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1-L'Outremangeur (part 1) 3.04
2-Impossible Amour (générique début) 2.44 3-La Ballade de Séléna 2.33 4-Introspection 0.19 5-Marseille Hold-Up 2.12 6-L'Enfermement (part 1) 1.53 7-Glissements (part 1) 0.51 8-L'Enfance (part 1) 0.46 9-L'Outremangeur (part 2) 1.27 10-Doutes 1.46 11-Premiers Regards 1.08 12-Le Couloir 0.48 13-La Rafle 1.36 14-Elsa 1.50 15-Impossible Amour (part 2) 1.38 16-L'Outremangeur (part 3) 2.41 17-Le Restaurant Chinois 0.32 18-L'Enfance (part 2) 1.41 19-Glissements (part 2) 0.55 20-L'Enfermement (part 2) 1.54 21-L'Outremangeur (part 4) 2.49 22-La Moto 2.11 23-La Ballade et le Souvenir 2.14 24-Le Traumatisme 0.11 25-Impossible Amour (générique de fin) 2.49 26-L'Outremangeur (part 5) 2.04 Musique composée par: Nicolas Errèra Editeur: Milan Music 301 669-2 Album produit par: Nicolas Errèra (c) 2003 Film Par Film/TF1 Films Production/TPS Star. All rights reserved. Note: ***1/2 |
L'OUTREMANGEUR
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ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
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Music composed by Nicolas Errèra
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« L’Outremangeur » est l’adaptation cinématographique de la bande dessinée éponyme de Tonino Benacquista et Jacques Ferrandez, réalisée par Thierry Binisti en 2003 avec Eric Cantona dans le rôle du commissaire principal Séléna, de la SRPJ de Marseille. Ce dernier est un homme obèse dépassant les 160 kilos mais qui possède une intuition à toute épreuve, craint et respecté de tous. Son seul problème vient de son obsession pour la nourriture : il mange tout le temps, à toutes les heures, il mange pour tenter d’oublier un souvenir douloureux, il mange pour s’échapper de ce monde. Enquêtant sur le meurtre d’Emile Lachaume (Richard Bohringer), l’un des plus importants armateurs du port de Marseille, Séléna croise la route de la jeune Elsa (Rachida Brakni), qu’il sait coupable du meurtre de son oncle. Il décide alors de lui proposer un bien étrange deal : en échange de son silence, Séléna exige que la jeune femme vienne dîner chez lui tous les soirs pendant un an. Révoltée, Elsa n’a pas d’autre choix que d’accepter la proposition du commissaire. Une relation assez étrange s’installe alors entre eux deux, mais passé le malaise des premiers jours, Elsa, toujours aussi révoltée, va découvrir petit à petit un autre aspect de la personnalité de Séléna, bien enfoui derrière ses 160 kilos de chair. « L’Outremangeur » est une belle fable moderne inspirée de « La Belle et la Bête », un conte urbain qui doit beaucoup à la performance incroyable d’Eric Cantona, totalement métamorphosé - on ne pourra qu’apprécier ici la qualité des maquillages - l’acteur parvient ainsi à insuffler une vraie profondeur dramatique à son personnage, entre les scènes de grande bouffe dérangeantes et pathétiques, et celles où le personnage révèle ses sentiments avec un naturel et une profondeur inattendue. Les scènes où la jeune Rachida Brakni l’observe silencieusement en train de dévorer tous ses plats sont à la fois extrêmement denses et émotionnellement très forts - un regard suffit à exprimer toute l’intensité dramatique de la scène. Entre l’humanité enfouie du personnage d’Eric Cantona et sa relation difficile et bouleversante avec une jeune femme qui apprendra progressivement à découvrir l’homme qui se cache derrière « la bête », « L’Outremangeur » est une fable moderne rafraîchissante et poignante, le tout sur fond de décors marseillais et d’une image belle et impressionniste.
La musique minimaliste de Nicolas Errera apporte une poésie certaine à « L’Outremangeur ». Fidèle à son style habituel, le compositeur français mélange ici musique électro et instruments acoustiques avec une aisance certaine. Sa musique fait autant appel aux loops électro qu’il affectionne tant qu’aux instruments organisés en formation de chambre. Le thème principal de « L’Outremangeur » est accompagné par un rythme électronique moderne resituant cette fable inspirée de « La Belle et la Bête » dans le Marseille d’aujourd’hui, le tout agrémenté de quelques cordes. Le compositeur nous propose d’ailleurs une série de variations autour de ce thème tout au long de son album. Dans « Impossible Amour (générique de début) », Nicolas Errra nous offre un thème romantique mélancolique et poignant pour cordes et piano, minimaliste et tout en retenu, un très beau thème évoquant clairement ici l’idée de l’amour impossible entre Séléna et Elsa. Le compositeur fait preuve ici d’une grande sensibilité et d’une certaine délicatesse, sans jamais en faire de trop. Sa musique opte donc pour une approche résolument minimaliste qui sied parfaitement au ton du film. Le commissaire Séléna a droit à son propre thème dans « La Ballade de Séléna », un très beau thème à trois temps confié à un violoncelle soliste dont la mélodie délicate et lyrique apporte une certaine poésie au personnage d’Eric Cantona - il rappelle l’humanité enfouie du policier - tandis que le violoncelle est accompagné par des pizzicati et des staccatos de cordes samplées, apportant une dimension synthétique adroite au morceau, sans jamais tomber dans les excès des musiques synthétiques et des samples faciles. Le tout est donc exécuté avec une grande justesse et une certaine adresse typique des musiques de Nicolas Errrera. Le compositeur apporte néanmoins un travail plus prononcé autour de l’électronique dans « Introspection » et surtout « Marseille Hold Up », où les notes rapides des synthétiseurs créent ici une ambiance assez particulière, pour la scène où Séléna mène son enquête - à noter que certains morceaux présentés ici sur l’album n’ont pas été utilisés dans le film. Dans « L’Enfermement », Errera évoque l’isolement du personnage principal dans son univers peuplé de nourriture et de grande bouffe. Pour se faire, le musicien opte pour une approche instrumentale plus acoustique, à l’aide d’accords hésitants des cordes, symbolisant ici la souffrance enfouie et les tourments de Séléna. En jouant sur les pauses et les silences, « L’Enfermement » parvient à apporter une poésie subtile et poignante au personnage de Cantona, tout en conservant cette approche minimaliste omniprésente tout au long de la partition de « L’Outremangeur ». Certains passages comme « Doutes » (avec ses synthétiseurs kitsch rappelant la musique électro des années 80), « Le Couloir » et « Glissements » permettent au musicien de développer des atmosphères électro plus abstraites et quasi expérimentales, apportant une ambiance plus particulière au film. Nicolas Errera développe alors son thème principal (« L’Outremangeur »), qui apporte à son tour une certaine mélancolie au personnage de Séléna tout en demeurant malgré tout répétitif et déterminé. On remarquera d’ailleurs qu’au fur et à mesure que l’histoire avance, la musique fait de plus en plus appel aux instruments acoustiques en délaissant progressivement l’électronique. C’est le cas dans l’hésitant « Premiers regards » ou le jazz savoureux de « La Rafle », sans oublier l’intimiste et mélancolique solo de piano de « Elsa », celui de « L’Enfance » (associé aux souvenirs d’enfance lointains de Séléna) ou les développements du thème romantique de « Impossible Amour » ou du thème de « L’Outremangeur » et ses loops électro modernes sur fond de pizzicati de cordes. Errera reprend aussi le thème à trois temps de Séléna et son violoncelle lyrique et délicat sur fond de pizzicati dans « La ballade et le souvenir », sans oublier une ultime reprise pour le générique de fin du thème romantique pour « Impossible Amour (générique de fin) ». Nicolas Errera signe donc une partition fraîche, simple et délicate pour « L’Outremangeur », un score à la fois classique et moderne, rappelant ainsi le talent du compositeur pour les mélanges adroits entre l’électronique et les instruments acoustiques, et qui apporte au film de Thierry Binisti une poésie et une délicatesse rare, grâce à une poignée de mélodies toutes plus réussies les unes que les autres. Recommandé, donc ! ---Quentin Billard |