ou les harmonies chères à Silvestri, la partition de 'The Quick & The Dead' manque un peu d'audace, d'originalité, de fantaisie. On est loin ici des expérimentations 'sixties' d'Ennio Morricone sur ses anciennes partitions western pour des films de Sergio Leone. Evidemment, l'époque et le contexte ne sont plus les mêmes aujourd'hui, d'autant que Sam Raimi souhaitait une approche musicale plus orchestrale et conventionnelle, ancrée dans son époque. Néanmoins, malgré le manque d'originalité flagrant de l'entreprise, Alan Silvestri marque un point en élaborant une ambiance à la fois mélancolique, intime, rythmée, sombre et tendue, toute à l'image du film. Silvestri évoque les différents sentiments des personnages principaux et renforce les duels du film et les affrontements entre les différents personnages (affrontements à la fois physiques et psychologiques). Avec son excellent thème principal mémorable, la musique de 'The Quick & The Dead' a de quoi ravir les fans du compositeur. Quand aux autres, ils devraient s'attarder quelques instants sur cette solide partition orchestrale qui, à défaut d'être d'une grande originalité, a au moins le mérite de nous faire entendre le compositeur sur un genre assez inhabituel dans sa filmographie: la musique de western!


---Quentin Billard