1-County Galway, June 1892 1.55
2-The Fighting Donnelys 2.18*
3-Joe Sr.'s Passing/
The Duel Scene 4.41
4-Leaving Home 1.55
5-Burning The Manor House 2.43
6-Blowing Off Steam 1.31
7-Fighting for Dough 2.02*
8-Am I Beautiful? 3.38
9-The Big Match 5.56
10-Inside The Mansion 4.24
11-Shannon Is Shot 4.06
12-Joseph's Dream 3.08
13-The Reunion 3.50
14-Oklahoma Territory 2.12
15-The Land Race 4.56
16-Settling with Steven/
The Race to the River 4.08
17-Joseph and Shannon 3.14
18-Book of Days 2.53**
19-End Credits 6.35*

*Featuring The Chieftains
**Composé et interprété
par Enya
Paroles de Roma Ryan
Produit par Nick Ryan.

Musique  composée par:

John Williams

Editeur:

MCA Soundtracks
MCD-10628

Album produit par:
John Williams
Musique montée par:
Ken Wannberg

Artwork and pictures (c) 1992 Universal Pictures. All rights reserved.

Note: ***1/2
FAR AND AWAY
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by John Williams
« Far and Away » (Horizons Lointains) de Ron Howard décrit l'histoire d'un fils de paysan irlandais et d'une jeune aristocrate rebelle qui vont vivre une grande aventure dans l'Amérique de la fin du 19ème siècle à la recherche du rêve américain. Un groupe d’émigrants irlandais fuient la famine de leur pays pour partir tenter leur chance aux Etats-Unis. L’histoire commence alors en Irlande, en 1892. Joseph Donelly (Tom Cruise) est le fils d’un paysan qui exploite une petite ferme modeste en bord de mer. Couverts de dettes, les Donelly ne tardent pas à recevoir la visite de Daniel Christie (Robert Protsky), leur richissime propriétaire qui exige d’être remboursé. L’altercation vire au drame et le père Donelly est abattu après que sa maison ait été brulée par les hommes de main de Christie. Bien décidé à se venger, Joseph se rend chez les Christie armé d’un fusil. C’est alors qu’il croise la route de Shannon (Nicole Kidman), la fille de Daniel Christie qui est une personne extrêmement orgueilleuse et indépendante. Peu de temps après, Joseph est provoqué en duel par Stephen Chase (Thomas Gibson), l’intendant du manoir Christie et soupirant de Shannon. Refusant de se battre, Joseph décide de fuir avec la jeune femme en direction des Etats-Unis, où ils espèrent trouver de nouvelles terres et commencer une nouvelle vie. Ils devront affronter ensemble bien des épreuves et lutter contre la pauvreté et l’injustice avant de gagner enfin les terres vierges de l’Oklahoma. « Far and Away » permet au réalisateur Ron Howard d’évoquer le rêve américain tel qu’on le concevait alors au 19ème siècle, en pleine ère des pionniers et des chercheurs d’or, là où tout semblait encore possible. L’histoire est vue ici à travers les yeux d’un jeune émigrant irlandais qui échappe à la misère de son pays pour découvrir une autre misère aux Etats-Unis, où les nécessiteux n’ont pas leur place. Bien sûr, tout finira bien à la fin de l’histoire, mais de toute évidence, « Far and Away » n’a pas vocation à un être un film qui dénonce les illusions du rêve américain. Le film de Ron Howard n’est rien de plus qu’un simple divertissement hollywoodien plutôt spectaculaire et grandiose, un film plutôt réussi qui rappelle les grandes fresques historiques du Golden Age hollywoodien, sans jamais atteindre pour autant la grandeur et la puissance de ces productions d’antan.

La musique de John Williams pour « Far and Away » possède une force et un charme tout à fait caractéristique de ce que le maestro américain a l’habitude d’écrire pour les grands films d’aventure hollywoodiens de ce genre. Sa partition symphonique pour « Far and Away » s’avère être plutôt réussie, mélangeant aventure épique et romantisme à la manière des grands classiques d’antan. Le thème principal évoque ainsi l’idée de l'aventure et de la découverte de grands horizons. Apparaissant sous diverses formes tout au long de la partition, le dit thème évoque l'esprit d'aventure et de la conquête du rêve américain. John Williams parvient néanmoins à distinguer les deux pays évoqués dans le film, avec une partie plus celtique et folklorique pour les paysages de l’Irlande au début du film, et une partie au classicisme symphonique éclatant pour l’Amérique. La partie orchestrale reste omniprésente tout au long du film, John Williams utilisant simplement de temps en temps quelques instruments solistes, comme c’est le cas au début du film, lorsque l’on aperçoit la maison de Joseph et de la famille Donelly. Williams utilise alors quelques touches de musique irlandaise pour évoquer le folklore musical et les décors magnifiques de l’Irlande. L'instrumentation reste traditionnelle et indissociable de la musique celtique : flûte de pan, cornemuse, whistle, etc. Et tout cela bien avant que James Horner nous envahisse de gigues irlandaises dans les années 90 avec « Titanic » ou « The Devil’s Own » ! Pour les besoins de la musique, John Williams a d’ailleurs fait appel au groupe irlandais The Chieftains pour interpréter les parties celtiques de sa partition (groupe spécialisé dans la musique traditionnelle irlandaise et crée en 1962). C’est le cas dans des morceaux tels que « The Fighting Donellys », « Fighting for Dough » et « End Credits ». On appréciera d’ailleurs au passage l'utilisation de cette gigue irlandaise sautillante pour la scène où Joseph se bat avec ses frères dans « The Fighting Donellys ». Dès le début de la partition, John Williams fait preuve d'un grand talent de mélodiste à travers cette très belle musique celtique qui apporte une certaine beauté dépaysante aux images du début du film.

Le film s’ouvre au son du majestueux et grandiose « County Galway, June 1892 » qui développe un premier thème associé à l’Irlande et à la terre natale des Donelly, morceau dominé ici par la flûte celtique. Par la suite, John Williams s’amusera ainsi à varier les ambiances au rythme de l’histoire, car, loin de se contenter des musiques celtiques introductives, le compositeur nous offre même un passage dominé par des synthétiseurs dans « Leaving Home », une utilisation plus inhabituelle de l’électronique chez le compositeur, et qu’il associe ici à l’orchestre et aux différents instruments solistes celtiques. Certains passages comme « Blowing Off Steam » et son irrésistible scherzo s’avèrent plus énergiques et rythmés dans le film, avec son motif rythmique de cordes en notes rapides du plus bel effet. Le compositeur calme temporairement le jeu dans « Am I Beautiful ? » où il suggère un lyrisme sous-jacent qui commence à se dévoiler progressivement, aboutissant à un premier moment de magie pure dans la partition de « Far and Away », « Inside The Mansion ». Ce morceau accompagne la scène où Joseph et Shannon sont en tête à tête intime dans le manoir, une scène romantique que John Williams illustre en utilisant un mélange remarquable entre harpe, célesta et synthétiseurs cristallins qui ne sont pas sans rappeler la musique que le maestro composa pour les scènes de paradis dans « Always » de Spielberg (1990). Ce sont les synthétiseurs aux sonorités new-age/cristallines qui apportent un charme incroyable à cette très belle séquence, baignant dans une atmosphère quasi surréaliste, quasi onirique, une atmosphère sereine et planante : une très belle réussite, preuve du talent d’un compositeur qui, non content de maîtriser pleinement son écriture orchestrale, arrive toujours à trouver le petit « plus » sur certaines scènes qui l’inspirent plus que d’autres.

La musique devient alors subitement plus sombre et agressive dans « Shannon is Shot », lorsque la jeune femme est blessée par un coup de fusil. Ici, l’orchestre de façon plus morne et résignée, créant une certaine tension plus dramatique à l’écran. Le thème irlandais revient aux cordes de façon plus légère dans « Joseph’s Dream », et commence à évoquer l’attirance du jeune irlandais pour l’Amérique. Un morceau comme « Reunion » possède un lyrisme poignant et raffiné typique du compositeur, avec sa très belle mélodie de flûtes sur fond de cordes chaleureuses tout à fait typiques de John Williams. A contrario, « Oklahoma Territory » apporte un côté plus américain et léger à la musique de John Williams, lorsque Joseph et Shannon arrivent enfin aux Etats-Unis. On retrouve ici un Williams plus coloré, léger et insouciant annonçant quelques uns des futurs chefs-d’oeuvre du maestro américain : « Hook », « Harry Potter », etc. La partition atteint même un sommet avec l’incontournable « Land Race », superbe envolée orchestrale héroïque à l’esprit typiquement « americana », morceau dans lequel John Williams renoue avec son style aventureux cuivré habituel qui annonce par moment le style de ses futures partitions pour « Hook » ou la nouvelle trilogie de « Star Wars ». Le compositeur met ici l’accent sur les cuivres et développe enfin le thème principal exposé ici dans toute sa splendeur, thème du rêve américain qui prend une tournure réellement épique et héroïque - et qui deviendra d’ailleurs par la suite un grand classique des musiques de bandes-annonces hollywoodiennes ! « Land Race » accompagne la course en chariots pour la victoire du terrain à la fin du film, un morceau extrêmement prenant et entraînant, une autre grande réussite de la partition de « Far and Away », indissociable de l’excitation de la conquête de l'ouest, idée que suggère alors le film dans ses vingt dernières minutes, le morceau s'achèvant d'ailleurs sur un final assez épique, débouchant ensuite sur la chanson d'Enya pour le générique de fin du film (« Book of Days »), elle aussi très utilisée dans des bandes-annonces de film des années 90, chanson dont James Horner s’inspirera d’ailleurs massivement pour la musique de « Titanic » (1997). Le « End Credits » nous permet alors de réentendre les principaux thèmes du score dans un final assez mémorable et typique du maestro américain.

En conclusion, « Far and Away » n’a peut être pas la force ni le charme des grandes musiques pour les films de Steven Spielberg, mais cela n’en demeure pas moins une oeuvre extrêmement belle, lyrique et cohérente, avec une thématique totalement maîtrisée et aboutie, une oeuvre malheureusement un peu tombée dans l’oubli mais qui mériterait amplement d’être redécouverte, car elle permet aussi de mieux comprendre l’évolution du style de John Williams au début des années 90. Enfin, elle nous permet aussi d’entendre un compositeur incorporer quelques éléments plus inhabituels dans ses musiques comme la participation du groupe irlandais The Chieftains ou les quelques rares touches d’électronique vers le début du film. La musique de John Williams apporte donc une émotion sincère et un souffle épique fort au film de Ron Howard. Du très bon travail, en somme !



---Quentin Billard