1-They's ll Remember You 4.20*
2-Operation Valkyrie 5.11
3-What's This Really All About? 3.44
4-Bunker Bust 3.45
5-March 13 Attempt 3.38
6-Midnight Waltz 2.11*
7-A Place to Change 4.09
8-Seconds Lost 3.34
9-Getting the Signature 4.04
10-The Officer's Club 2.37**
11-The Way It Should Go 3.24
12-If I Were That Man/
To The Berghof 2.21
13-I'm Sorry 3.04
14-Important Call 4.07
15-No More Indecision 2.31
16-Olbricht Gives the Order 3.18
17-Operation Terminated 1.16
18-Long Live Sacred Germany 6.13

*Composé par John Ottman
et Lior Rosner.
**Traditionnel, interprété par
Katharine Mehrling.

Musique  composée par:

John Ottman

Editeur:

Varèse Sarabande VSD-6937

Album produit par:
John Ottman
Montage musique:
Amanda Goodpaster
Producteur exécutif:
Robert Townson

Artwork and pictures (c) 2008 Metro-Goldwyn Mayer, Inc. All rights reserved.

Note: ****
VALKYRIE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by John Ottman
Après un cycle de films super-héros (« X-Men », « Superman Returns »), Bryan Singer revient à un style plus sérieux dans « Valkyrie », pour lequel il évoque une histoire méconnue de la 2de Guerre Mondiale : la tentative d’assassinat raté contre Hitler en 1943. Très attendu depuis un certain temps, le film avait suscité un certain buzz, dévoilant à travers plusieurs affiches teaser le visage de Tom Cruise en officier nazi, un rôle inattendu dans un film de Bryan Singer. Le résultat est somme toute à la hauteur de l’attente. Le colonel Claus von Stauffenberg (Tom Cruise), officier de la Wehrmacht, est un fidèle partisan de l’Allemagne, jusqu’au jour où, après son retour du front, il réussit à convaincre plusieurs officiers nazis de son plan pour tenter de renverser Hitler et de remettre l’Allemagne dans le droit chemin. Selon lui, le Führer est en train de faire basculer le pays dans le chaos, et pour empêcher cela, il va devoir tuer Hitler. Mais la tâche ne sera pas de tout repos : c’est pourquoi, dès 1943, il réunit autour de lui un cercle d’officiers nazis et met en place le complot du 20 juillet 1944 plus connu sous le nom d’Opération Walkyrie. Avec l’appui du général Friedrich Olbricht, le colonel Albrecht Mertz von Quirnheim et le général Henning von Tresckow, Stauffenberg reprend la procédure de l’Opération Walkyrie, un plan d’urgence qui devait servir à l’origine à réprimer de possibles révoltes intérieures, mais que Stauffenberg et ses alliés modifieront en douce afin d’en faire un plan d’opération pour le coup d’Etat. Après le déclenchement de l’opération, Stauffenberg et les conspirateurs décident de passer à l’action : désormais, le colonel se retrouve en première ligne et devra assassiner lui-même Hitler.

Histoire méconnue de la 2de Guerre Mondiale, le complot du 20 juillet 1944 est pourtant l’épisode le plus connu de la résistance allemande contre Hitler. Le Führer avait échappé à de nombreux attentats à plusieurs reprises, mais celui de 1944 fut certainement le plus audacieux, mais aussi un échec magistral. De nos jours, Claus von Stauffenberg est considéré comme un héros de la résistance allemande au régime nazi, bien que son personnage reste encore peu connu en France ou dans d’autres pays d’Europe. Une chose est sûre : il fallait vraiment qu’un réalisateur se penche sur cette histoire somme toute passionnante, déjà adaptée au cinéma dans trois précédents films : « C’est arrivé le 20 juillet » (1955), « Stauffenberg » (2004) et « Opération Walkyrie : le complot pour tuer Hitler » (2004). Bryan Singer a pris son sujet a bras le corps et nous offre un long-métrage sombre et captivant, qui nous maintient en haleine jusqu’à l’issue finale connue. Le film a été très difficile à faire, en particulier à cause de quelques incidents techniques sur le plateau ou de la polémique qu’a suscitée l’annonce de Tom Cruise dans le rôle-clé du film. Malgré tout, Bryan Singer a réussit un film fort et sombre, qui, s’il manque un peu de nuances (on aurait aimé un peu plus de profondeur dans les personnages, qui sont trop souvent traités comme de simples héros cherchant à tuer Hitler, point barre !), réussit malgré tout à convaincre grâce à la fermeté de sa mise en scène, la performance d’un Tom Cruise charismatique, et un casting de qualité : Terence Stamp, Bill Nighy, Kenneth Branagh, Tom Wilkinson, Thomas Kretschmann, Eddie Izzard ou la ravissante Carice Van Houten, vue récemment dans un autre film sur la 2de Guerre Mondiale : « Black Book » de Paul Verhoeven. Reste qu’une fois encore, si l’on ne peut qu’applaudir la réalisation efficace et tendue de Bryan Singer, on pourra regretter le côté un peu sommaire des personnages du film, qui ne sont finalement que de simples héros aux yeux du réalisateur. Même si l’on connaît déjà l’issue du film à l’avance, on regardera « Valkyrie » avec un certain plaisir, le film permettant ainsi de découvrir cette histoire méconnue de la résistance allemande contre Hitler. A ne pas manquer, donc !

A la musique et au montage, on retrouve John Ottman, éternel complice de Bryan Singer depuis leur début en 1993 sur « Public Access » et le succès international de « Usual Suspects » en 1995. Si l’on met de côté sa partition tonitruante pour « Superman Returns », cela faisait depuis un certain moment que la collaboration Ottman/Singer semblait être retombée à plat depuis quelques années, surtout après la déception du médiocre « X-Men 2 ». Fort heureusement, l’écoute de « Valkyrie » nous rassure pleinement quand à la qualité de cette collaboration, avec le retour d’un John Ottman visiblement très inspiré par son sujet, même si le compositeur ne signe pas pour autant un score très mémorable ou exceptionnel en soi. Le mot clé du score reste indéniablement le « suspense ». Le score d’Ottman maintient une tension permanente tout au long du film, permettant au compositeur de renouer avec un style dissonant/atonal qui rappelle son récent travail sur le film « Hide and Seek ». A cela s’ajoute un puissant thème dramatique qui sera surtout entendu dans le générique de fin, et finalement très peu présent tout au long du film. Restreignant ainsi sa thématique au maximum, le compositeur a donc opté pour une musique d’ambiance sombre et tendue, une atmosphère de suspense constante, illustrant le danger qui pèse constamment sur les épaules des conspirateurs dans le film.

« Operation Valkyrie » - morceau entendu à plusieurs reprises dans le film - accompagne les préparatifs de l’opération Walkyrie avec des cordes agitées et des percussions martelées de façon agressive. Le morceau évoque de façon intense les débuts de la conspiration contre Hitler et annonce d’ores et déjà une aventure particulièrement mouvementée. Le compositeur fait ensuite intervenir quelques éléments électroniques dans « What’s This Really All About ? » avec des ostinatos rythmiques synthétiques et des nappes sonores qui maintiennent une tension permanente, avec ses cuivres et ses percussions agressives, synonymes de danger. A noter un point important propre au score de « Valkyrie » : la prédominance des registres graves dans le jeu des instruments. Rares sont les sons qui grimpent ici dans l’aigu. A contrario, Ottman préfère suggérer la tension en restant quasi constamment dans le grave. Il en ressort ainsi une atmosphère plus oppressante et inquiétante. Ottman se montre assez inventif dans le maniement de ses textures électroniques, certaines ayant été crées par le compositeur lui-même pour les besoins du film. Un morceau comme « Bunker Bust » est ainsi très représentatif de cette atmosphère oppressante atonale, avec ses échos de cordes et ses sonorités dissonantes/glauques qui rappellent indéniablement Christopher Young. Comme d’habitude, Ottman accompagne toutes ces séquences de conspiration avec ses sonorités agressives et dissonantes illustrant la menace et le danger permanent. La seconde partie de « Bunker Bust » accompagne ainsi les préparatifs de la bombe dans le bunker d’Hitler : une musique de suspense pur 100% thriller comme le compositeur les affectionne tant !

Le reste du score est dans le même acabit, avec toujours une certaine inventivité dans l’utilisation des sonorités électroniques : « March 13 Attempt » illustre ainsi une tentative d’attentat raté contre Hitler (au début du film) à grand renfort de percussions agressives, de cordes martelées et de dissonances multiples. A noter ici l’utilisation réussie d’un martèlement de col legno de cordes (l’instrumentiste frappe les cordes du violon avec le bois de l’archet) et d’une accélération rythmique vers la fin du morceau, amplifiant une fois de plus la tension à l’écran et le danger permanent. On retrouve une agressivité assez similaire dans le traitement instrumental du très dissonant « Place to Change », dans lequel John Ottman a eu l’idée de créer un son en manipulant une feuille de papier sur laquelle il a frappé un son avec deux doigts. Ce son est ensuite devenu un loop rythmique étrange et inquiétant dans « Place to Change » durant la scène où Stauffenberg prépare à son tour la bombe pour le bunker d’Hitler. « Getting the Signature » évoque quand à lui la présence d’Hitler de façon menaçante, à base de cluster dissonant de cordes et d’un loop électronique inquiétant (scène où Stauffenberg réussit à obtenir la signature du Führer pour la nouvelle version de l’opération Walkyrie). « Important Call » évoque à son tour le personnage d’Hitler à l’aide d’un magma de cordes dissonantes et d’un loop électro ressemblant à un battement de coeur (sans aucun doute l’un des morceaux les plus sinistres du score de « Valkyrie »). Ici aussi, on pense constamment à Christopher Young, un compositeur qui a d’ailleurs toujours grandement inspiré John Ottman.

Enfin, le compositeur n’en oublie pas pour autant la partie plus humaine du film, et dévie du style thriller/suspense du début pour une ambiance plus dramatique sur la fin du film : des morceaux comme « Seconds Lost » (qui dévoile aux cordes le thème principal) ou « I’m Sorry » et ses cordes poignantes témoignent du drame qui se joue pour les conspirateurs : l’échec de leur plan et la victoire d’Hitler contre la résistance allemande. Un morceau comme « I’m Sorry » dévoile un sentiment d’amertume et de résignation de façon particulièrement émouvante, comme « Operation Terminated ». Enfin, la partition d’Ottman atteint un climax émotionnel pour sa conclusion avec deux morceaux incontournables : « Long Live Sacred Germany » et l’inévitable « They’ll Remember You ». Pour le premier, Ottman accompagne la séquence finale de façon élégiaque avec des cordes plaintives et tragiques qui rappellent l’Adagio pour cordes de Barber. Et comme si cela ne suffisait pas, le compositeur nous offre LE morceau du score pour le générique de fin du film - et, osons le dire, probablement l’un des plus beaux morceaux que le compositeur ait écrit de toute sa carrière - le sublime « They’ll Remember You », magnifique morceau en hommage aux héros de la résistance allemande, écrit pour orchestre avec choeur et soprano. Ottman s’est alloué pour le morceau les services de la Rundfunkchor Berlin et de la mezzo soprano Sylke Schwab (une des plus grandes mezzo-sopranos allemandes du moment, et une spécialiste de l’œuvre de Jean-Sébastien Bach), avec la collaboration du compositeur Lior Rosner. Adapté d’un poème allemand de Goethe, « They’ll Remember You » est à la fois un hommage poignant aux résistants allemands qui osèrent défier le régime nazi de l’intérieur, mais aussi un hommage vibrant à l’opéra allemand dans toute sa splendeur. Rares sont les compositeurs hollywoodiens à avoir eu l’occasion d’écrire ce genre de grande pièce chorale/symphonique pour une grosse production cinématographique de ce genre, preuve en est que la collaboration Ottman/Singer n’a décidément pas fini de nous surprendre !

Au final, « Valkyrie » demeure une véritable réussite de bout en bout, un score particulièrement sombre, tendu et agressif, reposant essentiellement sur une atmosphère de suspense oppressante à la façon des grandes musiques de thriller hollywoodienne d’aujourd’hui, dans un style qui rappelle inévitablement Christopher Young. Mais c’est surtout la partie dramatique du score qui retiendra ici toute notre attention, avec, en tête de liste, le bouleversant « They’ll Remember You », considéré désormais comme un classique dans l’œuvre de John Ottman. Du coup, exit le coup d’épée dans l’eau de « X-Men 2 » ou le constat mitigé de « Superman Returns » : « Valkyrie » remet les pendules à l’heure et nous permet enfin de retrouver un John Ottman inspiré, comme au temps de « Usual Suspects » et « Apt Pupil », sans aucun doute le score qui se rapproche le plus de celui de « Valkyrie ». Réussite de bout en bout, la partition de John Ottman apporte suspense, tension et émotion au film de Bryan Singer avec une maestria rare. Au final : un score à ne pas manquer, assurément !


---Quentin Billard