1-Dream House 5.36
2-Little Girls Die 2.53
3-Footprints In The Snow 3.17
4-Peter Searches 6.00
5-Night Fever 1.33
6-Intruders 1.41
7-Libby Sees Graffiti 2.33
8-Peter Ward's Room 2.10
9-Ghostly Playthings 3.17
10-Peter Ward's Story 3.13
11-Ghost House 2.37
12-Remember Libby 4.05
13-Murder Flashback 3.59
14-Peter Saves Ann/Redemption 7.29
15-Dream House/End Credits 5.55

Musique  composée par:

John Debney

Editeur:

Varèse Sarabande 302 067 115 2

Producteur exécutif:
Robert Townson
Direction de la musique pour
Universal Pictures:
Mike Knobloch
Coordination du score:
Lola Debney
Supervision production du score:
Stephanie Pereida
Monteurs musique:
Chuck Martin, Jeff Carson
Production score:
Dan Savant, Jennifer Mersola
Assistant technique Debney Productions:
Jaime Hartwick

Artwork and pictures (c) 2011 Universal Studios. All rights reserved.

Note: ***1/2
DREAM HOUSE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by John Debney
C’est la première fois que le cinéaste irlandais Jim Sheridan réalise un thriller hollywoodien, lui qui s’était essentiellement cantonné jusqu’à présent dans le domaine des drames sociaux se déroulant entre l’Amérique et l’Irlande (on se souvient notamment de « In The Name of the Father », « The Boxer » ou bien encore « In America »). « Dream House » évoque ainsi l’histoire troublante de Will Atenton (Daniel Craig), un bon père de famille qui décide un jour de quitter son travail d’éditeur new-yorkais à succès pour déménager avec sa femme Libby (Rachel Weisz) et leurs deux fillettes Trish (Taylor Geare) et Dee Dee (Claire Geare). Fraîchement installés dans leur nouvelle maison de la Nouvelle Angleterre, Will et sa famille passent des moments heureux, jusqu’au jour où ils découvrent que leur maison de rêve a été le théâtre d’un meurtre survenu il y a cinq ans, où une mère et ses deux enfants ont été abattus sauvagement par le père de famille. Cherchant à en savoir davantage, Will se rend à l’hôpital psychiatrique de la ville et découvre l’impensable : il serait apparemment le meurtrier nommé présumé, de son vrai nom Peter Ward, et aurait abattu sa famille il y a cinq ans. Mais Will refuse d’y croire et se met alors en quête de la vérité. Pour son premier thriller hollywoodien, Jim Sheridan rate malheureusement l’occasion de nous faire vibrer et livre un film au scénario bâclé, téléphoné, servi par une mise en scène totalement impersonnelle. La faute est en partie imputable à la production qui, à la suite de screen tests catastrophiques, aurait apparemment décidé de reprendre le film en main et de tourner de nouvelles scènes, changeant radicalement l’ambiance du film que Jim Sheridan avait en tête. Quand au scénario, il accumule les invraisemblances et les incohérences, plus particulièrement lors du twist final, extrêmement décevant et pas crédible pour un sou (dommage, car les 30 premières minutes sont plutôt réussies !). On raconte d’ailleurs que le cinéaste, mécontent du résultat final, aurait renié le film, tout comme les deux acteurs principaux, Daniel Craig et Rachel Weisz, qui auraient refusé de promouvoir « Dream House », le jugeant carrément mauvais. Mais ce qui a véritablement mis le feu au poudre et provoqué la brouille entre Sheridan et le studio Morgan Creek, c’est la fameuse bande-annonce qui révèle quasiment toute l’intrigue et le twist du film, relançant ainsi les débats enflammés dans le milieu cinéphile quand au sujet du contenu des trailers, qui en dévoilent toujours plus et laissent de moins en moins la place à l’imaginaire et aux surprises (quel intérêt d’aller voir un film à twist si la bande-annonce révèle déjà tout ?). Et pourtant, tout n’est pas mauvais, le film évoluant brillamment entre deux univers : le monde de rêve imaginaire de la maison, et le monde réel : Jim Sheridan joue d’ailleurs brillamment sur les contrastes de lumière pour évoquer le passage d’un monde vers l’autre tout au long du film, tandis que Daniel Craig ne manque pas de charisme, encore une fois, et reste tout à fait convaincant dans le rôle de ce père de famille psychologiquement traumatisé par le meurtre de sa famille. A ses côtés, Rachel Weisz et Naomi Watts remplissent parfaitement le cahier des charges. Hélas, « Dream House » reste au final une grande déception, le scénario accumulant les poncifs et les scènes déjà vues (l’intrigue rappelle un mélange entre « Shutter Island » et « Hide & Seek »), tandis que les 20 dernières minutes basculent dans le n’importe quoi le plus total.

John Debney signe une brillante partition symphonique pour « Dream House », une partition sombre, dramatique, envoûtante et mystérieuse, dans la lignée de son travail sur le film « Dragonfly » de Tom Shadyac (2002). Parfaitement mise en valeur tout au long du film, la musique de John Debney reste à n’en point douter le principal atout de « Dream House », suggérant les tourments intérieurs de Will et sa quête obsédante de vérité au sujet du triple meurtre qui a eu lieu dans sa propre maison. Le score utilise l’orchestre symphonique habituel, accompagné de quelques solistes – piano, harpe, violoncelle, hautbois, etc. – et de voix féminine évoquant les deux fillettes de Will. Le score repose avant tout sur un thème principal aux notes descendantes, thème mystérieux associé à la famille de Will, mélodie mystérieuse et envoûtante qui reviendra tout au long du récit et dont la ligne mélodique n’est pas sans rappeler curieusement un thème du score de « Spy Game » d’Harry Gregson-Williams. Le thème est introduit dès les premières secondes du film dans « Dream House » avec une voix féminine mystérieuse sur fond de cordes, de piccolo, de harpe et de célesta. On notera ici le soin apporté aux orchestrations, riche et soignées, comme souvent chez John Debney, et qui renforcent parfaitement l’ambiance mystérieuse et pesante du long-métrage de Jim Sheridan. La deuxième partie de « Dream House » s’avère être plus légère, lyrique et poétique, dans son utilisation très nuancée des bois, du piano, du célesta et de la harpe, sans oublier ses voix lointaines qui semblent surgir du passé de Will. Il règne à ce moment là un climat d’une infime douceur, quasi émerveillé, alors que Will découvre sa nouvelle maison après avoir quitté son travail. Mais le charme et le lyrisme élégant de « Dream House » cèdent très vite la place au drame dans le déchirant « Little Girls Die » pour l’une des plus belles scènes du film. La musique devient alors plus mélancolique, amère et torturée, avec une très belle reprise du thème principal au violoncelle soliste, sur fond de cordes, bois et harpe. Le violoncelle apporte à « Little Girls Die » une véritable tonalité funèbre, une sorte de lamentation élégiaque tout en retenue, profondément poignante et résolument tragique, avant une première envolée orchestrale dramatique alors que Will commence à comprendre la vérité au sujet de sa famille – d’où une reprise orchestrale grandiose et dramatique du thème principal, accompagné de ponctuations funèbres des timbales.

Avec « Footprints In the Snow », John Debney apporte un suspense plus haletant au film avec une utilisation plus sombre et ambiguë des instruments : le violoncelle, le célesta et les cordes deviennent ici plus pesants, plus mystérieux, alors que Will découvre que quelqu’un rôde la nuit près de sa maison. On retrouve ici le Debney des musiques de thriller/suspense tendance « I Know What You Did Last Summer » (1997) ou « End of Days » (1999), avec un soin apporté à des effets instrumentaux plus avant-gardistes (clusters de cuivres, cordes dissonantes et stridentes, glissandi, etc.) et un langage atonal et dissonant plus sinistre et oppressant. La peur est aussi l’un des sentiments véhiculé dans la partition de « Dream House », rejoignant rapidement le mystère pesant de « Peter Searches », 6 minutes de suspense et d’atmosphère sombre et latente assez immersive dans le film, ponctuée de quelques rappels au thème et sa voix enfantine légère et lointaine. L’émotion de « Night Fever » contraste ensuite avec la noirceur agressive de « Intruders » et ses cordes stridentes/dissonantes sur fond de percussions brutales et de cuivres menaçants – avec les traditionnels effets de ‘flatterzunge’ des trombones. Un morceau comme « Libby Sees Graffiti » est assez représentatif de l’ambiance à la fois intimiste, mélancolique et sombre du score de « Dream House », ménageant à la fois calme et moments de tension pure avec un doigté rare de la part de John Debney – et qui rappelle encore une fois son travail sur « Dragonfly » - « Peter Ward’s Room » renforce alors ce sentiment de mystère pesant, avec un morceau dissonant et menaçant qui semble vouloir exploser à n’importe quel moment. « Ghostly Playthings » renforce dans le film le sentiment de présence fantomatique dans la maison de Will en jouant ici aussi sur une retenue mélancolique poignante, même si le morceau est très vite rejoint par des ponctuations orchestrales plus sombres et menaçantes, à la manière d’une musique de thriller de Christopher Young (qui semble avoir servi d’inspiration sur la partition de « Dream House »). Après le premier twist du film, illustré dans le sinistre et oppressant « Peter Ward’s Story », « Murder Flashback » vient renforcer la tension lors du twist final, un pur moment de suspense glauque, agressif et dissonant, débouchant sur la violente confrontation lors du climax final « Peter Saves Ann/Redemption », 7 minutes d’action et de tension assez spectaculaire dans le film à grand renfort de percussions meurtrières, de cuivres massifs, de cordes survoltées et de rythmes complexes et syncopés. L’intense « Peter Saves Ann/Redemption » est d’ailleurs sans aucun doute l’un des meilleurs morceaux de la partition de « Dream House », une vraie réussite qui confirme l’inspiration du compositeur sur un film pourtant fort décevant et peu inspirant.

Enfin, John Debney conclut le film avec « Dream House End Credits », qui résume en moins de 6 minutes l’essentiel de la partition du film de Jim Sheridan en reprenant le thème principal dans toute sa splendeur, incluant la seconde partie mélodique et mystérieuse, déjà dévoilée dans le tout premier morceau (à partir de 0 :37), et réexposé ici dans un tutti orchestral ample, dramatique et puissant. Encore une fois, « Dream House End Credits » est une très belle réussite de la part de John Debney, qui prolonge son atmosphère tragique et lyrique en utilisant le violoncelle soliste, le piano, le célesta, la harpe et l’orchestre de façon tout à fait élégante – avec un classicisme d’écriture raffiné - sans oublier le retour de la voix féminine fantomatique et d’une instrumentation cristalline et légère évoquant le monde de l’enfance (boîte à musique, etc.), associé dans le film aux fillettes de Will. Le résultat est donc tout à fait satisfaisant, John Debney livrant une composition orchestrale sombre, poétique, dramatique et mystérieuse pour le thriller fantastique de Jim Sheridan, un score qui doit autant à la partition de « Dragonfly » qu’aux influences de Debney (Christopher Young, etc.) et à son talent pour créer des atmosphères sombres et mystérieuses, un talent qu’il n’exploite pas suffisamment à Hollywood, le compositeur officiant la plupart du temps sur des musiques de comédies familiales pour lesquels il n’a vraisemblablement plus grand chose à dire ou à faire. La musique de « Dream House » apporte donc une tension et un mystère lyrique assez intense et judicieusement mis en valeur à l’écran, et ce même si le film de Jim Sheridan s’avère être très décevant et sans grande saveur. John Debney confirme en tout cas qu’il reste une valeur plus que sûre à Hollywood, malgré son côté ‘caméléon’ et son manque de personnalité et d’originalité. Le score de « Dream House » contient ainsi tous les atouts et les défauts habituels de John Debney, une musique bien écrite, bien orchestrée, servie par un thème principal mémorable, mais aussi extrêmement peu originale, prévisible et sans grande surprise. Reste qu’il s’agit là de l’une de ses meilleures compositions de ces cinq dernières années !



---Quentin Billard