1-Spirit Main Title 5.01
2-Lorelei, Angel of Death 0.39
3-Enter Silken Floss/
Octopus Kicks 1.34
4-Just a Fight 3.55
5-You're An Accident 1.54
6-Spirit Reflects 1.59
7-Egg On My Face 7.54
8-Sand/Octopus Lair 1.08
9-I Am Soreley Disappointed 3.24
10-Spirit Finds Sand/
Falling/Hung Up 2.11
11-Plaster of Paris Dance 1.21
12-Spirit and Plaster Run 1.05
13-Lorelei, You're Mine/
Spirit Wants 4.30
14-Stand Off/Spirit Just
Keeps Coming 2.57
15-Shootout 1.42
16-Octopus Buys It 1.49
17-Spirit Kisses Sand 2.31
18-It's You I Love/
She Is My City 2.45

Musique  composée par:

David Newman

Editeur:

Silva Screen SILCD1283

Producteur album:
David Newman
Supervision scoring:
Krystyna Newman
Consultant scoring:
Marty Frasu
Orchestrations:
Greg Jamrok
Montage musique:
Liquid Music

Pour Lionsgate:
Président musique:
Jay Faires
General Manager & EVP,
Business Affairs:
Lenny Wohl
Exécutif musique:
Tracy McKnight
Soundtracks & Digital Music:
Chris Fagot
Superviseur, Film & TV Music:
Diana Beas
Supervision, Finance/Budgets musicaux:
Chris Brown

American Federation of Musicians.

Artwork and pictures (c) 2008 Spirit Films LLC. All rights reserved.

Note: ****
THE SPIRIT
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by David Newman
Convaincu par l’expérience de « Sin City » réalisé aux côtés de Robert Rodriguez en 2005, Frank Miller s’attaque aujourd’hui à sa seconde réalisation pour le cinéma avec « The Spirit », adaptation cinématographique d’un comic book de Will Eisner crée dans les années 1940. « The Spirit » est un film essentiellement visuel, à l’instar de « Sin City » : Frank Miller nous rappelle qu’il vient de l’univers des comics, puisqu’on lui doit non seulement « Sin City » mais aussi « Batman Year One », « The Dark Knight Returns » ou « Daredevil », des oeuvres qui possèdent un style visuel très fort et aussi très viscéral, sombre, mélancolique, torturé et violent. « The Spirit » conserve quelques unes de ces caractéristiques indissociables des oeuvres de Frank Miller mais en mettant de côté la violence exacerbée qui hante bien souvent les comics de Miller : on y suit les péripéties d’un héros immortel, le Spirit (Gabriel Macht), qui lutte activement contre le crime dans la ville de Central City, et multiplie les punitions les plus astucieuses contre les criminels et les bandits qu’il finit toujours par faire coffrer avec l’aide de la police. A l’origine, le Spirit était un ancien policier nommé Denny Colt qui fut abattu lors d’une opération de police et revint mystérieusement à la vie pour une raison encore inconnue. Son plus grand ennemi reste aujourd’hui Octopus (Samuel L. Jackson), un ancien médecin légiste devenu un véritable génie du crime depuis qu’il a testé sur lui-même ses propres expériences maléfiques. Octopus et sa complice la sensuelle Silken Floss (Scarlett Johansson) cherchent à répandre la terreur dans Central City en récupérant une précieuse urne censée contenir le sang mythique d’Héraclès. Mais Octopus n’est pas le seul à rechercher l’urne mythique, puisque la sexy Sand Saref (Eva Mendes), l’ancienne petite amie de Denny Colt, est elle aussi à la recherche du fabuleux trésor renfermant un pouvoir incroyable. « The Spirit » reprend ainsi le style visuel déjà amorcé dans « Sin City », avec un même mélange de couleurs délavées, de noir et blanc et d’images rouges, une esthétique très personnelle qui rappelle le style des comics de Frank Miller. Si l’univers de la bande dessinée est bien respectée, le scénario est en revanche une catastrophe totale : non seulement on y croit pas un seul instant, mais le film hésite trop souvent entre un ton sérieux, sombre et un humour potache et puéril totalement hors de propos. Le caractère bavard de certains personnages et l’indigence de certains dialogues achèvent de faire sombrer le film dans un ridicule absolu, tandis que l’interprétation et la solidité du casting (Gabriel Macht, Samuel L. Jackson, Scarlett Johansson, Eva Mendes, Paz Vega, Stana Katic, Eric Balfour, Jaime King, etc.) ne parviennent pas à sauver le film d’un profond ennui. Alors que l’on se serait attendu à un véritable film de super héros gothique, violent et sauvage, Frank Miller ne nous propose qu’une vulgaire série-B à l’humour décalé totalement grotesque, « The Spirit » s’offrant ainsi le luxe de nous présenter l’un des méchants les plus nuls de toute l’histoire du cinéma hollywoodien contemporain : Samuel L. Jackson cabotine à mort comme si sa vie en dépendait, Scarlett Johansson semble n’en avoir rien à faire, et les débiles clonés qui servent de side-kicks et qui ne meurent jamais (interprétés par Louis Lombardi) rappellent plus un mauvais épisode de dessin animé qu’un vrai film de super héros hollywoodien. Frank Miller ne parvient pas à se décider entre l’humour décalé et les enjeux dramatiques de son récit – on se serait attendu à une véritable intrigue complexe, noire et torturée – et le résultat tombe bien souvent dans le n’importe quoi le plus total, comme lors de ces scènes où Octopus change régulièrement de costume à chacune de ses apparitions, jusqu’à arborer un costume d’officier S.S. sur fond de symboles nazis (Miller n’a jamais caché sa fascination pour les idées d’extrême droite mais aussi pour les armes à feu et la violence) ou un kimono japonais inspiré des films d’arts martiaux asiatiques. En
bref, malgré toutes ses bonnes intentions, « The Spirit » est une solide déception, non seulement cinématographique mais aussi financière, puisque le film a été un solide échec au box-office U.S. de 2008 !

C’est le compositeur David Newman qui signe la musique de « The Spirit », le compositeur étant un choix logique sur ce film puisqu’il avait déjà mis en musique par le passé un autre film de super héros : « The Phantom » (1996) et qu’il a prouvé à plusieurs reprises qu’il est capable d’écrire des grandes partitions d’aventure/action (« Galaxy Quest », « Serenity », etc.). Avec « The Spirit », David Newman bouscule quelque peu ses habitudes et nous offre une partition à la fois classique dans sa construction mais étonnante dans la fraîcheur des idées proposées tout le long. En plus de l’orchestre symphonique habituel, Newman ajoute pour les besoins du film quelques couleurs instrumentales particulières incluant des trompettes en sourdine jazzy évoquant Central City à la manière des grandes villes américaines des années 30 – avec un petit côté musique de polar/film noir de cette époque – et l’utilisation remarquable de l’harmonica soliste de Tommy Morgan, qui apporte ici une sonorité particulière à la partition de « The Spirit », totalement indissociable du film de Frank Miller. L’électronique est aussi présente, tout comme les saxophones jazzy, la guitare basse ou les quelques vocalises féminines éthérées entendues dans « Lorelei Angel of Death » ou dans d’autres passages du score. La palette musicale de David Newman reste riche, éclectique et variée, révélant une inventivité rafraîchissante et un peu inédite chez David Newman. Le ton est immédiatement donné dans « Spirit-Main Title », superbe ouverture orchestrale de plus de 5 minutes posant les bases de la partition : très vite, l’harmonica soliste fait son apparition – avec des sonorités rappelant les scores de western spaghetti d’Ennio Morricone - entouré de sonorités relativement graves de l’orchestre (cors, contrebasson, contrebasses, etc.), des cuivres amples et massifs, des cordes agitées et des ponctuations percussives imposantes, mélangeant timbales, tambourins et percussions boisées diverses. Le rythme agité et foisonnant du « Main Title » couplé à la robustesse des cuivres nous fait immédiatement penser ici aux meilleurs références des musiques de film de super héros, à commencer par Danny Elfman (on pense par exemple à « Spiderman »), à la différence que David Newman évite toute forme de mélodie héroïque et préfère au contraire opter pour une approche plus énergique et un peu sombre, sans aucune forme d’héroïsme ou de triomphalisme, hormis quelques enchaînements harmoniques parfois un brin plus musclés et déterminés. L’ouverture pose ainsi les sonorités globales de la partition en associant à la fois des motifs rythmiques/mélodiques rapides associés au mystérieux Spirit, tout en évoquant la ville de Central City. David Newman se fait plaisir et nous offre une superbe ouverture capable de rivaliser avec les meilleurs « Main Titles » de Danny Elfman, qui semble avoir pas mal inspiré David Newman sur « The Spirit ». La musique n’hésite pas à devenir plus sombre et obscur lorsqu’il s’agit d’éviter l’héroïsme habituel, tandis que le motif associé au Spirit est entendu à 3:13, et rappelle curieusement les premières notes du fameux thème de « The Phantom ». Ce motif sera utilisé et développé à plusieurs reprises dans le film pour illustrer la détermination du Spirit, prêt à tout pour stopper Octopus et découvre la vérité sur ses origines.

« Loreleil Angel of Death » accompagne les premières scènes avec l’ange de la mort en introduisant un motif énigmatique et envoûtant confié à une voix féminine sensuelle et planante évoquant les appels de l’au-delà. « Enter Silken Floss-Octopus Kicks » introduit le saxophone jazzy et les touches musicales sexy associés à Silken Floss, avec une certaine inventivité et un sens de la fantaisie assez appréciable. Newman ponctue le morceau de sonorités diverses, qu’il s’agisse des nappes synthétiques étranges, des effets percussifs divers, du riff de basse ou des saxophones jazzy, évoquant le personnage de femme fatale de Scarlett Johansson. Ce sens de la fantaisie se retrouve dans « Just A Fight », pour le premier affrontement entre Spirit et Octopus au début du film (avec une scène digne d’un nanar durant laquelle le bad guy assomme le héros avec des toilettes !). Le morceau évoque un véritable jeu du chat et de la souris en alternant les sonorités dissonantes et noires avec une inventivité inhabituelle chez David Newman : à noter ici ces effets percussifs étranges à base de percussions boisées, reprises de « Octopus Kicks » et ces ponctuations percussives/cuivrées évoquant la violence décalée et bizarre de cette scène de bagarre dans la boue (à la limite du mickey-mousing). Ces effets percussifs boisés se retrouveront d’ailleurs à plusieurs reprises dans le film, soulignant l’atmosphère étrange et parfois décalée du film de Frank Miller. Dans « You’re An Accident », l’orchestre devient enfin plus ample et emphatique en privilégiant le jeu puissant des cuivres tandis que les vocalises féminines mystérieuses associées à l’ange de la mort reviennent à la fin du morceau. « Spirit Reflects » fait la part belle à l’harmonica et aux cordes plus lentes et méditatives, avec des sonorités cristallines plus furtives du célesta de Gloria Cheng. Le motif du Spirit est suggéré très brièvement au célesta à 1:00, mais l’on sent clairement à quel point le compositeur s’est forcé à restreindre toute forme d’envolée thématique trop évidente dans le film (probablement à la demande du réalisateur). « Egg on my Face » dévoile les sonorités plus sombres et étranges associées à Octopus, avec une utilisation de techniques avant-gardistes remarquables (glissandi des cordes) et une utilisation réussie d’effets de guitare électrique lointaine (un peu comme l’a fait Alan Silvestri dans son score pour « Tomb Raider 2 »). Le morceau dévoile ensuite un nouveau thème de piano plus intime et poignant, évoquant avec une retenue touchante les souvenirs du Spirit de Sand Saref, son ancien amour de jeunesse. Le très beau Love Theme, délicat et mélancolique, reste l’un des meilleurs éléments de la partition de « The Spirit », Newman l’accompagnant occasionnellement d’un son synthétique plutôt doux et nostalgique, assez caractéristique des passages romantiques/intimes du score. Quand à Octopus, son excentricité bizarre est largement reflétée dans « Octopus Lair » et son mélange de sonorités sombres, de cuivres massifs à la Jerry Goldsmith et d’effets percussifs divers. On notera l’utilisation réussie du célesta dans « I Am Soreley Disappointed » qui apporte une couleur particulière au morceau, Newman privilégiant ici aussi des orchestrations hétéroclites, riches et fantaisistes, fourmillant d’idées en tout genre. « Spirit Finds Sand/Falling/Hung Up » permet à Newman de reprendre le matériau thématique associé au Spirit (le motif ascendant et les cordes galopantes du « Main Title » à la Elfman) avec le retour de l’harmonica, de la trompette jazzy (avec sa basse) et des synthétiseurs étranges sur fond de glissandi de trombones pour la scène de la chute du Spirit.

Visiblement, David Newman s’en donne à coeur joie et nous offre même une danse orientale un peu décalée dans « Plaster of Paris Dance », pour la scène de la danse sensuelle de Plaster of Paris (Paz Vega), sur fond de rythmes de rythme de boléro (caisse claire/castagnette). Ici aussi, l’humour étrange et décalé du film permet à David Newman de jouer sur les différentes sonorités de l’orchestre avec un sens prononcé de la fantaisie et une certaine liberté. « Spirit and Plaster Run » débute ainsi au son de sonorités hispanisantes enlevés et se prolonge sur une succession de textures sonores synthétiques assez particulières voire quasi expérimentales (à partir de 0:10, un long et étrange glissando descendant) sur fond de hautbois aux sonorités orientales. Le motif de l’ange de la mort revient dans « Lorelei You Are Mine/Spirit Wants » avant de céder le pas à l’action et à un nouveau déchaînement orchestral massif, percussif et cuivré assez impressionnant. A noter l’utilisation remarquable d’un violon soliste à partir de 3:11, avec ces arpèges élégants et classiques à 3:21 qui rappelle curieusement le score de « The Village » de James Newton Howard, alors que David Newman dévoile ici un nouveau thème plus solennel, lyrique et vibrant assez réussi. Les différentes sonorités de « The Spirit » se condensent dans « Stand Off/Spirit Just Keeps Coming », alors que « Shootout » reprend le motif du Spirit avant de céder la place à une série de rythmes martiaux enlevés pour l’affrontement final contre Octopus en pleine rue de la ville (à noter ici l’emploi remarquable des percussions militaires et des cuivres à la Elfman). La coda de « Shootout » introduit même quelques envolées harmoniques assez héroïques et prenantes, avant de se conclure dans « Octopus Buys It » et « It’s You I Love/She Is My City », qui marque l’ultime retour du très beau Love Theme et du thème du Spirit, incluant même le saxophone jazzy/sexy de Silken Floss, une superbe conclusion à l’image du travail de David Newman sur « The Spirit » : riche et inspiré ! Que dire de plus, si ce n’est que David Newman signe là l’un de ses meilleurs travaux à ce jour, une partition riche, inventive, complexe, fourmillant d’idées musicales et de trouvailles sonores assez inédites de la part d’un compositeur qui nous a habitué à un style musical souvent plus conventionnel et pépère. « The Spirit » est une musique de super-héros à la fois originale et très prenante, avec une atmosphère assez particulière, un brin excentrique et fantaisiste, évoquant à la fois le côté comic book du film et l’humour particulier de cette aventure, à redécouvrir d’urgence sur l’album, le score étant mal mixé dans le film et assez peu mis en valeur. Une très belle réussite, en somme !



---Quentin Billard