1-The Egg 1.06
2-Spying 2.27
3-The First Bath 2.50
4-It's Not Just About You 1.29
5-Tram at Dawn 1.05
6-You Don't Matter 2.41
7-Reading 1.51
8-Cycling Holiday 1.40
9-Sophie/The Lady With
The Little Dog 3.00
10-Go Back to Your Friends 5.21
11-Not What I Expected 1.28
12-Handwriting 2.19
13-The Failed Visit 4.59
14-Verdict 1.35
15-Mail 3.38
16-Letters 2.39
17-I Have No One Else to Ask 3.42
18-Piles of Books 2.13
19-Who Was She? 6.48

Musique  composée par:

Nico Muhly

Editeur:

Lakeshore Records LKS-34061

Album produit par:
Nico Muhly

Artwork and pictures (c) 2008 The Weinstein Company. All rights reserved.

Note: ***
THE READER
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Nico Muhly
Adapté du roman « Le Liseur » de l’auteur allemand Bernhard Schlink et réalisé par Stephen Daldry, « The Reader » est un drame poignant qui se déroule à Berlin en 1958. Michael Berg (David Kross) est un jeune lycéen de 15 ans qui entretient pendant l’été une liaison avec une femme plus âgée de 20 ans, Hanna Schmitz (Kate Winslet), modeste employée de tramway. Hanna lui demande alors de lui faire la lecture de nombreux ouvrages littéraires, parmi lesquels se trouvent « Guerre et Paix », « Les Aventures de Huckleberry Finn » ou bien encore « Lady Chatterley ». Mais un jour, Hanna obtient une promotion et part sans prévenir Michael. Ce dernier continue alors ses études de droit et devient avocat. C’est au cours de l’année 1966 que son professeur (Bruno Ganz) l’emmène avec quelques uns de ses camarades assister au procès d’anciennes gardiennes SS d’Auschwitz. Michael découvre alors, stupéfait, qu’Hanna est l’une des accusées. Cette dernière se défend de façon maladroite et ses ex-collègues la chargent afin d’alléger leurs propres responsabilités, accusant Hanna d’avoir été le chef de leur groupe. Cette dernière est alors accusée d’avoir laissé enfermés des prisonniers dans une église en flamme suite à un bombardement, avant de rédiger par la suite un rapport à ses supérieurs couvrant ses extractions. Le juge demande alors à Hanna d’écrire quelque chose afin de comparer son écriture avec celle du rapport, mais elle refuse. C’est alors que Michael comprend son secret : Hanna est en réalité analphabète, elle ne sait pas lire ni écrire et elle en a honte. C’est pourquoi elle lui demanda régulièrement de lui lire des livres lorsqu’ils se voyaient régulièrement il y a plus de 10 ans. Michael décide alors de ne pas révéler son secret à la cours et Hanna est alors condamnée à perpétuité. Michael suit sa vie mais devient renfermé, jusqu’au jour où, dans les années 70, il retrouve des vieux livres qu’il lisait autrefois à Hanna et décide de lui enregistrer des cassettes de lecture et de les lui envoyer en prison. « The Reader » est un drame humain filmé avec une sobriété exemplaire, l’histoire d’amour impossible entre un jeune homme innocent et une ancienne tortionnaire SS - campée avec brio par l’excellente Kate Winslet. Le film pose la question du dilemme moral et de la crise de conscience d’un homme qui se rend compte au bout de plusieurs années que son amour de jeunesse était en réalité un monstre. Evitant systématiquement de porter le moindre jugement moral, « The Reader » évite tout manichéisme et dresse un récit plutôt froid et distant sur le rapport entre Michael et Hanna, un récit non dénué de sentimentalisme mais qui parvient néanmoins à éviter tout accès lacrymal en optant pour un ton plutôt sobre et intimiste assez saisissante. Le réalisateur de « The Hours » offre ainsi un rôle en or à Kate Winslet, qui obtint d’ailleurs l’Oscar de la meilleure actrice en 2009.

La partition orchestrale de « The Reader » a été confiée à Nico Muhly, un jeune compositeur de 28 ans tout juste diplômé de la Columbia University et de la Julliard School of Music et qui se voit confier ici son quatrième projet pour le cinéma (et surtout, son premier film majeur). Le score de « The Reader » repose essentiellement sur un ensemble constitué d’un piano, quelques vents et quelques cordes sans grande prétention. Le thème principal est entendu dès le début du film dans « The Egg », introduit avec sobriété par quelques notes de piano sur fond de cordes et de harpe. La musique joue ici sur une certaine retenue intimiste touchante à l’écran, bien qu’extrêmement prévisible et sans grande originalité. Même chose pour « Spying », qui évoque les sentiments de Michael pour Hanna, avec le piano, les cordes et les vents (flûtes, hautbois, bassons, etc.). Les solistes possèdent donc un rôle majeur ici, Nico Muhly faisant preuve d’un certain savoir-faire dans son écriture orchestrale, notamment dans la façon dont il écrit pour les instruments solistes. Dans « The First Bath », la musique évoque la liaison entre Michael et Hanna avec une utilisation remarquable du célesta et de la harpe sur fond de cordes graves : la musique annonce déjà clairement le drame à venir, et nous fait clairement ressentir un certain malaise, sans jamais en faire de trop pour autant. Le côté hésitant des instruments traduit clairement ici ce sentiment de malaise et cette mélancolie un brin sous-jacente, mais non dénuée d’une certaine sensualité. Le piano devient alors porteur de cette mélancolie intimiste et discrète dans « It’s Not Just About You », partagé entre une très belle écriture de piano et de hautbois.

« Tram At Dawn » met davantage l’accent sur les rythmes avec des cordes, des bois, une harpe et un piano plus agité. Mais c’est la mélancolie qui domine alors dans « You Don’t Matter », avec son mélange de cordes graves et piano. La musique suggère clairement ici la partie plus dramatique du récit sans tomber pour autant dans les excès mélodramatiques hollywoodiens. La musique conserve ainsi cette approche intimiste et retenue émouvante et toute en sobriété dans le film. Dans « Reading », Nico Muhly accompagne la première scène de lecture avec des cordes plus lyriques et déterminées, et une utilisation assez répétitive des instruments qui n’est pas sans rappeler Philip Glass. A noter que la musique conserve néanmoins une certaine gravité dans son approche harmonique et contrapuntique, comme pour rappeler le caractère dramatique de la relation impossible entre le jeune homme et l’ancienne tortionnaire SS. La musique devient alors plus apaisée et intime dans « Cycling Holiday », évoquant le temps qui passe avec un piano solitaire et une harpe discrète. Le sentiment de gravité et la détermination de « Reading » reviennent dans « Sophie/The Lady With the Little Dog » et surtout le dramatique « Go Back to Your Friends » qui marque la rupture progressive entre Michael et Hanna, avec une utilisation plus lyrique du hautbois et des cordes répétitives et agitées. Dans « Handwriting », Nico Muhly utilise des cordes staccatos et répétitives avec une utilisation toujours très réussie du hautbois soliste, tandis que « The Failed Visit » ramène la mélancolie et l’amertume dans l’oeuvre du jeune compositeur - à noter la façon avec laquelle le hautbois finit par s’imposer progressivement, au détriment du piano qui devient alors plus discret vers la fin du film. Le hautbois a encore son mot à dire dans le sombre « Verdict ».

« Mail » et « Letters » évoquent les scènes où Michael envoie des lettres à Hanna dans sa prison avec un caractère toujours très intime et tout en sobriété, mais non dénué d’une certaine mélancolie amère et tragique. Dans « Piles of Books », Muhly utilise de façon plus intéressante la flûte avec le reste de l’orchestre, pour illustrer là aussi la détermination de Michael à instruire Hanna et à l’initier progressivement à l’écriture et à la lecture. Enfin, le thème principal revient une dernière fois dans le long et conclusif « Who Was She ? », qui résume parfaitement l’essentiel de la composition de Nico Muhly sur plus de 6 minutes. Musique emprunte d’une certaine gravité pesante et profonde mais jamais lacrymale, « The Reader » est une partition intimiste et mélancolique de qualité qui ne laissera hélas pas un très grand souvenir. Pour sa première partition majeure pour le cinéma après « Joshua » en 2007, le jeune Nico Muhly fait honneur à son mentor Philip Glass (avec lequel il a collaboré à plusieurs reprises sur certaines de ses musiques de film) en nous livrant une partition minimaliste et répétitive emprunte d’un sentiment constant d’amertume, de regret et de gravité tragique, qui reflète parfaitement la relation amoureuse distante entre les deux personnages principaux du film de Stephen Daldry. Le score reste donc très réussi dans le film bien qu’assez fonctionnel et sans grande surprise, un score qui ne restera pas dans les annales du genre mais qui annonce déjà clairement le talent et le savoir-faire d’un jeune compositeur prometteur, qui, s’il sait manier sa carrière cinématographique avec brio, devrait encore faire parler de lui dans les années à venir !



---Quentin Billard