1-Main Theme 3.41
2-Getting On Board 2.56
3-The Story Begins 1.09
4-Payback Time 1.39
5-Farewell Fenster 0.45
6-"He's Here!" 1.48
7-The Garage 2.25
8-Verbal Kint 2.09
9-Keyser Appears 2.34
10-"It Was Beautiful" 1.18
11-The Arrests 1.17
12-Redfoot 1.39
13-New York's Finest 1.43
14-Kobayashi's Domain 2.22
15-The Killing Of A Rat 3.29
16-"I Work For Keyser Söze" 1.37
17-The Faces Of His Family 1.45
18-The Plan Begins 1.56
19-Back To The Pier 3.37
20-Casing The Boat 1.55
21-A Gift 1.39
22-The Greatest Trick 3.15
23-The Water 2.33
24-Les Sons et les Parfums
Tournent Dans l'Air du Soir 3.30*

*Composé par Claude Debussy
Interprété au piano par
Jon Kull.

Musique  composée par:

John Ottman

Editeur:

Milan 74321 30107-2

Producteur de l'album:
John Ottman
Supervision et production:
David Franco
Monteur de la musique:
Lia Vollack
Assistant de Mr.Ottman:
Damon Intrabartolo
Producteurs exécutif de Milan:
Emmanuel Chamboredon,
Toby Pieniek

Artwork and pictures (c) 1995 Rosco Film GmbH & Bad Hat Harry Productions, Inc./Milan Entertainment, Inc. All rights reserved.

Note: ****1/2
THE USUAL SUSPECTS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by John Ottman
Le thriller est un genre très codifié qui a connu ses heures de gloire à Hollywood grâce à Hitchcock et à ses histoires captivantes. Depuis, peu de film ont pu prétendre rivaliser avec la qualité de films comme 'Pyscho' ou 'Vertigo'. 'Usual Suspects' fait partie de ceux là. De la masse des films bateaux et ultra conventionnels se dresse parfois un film 'miracle', celui que l'on attendait tous mais que l'on désespérait de voir arriver. Depuis plusieurs années, le thriller Hollywoodien semblait s'essouffler de plus en plus à force de jouer tout le temps sur les mêmes clichés sans aucune inventivité et surtout, sans un bon scénario, l'intérêt majeur d'un thriller qui doit avant tout nous raconter une bonne histoire et crée une atmosphère de peur, de mystère ou d'inquiétude quasi palpable à l'écran. 'Usual Suspects' réuni tout cela, avec une maestria rarement égalée et une excellente mise en scène. Bryan Singer frappe fort pour son deuxième film deux ans après un 'Public Access' (1993) quasiment méconnu. C'est surtout grâce au script de qualité de Christopher McQuarrie que Singer a réussi à crée un véritable classique du genre, une perle rare qui nous prouve une fois encore que la qualité de la mise en scène et de l'histoire priment avant tout sur les artifices et les effets de mise en scène. Pour 'Usual Suspects', le réalisateur nous raconte comment un groupe de 5 malfrats New-yorkais se retrouvent un jour réunis pour une 'parade' organisé par la police afin de questionner ces éventuels suspects à la suite du braquage d'un fourgon transportant une importante cargaison d'armes. Parmi eux se trouve Dean Keaton (excellent Gabriel Byrne, brillant comme d'habitude), un ancien malfrat soi-disant reconverti dans les affaires et qui refusent de se mêler avec ces nouveaux 'compagnons' qui veulent organiser un coup ensemble afin de se venger de la police. C'est seulement après avoir effectué ensemble quelques coups bien calculés que la bande des 5 malfrats sont alors contactés par un mystérieux individu du nom de Kobayashi (Pete Postlethwaite) qui prétend travailler pour le compte de Keyser Söze, le mystérieux tueur insaisissable considéré comme une sorte de mythe, une légende des ombres que personne n'a jamais vu ni approché. Kobayashi leur explique que Söze exige qu'ils participent à un dernier coup pour le compte du légendaire tueur et afin de les convaincre du sérieux de la situation, Kobayashi leur remet à tous un dossier contenant toutes les informations sur leur vie depuis leur adolescence. Mais l'un des types du groupe, Fenster (Benicio Del Toro) refuse de participer à cette ultime mission et est retrouvé mort par les quatre autre après avoir tenté de fuir avec un peu d'argent. McManus (Stephen Baldwin), Verbal Kint (superbe Kevin Spacey. Rien à redire, il est impeccable, une fois de plus!), Keaton (Gabriel Byrne) et Hockney (Kevin Pollak) n'ont plus qu'une seule mission: ils doivent accomplir cette dernière mission dont certains savent déjà qu'ils n'en reviendront pas.

L'histoire est en fait raconté par Kint, le seul qui a survécu à cette dangereuse mission et qui se fait interrogé par l'inspecteur Dave Kujan (Chazz Palminteri) convaincu que Dean Keaton est derrière ce coup depuis le début. Kint quand à lui est un boiteux paralysé d'une main un peu simplet et filou en même temps qui tente de raconter l'histoire du mieux qu'il le peut, tandis qu'un autre inspecteur de la police enquête toujours sur Keyser Söze afin de faire la lumière sur ce qu'il s'est réellement passé cette nuit là sur le port. Bryan Singer réussi un véritable tour de magie: il accumule des preuves sous nos yeux sans que nous réussissions vraiment à les apercevoir, il accomplit devant nous un grand tour d'illusionniste, car le cinéma est, ne l'oublions pas, un art de l'illusion. Entre indice et fausses pistes, le réalisateur nous malmène jusqu'au bout et nous incite quelque part à nous interroger sur ce que nous voyons ou ce que nous entendons: quelle est la vérité dans cette histoire? Verbal Kint raconte il l'histoire telle qu'elle s'est réellement passé? Dean Keaton est il le véritable coupable? Keyser Söze est il une légende ou existe il réellement? Qui a organisé cette mission suicide? Pourquoi? Etait-ce vraiment pour un deal de drogue? Etc. L'histoire pose toutes ces questions et les réponses arrivent mais pas de la manière dont on pourrait s'y attendre, et c'est là que le réalisateur marque un point avec un coup de théâtre final resté anthologique dans le cinéma américain des années 90. On ne reviendra pas sur le casting de qualité et les performances de Gabriel Byrne et Kevin Spacey, ils sont tout simplement remarquables! Notons aussi les dialogues bien ciselés dont certaines répliques sont restés assez mémorables (on pense notamment à la scène anthologique de l'alignement au début du film ou de la séquence des interrogatoires au poste de police). Bref, une très grande réussite, un véritable roman policier cinématographique dans la plus belle tradition du genre. un film culte comme on en voit rarement!

Après avoir écrit le score de 'Public Access' pour son pote Bryan Singer, John Ottman compose sa troisième grande BO de film avec 'Usual Suspects' qui reste de loin ce qu'Ottman a fait de mieux dans sa carrière. Pour comprendre le travail d'Ottman sur 'Usual Suspects', il est absolument impératif de rappeler quelques points majeurs concernant le compositeur: tout d'abord, Ottman a débuté avec Singer sur son premier film, 'Public Access' et c'est durant leurs études à l'USC School of Cinema-Television que les deux compères se sont rencontrés. Par ailleurs, et c'est une chose suffisamment exceptionnelle pour pouvoir la citer, John Ottman est aussi le monteur du film, ce qui implique aussi qu'il a lui même crée son propre temp-track pour composer son score, ce qui est assez exceptionnel de nos jours où les temp-tracks font de plus en plus de ravage sur le plan de la créativité musicale à Hollywood. Ottman est d'ailleurs lui même un grand passionné de musiques de film et ses maîtres sont Goldsmith, Silvestri, Williams, Horner, Young, Herrmann et d'autres, et c'est ce que l'on ressent très bien à l'écoute de ce score qui ménage admirablement bien toutes ces influences dues en partie au temp-track personnel du compositeur qu'il se passait régulièrement durant la post-production afin de s'inspirer d'un style et d'un rythme à suivre suivant les différentes séquences du film. Orchestral avec quelques touches de synthé atmosphériques, le score de 'Usual Suspects' s'axe autour de deux grandes idées, deux grands thèmes au centre de la partition même s'ils ne sont pas tout le temps présent tout au long du film.

Le magnifique thème principal est exposé dans la première piste de l'album (qui est en fait le 'End Titles' du film) et entendu dans le générique de début du film dans 'The Water'. Avec sa mélodie de piano/cordes, le thème de 'Usual Suspects' décrit le côté tragique de cette histoire où beaucoup d'hommes vont mourir sans aucune raison particulière si ce n'est à cause d'un seul et unique tueur, le mystérieux Keyser Söze. Dans cette histoire où la vie humaine est bafouée et détruite de plusieurs façons (attaques, meurtres, explosion, etc.), le thème principal de piano apporte une touche à la fois dramatique et lyrique à cette mélodie sombre et émouvante, vite rejointe par des cordes quasi plaintives et mystérieuses en même temps, le genre de thème qui hante l'esprit même après la première écoute, un thème qui de par sa relative simplicité mélodique et l'émotion qui s'en dégage capte tout de suite l'attention dès l'ouverture du film. Le deuxième thème principal est en réalité un très mystérieux motif de cinq notes aux cordes qui évoque le mythe terrifiant de Keyser Söze mais plutôt que d'évoquer l'aspect inquiétant de ce tueur légendaire, Ottman a préféré souligner le côté intriguant de ce mythe, avec une maestria qui nous renvoie un peu à l'esprit des moments mystérieux du superbe 'Predator' d'Alan Silvestri. Entendu dès le début de 'The Story Begins' (commencement de l'histoire lorsque les flics retrouvent les cadavres calcinés sur le port), le motif nous invite d'emblée à nous plonger dans cette histoire sombre et inquiétante au son du motif de 5 notes qui nous fait comprendre que Söze est passé par là. En réalité, l'histoire commence à la fin pour revenir au début et nous dévoiler toute la vérité sur cette sinistre histoire, et ce à l'aide des divers flash-back exposés au travers du récit de Verbal Kint.

Ainsi donc, c'est le terrifiant 'Keyser Appears' qui introduit le film après un Main Title sombre et dramatique ('The Water'). Aux sons de cordes pesantes et sombres et de quelques vents qui semblent flotter dans l'air, le morceau s'ouvre sur des harmonies sombres et un léger choeur de synthé en arrière-fond pour renforcer le côté pesant et sinistre du morceau. Keyser apparaît dans l'obscurité mais on ne voit pas son visage. Il s'approche d'un homme blessé à terre qui lève les yeux vers lui et l'observe, surpris. Il sait qu'il va mourir et le tueur tire. Le morceau s'emballe alors et Ottman crée une rythmique orchestrale de plus en plus tendue jusqu'à l'explosion du bateau permettant au morceau d'atteindre son apogée - à noter l'excellente illustration de la musique qui suit le mouvement des flammes jusqu'à l'explosion - avec 'Keyser Appears', Ottman cerne à 100% le côté terrifiant et intriguant de cette sombre histoire en évoquant les méfaits du tueur insaisissable et la peur qui s'en dégage. Morceau clé du score, 'Keyser Appears' constitue en quelque sorte le prologue du film, un morceau qu'Ottman revisitera bien évidemment pour la dernière demie heure du film (et surtout dans 'The Killing of a Rat' ou bien encore 'He's Here' et 'Back To The Pier'), là où le réalisateur nous dévoilera toute la vérité sur cette histoire. Avec 'Verbal Kint', Ottman décrit dans la scène chez les flics (au début du film) le personnage de Verbal Kint, un petit combinard boiteux d'allure inoffensive mais qui sera pourtant réellement au centre de cette histoire. Avec une petite formation restreinte de quelques vents (principalement hautbois et clarinette), quelques cordes et un piano, Ottman décrit quelque part le côté inoffensif (voire innocent) de ce personnage qui se retrouve embarqué dans cette bande de malfrats alors qu'il n'a rien de bien méchant par rapport aux autres bandits. Mais l'aspect pourtant calme, quelconque et tranquille du morceau 'Verbal Kint' cache pourtant un secret, un indice que le compositeur nous livre très discrètement mais qui échappera très probablement à notre oreille à la première écoute, d'autant que le morceau n'apparaît que 30 ou 40 secondes dans la scène sans le reste malheureusement, donc on n'entendra l'astuce que sur l'album.

Le compositeur fait preuve d'une certaine inventivité en s'attaquant brièvement à d'autres styles comme dans 'The Arrests' (scène d'arrestation au début du film) où Ottman base son morceau sur un rythme de claves et quelques touches de synthés et petites percussions avec le piano et les cordes, les quelques touches de synthé donnant à la scène un côté cool tout en conservant le sérieux de la séquence (une arrestation) à l'aide d'une basse de synthé. L'utilisation de ce rythme de claves provient en fait du fameux 'The Conspirators' du score de JFK de John Williams, un morceau qu'Ottman a inclut dans son propre temp-track et qui lui a servi de référence pour bon nombre de ses morceaux. On retrouve ce rythme de claves dans 'New York's Finest', pour la scène du braquage du taxi du Finest New York, morceau développé par un motif de contrebasses, la pièce évoquant les préparatifs de l'opération. Autre morceau un peu particulier, 'Redfoot', séquence où McManus et ses 4 compères rencontrent Redfoot, un complice de McManus qui leur propose un coup à effectuer où il s'agira de s'attaquer à un bijoutier dans un garage souterrain. Ce morceau est entièrement basé sur une sombre basse de synthé et un mystérieux motif de banjo qui donne un côté un peu western à la scène où les deux compères se rencontrent pour organiser le coup, la scène se prolongeant avec le très sombre 'The Garage' reprenant le rythme de claves et qui montre ici le goût d'Ottman pour la musique atonale. Introduite par des cordes menaçantes pour la séquence du braquage dans le garage souterrain, le morceau fait progressivement monter la tension au cours de cet affrontement qui part en live et se conclut sur la mort du bijoutier et de ses deux gardes du corps. A noter ici les effets sinistres des cordes lors de l'affrontement avec les deux gardes du corps ou pour le sombre sursaut orchestral lorsque Kint tue le bijoutier d'une balle dans la tête (cette scène n'a d'ailleurs rien d'anecdotique).

Mais les choses commencent à changer avec l'apparition de Kobayashi. 'A Gift' rappelle un peu le style mystérieux et sombre de 'Basic Instinct' de Goldsmith, quelque chose qui sera aussi très flagrant au début de 'The Greatest Trick', Ottman s'étant aussi vaguement inspiré de Goldsmith dans certains passages plus atmosphériques du score. 'Farewell Fenster' apporte une touche plus dramatique lorsque les 4 malfrats retrouvent le cadavre de Fenster sur le bord d'une plage. (notons ici la petite formation instrumentale comme dans 'Verbal Kint', Ottman faisant quelques brèves allusions au thème principal pour illustrer le côté dramatique de cette scène). Autre moment plus dramatique, 'It Was Beautiful', lorsque Keaton est obligé de partir sans pouvoir avertir sa fiancée Edie Finneran (Suzy Amis). Comme toujours, on retrouve ici la formation instrumentale légèrement plus restreinte avec quelques vents, cordes, piano et harpe pour le côté plus intime de la séquence.

Avec 'Payback Time', on entre dans la dernière partie de l'histoire. Introduit de manière sombre par des cordes tendues et quelques sons de synthé menaçants, le morceau évoque la vengeance de Keaton et de sa bande bien décidés à régler leur compte à Kobayashi après avoir retrouvé le cadavre de Fenster. Le morceau prend alors une tournure plus tendu avec un rythme de cordes excitant, et l'on pourra aussi retrouver le rythme de claves de JFK à la fin du morceau. On notera le très intriguant 'Kobayashi's Domain' avec un piano ambigu et des cordes toute en retenue; notons l'étrange effet de glissendo sur les harmoniques pour la scène où Kobayashi montre à Keaton Edie en train de négocier avec des clients japonais dans son bureau et le menace de la tuer si lui et sa bande n'accomplissent pas leur tache. Le morceau nous fait ressentir à ce moment là toute la tristesse qui emplie le coeur de Keaton qui cache alors ses sentiments mais dont on devine sur l'expression de son visage un profond regret: celui de ne pas réussir à changer de vie, le regret de n'avoir pas su concrétiser son nouveau départ pour une vie meilleure et plus saine - cf. réplique où il dit à Kint: "dis lui que j'ai essayé". On notera le très mystérieux 'I Work for Keyser Söze' qui reprend encore une fois le côté mystérieux de 'Basic Instinct' de Goldsmith (surtout avec l'écriture des cordes et l'utilisation d'un vibraphone sur un motif descendant accompagnant ici l'intriguant thème de cinq notes de Söze) lorsque Kobayashi fait sa présentation aux 5 malfrats.

L'opération commence avec 'Casing The Boat' où Ottman fait une citation quasi texto à 'The Abyss' de Silvestri, un autre compositeur de référence pour Ottman et que ce dernier a aussi inclut dans son propre temp-track. Lorsque les 4 malfrats préparent l'attaque du bateau, Ottman développe sa citation assez appuyée au début de 'The Manta Ship' de 'Abyss' de Silvestri, et le morceau apporte un côté à la fois mystérieux et très tendu à la scène même si l'on pourra critiquer ici la citation à peine camouflée à Silvestri. A noter une autre citation au 'Abyss' de Silvestri au début du terrifiant 'The Killing of a Rat', là où Ottman reprend son travail de 'Keyser Appears' pour un morceau encore plus tendu et sombre (notons les quelques sons de cloches qui sonnent de manière très glauques ici) qui s'ouvre sur un rythme pesant de percussions métalliques (pour un passage vaguement influencé de 'Lindsey qui semblent avancer de manière inexorable pour cette scène où l'équipage du bateau commence à paniquer lorsque ces derniers apprennent que Keyser Söze est monté à bord du bateau. Söze liquide alors le témoin qui s'apprêtait à le balancer au son d'un thème puissant, une sorte de thème du 'dénouement' de l'histoire, thème qui interviendra lorsque Kujan croira trouver la vérité à propos de la véritable identité de Söze. On ressent ici toute l'intensité de la scène et la tension qui se dégage de cette séquence où le compositeur met très clairement ici le doigt sur la peur évoqué par le mystérieux tueur insaisissable. 'Getting On Board' est un des rares morceaux d'action du score pour la séquence de l'attaque du bateau. Avec des cuivres agressifs, quelques percussions et des cordes tendues, Ottman décrit cette scène d'action avec une certaine intensité et des orchestrations toujours remarquables (un autre point fort du score). C'est finalement 'Back To The Pier' qui conclut l'histoire telle que Kint la raconte avec la conclusion de Kujan. Ottman développe ici le style sinistre de 'Keyser Appears' pour un morceau tout à fait similaire d'esprit, le compositeur réutilisant le thème du 'dénouement' pour cette scène qui sert à revisiter la scène d'introduction vue sous un autre angle. Pour illustrer ce procédé, Ottman décide de reprendre quelques éléments de 'Keyser Appears' (et notamment le sinistre motif harmonique de cordes du début agrémenté ici de quelques vents sombres) pour proposer sa propre vision musicale de la scène revisitée.

La conclusion du film arrive finalement sur le superbe 'The Greatest Trick' qui est en lui même un véritable tour de force à l'image du final inoubliable du film. - Alerte au spoiler, nous sommes obligé de dévoiler un élément de la fin. Si vous n'avez pas encore vu ce film, ne lisez pas la suite! - Kujan a eu les réponses qu'il voulait, car après tout, il était le seul persuadé depuis le début que Keaton était le véritable Keyser Söze, mais la musique s'emballe vraiment lorsqu'il s'aperçoit que Kint lui a joué un tour. C'est le travail des cordes qui est frappant ici, la seconde partie développant en fait le thème de Keyser Söze qui devient moins intriguant mais plus volatil, passant d'un instrument à un autre avec une fluidité étonnante. Le motif de 5 notes est d'abord entendu par une flûte avant d'être développé par les cordes/vents soutenu par une 'vague' de piano qui semble couler comme de l'eau avant de se conclure sur une étrange formation flûte/violoncelle/harpe et cordes avec un ton léger et volatil (ce passage s'inspire en fait du thème de 'The Power' de Christopher Young); encore une astuce musicale du compositeur pour évoquer le caractère insaisissable de Keyser Söze. N'oublions pas la phrase finale de Kint: 'et d'un seul coup, il s'envole'.

'Usual Suspects' apparaît au final comme un véritable exploit dans son genre, aussi bien sur le plan cinématographique que musical. Pour son troisième score, John Ottman a composé une très grande BO exprimant son inventivité, ses orchestrations de qualité, son goût pour le mystère, la peur et tout ce qui fait le style et le charme habituel de ses musiques thriller, sauf que 'Usual Suspects' va bien plus loin qu'une simple BO thriller et exploite à fond l'intrigue du film et ses différents enjeux. Tour à tour intrigante, captivante et parfois brutale ou enlevée, la musique de 'Usual Suspects' est une très grande réussite où l'on voit un compositeur maîtriser pleinement son sujet et apporter quelque chose de vraiment très fort au film, d'autant que le compositeur est un des rares a avoir su tirer profit de l'influence du temp-track pour créer quelque chose de plus personnel malgré les quelques inspirations piochées chez Williams, Silvestri ou Goldsmith. Bilan plus que positif donc pour ce chef-d'oeuvre incontesté de John Ottman considéré comme LE classique du compositeur, une BO à découvrir de toute urgence si ce n'est pas déjà fait et à savourer pleinement dans le film!


---Quentin Billard