1-Metropolis 4.08
2-Foreboding 2.42
3-Ziggurat 2.55
4-Going to "Zone" 2.03
5-Sniper 3.04
6-El Bombero 2.20
7-Three-Faced of "Zone" 5.12
8-"Zone" Rhapsody 2.18
9-Hide Out 1.30
10-Run 3.18
11-St. James Infirmary 3.02*
12-Sympathy 1.37
13-Snow 6.53
14-Propaganda 1.07
15-Chase 2.18
16-Judgement 1.36
17-Awakening 1.38
18-Fury 3.07
19-After All 3.42
20-There'll Never Be Good-Bye
"The Theme of Metropolis" 4.38**

*Ecrit par Joe Primerose
**Ecrit par Minako "Mooki" Obata
et Toshiyuki Honda.

Musique  composée par:

Toshiyuki Honda

Editeur:

King Records KICA 540

Album produit par:
Toshiyuki Honda

Artwork and pictures (c) 2001 Madhouse Productions. All rights reserved.

Note: ****
METROPOLIS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Toshiyuki Honda
Nouveau chef-d’oeuvre incontesté de l’animation japonaise, « Metropolis » permet au réalisateur Rintaro (de son vrai nom Shigeyuki Hayashi) de nous offrir une formidable parabole du mythe de la Tour de Babel transposé dans un univers futuriste. « Metropolis » est en réalité l’adaptation cinématographique du manga d’Osamu Tezuka publié en 1949, et qui s’inspirait quelque peu du « Metropolis » de Fritz Lang (1927). Le film a été produit par le studio Madhouse, décidément très actif dans le paysage de l’animation japonaise, et qui a produit entre autre des films tels que « Perfect Blue », « Paprika », « Ninja Scroll » ou bien encore « Millenium Actress ». « Metropolis » nous plonge dans un futur lointain, à l’intérieur de l’immense cité de Metropolis, dans laquelle humains et robots cohabitent depuis de nombreuses années, chacun vivant néanmoins dans des espaces bien délimités. Un jour, un inspecteur japonais nommé Shunsaku Ban et son jeune neveu Kenichi arrivent à Metropolis pour y mener une enquête particulière : retrouver la trace du Dr. Laughton, un scientifique accusé de trafic d’organes. Laughton travaille en réalité pour Duke Red, l’homme le plus puissant de la cité. Ce dernier a construit l’immense Ziggurat, une gigantesque tour totalement démesurée surplombant la cité toute entière et qui lui permettra à long terme de dominer le monde. Le Dr. Laughton a crée, à la demande de Duke Red, un robot ultra-perfectionné nommé Tima, lui ayant ainsi donné les traits de la fille défunte du dirigeant. C’est alors qu’intervient Rock, le fils adoptif de Duke Red et chef de la patrouille anti-robot du très influent parti Marduk. Rock est jaloux de l’amour que porte Duke Red à sa nouvelle création, et lorsqu’il comprend que son père adoptif va utiliser Tima pour gouverner le monde, il décide ni plus ni moins d’assassiner le Dr. Laughton et de détruire le robot en mettant le feu à l’usine. Mais Tima survit à l’explosion et est sauvée in extremis par le jeune Kenichi, qui se trouvait sur les lieux en compagnie de son oncle. Kenichi et Tima s’enfuient alors dans la ville, mais Rock finit par retrouver leur trace et cherche désormais à les éliminer coûte que coûte.

« Metropolis » repose donc sur un des plus célèbres mythes bibliques, la Tour de Babel, construite par les hommes pour pouvoir atteindre le ciel et égaler ainsi Dieu. La tour de la Ziggurat est l’archétype même de ce mythe, à tel point que c’est l’inspecteur japonais lui-même qui y fait plusieurs fois référence dans le film. Mais loin de se limiter à ce symbole d’ordre moral du pêché d’ubris, le film de Rintaro nous permet surtout d’apprécier la beauté et l’immensité grandiose d’un décor absolument splendide, l’intérieur de la cité de Metropolis, ville démesurée et tentaculaire inspirée du chef-d’oeuvre de Fritz Lang, et dans laquelle humains et robots cohabitent dans des espaces cloisonnés et hyper réglementés. La cité symbolise l’immensité des grandes mégapoles d’aujourd’hui, une immensité étouffante pourtant pleine de vie dans le film, entre la musique jazz des années 30 et les couleurs vives et chatoyantes. Mieux encore, Rintaro arrive à donner vie à cet univers d’une richesse insoupçonnée en mélangeant graphismes à l’ancienne (parfois proche de Paul Grimault ou de dessins animés américains plus anciens) et 3D plus moderne, aboutissant à une animation et un graphisme hybride absolument saisissant. Le réalisateur ajoute à ça de nombreuses références artistiques, cinématographiques ou culturelles - bien souvent américaines et européennes - tout en restant fidèle au design naïf et enfantin du manga d’origine d’Osamu Tezuka - design enfantin repris de « Astro Boy » (un autre manga célèbre de Tezuka) et qui contraste radicalement avec la violence du film, sans aucun doute d’ailleurs l’un des aspects les plus étonnants du film. Audacieux, « Metropolis » l’est assurément. Rintaro brouille les pistes et joue admirablement bien sur les subtilités du script de Katsuhiro Otomo (« Akira », « Steamboy ») pour nous offrir un film complexe et brillant à l’esthétique néo-rétro (Steampunk) entre passé et futur, avec, cerise sur le gâteau, une séquence de bataille finale d’une beauté époustouflante, entièrement accompagnée par la chanson « I Can’t Stop Loving You » de Ray Charles, scène d’anthologie pure. En clair, « Metropolis » est à coup sûr le nouveau chef-d’oeuvre de l’animation japonaise, un film que vous ne devez manquer sous aucun prétexte !

En plus de réaliser des films animés, Rintaro est aussi un grand fan de jazz, musicien à ses heures. Il pensa même confier la musique de « Metropolis » au compositeur Quincy Jones, qui ne put malheureusement pas être disponible pour travailler sur le film. Rintaro se tourna alors ensuite vers Toshiyuki Honda, compositeur avec lequel il avait déjà collaboré sur certains de ses films précédents. Dès le début, Rintaro savait que son film ne pouvait être accompagné par une musique ordinaire. Il fallait dès lors se démarquer de l’esthétique musicale ambiante des animes japonais traditionnels et opter pour une approche plus singulière, capable d’illustrer le côté rétro-futuriste du film. C’est pourquoi Toshiyuki Honda a décidé d’écrire une partition jazzy à mi-chemin entre le jazz New-Orleans et le Dixieland jazz des années 30 pour évoquer l’univers musical de la cité de Metropolis - peut être aussi une façon pour le réalisateur de se rapprocher de manière plus subtile de l’époque vers laquelle Fritz Lang a tourné son « Metropolis ». Ainsi, une bonne partie du film est accompagnée par la musique du groupe de jazz formée pour l’occasion par le compositeur avec, chose plus surprenante, le réalisateur lui-même interprétant les parties de clarinette basse dans la musique de son film. Dès le début du film, la musique de « Metropolis » s’annonce d’emblée comme une belle aventure musicale, entre jazz rétro 30’s et musique symphonique plus moderne (et aussi plus hollywoodienne). Ainsi donc, le film débute au son du thème swing/jazz rétro de Metropolis (« Metropolis ») avec une formation instrumentale typique des big bands de l’époque : section de cuivres (avec saxophones, clarinettes et trompette en sourdine), batterie, contrebasse en pizz et banjo. Le thème jazzy de Metropolis apporte d’ailleurs un charme désuet tout à fait étonnant à la scène de la découverte de la cité.

Dans « Foreboding », l’orchestre fait son apparition, dominé ici par des cordes sombres et quelques instruments jazzy du plus bel effet pour rappeler la partie plus sombre de Metropolis : les sections cloisonnées dans lesquelles les robots sont entassés comme des moins que rien, n’ayant pas le droit de côtoyer les humains (une métaphore du racisme ?). Dans « Ziggurat », Toshiyuki Honda évoque l’immense immeuble de Duke Red à l’aide de cuivres puissants et de vents virevoltants. Le compositeur soigne tout particulièrement ses orchestrations, qu’il s’agisse des arrangements des parties jazz ou des morceaux symphoniques du score, reflétant ici un certain savoir-faire évident. « Ziggurat » en profite ainsi pour développer un motif de 4 notes associé à la monumentale Ziggurat dans le film, motif plutôt sombre, ample et mystérieux (on retrouve d’ailleurs une ambiance similaire dans les sombres « Sniper » et « Hide Out »). Et c’est donc sans surprise que le compositeur alterne ainsi entre les parties orchestrales sombres et les passages jazzy plus inventifs comme « Going To Zone » dont le style évoque bon nombre de standards des années 30 - musique étonnante pour la scène où les héros se rendent dans les zones interdites de la cité, là où n’importe quel autre compositeur aurait plutôt misé sur une musique orchestrale plus sombre et menaçante. On retrouve le thème ‘standard » jazz de « Going To Zone » dans le slow langoureux de « Three-Faced of Zone », thème toujours associé dans le film aux zones des robots de Metropolis, thème repris dans son intégralité avec le superbe « Zone Rhapsody » où les musiciens de l’orchestre de Toshiyuki Honda s’en donnent à coeur joie. La musique apporte donc une ambiance très particulière au film, reflétant une inventivité assez rafraîchissante de la part du compositeur. Plus étonnant encore, « El Bombero » accompagne une scène d’action-clé du film à travers un style jazz plus moderne, entre les improvisations survoltées du saxophone, des cris de foule samplés, et un accompagnement électro/techno plus moderne et inventif, une idée reprise et amplifiée dans « Run » qui vire quasiment vers du jazz électro/trip-hop détonnant.

Le thème de Metropolis revient dans une version plus lente et intime au piano avec « Sympathy », totalement dénué ici de ses accents jazz du début. La situation a évolué, et le visage de la ville est en train d’évoluer en même temps que les exploits des héros. La musique devient alors plus sombre et dramatique avec « Snow » pour la scène du massacre, pour lequel le compositeur reprend le thème de la Ziggurat/Duke Red de façon plus menaçante aux cordes. Plus étonnant, « Propaganda » rompt avec le reste de la partition avec sa fanfare héroïque triomphante. Avec « Chase », l’action est au rendez-vous, aboutissant à des morceaux orchestraux plus présents pour la partie finale, qu’il s’agisse de « Judgement », « Awakening » ou le puissant « Fury » accompagnant le climax final du film. Enfin, la partition se conclut avec une reprise savoureuse du thème de Metropolis au banjo dans « After All » et au saxophone dans la superbe et romantique chanson « There’ll Never Be Good Bye », qui imite le style du répertoire d'Ella Fitzgerald. Au final, la partition de « Metropolis » s’impose comme une véritable surprise, une bien belle découverte qui devrait ravir les amateurs de jazz du Dixieland et tous ceux qui recherchent des partitions d’anime japonais qui sortent un peu de l’ordinaire.


---Quentin Billard