1-Destiny's Encounter 5.02
2-Prologue to Death 4.35
3-From a Distant Love 4.13
4-Resonance of the Abyss 2.37
5-Immortal Incarnation 3.49
6-Whispers of Ancient Times 2.36
7-Pieces of a Dream 2.21
8-Illogical Agreement 2.23
9-Traces of a Plot 2.51
10-At the End of the World 5.06

Musique  composée par:

Taro Iwashiro

Editeur:

Avex Trax Entertainment Inc.
AVCD-17775

Album produit par:
Taro Iwashiro

(c) 2005 Avex Entertainment Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
SHINOBI
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Taro Iwashiro
« Shinobi » est une grosse production japonaise réalisée par Ten Shimoyama et sorti durant l’année 2005. Le film évoque la rivalité ancestrale qui oppose deux clans de ninjas dans le Japon de 1614. Cette rivalité menace une paix précaire qui unit le pays. C’est pourquoi le Shogunat décide alors d’organiser un grand combat à mort opposant cinq des meilleurs guerriers des deux clans, chacun étant rompu à l’art ancestral du Shinobi. Le vainqueur de ce combat à mort deviendra alors l’héritier du royaume. C’est ainsi que la belle Oboro (Yukie Nakama), du clan Iga, et le vaillant Gennosuke (Jô Odagiri) du clan Kouga, se retrouvent obligés de s’affronter lors de ce combat à mort, alors qu’ils s’aiment en secret depuis longtemps. Désormais, ils vont devoir choisir entre leur amour et l’honneur de leur clan. « Shinobi » repose donc sur une trame scénaristique très classique, qui n’est au final qu’un prétexte à une série de chorégraphies de combat virtuoses et plutôt réussies. Le film s’inspire de la série animée japonaise « Basilisk » créée par Kenya Hirata et Futaro Yamada, et qui était lui-même adapté du roman « Koga Ninpo-cho » écrit par Futaro Yamada. Le réalisateur Ten Shimoyama s’inspire donc de la vraie histoire de l’affrontement des clans Koga et Iga dans le Japon médiéval en apportant une touche de fantastique à son film - les héros sont tous dotés de pouvoirs surnaturels. Le film n’apporte pas grand chose de neuf au genre et s’inscrit dans la tradition des films de sabre hongkongais (Wu Xia Pian) avec ici une dimension fantastique supplémentaire. Avec son mélange d’action, d’amour, de combats violents et d’effets spéciaux numériques, « Shinobi » reste un divertissement honnête mais prévisible et sans surprise, une sorte de « Roméo et Juliette » transposé dans le Japon médiéval, respectueux de traditions populaires et ancestrales. L’action et l’émotion sont donc au rendez-vous, le tout servi par une mise en scène assez contemplative et de magnifiques décors naturels.

La partition symphonique du compositeur japonais Taro Iwashiro apporte une dimension émotionnelle et dramatique assez savoureuse au film de Ten Shimoyama. Le compositeur nippon, connu pour son goût pour des musiques lyriques et élégiaques, reste fidèle à son style habituel avec « Shinobi ». Sa partition utilise toutes les ressources habituelles de l’orchestre symphonique agrémenté de quelques instruments solistes évoquant les décors asiatiques du film. Dans « Destiny’s Encounter », Taro Iwashiro évoque ainsi la rencontre entre Oboro et Gennosuke avec un premier thème plutôt mélancolique, annonçant clairement le drame à venir. Ce thème dramatique est confié ici à des cordes, une harpe et quelques instruments à vent - flûte, hautbois, cors - un thème que le compositeur développe pleinement tout au long du film jusqu’à lui donner une certaine ampleur à l’orchestre avec l’ajout des percussions annonçant clairement le combat à venir. On reconnaît d’emblée ici le style orchestral habituel du compositeur japonais, qui joue davantage ici sur l’émotion et l’ambiance dramatique que sur l’action à proprement parler. Enfin, le deuxième grand thème du score est entendu à la fin de « Destiny’s Encounter », un thème qui reviendra lui aussi tout au long du film, associé à l’idée de la destinée et du combat à mort entre les deux amants. Le thème sombre introduit dans l’ouverture revient dans « Prologue to Death », qui crée une tension et un suspense pesant avec des sonorités graves et pesantes de l’orchestre (roulements de timbales, col legno des cordes, registre grave du piano). On retrouve ici le motif de 4 notes des cuivres entendu brièvement dans « Destiny’s Encounter », qui fera alors office de motif du combat. C’est aussi l’occasion pour le compositeur de mettre davantage en avant ici les percussions ethniques/asiatiques indissociables de ce type de musique, pour marquer le début du combat.

« From a Distant Love » reprend le motif de cuivres de 4 notes associé au combat et développe une nouvelle phrase mélodique émouvante et poignante évoquant l’amour impossible entre Oboro et Gennosuke - sans aucun doute l’un des plus beaux morceaux du score de « Shinobi ». Le compositeur en profite aussi pour développer le thème principal entendu à la fin de « Destiny’s Encounter ». Sa musique oscille ainsi tout au long du film entre atmosphères sombres comme « Resonance of the Abyss » et ses cordes plaintives et lyriques, « Immortal Incarnation » avec ses gongs tibétains et ses percussions métalliques, et passages plus dramatiques et émouvants comme « Whispers of Ancient Time », sans aucun doute le plus beau passage de la partition de Taro Iwashiro. Le compositeur fait preuve ici d’un classicisme d’écriture élégant et d’un lyrisme raffiné typique de ses compositions plus dramatiques, en associant cordes et vents pour un nouveau passage mélancolique de toute beauté sur l’idée de l’amour impossible entre les deux guerriers. Cette même mélancolie revient dans le poignant « Pieces of a Dream », où la mélodie de flûte évolue sur un tapis de cordes dramatiques du plus bel effet, tout en jouant sur une retenue intimiste touchante. La musique n’en fait jamais de trop et conserve ce côté lyrique et poétique propre à Taro Iwashiro, avec un classicisme d’écriture évident et une omniprésent des thèmes et des phrases mélodiques (on retrouve par exemple la mélodie mélancolique de « Whispers of Ancien Times » dans « Pieces of a Dream »). A l’écran, l’émotion est évidente très présente, alors qu’un passage plus sombre comme « Illogical Agreement » ramène de la noirceur et de la tension dans la partition de « Shinobi ».

Le score aboutit à un climax dramatique saisissant dans « At the End of the World », dans lequel Taro Iwashiro résume l’essentiel de sa partition sur plus de 5 minutes, entre cordes dramatiques, instruments solistes et percussions guerrières. Le compositeur en profite aussi pour développer ses différents thèmes, avec notamment le thème principal, le thème mélancolique de hautbois de « Whispers of an Ancient Times », le thème romantique émouvant de « From a Distant Love », repris ici dans toute sa splendeur par l’orchestre, et le motif de 4 notes du combat, concluant le film sur une dernière touche d’émotion. Taro Iwashiro signe donc une très belle partition au lyrisme élégant et retenu, une musique dramatique et poétique qui n’en fait jamais de trop et conserve donc cette retenue assez minimaliste typique du musicien nippon. Sa partition évoque donc à la fois l’idée d’un combat à mort inexorable et celle d’un amour impossible entre deux êtres que tout oppose, et dont la destinée tragique les amènera à faire un choix difficile. Les fans de Taro Iwashiro seront donc comblés par la beauté de cette partition orchestrale qui, bien que sans grande originalité particulière, rappellera encore une fois à quel point le musicien japonais est définitivement le compositeur du lyrisme et de l’émotion !



---Quentin Billard