1-Player 5.42*
2-Replica 5.23**
3-Zero Signal 4.05
4-Solid State Society 4.40
5-Tempest 2.53
6-Born Stubborn 3.26
7-She Is 2.35***
8-From the Roof Top/
Somewhere In The Silence
(Sniper's Theme) 6.34+
9-Undivided 2.03
10-Blues in the Net 6.41
11-Human Step/
Aramaki's Theme 3.32
12-Date of Rebirth 4.40++
13-Take a Little Hand 5.05***
14-Remedium 3.11

*Ecrit par Yôko Konno
Interprété par Origa with Heartsdales
**Ecrit par Yôko Konno
Interprété par Ilaria Graziano
***Vocalises de Gabriela Robin
+Ecrit par Yôko Konno
Interprété par Ilaria Graziano
++Ecrit par Yôko Konno
Interprété par Origa.

Musique  composée par:

Yôko Kanno

Editeur:

Victor Entertainment VICL-62172

Album produit par:
Yôko Kanno

Artwork and pictures (c) 2006 Production I.G. All rights reserved.

Note: ***
GHOST IN THE SHELL STAND ALONE COMPLEX :
SOLID STATE SOCIETY
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Yôko Kanno
Après deux long-métrages d’exception réalisés par Mamoru Oshii en 1995 et en 2004, la saga « Ghost in the Shell » - inspirée du fameux manga de Masamune Shirow - s’est vu adapter en série animée de deux saisons de 26 épisodes chacune, intitulée « Ghost in the Shell : Stand Alone Complex », diffusée à partir de 2002 à la télévision japonaise. Un troisième long-métrage a ainsi vu le jour en 2006, sorti sous le nom de « Ghost in the Shell : Stand Alone Complex - Solid State Society ». En réalité, deux long-métrages ont déjà été crées juste avant « Solid State Society » : « The Laughing Man » et « Individual Eleven », ces deux films n’étant que des montages de différents épisodes de la série animée d’origine. « Solid State Society » est quand à lui un film inédit avec une histoire entièrement inédite, censée offrir une suite à une série laissée en suspend depuis 2005. Le film a été réalisé par Kenji Kamiyama (créateur de la série TV) et produit par Production I.G., à qui l’on doit quelques classiques de l’animation japonaise tels que « Ghost in the Shell » (le film de Mamoru Oshii), « Patlabor The Movie », « Jin-Roh » ou bien encore « Sakura Wars The Movie ». L’histoire de « Solid State Society » se déroule en 2034, soit deux ans après le départ du ‘Major’ Mokoto Kusanagi de la Section 9. Le ‘Major’ travaille désormais à son compte, tandis que la Section 9 a été entièrement restructurée, avec une équipe dirigée par Togusa sous la tutelle du vétéran Aramaki. La Section 9 est une unité d’élite anti-terroriste japonaise chargée d’enquêter sur les crimes en rapport avec le monde des cyber-technologies. Cette fois-ci, l’équipe de Togusa est confrontée à une vague de suicides inexpliqués qui touchent de nombreuses personnalités d’une organisation militaire sur le point de multiplier les actes terroristes sur le sol japonais par le biais d’un virus, et ce en représailles de la mort de leur dirigeant, le dictateur Ka Rum, chef de la junte militaire indonésienne de la République de Siak. Très vite, l’enquête de la Section 9 révèle l’existence de l’énigmatique « Marionnettiste », un hacker de génie qui semble être au coeur d’une mystérieuse conspiration terroriste. C’est au cours de son enquête que Batou - l’un des membres clé de la Section 9 - croise la route du Major, son ancienne alliée. Cette dernière lui adresse alors un étrange conseil : « Tiens-toi à l’écart du Solid State ». Ignorant encore tout au sujet de ce mystérieux « Solid State », Batou continue de mener à bien sa mission sans avertir ses supérieurs hiérarchiques qu’il a croisé la route du Major, craignant que cette dernière puisse être la fameuse « Marionnettiste ». Peu de temps après, un grand nombre d’enfants sont kidnappés dans des conditions étranges. La Section 9 ne tardera pas à comprendre que tous ces éléments sont reliés à la mystérieuse conspiration dirigée par le « Marionnettiste », qui tire les ficelles dans l’ombre.

« Solid State Society » s’avère être un anime plutôt réussi, fidèle à l’esprit de la série d’origine, « Ghost in the Shell Stand Alone Complex ». On y retrouve un graphisme similaire, des personnages qui nous sont familiers, puisque déjà présents dans les deux précédents films de Mamoru Oshii (la très sexy et glaciale Major Motoko Kusanagi, l’impressionnant et taciturne Batou, le flegmatique Togusa, le vétéran Aramaki, etc.) et bien sûr, une animation plutôt moderne, mélangeant 2D et 3D avec plus ou moins de bonheur - certains plans 3D s’avèrent être assez décevants dans le film, et notamment toute cette séquence de l’autoroute vers le milieu du film. L’histoire reste quand à elle relativement complexe et exigeante avec un zest de réflexion philosophique, et ce même si « Solid State Society » s’avère être bien moins complexe que les films d’Oshii sur ce sujet (et surtout, bien moins profond !). Le film illustre un thème rarement abordé dans le cinéma d’animation nippon, le problème de la baisse vertigineuse du taux de naissance au Japon et le vieillissement de la population, entraînant de nombreuses conséquences sur le plan social et politique. « Solid State Society » prend parfois même des allures de pamphlet politique lorsqu’il égratigne le monde des dirigeants japonais en dévoilant l’existence d’une importante conspiration gouvernementale - fictive - censée lutter contre le problème du vieillissement de la population japonaise et la création d’une nouvelle élite nippone. On pourra peut être regretter le côté parfois un peu alambiqué du scénario, mais l’intrigue reste suffisamment captivante pour nous maintenir en haleine jusqu’au bout. Le film en profite ainsi pour évoquer la relation plus ambiguë entre Batou et le Major, avec notamment une très belle séquence finale rendant d’ailleurs hommage à la conclusion du premier film de Mamoru Oshii sorti en 1995. Enfin, « Solid State Society » nous replonge à nouveau dans un univers de technologie high-tech avec les cyber-cerveaux implantés dans les humains, qui peuvent désormais communiquer à distance par la pensée (seule ombre au tableau : quelques touches d’humour mal placées vers la fin du film, avec la présence des Tachikomas rigolos, qui semblent résolument de trop ici !). Plus orienté sur l’action et l’enquête policière que sur la réflexion à proprement parler, « Solid State Society » s’avère être un film bien plus complexe qui n’y paraît, qui, sans atteindre le brio des films d’Oshii, apporte une pierre de plus à l’édifice, un long-métrage de qualité indispensable pour tous ceux qui s’intéressent à l’univers futuriste, riche et unique de « Ghost in the Shell ».

C’est l’indispensable Yôko Kanno qui signe la musique de « Solid State Society », la compositrice ayant déjà oeuvré sur les musiques de la série TV d’origine, « Ghost in the Shell Stand Alone Complex ». Yôko Kanno a écrit pour le film de Kenji Kamiyama une partition assez éclectique, tournant essentiellement autour d’un style rock/électro-techno du plus bel effet. Après la chanson du générique de début (« Player », interprétée par la chanteuse russe Origa et grande amie de la Yôko Kanno), le score débute avec « Zero Signal ». La compositrice amorce ici ce style électro-techno high-tech résolument moderne, évoquant l’univers technologique du film. « Zero Signal » commence d’ailleurs de façon plus étonnante avec le chant d’un quatuor féminin alors que l’on aperçoit le Major Kusanagi au début du film. Dans « Solid State Society », Yôko Kanno utilise un piano sur fond de guitare électrique rock et de loops électro/techno du plus bel effet. La compositrice maîtrise parfaitement ses différents axes musicaux et apporte au film une tension plutôt réussie et une ambiance d’action/suspense du plus bel effet. Dans « Tempest », la compositrice fait la part belle à des orchestrations plus classiques d’esprit avec un morceau éminemment dramatique, dominé par des cordes tragiques du plus bel effet. Kanno change ensuite de style dans « Born Stubborn » et utilise un ensemble de guitares country/blues du plus bel effet (à noter que le morceau n’a pas été utilisé dans le film mais provient de la série TV d’origine !).

Dans « She Is », Kanno développe une ambiance électronique plus sombre et mystérieuse à l’aide de nappes synthétiques brumeuses et étranges (renforcées par des sons parasites imitant les craquements d’un LP), le tout agrémenté de quelques vocalises féminines sensuelles interprétées par Gabriela Robin (pseudo artistique de Yôko Kanno). La compositrice se fait plaisir et nous offre même du rock électro funky pour la scène du sniper sur le toit de l’immeuble, le morceau « From the Roof Top - Somewhere in the Silence (Sniper’s Theme) » étant une autre musique inédite non utilisée dans le film mais qui provient en réalité de la série TV : à noter que la séquence de l’attaque finale du bâtiment vers la fin du film est accompagnée par la chanson « Replica », écrite par Yôko Kanno et interprétée par Ilaria Graziano. A noter d’ailleurs qu’il est rare de voir une scène d’action quasiment entièrement accompagnée par une chanson dans un film animé de ce genre ! Kanno poursuit son exploration d’ambiances électro plus sombres dans « Undivided » où l’orchestre est présent, sur fond de rythmes synthétiques inquiétants maintenant une tension tout au long du film. La seconde partie du morceau lorgne même vers un style hip-hop/électro du plus bel effet, qui retranscrit parfaitement ici aussi l’univers technologique et futuriste de cette enquête policière. Idem pour le synthétique et atmosphérique « Blues in the Net » qui fait curieusement intervenir vers la fin du morceau un motif de piano un brin mélancolique visiblement calqué sur le thème de « Spy Game » d’Harry Gregson-Williams - le morceau est entendu durant la scène où le Major communique avec l’esprit du Marionnettiste vers la fin du film, et qui apporte une émotion salvatrice à la scène de la révélation finale sur le conspirateur. Aussi curieux que cela puisse paraître, Kanno semble avoir été pas mal inspiré de Media-Ventures/Remote Control sur « Solid State Society », et plus particulièrement de John Powell, puisque certains morceaux ne sont pas sans rappeler le style des musiques de la saga « Jason Bourne ». Et que dire du morceau « Human Step/Aramaki’s Theme » dont le style solennel, épique et symphonique jure radicalement avec le reste de l’album (morceau utilisé dans la série TV d’origine), et dont les harmonies rappellent furieusement un thème du « Armageddon » de Trevor Rabin. Parmi les autres chansons du score, on notera la superbe chanson rock « Date of Rebirth » toujours interprétée par Origa, sans oublier « Take A Little Hand » et ses vocalises féminines paisibles sur fond de guitares.

La BO de « Ghost in the Shell Stand Alone Complex : Solid State Society » permet ainsi à Yôko Kanno de nous rappeler son goût pour l’éclectisme musical et la variété des ambiances. Curieusement, la version du score dans le film s’avère être bien moins intéressante et beaucoup plus orientée sur le style électro-techno/rock atmosphérique, avec quelques touches d’orchestre et des chansons bien placées. Rien de bien surprenant en soi, même si la musique apporte un rythme et une tension indispensable à cette enquête futuriste sur fond de conspiration gouvernementale. Ainsi donc, l’album que nous présente Yôko Kanno reflète donc plus un travail d’ambiances musicales conceptuelles, un mélange extrêmement varié de différents styles musicaux, parfois sans aucune unité stylistique, à travers une sélection alternant musique originale du film et musiques extraites de la série TV d’origine. A ce sujet, il est d’ailleurs regrettable de constater que l’album de « Solid State Society » n’a somme toute quasiment rien à voir avec la version du film, et que beaucoup de morceaux du film proviennent en réalité des deux saisons de la série « Ghost in the Shell Stand Alone Complex » (pourquoi ne pas avoir sorti un album entièrement consacré à la musique du film « Solid State Society » ?). Autre problème majeur : l’absence totale d’un thème fédérateur, qui fait quelque peu défaut à la musique du film et ne parvient pas à empêcher le score de sombrer dans un style somme toute assez fonctionnel. Bref, cela reste finalement du bon travail, même si l’on a connu une Yôko Kanno plus ambitieuse et inspirée !



---Quentin Billard