tr> |
1-Mocking in Summer 1.06
2-Heavy Armor 4.11 3-Runaway Case 3.53 4-Tomato Field 0.47 5-The Upcoming Anxiety 1.32 6-HOS 1.09 7-Street of Hallucination 2.26 8-Governmental PR 0.20 9-GEGE 3.21 10-Resonance 2.02 11-Order To Go 1.57 12-To The Sea 0.42 13-Inrush 1.48 14-ID: 666 0.31 15-The Ark 3.22 16-Collapse of Babel 5.19 17-Into the Morning Sunshine 3.54 Musique composée par: Kenji Kawai Editeur: Warner Bros WPC7-8656 Album produit par: Kenji Kawai Artwork and pictures (c) 1988 Headgear/Studio DEEN/Sunrise. All rights reserved. Note: *** |
PATLABOR THE MOVIE
|
|
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
|
|
Music composed by Kenji Kawai
|
|
A l’inverse de beaucoup de séries animées japonaises, « Patlabor » est l’une des rares séries à avoir précédé un manga éponyme au Japon. Créée en 1988, « Patlabor Mobile Police » a connu un certain succès et s’est vu adapter à trois reprises en long-métrage. C’est le toujours aussi inspiré Mamoru Oshii qui réalisa le premier long-métrage intitulé « Patlabor The Movie », sorti en 1989. L’histoire se déroule dans le Tokyo de 1999. La ville entière a été transformée en un immense chantier soumis au Projet Babylon, un programme de restructuration urbaine ambitieux dominé par l’Arche, une gigantesque plateforme métallique qui domine toute la baie de Tokyo. Les travaux sont assurés par les Labors, des robots géants qui ont été construits afin de remplacer les grues et autres engins mécaniques de construction. L’histoire commence peu de temps après le suicide d’un mystérieux programmeur informatique nommé Eiichi Hoba, qui met fin à ses jours en sautant de l’Arche. Peu de temps après, d’étranges incidents commencent à se produire : les Labors deviennent fous et finissent par se révolter mystérieusement contre les humains. Plusieurs incidents sont ainsi maîtrisés à temps, mais certains commencent alors à accuser l’entreprise responsable de la création des robots, la Shinohara Industries. C’est pour faire face à ce genre de problème qu’a été créée la police spéciale de la Division 2, qui utilise à son tour des Labors de combat pour faire face au moindre danger. La police enquête alors sur les nombreuses malfonctions ayant entraîné les problèmes avec les Labors sur les chantiers de la baie de Tokyo. L’enquête est menée par le capitaine Goto et le sergent Asuma Shinohara, le fils du fondateur de la Shinohara Industries. Très vite, ils découvrent un problème lié au H.O.S. des robots (Hyper Operating System), un programme d’exploitation dernier cri installé sur tous les Labors. Les enquêteurs finissent par comprendre que le virus présent sur le H.O.S. des robots n’est autre que l’oeuvre d’Eiichi Hoba, le défunt concepteur du programme informatique qui a mis au point un plan machiavélique pour semer le chaos dans Tokyo. « Patlabor The Movie » permet donc au réalisateur Mamoru Oshii de nous offrir un excellent film d’action futuriste avec son lot de méchas - un genre très privilégié dans l’animation japonaise (« Macross Plus »), de héros intrépides à l’hollywoodienne et d’intrigue complexe, avec un véritable jeu de piste mélangeant de nombreuses références bibliques (Jehova, le projet Babylon, le virus nommé Babel, le chiffre 666 sur le corbeau aux yeux rouges vers la fin du film, l’Arche construire dans Tokyo Bay, etc.). Le film s’avère être très prenant bien que le rythme accuse une sérieuse baisse de régime vers le milieu de l’histoire - lors du déroulement de l’enquête policière des deux détectives japonais - on appréciera néanmoins l’humour du film, les quelques scènes d’action mémorables (et notamment toute la partie finale sur l’Arche, quasi anthologique !) et la profondeur apportée au récit, par le biais d’une réflexion quasi philosophique sur les dérives de l’informatique et de la technologie moderne.
On connaît Mamoru Oshii pour ses intrigues complexes et ses interrogations existentialistes et philosophiques : « Ghost in the Shell » reste d’ailleurs à ce jour son plus grand chef-d’oeuvre, un film dans lequel le cinéaste nippon condensa quelques uns de ses thèmes fétiches avec un brio rarement égalé dans le cinéma d’animation japonais. Plus impersonnel et moins abouti, « Patlabor The Movie » porte néanmoins la patte du réalisateur bien que le film reste beaucoup plus simple et moins élaboré que ses films suivants. L’animation et le character design sont tous deux très réussis, Oshii dévoilant un sens inné du détail et du réalisme (et ce malgré le côté légèrement daté des graphismes), avec des personnages assez attachants, une bonne dose d’humour et une enquête policière somme toute pas si complexe qu’elle n’y paraît. Mais Oshii joue ici sa plus grande carte : manipuler les apparences pour mieux arriver à ses fins. Ainsi, à l’instar de « Ghost in the Shell », « Patlabor The Movie » affiche un double niveau de lecture plutôt saisissant : plus qu’un simple film de mécha, « Patlabor » évoque avant tout un certain regard sur le monde d’aujourd’hui. Au-delà de l’intrigue même de l’enquête policière autour du virus informatique semant le chaos dans Tokyo, « Patlabor » illustre de manière plus pertinente les dérives de la technologie moderne face à une humanité en perdition. Le virus d’Hoba n’est ici qu’une parabole évidente d’un message divin adressé au monde terrestre contre l’orgueil de l’homme, qui cherche toujours plus à égaler Dieu : les références bibliques ne sont pas placées ici au hasard. Les allusions à la tour de Babel, l’Arche de Noé et à Babylone (célèbre cité biblique représentée dans le livre de l’Apocalypse comme une société déshumanisée et décadente, associée dans le film à la ville de Tokyo) confirment l’idée que toute l’histoire du film n’est qu’une métaphore du pêché d’ubris, qui, dans les tragédies grecques antiques, était associé à la démesure et à l’orgueil humain. L’idée même que le virus censé mettre un terme à la civilisation s’appelle dans le film Babel est extrêmement ironique : toujours selon la Bible, la tour de Babel aurait été construite par les hommes afin de leur permettre d’atteindre le ciel et d’égaler Dieu, qui intervint et mit un terme à ce projet insensé. Finalement, Oshii opte pour une vision plutôt optimiste (malgré la vision du monde parfois fataliste du capitaine Goto - une marque de fabrique du réalisateur !), car les héros de la Division 2 luttent contre les plans diaboliques d’Hoba - censés punir l’humanité de son orgueil grandissant - avec la ferme conviction que les hommes doivent pouvoir décider eux-mêmes de leur propre avenir et ont toujours droit à une seconde chance. C’est une vision proprement humaniste, servant au final un excellent anime japonais et un grand classique du genre, tout bonnement incontournable ! La musique de Kenki Kawai a sans aucun doute contribué grandement à la popularité de « Patlabor The Movie ». Elle marque aussi le début d’une grande collaboration entre Mamoru Oshii et Kenji Kawai, collaboration qui se développera par la suite avec des films tels que « Patlabor The Movie 2 », « Ghost in the Shell 1 et 2 », « Avalon » et le récent « The Sky Crawlers ». Kawai a opté sur « Patlabor » pour une musique essentiellement électronique - avec des synthétiseurs « 80s » plutôt kitsch et datés - soutenus par quelques touches orchestrales plus discrètes. La musique évoque ainsi le caractère futuriste et moderne du film, avec des synthétiseurs associés au monde des Labors dans le film. Après une introduction plutôt atmosphérique dévoilant les nappes sonores et autres percussions exotiques utilisées ici de façon inventives, Kawai accompagne le générique de début du film au son du très rythmé « Heavy Armor », apportant une énergie assez agréable au générique (qui alterne entre les noms du staff et les plans des Labors en action). Le compositeur utilise ici les cordes sur fond de rythmiques électroniques entêtantes et typiquement 80’s. Le morceau se conclut même de façon plus héroïque, annonçant clairement un film d’action mouvementé, avec les cordes, les rythmiques électroniques kitsch, quelques claviers et une guitare électrique. Ce côté action eighties kitsch revient dans « Runaway Case » et ses rythmes répétitifs, qui évoque une certaine forme d’urgence, alors que les policiers de la Division 2 doivent contenir les révoltes de Labors devenus furieux. Kenji Kawai se montre plus inventif dans les passages atmosphériques et contemplatifs typiques de ses musiques pour les films de Mamoru Oshii : c’est le cas notamment dans « Tomato Field » où il évoque une certaine ambiance de mystère avec quelques percussions ethniques et une utilisation plus étonnante de violons solos. Son utilisation très datée des synthétiseurs risquent fort d’en rebuter plus d’un ici, néanmoins, on appréciera dans le film le charme d’un morceau purement expérimental comme l’étrange « HOS », typique de l’inventivité habituelle de Kenji Kawai, qui maintient une forme de tension à l’écran à l’aide de sonorités électroniques répétitives particulièrement étranges (associées ici au monde informatique qui régit les Labors). « Street of Hallucination » développe alors de façon plus intense l’atmosphère mystérieuse et contemplative de « Tomato Field », alors que les deux inspecteurs poursuivent dans le film leur enquête au sujet d’Eiichi Hoba. A noter que ce morceau revient à plusieurs reprises dans le film, se rapprochant de ce qu’on pourrait qualifier de « motif de l’enquête ». L’utilisation des percussions ethniques annonce très clairement ici ce que fera Kawai quelques années plus tard sur la musique de « Ghost in the Shell », où il utilisera d’une façon relativement similaire des éléments typiques de la musique japonaise traditionnelle. En revanche, difficile d’être plus objectif concernant des morceaux extrêmement datés comme « Governmental PR » ou « GEGE » (musique de la scène du restaurant vers le début du film), qui ressemblent beaucoup à des musiques de jeux vidéos japonais des années 80. Dans « Resonance », le héros découvre le moyen qu’a trouvé le créateur du virus pour répandre facilement ce dernier sur toutes les machines de la ville. Kawai a de nouveau recours ici à un style électronique très daté, mais qui apporte un charme indéniable au film. On retrouve ensuite son style action habituel lorsque les policiers de la Division 2 se mettent en mouvement dans « Order To Go » et surtout l’héroïque « Inrsuh » avec sa guitare électrique cool, ses cordes et son style action/héroïque qui ressemble ici aussi beaucoup à certaines musiques de jeu vidéo du début des années 90, sans oublier une utilisation intéressante des percussions ethniques. L’attaque finale dans l’Arche (« The Ark ») permet au compositeur de reprendre ses rythmes action à grand renfort de cuivres, guitare électrique rock et rythmiques synthétiques speedées (une musique plutôt typique des dessins animés japonais d’action des années 80 !). La partition de « Patlabor » atteint d’ailleurs son climax avec « Collapse of Babel » pour la bataille finale, durant laquelle Kawai va même jusqu’à utiliser des choeurs épiques de toute beauté, mélangés à son orchestre et ses rythmiques synthétiques. Enfin, le compositeur se fait plaisir et nous offre une coda héroïque et entraînante délicieusement kitsch pour « Into the Morning Sunshine », accompagnant le générique de fin avec un optimisme héroïque très 80’s et aussi typiquement japonais (à mi-chemin entre les musiques de jeux vidéos et les séries animées eighties) : un pur régal pour tous les fans du genre ! Kenji Kawai signe donc une partition plutôt énergique et rythmée pour « Patlabor The Movie », une partition qui, sans atteindre le brio de ses partitions suivantes, apporte au film de Mamoru Oshii un charme indéniable qui séduira surtout les fans de musiques d’animes japonais des années 80. Les autres auront peut être du mal à passer la barrière du style synthétique/orchestral « kitsch » voulu par Kenji Kawai sur ce film - un style néanmoins très moderne pour l’époque et à la pointe de son temps au moment où le film sorti. On regrettera néanmoins ici l’absence étonnante d’un thème récurrent, empêchant alors la partition de décoller vraiment, se contentant finalement d’aligner les morceaux fonctionnels tout au long du film, et ce malgré une certaine inventivité évidente de la part de Kenji Kawai. Au final, le score de « Patlabor The Movie » constitue un agréable moment pour tous les fans de l’univers musical caractéristique des animes japonais à l’ancienne. ---Quentin Billard |