1-Main Title 1.07
2-Ben Takes The Stage/
Dan's Burden 5.45
3-Man of his Word 0.59
4-Bisbygliando 1.23
5-Barn Burn 2.02
6-Chinatown 1.39
7-Indian Grounds 2.50
8-Chinese Democracy 2.51
9-One for the Road/Storm Clouds 4.12
10-Trial by Fire 1.58
11-Flight of the Princess 1.59
12-Ben There Done That 1.36
13-Gang Arrives 1.52
14-Ben Arrested 4.00
15-It's Time 1.02
16-Hotel 0.41
17-One Man Left 3.07
18-William Escapes 1.45
19-Bible Study 2.35
20-Who Let The Cows Out? 1.32
21-The 3:10 to Yuma 2.07

Musique  composée par:

Marco Beltrami

Editeur:

Lions Gate Records LIOG20010

Album produit par:
Marco Beltrami
Co-produit par:
Buck Sanders
Monteur musique:
Jim Schultz
Direction musicale pour Lionsgate:
Jay Faires
Producteurs exécutifs album:
James Mangold, Cathy Konrad
Coordination soundtrack:
Chris Fagot

Artwork and pictures (c) 2007 Lions Gate Films Inc. All rights reserved.

Note: ***
3:10 TO YUMA
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Marco Beltrami
Remake éponyme du western de Delmer Daves réalisé en 1957 (adapté du roman d’Elmore Leonard), « 3:10 To Yuma » permet au réalisateur James Mangold de mettre en scène un face à face intense entre Christian Bale et Russell Crowe dans le grand ouest sauvage américain. A une époque où le genre du western semble être quelque peu tombé en désuétude dans le cinéma américain, un film comme « 3:10 To Yuma » représente une sacrée prise de risque, et pourtant, le résultat est à la hauteur des attentes : âpre, violent, psychologique, dramatique et intense, le film de James Mangold n’a certes pas le brio des westerns d’antan mais apporte néanmoins un éclairage neuf et passionnant à un genre souvent ultra codifié et usé jusqu’à la moelle. « 3:10 To Yuma » tire son intérêt du traitement plutôt moderne de l’histoire, un western transformé en une sorte de polar urbain plus proche des anciens films de James Mangold (on pense à « Copland » par exemple). L’histoire met en scène Dan Evans (Christian Bale) un homme revenu blessé de la guerre de sécession, et qui s’est installé avec sa famille dans un ranch pour y couler des jours heureux. Mais la sécheresse a détruit une partie de ses terres et de son bétail. Du coup, Evans commence à perdre la considération que lui porte sa famille, et plus particulièrement celle de son jeune fils aîné de 14 ans Will (Logan Lerman). Au même moment, le célèbre brandit Ben Wade (Russell Crowe) est arrêté dans la ville de Bisbee suite à l’attaque d’une diligence. Recherché pour meurtre et hold-up, Wade doit être escorté à Contention afin d’embarquer sur un train à destination du tribunal fédéral de Yuma, qui partira à 3 heures 10. Soucieux de sauver le ranch familial, Dan Evans décide alors de s’engager dans l’escorte qui doit accompagner Wade vers le train de Yuma en échange d’une importante prime. C’est alors que Will, le fils de Dan, rejoint tardivement l’escorte, fasciné par le charisme du dangereux criminel. Alors que le gang de Wade prépare de son côté l’évasion de leur chef, le fameux criminel use de son pouvoir de séduction et de la peur qu’il inspire aux autres pour entamer un dangereux duel psychologique entre lui et ses gardiens, développant par la même occasion une amitié ambiguë avec son principal gardien, Dan Evans. Ainsi donc, « 3:10 To Yuma » est une sorte de western spaghetti moderne et violent oscillant astucieusement entre polar psychologique et thriller urbain tout en respectant les grandes lignes du film d’origine, un film qui vaut tout autant pour le face à face trépidant entre Bale et Crowe que par la mise en scène brute et classique de James Mangold.

« 3:10 To Yuma » est entièrement porté par la partition orchestrale de Marco Beltrami, qui s’essaie pour la première fois au registre de la musique de western après le rendez-vous manqué de « Texas Rangers » en 2001. En l’espace de six semaines, Beltrami a élaboré une partition rendant à la fois hommage au style d’Ennio Morricone pour les westerns spaghettis italiens des années 60 tout en optant pour une approche résolument moderne et atmosphérique plus typique de Beltrami. Pour se faire, le compositeur a utilisé un ensemble instrumental incluant orchestre symphonique, guitares électriques diverses (incluant les traditionnels effets de pédale chers à Ennio Morricone), synthétiseurs, trompette, guimbarde et percussions en tout genre. Dès les premières minutes du « Main Title », Beltrami élabore une atmosphère à la fois sombre et planante plus typique du style de ses musiques pour « The Three Burials of Melquiades Estrada » ou « In The Electric Mist ». Les guitares électriques avec effet de pédale traduisent clairement l’ambiance western du film, mais le côté atmosphérique de la musique apporte un sentiment de chaleur renvoyant aux grands espaces de l’ouest américain sauvage écrasés par un soleil de plomb. Le compositeur a aussi eu l’idée de traduire en musique l’idée du temps et du compte à rebours en utilisant des percussions métronomiques évoquant clairement le son d’une montre (après tout, il est question d’une heure précise pour un train en direction de la prison de Yuma).

Les parties orchestrales restent limitées bien souvent au strict minimum - percussions incluant timbales et caisse claire, cordes, trompettes - mais c’est dans « Ben Takes The Stage/Dan’s Burden » que la musique prend réellement son envol, avec un thème de chevauchée de toute beauté, soutenu par un ostinato rythmique de guitares/timbales sur fond de guitares électriques, cordes et trompette en sourdine. Le compositeur se montre assez inventif dans ses orchestrations, dévoilant par la même occasion le thème principal, mélancolique et intimiste, qui deviendra parfois plus allant et énergique (sous forme de chevauchée) lorsqu’il s’agit d’évoquer les méfaits de Wade, tandis qu’une guitare plus intimiste suffit à évoquer Dan Evans et son envie de sauver son ranch et d’aider sa famille dans le besoin. Un morceau comme « Man Of His Word » traduit clairement le souhait du compositeur d’avoir recours à une instrumentation moins hollywoodienne, plus proche de ses travaux sur des films plus indépendants : ici, l’ensemble de guitares suffit à illustrer à la fois les décors du film et les motivations des principaux protagonistes de l’histoire. On retrouve le goût du musicien d’origine italienne pour la musique contemporaine dans « Bisbygliando » (qui fait référence à une technique instrumentale, le « bisbigliando », une sorte d’effet de tremolo utilisé principalement sur la harpe) où la musique frôle les dissonances et les atmosphères étranges chères au compositeur. La musique traduit même une certaine montée de violence dans « Barn Burn » avec ses cordes staccatos et ses effets étranges de trompettes - une utilisation plutôt moderne des instruments qui rejoint clairement la modernité de la mise en scène de James Mangold. Des morceaux comme « Chinatown » ou « Indian Grounds » permettent à Marco Beltrami de développer ses atmosphères sombres et tendues traduisant le sentiment de temps qui passe. Les fans de musique de western spaghetti apprécieront l’hommage du compositeur à Ennio Morricone dans « Chinese Democracy » avec son thème de guitare et de trompette qui renverrait presque aux grandes heures des musiques des films de Sergio Leone. Plus qu’un simple exercice de style, Beltrami parvient à s’emparer des codes du genre tout en conservant sa propre personnalité, comme nous le rappelle l’utilisation envoûtante des instruments dans le motif principal de deux notes dans « One For The Road/Storm Clouds » et son atmosphère latente et sèche.

La tension monte d’un cran dans « Trial By Fire » et « Flight Of The Princess », des morceaux d’action/suspense plus modernes et dissonants typiques du style suspense habituel cher à Marco Beltrami. Autant dire que l’approche musicale voulue par Beltrami sur ce western moderne reste assez rafraîchissante sans être particulièrement révolutionnaire en soi. La musique évoque aussi l’amitié ambiguë et naissante entre Ben et Dan dans « Ben There Done That » et l’intimiste et solitaire « Hotel », tandis que « Gang Arrives » et « Ben Arrested » ramènent le suspense dans la partition. Beltrami oscille de façon plus habile entre tension et passages intimistes et mélancoliques dans « One Man Left », sans oublier la superbe chevauchée orchestrale de « Bible Study » et sa trompette aux accents western spaghetti du plus bel effet. Beltrami développe avec une grande aisance les touches americana traditionnelles dans « Who Let The Cows Out ? » sans oublier pour autant la modernité de son approche instrumentale (et notamment ici des effets d’écho de trompettes qui rappelleraient presque le Jerry Goldsmith de « Patton »). Enfin, la partition s’achève sur le thème principal à la guitare dans « The 3:10 To Yuma », une magnifique conclusion non dénuée d’une mélancolie indissociable des grands espaces de l’ouest américain sauvage. Dommage cependant que le thème ne soit guère plus mémorable, car, aussi bien trouvé soit-il, il faudra un peu de temps pour qu’il laisse un quelconque souvenir dans l’esprit de l’auditeur. Toujours est-il que le résultat est là, car, sans signer pour autant son nouveau chef-d’oeuvre, Marco Beltrami s’attaque avec brio à un genre ultra codifié avec lequel il n’a jamais été habitué, la musique de western, tout en renouant avec ses propres racines italiennes (et plus particulièrement ici les musiques d’Ennio Morricone voire de Bruno Nicolai), le tout métissé avec son propre goût pour une musique plus moderne ancrée dans le registre contemporain. Les fans de Beltrami devraient donc apprécier à n’en point douter le nouvel opus musical du compositeur.



---Quentin Billard