1-Main Title 3.00
2-Russian Streets 1.35
3-Cleanhead Bust 4.16
4-Victor Escapes 2.53
5-Tailing Kat/The Set Up 7.55
6-Hospital Chase 4.30
7-The Hotel 6.21
8-Bus Station 9.34
9-End Credit 4.04

Musique  composée par:

James Horner

Editeur:

Virgin Records
CDV-2558

Montage musique par:
Nancy Fogarty
Album produit par:
James Horner

Artwork and pictures (c) 1988 Carolco Pictures/Columbia TriStar. All rights reserved.

Note: **1/2
RED HEAT
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by James Horner
Film d'action réalisé par Walter Hill et produit par le tandem Mario Kassar/Andrew G. Vajna, mettant en scène le tandem Arnold Schwarzenegger/Jim Belushi, « Red Heat » (Double Détente) est encore un de ces films surfant sur la vague des buddy movies des années 80 inspirés de « 48 Hours », « Lethal Weapon » et « Beverly Hills Cop ». Profitant de son succès grandissant dans le cinéma d’action américain, Schwarzy se vit ainsi offrir l’occasion de jouer dans son propre buddy movie avec « Red Heat ». L’histoire est on ne peut plus simple : tout commence dans la Russie de 1988. Le capitaine Ivan Danko (Schwarzenegger), capitaine de la police soviétique, traque l’un des plus grands criminels du pays, Viktor Rostavili (Ed O’Ross). Danko vient tout juste de retrouver sa trace dans un sauna, mais au moment où le capitaine est sur le point de l’arrêter, Viktor s’enfuit et abat son collègue. Le meurtrier s’exile alors aux Etats-Unis. Ivan part à son tour pour l’Amérique où il devra faire équipe avec Art Ridzik (Jim Belushi), un as de la gâchette et un maladroit invétéré. Ensemble, ils vont tenter de stopper Viktor une bonne fois pour toute. « Red Heat » reprend donc les formules habituelles du buddy movie avec deux policiers aux personnalités totalement différentes obligés de travailler ensemble pour arrêter un criminel notoire. Le film est une sorte de réponse au « Lethal Weapon » de Richard Donner sorti un an avant, en 1987. Le duo Schwarzy/Jim Belushi fonctionne plutôt bien à l’écran, l’un étant une montagne de muscles à l’expression monolithique, l’autre un sidekick pseudo-comique totalement insupportable. Reste que l’on a déjà vu bien mieux dans le genre. « Red Heat » apporte néanmoins son lot d’action et d’humour qui devrait pleinement séduire les fans du Schwarzenegger action des années 80 !

Quand il est engagé par la production pour écrire la musique de « Red Heat », James Horner est alors à l’apogée de son style de musique d'action typiquement 80s. Tout comme « 48 Hours », « Gorky Park » ou « Commando », « Red Heat » nous permet de retrouver le Horner action sur des mélanges d'instruments divers souvent insolites et très hétéroclites. Tout comme dans « 48 Hours » ou « Commando », on retrouve en plus de l’orchestre symphonique traditionnel l'utilisation de batteries, d'un saxophone, d'une shakuhachi pour rythmer certains passages, sans oublier la présence d'un synthétiseur ténébreux au milieu de ce score d'action. « Russian Streets » nous permet ainsi de retrouver un son très proche de « Commando » avec ses cordes rythmées, ses cloches, son cymbalum, son accordéon et ses percussions en tout genre. Horner tente ici de suggérer discrètement quelques sonorités slaves entre les instruments plus « action » de sa musique (les cordes, les cuivres, les percussions), pour la scène de la poursuite dans les rues russes au début du film. Mais c’est un morceau comme « Cleanhead Bust » qui s’avère être très représentatif de l’atmosphère urbaine « funky » qu’a voulu créer Horner pour rythmer la course poursuite entre Ivan et Viktor dans le film. « Cleanhead Bust » nous transporte quand à lui aux Etats-Unis et impose un son plus moderne et résolument urbain, avec un saxophone à la limite du free-jazz, quelques synthétiseurs plus atmosphériques et une guitare basse funky - sur fond de boîte à rythme résolument 80s. Le saxophoniste s’en donne ici à coeur joie, improvisant dans un registre parfois proche de l’expérimentation pure (passage central où le saxophone multiplie les sonorités étranges et inédites en utilisant différentes techniques de jeu). En ce sens, Horner va bien plus loin que dans « Commando » où le saxophone ne se limitait qu’à de simples parties mélodiques/rythmiques. Il offre carrément l’occasion à l’interprète d’expérimenter librement durant une bonne partie de « Cleanhead Bust ». Le morceau bascule même dans l’atonalité/free jazz pure pour la conclusion de cette pièce très particulière.

Les amateurs d’un James Horner plus expérimental seront donc ravis d’entendre le compositeur dans un registre assez différent de ce qu’il fait différent, mais pas si différent que cela puisque l’essentiel de ce qu’Horner a écrit sur « Red Heat » provient donc en réalité de « 48 Hours », « Gorky Park » et « Commando ». Qu’à cela ne tienne, le compositeur se fait à nouveau plaisir en mélangeant ses différentes sonorités dans un style à la fois sombre, atmosphérique et résolument urbain. Ainsi, la scène où Viktor s’enfuit au début du film nous permet de retrouver le Horner action typique des années 80, avec ses ostinatos mélodiques à la « Commando », son mélange de percussions acoustiques/électroniques, ses synthétiseurs dissonants et ses ponctuations grinçantes de shakuhachi - une flûte japonaise en bambou, très célèbre dans la culture musicale nippone. Horner poursuit ses expérimentations et son exploration de sonorités plus inhabituelles en mélangeant au début de « Tailing Kat/The Set Up » des sonorités aigues et lointaines de saxophone et quelques notes de banjo, le morceau basculant ensuite dans du suspense pur et dur avec des synthétiseurs très années 80. A vrai dire, toute la partition de « Red Heat » est clairement orienté vers ce style action très moderne indissociable de cette période d’expérience assez unique dans la carrière d’un Horner encore assez jeune à l’époque où il compose cette musique. Seule ombre au tableau : l’absence totale d’un véritable thème fort, et comme souvent chez le compositeur, une réutilisation d’éléments provenant de ses anciennes partitions, avec par exemple un motif rythmique électronique entendu vers le milieu de « Tailing Kat/The Set Up » clairement repiqué du thème principal de « Commando », sans oublier un morceau comme « Russian Streets » qui s’inspire massivement de certains passages de « Gorky Park » (1983), et même la partie final de « The Set Up » dans laquelle Horner va même jusqu’à reprendre des sonorités électroniques qu’il avait déjà utilisé dans « Aliens » (1986).

L’action reprend le dessus dans « Hospital Chase » dans lequel l’orchestre est totalement mis en retrait et remplacé par des synthétiseurs 80s kitsch, des ponctuations de piano, de percussions diverses et de shakuhachi, pour la poursuite dans l’hôpital vers le milieu du film. Ici aussi, Horner expérimente avec ses différents instruments et ses synthétiseurs apportant un côté résolument moderne à la partition de « Red Heat », qui n’échappe malheureusement pas à un style très « musique de série-B d’action à petit budget » (probablement une façon pour le compositeur de se souvenir qu’il débuta à la fin des années 70 sur des productions fauchées de Roger Corman !). « Hospital Chase » bascule dans l’atmosphère et la dissonance pure alors que la poursuite s’intensifie à l’écran, une vraie musique de thriller aux synthétiseurs kitsch, tels qu’on pouvait les entendre alors dans les années 80 - le score annonce clairement dans ce genre de morceau synthétique kistch le futur score d’Horner pour « Unlawful Entry », l’un de ses partitions les plus impopulaires soit-dit en passant ! « The Hotel » prolonge cette ambiance de suspense synthétique aboutissant à un nouveau passage d’action qui enchaînera enfin sur « Bus Station », pour la confrontation finale dans les bus.

Aucune surprise particulière dans ce score, surtout lorsqu'on connaît déjà le style 80's de James Horner, avec ses sonorités expérimentales et modernes reprises ici de « 48 Hours », « Gorky Park » ou « Commando ». Seule véritable petite surprise sur ce film ; la musique du « Main Title » et du « End Credit », qui pose dès les premières minutes du film l’atmosphère russe du film de Walter Hill. Cette grande pièce est écrite pour choeur et orchestre. Le choeur chante un texte russe, rythmé à la manière d’une grande marche soviétique avec la caisse claire et un orchestre particulièrement cuivré, accompagnant à l’écran le plan introductif de la place rouge à Moscou et la marche des soldats de l'armée rouge. Cet excellent morceau ne sera jamais repris tout au long du score en dehors du « End Credit ». Du coup, il manque un véritable thème dans le score de « Red Heat », un thème principal qui aurait permis d’apporter un peu plus de cohérence à un ensemble somme toute très moderne et urbain mais inexorablement moulé dans un style atmosphérique très fonctionnel, une atmosphère musicale pure et dure complètement athématique.

On retrouve simplement le chant russe au générique de début et de fin, et c'est tout, ce qui est bien dommage, car il s’agissait pourtant d’un morceau particulièrement intéressant. Signalons simplement que le choeur russe du « Main Title » n’est en aucun cas une oeuvre de James Horner mais bien une adaptation musicale (curieusement non créditée sur l’album et dans le film !) d’une pièce de Serguei Prokofiev, la Cantate pour le 20e anniversaire de la révolution d’octobre opus 74 écrite en 1937. Le morceau qu’Horner a adapté ici n’est autre que le deuxième mouvement « Les philosophes » de la Cantate de Prokofiev, un compositeur qui semble avoir décidément beaucoup inspiré James Horner à plus d’une reprise tout au long de sa carrière (« Battle Beyond the Stars », « Glory », « Enemy at the Gates », « The Land Before Time », etc.). Comme toujours, Horner procède de façon peu honnête - pourquoi ne pas créditer Prokofiev sur l’album ? - et la rupture de ton totalement décalée entre les chœurs russes du début et le style plus synthétique moderne s’avère être quelque peu maladroite et étrange, d’autant que « Red Heat » est loin d’être ce qu’Horner a fait de mieux dans le genre. Sa musique apporte néanmoins le suspense et l’action nécessaire au film de Walter Hill, mais reste constamment figé dans ce style atmosphérique/fonctionnel un peu laborieux, un score qui s’oublie aussi très vite : dans un style similaire, on appréciera certainement davantage le côté plus musclé et cohérent du score de « Commando » !



---Quentin Billard