1-Main Title 2.15
2-Take Him Home/Broken Toe 1.48
3-Tell Me About It 2.17
4-State of the Art/The Charge 6.55
5-Gas Attack 4.52
6-The Injection 2.12
7-The Hand/Fat Cells 1.00
8-Woman in Red 2.36
9-What is it? 1.09
10-Optic Nerves 4.00
11-Take it Easy/It's True 2.18
12-No Messenger 2.41
13-No Pain 1.57
14-User Friendly 1.40
15-A Close Look 1.34
16-The Cowboy 1.00
17-Hold It 3.42
18-For the Money/A New Man 3.39
19-How Do I Look?/Save it 1.45
20-Transformed 3.02
21-Retransformed 2.52
22-Where Am I? 2.12
23-The Womb 4.39
24-Fair Exchange 2.05
25-Stop the Car 5.58
26-Out of the Pod 3.55
27-Disengage 3.00
28-No Red Lights 1.18

Musique  composée par:

Jerry Goldsmith

Editeur:

La La Land Records
LLLCD 1114

Album produit par:
MV Gerhard, Mike Matessino

Artwork and pictures (c) 2009/1987 Warner Bros/Amblin Entertainment. All rights reserved.

Note: ****
INNERSPACE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Jerry Goldsmith
« Innerspace » (L’aventure intérieure) est un divertissement hollywoodien typique des années 80. Produit par Steven Spielberg et réalisé par Joe Dante en 1987, « Innerspace » fait partie de ce type de production que l’on doit à un Spielberg plus fécond que jamais à cette époque, avec, parmi ses projets ‘eighties’ les plus célèbres en tant que producteur, « Who Framed Roger Rabbit », « Poltergeist » (où il a même réalisé une partie du film avec Tobe Hooper), « The Goonies », « Back to the Future » ou bien encore « Young Sherlock Holmes », autant de productions majeures qui furent de grands succès à leur époque et des films importants dans leurs domaines respectifs. « Innerspace » ne déroge donc pas à la règle et prend appui sur un scénario emprunté au film « Fantastic Voyage », grand classique de la science-fiction réalisé par Richard Fleischer en 1966 et qui se déroulait quasi entièrement à l’intérieur d’un corps humain. Le lieutenant Tuck Pendleton (Dennis Quaid) est un aviateur tête brûlée qui ne rêve que de gloire et de consécration. Un jour, il décide de devenir le cobaye d’une expérience de miniaturisation top-secrète menée par des scientifiques américains. A l’origine, sa mission consistait à être miniaturisée à l’intérieur d’un petit module submersible pour être ensuite injecté dans le corps d’un lapin. Mais les choses tournent mal lorsqu’un groupe de terroristes attaquent le laboratoire et tentent de s’emparer des puces qui contrôlent le système de miniaturisation. L’un des scientifiques réussit alors à s’enfuir avec la seringue contenant le module de Pendleton, qui s’échoue finalement dans le corps d’un jeune homme dépressif et hypocondriaque, Jack Putter (Martin Short). Le lieutenant réussit alors à communiquer de l’intérieur avec son « hôte » et le guide dans une grande course contre la montre, alors que ses réserves d’oxygène s’épuisent d’heure en heure.

C’est parce que Joe Dante avait déjà travaillé avec Spielberg sur « Twilight Zone The Movie » (1983) que les deux hommes décidèrent de se retrouver sur « Innerspace », production colossale pour l’époque mélangeant aventure, comédie et science-fiction avec une inventivité rare. Avec l’inventivité du scénariste Jeffrey Boam, la magie des effets spéciaux de chez ILM et le talent incontestable de Joe Dante - et son humour toujours très personnel - « Innerspace » a réussi à devenir un classique de la comédie de science-fiction. Avec un casting parfait centré autour du trio Dennis Quaid/Martin Short/Meg Ryan, le film vaut surtout par ses scènes de description réalistes de l’intérieur du corps humain (grâce aux effets spéciaux de l’époque, qui n’ont pas pris une ride !), son humour omniprésent (le méchant incarné par Vernon Wells qui crève le ballon d’un clown dans un supermarché !) et ses moments plus intimes et poétiques (la très belle scène où Pendleton découvre le bébé de Lydia dans son ventre). Maniant une certaine forme de dérision avec un sens très personnel du rythme et de l’aventure, Joe Dante accouche d’un spectacle parfait, un film qui, en plus d’évoquer de façon grandiose et réaliste l’intérieur du corps humain, nous transporte dans une aventure inoubliable, bourrée de rebondissements, d’humour et de grands morceaux de bravoure (la poursuite dans le camion, l’affrontement dans l’estomac, etc.). En clair, « Innerspace » est un pur bijou du divertissement hollywoodien des années 80, frais, drôle et inventif, qui n’a pas pris une ride : un classique, en somme !

La partition musicale de « Innerspace » marque les retrouvailles entre Jerry Goldsmith et le réalisateur Joe Dante après « Twilight Zone The Movie », « Gremlins » et « Explorers », trois scores sur lesquels le compositeur a su rappeler encore une fois à quel point il est plus que jamais l’un des grands maîtres de la musique de film hollywoodienne, toujours au sommet de son art. « Innerspace » s’inscrit dans la continuité des musiques du maestro californien pour les films de Joe Dante : fraîche, inventive, rythmée, énergique et pleine de surprises. On y retrouve comme d’habitude les sempiternels synthétiseurs « eighties » chers au compositeur, mélangés à l’orchestre symphonique habituel. Un petit thème héroïque accompagne le personnage principal, Jack Putter (Martin Short), qui, d'un loser sans personnalité, va se transformer petit à petit en un héros intrépide - avec un thème héroïque de 3 notes qui reviendra lors des grands moments de bravoure du film. L'aventure à l'intérieur du corps de Jack est caractérisée par un motif de cordes mystérieux qui rappelle les passages de V’Gur dans « Star Trek The Motion Picture » (1979), idéal pour représenter l'idée de la découverte d'un monde nouveau et étrange (ici, celui du corps humain). Quand au personnage du tueur au doigt-pistolet brillamment incarné à l’écran par Vernon Wells (inoubliable méchant de « Commando »), Goldsmith a décidé de représenter chacune de ses apparitions à l'écran par l’utilisation d’une pléiade de percussions métalliques agressives et sèches, illustrant la froideur et le manque total d’émotion de cette brute épaisse. La partition de « Innerspace » regorge ainsi d’une série de thèmes tous plus passionnants les uns que les autres, car en dehors du thème héroïque de la mission de Pendleton introduit aux synthétiseurs dès le générique de début du film - ainsi que le thème héroïque de 3 notes - on retrouve aussi un magnifique « Love Theme » pour la relation entre Pendleton et la très craquante Meg Ryan, thème romantique qui apporte un peu d’émotion et de poésie à un score somme toute largement dominé par l’action et les déchaînements orchestraux contrôlés. On retrouve aussi le motif mécanique/métallique menaçant de Igoo (Vernon Wells), le motif mystérieux de cordes pour l’intérieur du corps humain et - cerise sur le gâteau - un thème western associé au personnage du cow-boy, interprété de façon hilarante par Robert Picardo dans le film (sans aucun doute l’un de ses rôles les plus mémorables dans un film de Joe Dante !).

Jerry Goldsmith renoue ainsi avec ses fameux mélanges orchestre/synthé, et comme d'habitude dans ses musiques pour les films de Joe Dante, le compositeur utilise de nombreux effets électroniques inventifs et parfois décalés, avec notamment les sons de radars et autres effets synthétiques étranges, sans oublier des pulsations proches de battements de cœur, le tout entendu dès le « Main Title » qui annonce le thème principal de la mission avec son environnement sonore mystérieux (waterphone, synthétiseurs, etc.). Le « Love Theme » est ensuite annoncé dans le très beau « Take Him Home/Broken Toe » avec une tendresse quasi nostalgique d’une grande poésie - typique de Jerry Goldsmith, qui va même jusqu’à céder au cliché un brin rétro du saxophone romantique. L’aventure commence avec le début de la mission de miniaturisation dans « State of the Art/The Charge » où l’on ressent à l’écran toute l’excitation du début d’une grande aventure. Le thème de la mission est développé à travers un grand crescendo plutôt prenant et excitant. On y retrouve comme d’habitude les orchestrations typiques du Goldsmith des années 80, inventives et soignées. On ne pourra ensuite qu’apprécier le premier grand morceau d’action du score, « Gas Attack », lorsque les criminels attaquent le laboratoire pour voler la puce et la seringue contenant Pendleton. C’est le grand Jerry Goldsmith de l’action qui se dévoile à nos oreilles conquises par l’inventivité rythmique du morceau et la qualité des orchestrations (utilisation des cuivres en sourdine, rythmiques synthétiques incorporées à l’orchestre, etc.). Encore une fois, c’est du grand art, le tout soutenu par le classicisme d’écriture à la fois moderne et traditionnel de Jerry Goldsmith. On ressent même dans « Gas Attack » une certaine forme de dérision et d’humour noir qui n’est pas sans rappeler « Gremlins » par moment, impression confirmée par la poursuite en vélo dans la seconde partie de « Gas Attack ».

Le motif métallique d’Igoo revient à plusieurs reprises dans « Gas Attack » ou le sombre « The Injection », sans oublier le début de « The Hand/Fat Cells ». Goldsmith se montre assez inventif dans l’utilisation de ses sonorités métalliques/électroniques froides associées au tueur qui traque le héros avec acharnement tout au long du film. A noter l’utilisation d’un motif de 4 notes descendantes rapides déjà entendues dans « Gas Attack » et reprises à la fin de « Fat Cells », associé dans le film à Jack Putter. Un morceau comme « Optic Nerves » est assez représentatif de l’atmosphère musicale qu’au voulu créer Jerry Goldsmith pour les séquences à l’intérieur du corps humain. Le compositeur créer un univers sonore assez étrange et inventif en mélangeant orchestre et effets électroniques avec brio. On retrouve ici le motif mystérieux de cordes rappelant le mysticisme de V’gur dans « Star Trek The Motion Picture », pour la scène où Pendleton va se connecter au nerf optique de Putter. Et c’est le Jerry Goldsmith de l’humour et de la dérision que l’on retrouve dans « Take It Easy/It’s True », lorsque Putter, désespéré et à bout, revient chez lui, fatigué par tout ce qui lui arrive. Goldsmith reprend alors le thème malicieux aux notes descendantes de Putter (entendu dans « Fat Cells ») sous la forme d’une marche synthétique un brin grotesque et assez amusante. Parmi les moments de bravoure du film, impossible de ne pas citer « No Messenger », pour la scène où Pendleton se fait entraîner par les globules rouges et réussit à éviter de rentrer in extremis dans les valves du coeur de Putter. Goldsmith met l’accent ici sur les effets de battements de cœur et développe le motif de cordes mystérieux du corps humain dans une atmosphère de tension et de danger, et ce jusqu’à l’explosion héroïque finale, reprenant le thème de 3 notes dans sa version la plus triomphante - un pur moment de bonheur pour les fans du compositeur !

L’action reprend très vite le dessus avec ses rythmes syncopés typiques du compositeur, ses lignes de basse synthétiques très ‘80s’ et ses orchestrations qui rappellent parfois Bartók ou Stravinsky. On n’oubliera pas non plus la poésie du Love Theme repris avec grâce dans « A Close Look » pour rappeler la romance entre Lydia et Pendleton. Impossible d’ailleurs de ne pas mentionner la reprise extrêmement magique et poétique du thème romantique dans « The Womb », lorsque Pendleton se retrouve accidentellement injecté dans le corps de Lydia et observe avec émotion le bébé dans son ventre, comprenant qu’il va être enfin papa. Le score de « Innerspace » se distingue aussi par ses touches d'humour, et plus particulièrement avec le thème du personnage du cow-boy, représenté par un motif ironique pastichant les musiques de westerns des années 60 (entre le « Rio Conchos » de Jerry Goldsmith ou les westerns spaghettis d’Ennio Morricone). Jerry Goldsmith utilise un sifflet (samplé), une guimbarde, une guitare, un tambourin, bref, des sonorités typiquement "cow-boy" pour représenter le personnage incarné dans le film par Robert Picardo (acteur fétiche de Joe Dante). Le maestro californien, connu pour son grand sens de l'humour, s'est particulièrement régalé avec ces passages amusants, dans lesquels il en profite aussi pour faire référence au style de ses anciennes partitions westerns des années 60/70 (« Lonely are the Brave », « Hour of the Gun », « Rio Conchos », « Rio Lobo », « 100 Rifles », etc.). Niveau humour, on atteint des sommets de délire et de drôlerie musicale dans « Transformed » (scène où le visage de Putter se transforme en celui du cow-boy) et l’hilarant « Retransformed » alors que la transformation s’inverse subitement et que Putter récupère son visage d’origine, sans aucun doute les deux morceaux les plus drôles de toute la partition de « Innerspace ».

Les morceaux d'action, notamment ceux des courses-poursuites, se succèdent à un rythme effréné et demeurent absolument typiques du style action 80s de Jerry Goldsmith, c'est-à-dire : excitant, efficace, enlevé, rythmé, virtuose et extrêmement maîtrisé de bout en bout. On y retrouve une complexité d’écriture chère au compositeur avec des rythmiques électroniques omniprésentes, des rythmes syncopés et savamment élaborés, avec de nombreux changements de mesures, et des orchestrations très fouillées – notamment une utilisation souvent adéquate des cuivres en sourdine – trompettes, trombones, cors, etc. Parmi les grands moments de bravoure, impossible de passer à côté du superbe « For the Money/A New Man » pour la poursuite du camion, « The Womb », « Fair Exchange » et le frénétique « Stop the Car » (et son utilisation très ironique des bois aigus - clarinettes, trompettes et trombones en sourdine, xylophone - pour évoquer l’affrontement avec les méchants miniaturisés, scène absolument délirantes dans le film !). L’aventure touche à sa fin avec le paisible « Disengage » (dont le son semble hélas légèrement détérioré sur l’album de La La Land) et « No Red Lights », qui reprend une dernière fois le thème western du cow-boy et le thème héroïque !

Partition-clé dans la collaboration Jerry Goldsmith/Joe Dante, « Innerspace » est un pur régal de A à Z, un modèle d’inventivité, de fraîcheur mélodique, d’humour et d’action. Certes, ce n’est peut être pas la partition la plus aboutie de la collaboration avec Joe Dante (niveau humour, on est loin des délires extravagants de « The ‘Burbs » ou de l’humour grinçant de « Gremlins »), mais cela n’en demeure pas moins un score incontournable de la part du maestro, toujours aussi inspiré par l’univers filmique unique de Joe Dante. « Innerspace » a inspiré à Jerry Goldsmith une partition attachante, agréable et extrêmement diversifiée, apportant un punch indéniable au film, entre action, humour et poésie, un beau condensé de tout l’art du compositeur à (re)découvrir grâce à la récente galette de La La Land Records. Incontournable !



---Quentin Billard