1-Watergate 4.25
2-The Numbers 1.54
3-Hello, Good Evening
and Welcome 1.31
4-Pardon The Phlebitis 1.45
5-Status 3.59
6-Beverly Hilton 2.24
7-Money 2.47
8-Frost Despondent 2.29
9-Insanely Risky 2.49
10-Cambodia 0.59
11-Research Montage 3.03
12-The Final Interview 2.17
13-Nixon Defeated 2.43
14-First Ideas 9.55

Musique  composée par:

Hans Zimmer

Editeur:

Varèse Sarabande 302 066 942 2

Album produit par:
Hans Zimmer
Producteur exécutif:
Robert Townson
Musique additionnelle de:
Lorne Balfe, Atli Örvarsson
Ambient music design:
Mel Wesson
Violoncelle de:
Martin Tillman
Coordinateur de production:
Andrew Zack
Digital instrument design:
Mark Wherry

Artwork and pictures (c) 2008 Universal Pictures. All rights reserved.

Note: ***
FROST/NIXON
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Hans Zimmer
Pour son nouveau film, le réalisateur Ron Howard s’intéresse cette fois-ci à une pièce de théâtre de Peter Morgan adaptée de l’histoire des célèbres interviews télévisées de 1977 entre le journaliste britannique David Frost et l’ancien président des Etats-Unis Richard Nixon. Le film de Ron Howard relate ainsi les préparatifs et le déroulement de ces interviews qui battirent alors le record d’audience de toute l’histoire de la télévision américaine - chose exceptionnelle pour un magazine d’actualités : ces interviews qui durèrent ainsi quatre jours furent regardées à la télévision par plus de 45 millions de spectateurs, des interviews qui opposèrent deux hommes avec des enjeux très élevés : pour David Frost (Michael Sheen), célèbre play-boy de la télévision britannique et jusqu’ici spécialisé dans les interviews people, il s’agissait de prouver au monde entier qu’il avait l’étoffe de diriger une interview politique avec un ancien président américain (il prit un énorme risque en finançant lui-même cette série d’entretiens télévisés alors qu’aucun distributeur ne croyait en son projet). Quand à Richard Nixon, désavoué de la présidence américaine depuis le 9 août 1974 suite au scandale de l’affaire du Watergate, il s’agit avant tout de montrer un visage plus positif et humain devant le peuple américain et de permettre aux spectateurs de faire une croix sur cette affaire une bonne fois pour toute. Dès le début de ces interviews, Frost et Nixon savaient qu’un seul sortirait vainqueur de cet affrontement verbal, de ce duel médiatique et télévisé, qui incita Richard Nixon à faire un aveu stupéfiant devant le monde entier.

Ces interviews télévisées de 1977 restent encore aujourd’hui très populaires et considérés comme des références dans l’art de l’interview-confession. Ron Howard reprend donc la pièce de Peter Morgan et nous offre un véritable face-à-face entre deux grands acteurs de deux générations différentes : Frank Langella (Nixon) et Michael Sheen (Frost). Les deux acteurs nous offrent une interprétation absolument saisissante de leurs personnages respectifs, un véritable numéro d’acteur qui semble même avoir époustouflé les détracteurs de Ron Howard. Reconstituant très fidèlement l’Amérique des années 70, « Frost/Nixon » nous propose ainsi un véritable combat de gladiateur entre deux hommes qui ont tout à prouver dans cette série d’entretiens télévisés. Frank Langella interprète avec brio un Richard Nixon poussé dans ses derniers retranchements par son adversaire, montrant ainsi un visage plus humain et fragile de ce personnage complexe et manipulateur, maintes fois évoqué au cinéma (on se souvient par exemple du superbe « Nixon » d’Oliver Stone sorti en 1996). Au final, « Frost/Nixon » crée une véritable surprise et s’impose comme l’un des meilleurs films de Ron Howard, prenant et instructif de bout en bout. Indispensable !

Hans Zimmer retrouve donc Ron Howard après « Backdraft » (1990) et « Da Vinci Code » (2006) sur « Frost/Nixon », pour lequel le compositeur signe un score atmosphérique relatant la tension et le suspense entourant les préparatifs de ces interviews et leur déroulement tout au long du film. Hans Zimmer a ainsi abordé le film de Ron Howard à la manière d’un thriller, mais en évacuant tout côté agressif pour se concentrer essentiellement sur une ambiance plus minimaliste, oscillant entre tension et moments plus intimes. Pour Zimmer, « Frost/Nixon » représente ainsi une formidable occasion de pouvoir écrire la musique d’un film plus intime et politique. Dès le début du film, « Watergate » impose d’emblée le ton du score avec son thème de cordes répétitif et mystérieux évoquant le scandale du Watergate. Zimmer articule ici tout son morceau sur un loop de rythmique électronique du plus bel effet, sur fond de cors et de cordes sombres agrémentées de quelques touches de piano. La musique n’est pas sans rappeler par moment le style des musiques de thriller politiques des années 70, revenu au goût du jour à Hollywood depuis le « Zodiac » de David Shire en 2006. Zimmer développe cette ambiance à la fois entêtante et sombre dans l’atmosphérique « The Numbers ». Il évoque par la même occasion les préparatifs difficiles et laborieux des interviews par David Frost et son équipe, et personnifie parfaitement à l’écran la tension et la pression qui pèse continuellement sur les épaules du journaliste, qui joue ainsi toute sa carrière avec ces entretiens télévisés.

Zimmer joue la carte du minimalisme et de l’économie de moyens dans un morceau comme « Hello, Good Evening and Welcome » où il mélange beats électro, piano, cordes répétitives, pizzicati et marimba dans un style qui n’est pas sans rappeler Thomas Newman. On retrouve dans « Hello, Good Evening and Welcome » le style habituel des musiques de comédie de Hans Zimmer, un style plus léger, inventif et rafraîchissant qui sied à merveille aux passages plus intimes et enjoués du film de Ron Howard (« Beverly Hilton »). Pourtant, très vite, c’est le suspense et la tension qui reprennent le dessus dans « Pardon The Phlebitis » dominé ici par le thème de cordes répétitif, suivi de « Status » et ses notes de piano vaporeuses. Zimmer apporte ici un climat plus sombre et amer à sa musique, avec ses cordes en suspend et ses harmonies plus mystérieuses et subtiles. Encore une fois, le compositeur conserve ce côté minimaliste tout au long de sa musique, avec une utilisation souvent brillante et raisonnée des différents instruments - et toujours ces ostinatos rythmique électroniques qui évoquent le son d’une montre, du temps qui passe. Un morceau comme « Money » évoque parfaitement la séquence où Frost s’active pour obtenir un financement auprès des distributeurs pour son projet d’interview. Les cordes répétitives du début reviennent ici sur fond de loop électro entêtant. Zimmer n’a d’ailleurs guère besoin de plus pour suggérer la tension et la pression que subit Frost. La musique devient même plus intime et contemplative dans « Frost Despondent », avec ses notes de piano mélancoliques sur fond de tenues de cordes/synthé du plus bel effet. Le compositeur va même jusqu’à nous offrir un morceau de cordes plus élégiaque et tragique dans « Cambodia » pour la séquence de la vidéo des massacres au Cambodge que visionnent ensemble Frost et Nixon durant une des premières interviews. Quand à « Research Montage », il s’agit d’une superbe reprise du thème principal de cordes avec des harmonies ambigües, qui oscillent ainsi entre espoir et tension avec une certaine subtilité (une bien belle réussite de la part du compositeur !). Enfin, le piano s’impose dans le sombre et mélancolique « The Final Interview », lorsque Nixon se confesse enfin devant des milliers de spectateurs, idée développée dans le dramatique « Nixon Defeated » dominé par des cordes amères et résignées (sans oublier le très long et intense « First Ideas » qui s’apparente clairement à une longue démo de plus de 9 minutes).

« Frost/Nixon » s’impose au final comme une partition tout à fait étonnante de la part de Hans Zimmer, visant bien plus l’introspection et les atmosphères minimalistes et rythmées que les grands élans synthético-orchestraux de ses scores habituels pour les grosses productions hollywoodiennes. Sans être d’une folle originalité ni même particulièrement mémorable, la musique de « Frost/Nixon » nous rappelle quand même que Hans Zimmer n’est jamais autant inspiré que lorsqu’il compose pour des réalisateurs qui savent stimuler sa créativité et son sens de la conceptualisation du rapport image/musique. En ce sens, la musique de « Frost/Nixon » n’est pas vraiment surprenante dans le fond mais plus sur la forme, une musique plus minimaliste et subtile très discrète dans le film, et qui risque fort de décevoir par son côté très fonctionnel et atmosphérique, tout en séduisant malgré tout les béophiles en quête d’un Zimmer plus modeste, introspectif et inventif.



---Quentin Billard