1-Main Title/The Base 3.04
2-Tired Doctor 1.40*
3-The Bottle Snatcher 2.55*
4-No Answer 1.14
5-Dockside 0.46
6-The Deal 3.11
7-Chemistry Lesson 2.16
8-The Vault 2.10*
9-Empty Box 0.41
10-The Telegram/
The Killers at Home 2.11
11-The Skin Diver 2.46
12-His Master's Voice/
The Phone Call 1.18
13-The Investigator 0.55
14-The Box 1.00
15-The Captives 1.45
16-Escape Route 2.27
17-The Getaway 6.19*
18-Lock Up 2.09
19-Instant Death 1.26*
20-The Hitchhiker 1.31*
21-End of the Line 2.17*
22-Road Block 3.10*
23-The Clue/Traffic Jam 1.31*
24-The Hidden Bottle*/Bail Out*/
End Title 5.25

Bonus Tracks

25-Bongo Blues (Jack Costanzo)*/
Dockside 1.45
26-Source Music 2.52
27-The Clue 1.01
28-End Title 0.27

*Contient des effets sonores !

Musique  composée par:

Jerry Goldsmith

Editeur:

Film Score Monthly FSM Vol.10 No. 6

Album produit par:
Lukas Kendall
Direction musicale pour
Metro-Goldwyn-Mayer Inc:
Barbara Custer

Edition limitée à 3000 exemplaires.

Artwork and pictures (c) 1965/1992 Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc. All rights reserved.

Note: ****
THE SATAN BUG
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Jerry Goldsmith
« The Satan Bug » (Station 3 Ultra Secret) est l’adaptation cinématographique du roman éponyme d’Alistair MacLean, un film d’espionnage autour d’un thème très prisé au cinéma : la menace d’un virus expérimental sur la population. Réalisé en 1965 par John Sturges, cinéaste américain très connu dans le genre du western (« The Magnificent Seven », « Hour of the Gun », etc.), « The Satan Bug » s’inscrit dans la continuité des autres films de science-fiction/suspense du réalisateur comme « Ice Station Zebra » (1968), qui était déjà adapté d’un autre roman d’Alistair MacLean, ou « Marooned » (1969). Pour « The Satan Bug », John Sturges nous plonge dans une histoire de course contre la montre pour stopper des terroristes sur le point d’utiliser un virus expérimental dérobé dans le complexe scientifique secret « Station 3 ». Suite au vol d’une fiole contenant le virus, le gouvernement américain décide de confier à l’agent Lee Barrett (George Maharis) la mission de mener l’enquête sur ce cambriolage et de retrouver le virus avant qu’il ne soit trop tard. Placé entre de mauvaises mains, le virus baptisé « Satan Bug » pourrait éradiquer en seulement quelques minutes toute la population d’une grande ville. Les terroristes envoient alors un message anonyme aux autorités en soumettant tous les Etats-Unis à un terrifiant chantage. « The Satan Bug » évoque donc le thème de la menace bio-terroriste, un sujet déjà assez présent dans le cinéma américain des années 60 et toujours à la mode à l’heure actuelle. La mise en scène de John Sturges reste très classique dans son genre, favorisant la tension et le suspense avec une intensité constante. Le film a malheureusement pris un bon coup de vieux et certains éléments flirtent bon avec le kitsch des « sixties » (le générique de début animé, le look carton-pâte de l’intérieur de Station 3, etc.), mais le film se laisse regarder avec un certain plaisir, servi par un casting de qualité (George Maharis, Richard Basehart, Anne Francis, Dana Andrews, etc.) et un rythme assez soutenu, malgré une première partie un peu trop bavarde et explicative, dans laquelle on s’ennuie un peu. Dommage aussi que le dénouement final dans l’hélicoptère soit visuellement un peu raté et assez décevant.

La partition musicale de Jerry Goldsmith pour « The Satan Bug » reste typique des musiques de thriller/suspense du maestro des années 60. Le compositeur nous livre ici une très solide partition orchestrale teintée d’expérimentations électroniques et d’éléments empruntés à la musique dodécaphonique du 20ème siècle. En 1965, le jeune Jerry Goldsmith n’en était pas à son premier coup d’essai dans le domaine des musiques à suspense, puisqu’il avait déjà écrit les musiques des thrillers « City of Fear » (1959), « The Prize » (1963), « Seven Day in May » (1964) et « Shock Treatment » (1964). Néanmoins, avec « The Satan Bug », le maestro dévoila à cette époque un style plus complexe et musclé, alliant action et tension avec une inventivité constante, le tout dans une partition qui posera les bases solides des futures grandes partitions avant-gardistes et atonales du compositeur pour les années à venir (« Planet of the Apes », « Coma », « Capricorn One », etc.). Le score de « The Satan Bug » utilise une orchestration assez originale : pas de violons ni d’altos dans le pupitre des cordes qui se résume essentiellement à un groupe de violoncelles et de contrebasses, un pupitre de cuivres, un pupitre à vent assez large, et de nombreuses percussions assez variées (cymbale, timbales, grosse caisse, caisse claire, bongos, gong, marimba, célesta, claves, jawbone, toms, etc.). On n’oubliera pas de mentionner par la même occasion la présence d’éléments électroniques - avec l’utilisation des claviers Novachord et Solovox, synthétiseurs très à la mode dans les années 60 - qui préfigurent déjà les futurs travaux du compositeur dans ce domaine pour les années à venir. Le score s’articule autour d’une thématique forte, comme toujours chez Jerry Goldsmith, avec pour commencer le « Main Title/The Base » sériel construit autour d’une série de 12 sons, dans la tradition de la musique sérielle/dodécaphonique savante de la première partie du 20ème siècle. Le principe reste toujours le même ici : il s’agit d’énoncer les 12 sons de la gamme chromatique sans jamais répéter la moindre note. Quand le compositeur est arrivé au bout des 12 notes, il a très souvent la possibilité de refaire la même gamme en écrevisse (sens contraire) ou en miroir. C’est ce que fait Goldsmith ici pour le générique de début du film. Son « Main Title » élabore donc la série de 12 sons autour d’un motif d’abord initialement annoncé par des cors. Le livret de l’album publié par FSM précise même l’échelle employée- La - Fa - Mi - Sol dièse - Si - Sol - Mi b - Ré - Si b - Sol b - Ré b - Goldsmith n’utilisant d’ailleurs que 11 des 12 notes de la gamme pour l’introduction. Puis, l’orchestre développe alors de façon plus ample et posée le thème principal sériel avec une nouvelle variante transposée : Fa dièse - Ré - Do dièse - Fa - Sol dièse - Mi - Do - Si - La - Mi b - Si b - La, la gamme étant cette fois-ci complète, interprétée par un mélange sombre de deux bassons, deux clarinettes basses, deux contrebassons et huit contrebasses. A ce thème sériel vient se greffer par dessus un très intéressant motif rythmique de flûtes/xylophone sur des rythmes syncopés à la Bartók, et quelques percussions diverses (dont les raclements des jawbones) agrémentées de sonorités électroniques qui seront très présentes tout au long du film. A noter que le motif dissonant de flûtes/xylophone -qui accompagne les images du générique de début animé- se conclut à la fin du générique par un nouveau motif de 3 accords de cuivres ascendants, motif qui sera très présent tout au long du film. Le morceau évoque clairement, par son atmosphère sombre et menaçante, le virus du « Satan Bug » qui sera au coeur même de l’histoire.

Après cette introduction sérielle, Goldsmith nous fait ensuite entendre le thème associé au virus, un motif de 5 notes descendantes dont la particularité vient de l’utilisation d’une échelle orientale assez inattendue dans le contexte du film, mais qui apporte une sonorité assez particulière au « Satan Bug » dans l’histoire (un motif que Goldsmith réemploiera d’ailleurs en 1998 pour la partition de « The Mummy »). Ce motif mystérieux sera d’ailleurs très présent tout au long du score. Dans « Tired Doctor », Goldsmith développe une atmosphère plus sombre et incertaine en introduisant les sonorités synthétiques étranges du Novachord, associées à la menace du virus tout au long du film. Le premier morceau d’action solide est entendu dans « The Bottle Snatcher », pour la scène où les terroristes dérobent la fiole de virus dans la Station 3. C’est l’occasion pour le compositeur de développer un nouveau motif qui sera lui aussi très présent tout au long du score, un ostinato mélodique entêtant de 5 notes construites sur un rythme à 5/4 autour des sonorités électroniques étranges du Solovox. Ce motif obsédant et répétitif est le leitmotiv des terroristes dans le film, et plus particulièrement de Donald (Frank Sutton) et son complice Veretti (Edward Asner). Ce leitmotiv sera véritablement au coeur même de la partition, son omniprésence apportant tout au long du film ce climat de menace et de tension propice à l’atmosphère de conspiration du film. Comme toujours avec Jerry Goldsmith, le choix des sonorités synthétiques est toujours extrêmement adroit et inventif, le compositeur démontrant dès 1965 qu’il fut plus que jamais un amoureux des expérimentations électroniques incorporées - comme un instrument à part entière - avec le reste de l’orchestre symphonique. C’est d’ailleurs un élément-clé du score de « The Satan Bug », et une première marque de fabrique d’un compositeur qui pose déjà les bases d’une personnalité musicale forte et affirmée, et qui trouvera un écho favorable dans ses futures partitions des années à venir. La première partie du film reste dominé par une atmosphère mystérieuse et un peu sombre comme dans « No Answer », « Dockside », « The Vault » ou le tendu « Chemistry Lesson », lors de la révélation par l’un des scientifiques de la Station 3 du vol du virus « Satan Bug ». Le motif intriguant du virus reste donc très présent ici, symbole du danger et d’une menace certaine.

« The Empty Box » dévoile toute l’inventivité habituelle du compositeur pour un bref morceau de 44 secondes orchestré avec soin, utilisant brillamment le piano pour une reprise du thème sériel du « Main Title » sur fond de raclement de percussions et d’une reprise du motif de 3 notes de l’introduction. Fidèle à son goût pour des développements thématiques denses et à l’omniprésence des thèmes, Goldsmith nous propose ainsi dans « The Telegram/The Killers At Home » des variations intéressantes autour de l’obsédant motif des terroristes confié au Solovox sur un rythme à 5/4, et quelques développements du motif sériel introductif dans « The Skin Diver » et du motif mystérieux du virus. Goldsmith intensifie ici le suspense et la tension avec une inventivité certaine dans le maniement de ses différentes sonorités acoustiques ou électroniques (présence continue ici du Solovox et du Novachord). Arborant ainsi un style atonal et parfois même plus dissonant, la musique fait progressivement monter la tension tout au long du film de John Sturges avec une intensité et un intérêt constant. On appréciera notamment la façon dont le compositeur utilise parfois les percussions comme dans « The Investigator », où il mélange avec inventivité bongos, guiro et cuivres pour une série de variations autour du motif sériel de 12 notes. C’est la richesse des orchestrations et la façon avec laquelle Goldsmith joue ici avec ses différentes sonorités qui font tout l’intérêt et la richesse de la partition inventive de « The Satan Bug ».

La tension monte encore d’un cran dans « The Box », « Escape Route » et « The Captives », avec ses reprises plus pressantes du motif de Solovox à 5/4 des terroristes, couplé cette fois-ci au motif du virus « Satan Bug ». Goldsmith apporte dans le film une dimension réellement obsédante et entêtante à ces thèmes, une répétition acharnée des ces motifs qui contribuent grandement à accroitre la tension et le suspense dans le film tout en conservant une inventivité et un souci constant de développements thématiques. La partition de « The Satan Bug » atteint l’un de ses premiers climax d’action dans « The Getaway » (malheureusement un peu gâché par de nombreux FX et bruitages que les concepteurs du CD n’ont pas pu retirer du master qui a été retrouvé miraculeusement !), superbe morceau d’action de plus de 6 minutes accompagnant la séquence de la poursuite sur la route. C’est l’occasion pour Goldsmith de mettre en avant ces rythmes action complexes, avec son lot de percussions martiales, de cuivres massifs et de rythmes enragés de piccolos/xylophones (qui rappellent un peu les sonorités du « Main Title »). Le motif des terroristes reste très présent, tout comme celui du virus ainsi que le thème sériel principal de 12 notes. Jerry Goldsmith nous offre ainsi un superbe morceau d’action/suspense dans lequel toutes les formules musicales habituelles du compositeur sont présentes : la scène n’aurait certainement aucun impact sans l’indispensable morceau écrit par le maestro pour les besoins de cette scène musclée. A noter que certains rythmes et certaines couleurs instrumentales ne sont pas sans rappeler le « Sacre du Printemps » de Stravinsky, influence fréquente chez Jerry Goldsmith (notamment dans le jeu d’un motif répétitif de trombones en sourdine vers la fin du film !). Autre morceau-clé de la partition, le superbe « Instant Death », qui développe de façon plus complexe et intense le motif des terroristes, le motif de 3 notes et celui du virus sur fond de rythmes syncopés complexes et intenses, pour la scène de la mort d’un agent du gouvernement, tué par une fiole du virus.

Dès lors, la musique devient particulièrement sombre, complexe et agressive, au fur et à mesure que la traque s’intensifie jusqu’au dénouement final. On retrouve ainsi l’action dans l’excitant « Road Block » pour la scène du barrage policier, teinté de rythmes agressifs influencés par Béla Bartók. Le motif de 12 notes est toujours présent, tout comme celui des terroristes, mais cette fois-ci, le Solovox est remplacé par d’autres instruments de l’orchestre (piano, etc.), avec un accompagnement percussif extrêmement riche et inventif (dans la lignée du travail de Jerry Goldsmith sur la musique du film « Seven Days in May »). La poursuite touche à sa fin dans l’intense « The Hidden Bottle/Bail Out », pour la confrontation finale dans l’hélicoptère et l’exploit héroïque de l’agent Barrett, qui réussit enfin à récupérer la fiole de virus à la fin du film. Jerry Goldsmith signe donc en 1965 une grande partition d’action et de suspense pour « The Satan Bug », un score assez moderne pour l’époque, reflétant toute l’inventivité du compositeur et la richesse de ses trouvailles mélodiques et/ou instrumentales. Le score mélange ainsi suspense atonal, parties sérielles et déchaînements orchestraux complexes avec une aisance incroyable, le maestro californien nous offrant une vision musicale sombre et adéquate de cette implacable traque au virus, si bien que le score de « The Satan Bug » reste un incontournable de son genre dans la filmographie « 60’s » du compositeur, un score injustement tombé dans l’oubli au cours de ces 10 dernières années mais que les fans de Jerry Goldsmith pourront enfin redécouvrir grâce à l’excellente édition CD publiée par FSM, mais qui contient malheureusement des FX enregistrés sur la copie du score qui a été retrouvé (le master d’origine ayant été détruit). Voilà donc une très grande partition thriller de Jerry Goldsmith, qui n’a pas pris une seule ride malgré son âge (1965), un score incroyablement moderne pour l’époque et très prenant, à ne surtout pas manquer !



---Quentin Billard