1-Le Festin
(interprété par Camille) 2.50
2-Welcome to Gusteau's 0.38
3-"This is Me" 1.41
4-Granny Get Your Gun 2.01
5-100 Rat Dash 1.47
6-Wall Rat 2.41
7-Cast of Cooks 1.41
8-A Real Gourmet Kitchen 4.18
9-Souped Up 0.50
10-Is It Soup Yet? 1.16
11-A New Deal 1.56
12-Remy Drives Linguini 2.26
13-Colette Shows Him Le Ropes 2.56
14-Special Order 1.58
15-Kiss & Vinegar 1.54
16-Losing Control 2.04
17-Heist to See You 1.45
18-The Paper Chase 1.44
19-Remy's Revenge 3.24
20-Abandoning Ship 2.55
21-Dinner Rush 5.00
22-Anyone Can Cook 3.13
23-End Creditouilles 9.16
24-Ratatouille Main Theme 2.09

Musique  composée par:

Michael Giacchino

Editeur:


Album produit par:
Michael Giacchino

Artwork and pictures (c) 2007 Pixar/Walt Disney Pictures. All rights reserved.

Note: *****
RATATOUILLE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Michael Giacchino
A chaque nouveau film qu’il réalise, Brad Bird arrive toujours à susciter l’événement. L’ancien animateur des studios Disney s’est fait remarquer en 1999 avec son sympathique film d’animation ‘The Iron Giant’ avant de nous livrer l’un de ses premiers chef-d’œuvre d’animation, ‘The Incredibles’ (2004), produit par les studios Pixar. Fort du succès de ce dernier film, Brad Bird rempile à nouveau avec Pixar et Walt Disney sur le très attendu ‘Ratatouille’, sans aucun doute l’un des évènements cinématographiques de l’été 2007. Les productions Pixar nous ont toujours habitué à une qualité irréprochable, que ce soit l’animation 3D, la beauté des images, la qualité de la réalisation, du scénario, des personnages, etc. Et bien fort heureusement, ‘Ratatouille’ n’échappe pas à la règle, bien au contraire : le film de Brad Bird est déjà un classique instantané et va sans aucun doute faire date dans le monde de l’animation U.S. On découvre dans ‘Ratatouille’ les aventures rocambolesques de Rémy, un jeune rat qui rêve de devenir un grand chef cuisiner français. Avec son sens aigu de l’odorat et son génie des goûts et des saveurs raffinées, Rémy se sent l’âme d’un grand artiste. Hélas, sa famille est bien loin de partager son enthousiasme, le petit rat étant né dans une famille de rongeurs sauvages qui traînent dans les égouts et les greniers des maisons. Et pourtant, Rémy va tout faire pour vivre sa passion de la cuisine. Le jour où il entend parler d’Auguste Gusteau, grand chef parisien auteur d’un livre intitulé « tout le monde peut devenir cuisiner », Rémy comprend qu’il est grand temps pour lui de sauter sur l’occasion. Après avoir été séparé accidentellement de sa famille, notre petit héros poilu erre dans les égouts de Paris et atterrit enfin dans le grand restaurant de Gusteau. Il y fait la connaissance de Linguini, un jeune préposé à l’entretien maladroit et attachant qui va sympathiser avec le petit rat et devenir son fidèle complice. Avec l’aide de son ami humain, Rémy va confectionner de nouveaux plats et redorer le blason du restaurant de Gusteau, décédé peu de temps après avoir perdu une étoile à la suite d’une critique assassine du redoutable Anton Ego – critique gastronomique à la plume acerbe. Et petit à petit, les plats que confectionne Linguini avec l’aide indispensable de Rémy séduisent les clients et irritent Skinner, le nouveau patron qui mijote un mauvais coup en douce.

Avec une animation 3D irréprochable et des images d’une beauté à couper le souffle, ‘Ratatouille’ est désormais un grand chef-d’œuvre de l’animation américaine. Pixar pousse la barre très haut et nous propose un spectacle magnifique, drôle, divertissant, émouvant et aussi intelligent. Rares sont les films américains à avoir su montrer la ville de Paris et ses habitants avec une telle classe, évitant les caricatures faciles ou les stéréotypes habituels. Ici, pas de parisien franchouillard avec son béret et sa baguette de pain sous le bras en train de fredonner la Marseille à côté d’un accordéoniste qui chante du Edith Piaf ! Brad Bird – qui signe lui-même le scénario de son film – est bien trop intelligent pour s’adonner à de telles bassesses, et son film en témoigne de façon spectaculaire. Dès le début du film, Paris est montré sous un angle positif, comme la ville de la gastronomie et du raffinement. Elle devient pour Rémy symbole d’un rêve qui l’habite depuis toujours : l’art culinaire ! Rares sont les films au cinéma à avoir su montrer le monde de la gastronomie française avec un tel brio et une telle légèreté, encore moins un film d’animation américain! Brad Bird réussit donc le pari qu’il s’est fixé et nous offre un spectacle tout simplement magique, avec des personnages attachants – Rémy, chef cuisiner de génie, Linguini attachant malgré sa maladresse habituelle, Emile bien sympathique malgré sa nonchalance habituelle, Colette impressionnante en cuisinière à la personnalité bien tranchée mais dotée malgré tout d’un grand coeur, etc. Pour dépeindre avec autant de précision et de véracité le monde des restaurants français, l’équipe de Brad Bird a du suivre des cours de cuisine en accéléré et s’est rendu dans les plus prestigieux restaurants parisiens pour recueillir un maximum d’information sur le monde des cuisines françaises. Les artisans de chez Pixar se sont aussi fait aider de quelques uns des plus grands cuisiniers français du moment (dont Cyril Lignac bien sur, qui a prêté sa cuisine pour permettre à l’équipe du film d’enregistrer quelques sons pris en direct). Et comme toute bonne production Disney qui se respecte, ‘Ratatouille’ nous offre une morale à la fois simple mais renforcée par un discours plus complexe qu’il n’y paraît : on y retrouve ainsi le traditionnel discours sur l’importance de réaliser ses rêves, faisant l’apologie de la création artistique individuelle, de la tolérance, du dépassement de soi. Puis l’on découvre enfin une réflexion finale judicieuse et touchante sur le pouvoir que possèdent les critiques d’art sur le monde des artistes et le rôle crucial qu’elles ont à jouer dans la préservation du monde artistique en général. En ce sens, ‘Ratatouille’ s’adresse à tous les publics mais paraît au final bien plus adulte qu’il n’y paraît. En ce sens, il y a fort à parier que les enfants auront bien du mal à comprendre ou apprécier certains éléments du scénario qui nécessitent un point de vue adulte (notamment vers le milieu du film). Inventif, drôle, intelligent, visuellement époustouflant (les décors parisiens, la nourriture, le monde des cuisines, etc.) et aussi très émouvant par moment, ‘Ratatouille’ est un véritable festin, un régal pour tous les sens, un film d’animation ambitieux et doté de plusieurs niveaux de lecture, qui ravira les petits comme les grands!

Après ‘The Incredibles’, Michael Giacchino revient sur le nouveau film de Brad Bird pour lequel il nous offre une partition 100% symphonique garanti (clin d’oeil à un message aperçu vers la fin du générique de fin). La musique de ‘Ratatouille’ est à l’image même du film : fraîche, légère, virevoltante, inventive et revigorante. Le compositeur nous offre pour commencer un thème principal joli et rêveur, associé à la passion de Rémy pour la cuisine. Le ‘Ratatouille Main Theme’ est décliné à la fin de l’album sous la forme d’une très belle pièce pour piano, orchestre et accordéon « à la parisienne » (cliché inévitable des films se déroulant à Paris, mais néanmoins utilisé de façon intelligente ici). A noter que l’accordéon est ici interprété par Frank Marocco, célèbre accordéoniste américain spécialiste du jazz et originaire de l’Illinois. Le ‘Ratatouille Main Theme’ possède un côté nostalgique qui évoquerait presque par moment une vision idéalisée d’un Paris romantique au 19ème siècle, un thème étonnamment rétro aux sonorités « old fashion » de très bon goût, proche de la musique de Montmartre. C’est d’ailleurs ici le climat authentique et non stéréotypé de la musique à la française de ‘Ratatouille’ qui étonne ici, utilisée avec bon goût et avec une vitalité rare. Le film débute sur une brève allusion à la Marseillaise dans ‘Welcome To Gusteau’s’ et se prolonge sur une très charmante valse/java à la française avec son accordéon « musette » et sa guitare, idéal pour se plonger dans l’atmosphère de la gastronomie parisienne avec raffinement. ‘This Is Me’ s’avère quand à lui plus léger et sautillant, avec ses petites percussions inventives, son utilisation de divers solistes incluant clarinette basse, basson, accordéon, guitare, etc. Le morceau se conclut sur une très agréable touche jazzy rétro qui semble là aussi vouloir nous plonger dans une autre époque – et ce alors que l’on découvre Rémy pour la première fois dans le film. A noter un premier déchaînement orchestral virtuose dans ‘Granny Get Your Gun’ totalement maîtrisé, pour la scène de la grand-mère qui tire au fusil sur les rats. Le morceau nous propose un jeu brillant d’orchestration assez impressionnant, rappelant par moment la magie et l’inventivité du fameux ‘Apprenti Sorcier’ de Paul Dukas.

Un morceau comme la scène de l’évasion des rats au début du film (‘100 Rat Dash’) témoigne de l’inventivité et de l’énergie spectaculaire que déploie Michael Giacchino tout au long de sa partition et dans le film. Le morceau s’apparente ici à une sorte de danse enlevée soutenue par un orchestre ample et des orchestrations somme complexes et très fouillées. A noter la façon dont Giacchino utilise avec inventivité une flûte virtuose dans ‘Wall Rat’ soutenue par des orchestrations étonnamment pétillante et toute en finesse. Le thème principal de Ratatouille est repris à la fin du morceau lorsque Rémy découvre pour la première fois le restaurant de Gusteau. Il faut dire que la musique possède une très grande importance dans le film. Par exemple, le jeune rat n’explique t’il pas au début du film que goûter un met culinaire raffiné, c’est comme savourer le mariage de différents sons harmonieux, formant au final une musique colorée et enjouée ? Partant du principe que la cuisine est un art aussi indispensable et raffiné que ne l’est l’art musical, Michael Giacchino nous offre une musique décidément pétillante, débordant de vie et d’émotion. La présentation des cuisines de Gusteau se fait au son d’une pièce jazzy absolument savoureuse (‘Cast of Cooks’) aux sons rétro, très années 50/60. C’est la variété des ambiances qui attire immédiatement ici notre attention : ainsi, Giacchino se plaît à passer d’une atmosphère à une autre morceau après morceau, car après le jazz rétro de ‘Cast of Cooks’, ‘A Real Gourmet Kitchen’ nous propose une nouvelle envolée orchestrale agitée pour la scène où Rémy tombe dans les cuisines et se retrouve embarqué dans une série de péripéties particulièrement dangereuses pour un petit rat. Une fois encore, le compositeur privilégie les orchestrations avec un tact rare – de mémoire, cela faisait bien longtemps que l’on avait pas entend une partition aussi magnifiquement écrite à Hollywood!

Les touches jazzy (saxophone, batterie, etc.) sont reprises dans l’inventif et festif ‘Souped Up’ qui illustre avec brio la scène de la soupe vers le début du film. Dans un genre similaire, ‘A New Deal’ nous propose un jeu étonnant d’instruments solistes – accordéon, guitare, clarinette, harmonica, saxophone, avec toujours ces touches jazzy rétro qui évoquent une sorte de Paris idéalisée d’après guerre – c’est d’ailleurs avec un certain plaisir que l’on retrouve le thème rêveur de Ratatouille. Dans ‘Remy Drives A Linguini’, Michael Giacchino continue de se faire plaisir en nous offrant une mélodie joyeuse et sautillante entièrement sifflée, accompagnée par un ensemble instrumental jazzy débordant de vie. Le morceau accompagne avec brio la scène où Rémy entraîne Linguini à faire la cuisine. ‘Colette Show Him The Ropes’ (scène où Languini fait connaissance avec l’explosive Colette) nous propose quand à lui un superbe mélange entre musique latino et française avec un côté swing plus proche ici de Django Reinhardt (l’un des personnages du film s’appelle d’ailleurs Django). Le thème latino/swing de ‘Colette Show Him The Ropes’ est repris dans l’excellent ‘Special Order’, débordant de joie de vivre. Et pour un peu, on croirait reconnaître dans l’envolée romantique rétro de la scène du baiser (‘Kiss & Vinegar’) un style de musique de film française de l’époque de Georges Van Parys ou Georges Auric. Rappelons que Michael Giacchino est italien d’origine, ce qui explique probablement son enracinement dans une partie de la musique européenne qu’il semble parfaitement maîtriser ici (d’autant que le compositeur avoue apprécier tout particulièrement l’accordéon, ayant offert quelques parties solistes magnifiques à l’indispensable Frank Marocco).

La musique de Michael Giacchino demeure riche, complexe et survitaminée de bout en bout. Impossible de s’ennuyer une seule seconde, tant sa musique est un véritable festin de sonorités française, jazzy/swing, par moment plus américaines (production Pixar/Disney oblige!) mais toujours pleine de passion, d’honnêteté. Un morceau d’action virtuose comme la poursuite avec le testament de Gusteau dans ‘The Paper Chase’ est une formidable démonstration de tout le savoir-faire musical de Michael Giacchino, passé maître dans l’art des grandes envolées orchestrales majestueuses à l’ancienne. Idem pour ‘Dinner Rush’ lors des préparatifs du dîner final servi à Anton Ego. Le morceau possède un entrain et un côté héroïque qui rappelle par moment les partitions du Golden Age, quelque part entre la noblesse d’âme d’un Korngold ou le swing orchestral classique d’un Gershwin tendance « An American in Paris ». Une pièce comme ‘Remy’s Revenge’ est plus représentative des différentes émotions du film : par moment touchante avec ses allusions au ‘Ratatouille Main Theme’, plus enjouée et démonstrative dans d’autres passages, la musique oscille entre différentes ambiances à une très grande vitesse, une sorte de cocktail musical de haut niveau, comme on en avait pas réentendu depuis fort longtemps à Hollywood! A noter pour finir une très belle chanson écrite par Michael Giacchino pour les besoins du film et intitulée ‘Le Festin’, chanson interprétée par Camille, grande gagnante à deux reprises aux Victoires de la musique française. A noter qu’en plus d’interpréter la chanson-clé du film, Camille prête aussi sa voix au personnage de Colette dans le film.

Bilan final absolument élogieux pour ‘Ratatouille’, nouvel opus symphonique incroyable riche et complexe signé Michael Giacchino. Si le compositeur n’avait jusqu’ici livré que des partitions de qualité mais somme toutes assez fonctionnelles, sa musique pour ‘Ratatouille’ confirme que le musicien fait désormais partie de la cours des grands. Rares sont les compositeurs à avoir su montrer une telle conviction, une telle énergie et une telle passion dans une BO pour un film d’animation américain. La musique de ‘Ratatouille’ s’apprécie autant dans le film que sur l’album, où elle demeure une véritable expérience musicale en soi, preuve qu’une musique de film peut aussi prétendre survivre hors des images et s’apprécier pour elle-même. Mélangeant jazz d’inspiration « Saint-Germain-des-Prés » (à ce sujet, ne manquez pas l’incontournable ‘End Creditouilles’ qui devrait ravir tous les amateurs de jazz rétro!), solos d’accordéon français tendance musette et parties symphoniques hollywoodiennes, la musique de ‘Ratatouille’ est, à l’image du titre de la chanson de Camille, un véritable festin, un régal pour les sens, évoquant l’univers gastronomique de Paris et les aventures rocambolesques du petit rat qui rêvait de devenir un grand cuisiner français. Dans un climat musical hollywoodien terriblement morose où le marasme artistique côtoie la facilité et la médiocrité, il est bon de découvrir certaines partitions étonnantes comme ce ‘Ratatouille’, qui constitue une véritable expérience musicale en soi. Certes, la musique de Michael Giacchino n’a rien d’original ou de révolutionnaire en soi, mais le compositeur déborde tellement d’idées et d’énergie qu’il finit par nous entraîner les yeux fermés dans cette grande aventure musicale passionnante et nous séduit immédiatement par la beauté, l’inventivité et la richesse de sa musique. Voici sans aucun doute un chef-d’œuvre de la musique de film moderne qui confirme le fait que Michael Giacchino est bel et bien le nouveau compositeur à suivre à Hollywood, à condition qu’il continue de choisir des films qui réussissent à l’inspirer de la sorte!


---Quentin Billard