1-One More Day 3.15*
2-Dublin 1996 2.49
3-Driving 1.37
4-Preparations 1.49
5-The Killing 5.07
6-Research 1.03
7-Traynor Lies 2.08
8-The Beating 4.24
9-Conversations 1.53
10-First Warning 1.13
11-Bad News 5.58**
12-Second Warning 2.25
13-Deceit 3.32
14-Never Show Your Fear 1.22
15-The Funeral 2.24***

*Interprété par Sinnead O'Connor
Composé par Harry Gregson-Williams,
Hugh Marsh, Patrick Cassidy
et Trevor Horn
Produit par Trevor Horn
**Interprété par Brian O'Donnell
Ecrit par Harry Gregson-Williams
D'après l'air de 'Fields of Athenry'
Composé par Pete St. John
***Interprété par Sinnead O'Connor
Ecrit par Harry Gregson-Williams,
Hugh Marsh, Patrick Cassidy
et Trevor Horn
Produit par Trevor Horn.

Musique  composée par:

Harry Gregson-Williams

Editeur:

Hollywood Records
HR-162398

Produit par:
Harry Gregson-Williams,
Trevor Horn

Producteur exécutif de la musique:
Jerry Bruckheimer

Artwork and pictures (c) 2003 Touchstone Pictures. All rights reserved.

Note: ****
VERONICA GUERIN
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Harry Gregson-Williams
Réalisé par Joel Schumacher, ‘Veronica Guerin’ raconte l’histoire vraie de la journaliste irlandaise Veronica Guerin, qui, de 1994 à 1996, avait enquêté sur un important trafic de drogue qui sévissait en toute impunité à l’intérieur même de Dublin. Menacée de mort à plusieurs reprises, la journaliste sera finalement assassinée en juin 1996, alors que ses nombreux articles chocs l’avaient rendus extrêmement célèbre dans son pays et que les dits articles avaient réussis à faire réagir la population. Le gouvernement vota par la suite plusieurs lois pour relancer le combat contre la drogue et permit d’arrêter d’importants membres du réseau de trafiquants de drogue à Dublin. Cate Blanchett campe un personnage aussi fort que vigoureux, dans une histoire poignante et dure qui décrit avec un réalisme étonnant les ravages de la drogue dans des quartiers pauvres et le laxisme du gouvernement irlandais de l’époque. Il faut quand même signaler que ‘Veronica Guerin’ est à la base une production Jerry Bruckheimer, et qu’au final, on est bien loin du style des pétaradants ‘Bad Boys’, ‘Armageddon’ et autre grosse production calibrée. Bruckheimer voulait prouver avec ‘Veronica Guerin’ qu’il pouvait aussi s’intéresser à des histoires plus humaines, simples et intimes, et il nous le prouve fièrement avec le film de Schumacher. Ce dernier renoue quand à lui avec un style plus dramatique/revendicatif et social que l’on connaissait déjà depuis ‘Falling Down’ (Chute Libre) ou ‘A Time To Kill’ (Le Droit de Tuer). Seule ombre au tableau: quelques effets de mise en scène à la limite du clip MTV qui restent inadéquats avec un sujet pareil, mais ces effets sont fort heureusement rares et peu appuyés. Joel Schumacher expose les ravages de la drogue de façon très crue durant toute la première moitié du film - une production Bruckheimer qui montre des gamins de 10 à 14 ans en train de se piquer avec de la cocaïne, ça ne se voit pas souvent, surtout à une époque où l’on édulcore de plus en plus le cinéma hollywoodien grand public! Piquer là où ça fait mal pour faire mieux réagir, tel semble avoir été le mot d’ordre de la production sur ‘Veronica Guerin’, Schumacher accouchant d’un drame dur, révoltant et poignant, qui permet au réalisateur de remonter la pente après une série de navets et autres productions de triste mémoire!

Harry Gregson-Williams a été choisi pour écrire la musique de ‘Veronica Guerin’. Rappelons que Gregson-Williams fait partie de l’écurie Media-Ventures, la boîte à Hans Zimmer qui collabore avec Bruckheimer depuis une décennie déjà. A noter que ‘Veronica Guerin’ marque aussi les retrouvailles entre Joel Schumacher et Harry Gregson-Williams après ‘Phone Booth’ (2002) réalisé un au auparavant. Le score de ‘Veronica Guerin’ traduit parfaitement dans le film toute la dimension dramatique et humaine de l’histoire. Pour se faire, HGW a utilisé l’orchestre traditionnel agrémenté des sempiternelles touches électroniques chères au compositeur ainsi que de quelques instruments aux sonorités irlandaises/celtiques. ‘Dublin 1996’ introduit le film avec des cordes graves accompagnées par le thème principal joué par un violon électrique, interprété par le soliste habituel de HGW, Hugh Marsh. L’utilisation de l’électronique renforce ici la tension dramatique du morceau. Le thème principal reste particulièrement mélancolique et amer, retranscrivant à la fois le combat de Veronica Guerin qui lutte pour une bonne cause à travers son enquête et sa détermination aveugle qui la conduira à sa mort. A contrario, ‘Driving’ se veut nettement plus optimiste, pour une scène où Veronica poursuit son enquête et traverse la ville à bord de sa voiture. Le morceau est ici confié au violon de Hugh Marsh qui interprète une superbe jig irlandaise accompagné par les instruments irlandais (guitares, percussions, etc.) et le reste de l’orchestre et des synthétiseurs. Comme souvent dans ce type d’exercice de style, HGW aime apporter une réelle authenticité musicale à sa musique, que ce soit par le choix de ses interprètes ou par l’utilisation que le musicien en fait par la suite. ‘Driving’ est l’exemple type d’un compositeur qui maîtrise un style qu’il n’a pas forcément l’habitude de faire mais qu’il a écrit avec beaucoup de coeur et d’honnêteté. La fougue et le dynamisme de ‘Driving’ associé à la détermination de Veronica Guerin est très vite contrebalancé par la tension de ‘Preparations’, morceau synthétique largement dominé par un loop électro entêtant associé dans le film aux trafiquants de drogue.

La jig irlandaise associée à la détermination de la journaliste revient dans ‘Research’ qui décrit le déroulement de l’enquête de Veronica Guerin, toujours confiée au violon électrique d’Hugh Marsh ainsi qu’à un second violon acoustique, une harpe et quelques cordes. ‘Traynor Lies’ reprend le thème principal joué par des cordes graves et accompagné par un motif entêtant de 3 notes de piano. On retrouve ici une dimension dramatique typique du compositeur, dans un style qui, curieusement, rappelle beaucoup par moment certaines phrases de ‘The Thin Red Line’ de Hans Zimmer. L’utilisation d’un loop électro renforce la dynamique de la scène, où Veronica discute avec son contact, le très douteux John Traynor (Ciarand Hinds). La tension monte d’un cran avec ‘The Beating’, morceau assez poignant qui dévoile un nouveau thème dramatique joué par le violon électrique puis par le piano sur fond de nappe de synthé grave et pesante. Le morceau intervient dans le film lorsque Veronica Guerin se fait tabasser par John Gilligan (Gerard McSorley), qu’elle soupçonne d’appartenir au réseau de trafiquant de drogue. La musique dégage une émotion forte à l’écran, qui ne prend jamais le pas sur les images et conserve toujours une retenue touchante, typique de la sensibilité du compositeur. A noter l’utilisation d’un duduk à la fin du morceau, un instrument décidément surutilisé à Hollywood depuis le succès un brin trop causant du ‘Gladiator’ de Hans Zimmer en 2000. Le thème principal revient dans ‘Conversations’, construit en deux partie : une reprise du thème au violon acoustique d’une part, et une seconde partie plus rythmée et déterminée, avec une rythmique électronique évoquant l’acharnement de Veronica et sa dangereuse manie de foncer tête baissée là où elle ne devrait pas aller. A ce sujet, ‘First Warning’ est assez représentatif, HGW utilisant des sonorités électroniques plus sombres et agressives lorsque Veronica et sa famille sont menacés une première fois. Le second avertissement (‘Second Warning’) est beaucoup plus dur, et Veronica est carrément menacée de mort. A l’inverse, HGW décide d’illustrer cette scène de façon moins agressive, plus retenue, mais de façon toute aussi sombre et pesante. Le thème principal est repris par le violon soliste avec harpe/piano, guitares et cordes.

Mais le climax absolu de l’émotion est atteint lors de la séquence du meurtre de Veronica Guerin. Pour commencer : ‘Bad News’ interprété par le jeune garçon irlandais Brian O’Donnell, et la chanson-clé du score, ‘One More Day’ et son prologue dans la coda du film, ‘The Funeral’. HGW explique dans le livret de l’album de ‘Veronica Guerin’ que le morceau ‘Bad News’ est sans aucun doute le morceau le plus émouvant qu’il du écrire sur le film de Joel Schumacher. Le compositeur parle ainsi du moment où, en se baladant dans les rues de Dublin sur le tournage du film, il entendit un jeune garçon chanter une chanson irlandaise traditionnelle dans la rue. HGW enregistra par la suite le jeune garçon (Brian O’Donnell) et conserva le chant traditionnel ‘Fields of Athenry’ qui servira de base au morceau ‘Bad News’. Ainsi, par dessus la partie vocale interprétée par le jeune garçon soliste, HGW ajoute sa propre partie orchestrale, le tout accompagnant la scène de la mort de Veronica Guerin et l’annonce retentissante de sa mort vécue comme une véritable tragédie partout dans le pays. Le réalisateur décide pour cette scène de ne faire parler que la musique qui a alors quartier libre pour pouvoir s’exprimer pleinement et sereinement. La voix du jeune garçon soliste évoque à la fois le souvenir de Veronica Guerin et la voix du peuple irlandais qui, à l’annonce de la mort de la célèbre journaliste, décide de réagir et de combattre le trafic de drogue pour de bon. Impossible de rester insensible devant la puissance émotionnelle et dramatique de ce magnifique ‘Bad News’, un véritable sommet d’émotion sur l’album comme dans le film. Et comme si cela ne suffisait pas, HGW nous offre un second grand moment d’émotion pour la fin du film avec ‘The Funeral’, pour la scène des funérailles de Veronica Guerin. Le thème dramatique est repris ici par la chanteuse irlandaise Sinnead O’Connor, thème qui se transforme ici en véritable élégie solennelle et poignante pour la journaliste. A noter que la mélodie de ‘The Funeral’ (qui ressemble énormément à la mélodie principale de la chanson ‘May It Be’ d’Enya pour le générique de fin de ‘Lord of the Rings : The Fellowship of the Ring’) prend quelques tournures celtiques traditionnelles dans la continuité de ‘Bad News’, avec cette fois-ci un accompagnement orchestral plus présent, quelques instruments irlandais (whistle, guitare, cornemuse) et des choeurs féminins puissants pour accompagner les funérailles de la journaliste. HGW se fait plaisir et s’offre une version longue de la chanson dans ‘One More Day’, interprétée ici aussi avec beaucoup de conviction et de sensibilité par Sinnead O’Connor pour un autre grand moment d’émotion du score de ‘Veronica Guerin’.

Si vous doutiez du talent d’Harry Gregson-Williams, jetez une oreille attentive sur son travail pour ‘Veronica Guerin’ de Joel Schumacher : celui qui débuta au milieu des années 90 sur des productions typiquement M-V (musique additionnelle sur ‘The Rock’, ‘Armageddon’, etc.) prend aujourd’hui son indépendance artistique et nous offre un score personnel de qualité, même si les touches électroniques à la M-V sont toujours assez présentes (production Bruckheimer oblige!). L’ensemble reste maîtrisé de bout en bout avec un soin tout particulier apporté à l’instrumentation irlandaise et à l’écriture thématique. Harry Gregson-Williams dévoile ici une sensibilité sure à travers sa musique, accompagnant chaque moment fort de l’histoire de Veronica Guerin avec tact et finesse, sans jamais basculer dans le mélodramatique ou la facilité. Certes, il n’y a rien de follement inoubliable ni de révolutionnaire dans le travail du compositeur, mais la musique possède une telle énergie et un tel impact émotionnel sur les images du film que l’on ne peut qu’adhérer au travail remarquable qu’a accomplit HGW sur le film de Joel Schumacher. Assurément, la bande originale de ‘Veronica Guerin’ est d’ors et déjà à classer parmi les plus belles réussites du compositeur dans le domaine de la musique de film hollywoodienne moderne!


---Quentin Billard