1-Somewhere In Time 3.01
2-The Old Woman 2.51
3-The Journey Back In Time 4.29
4-A Day Together 6.06
5-Rhapsody On A Theme
Of Paganini 2.50*
6-Is He The One? 3.14
7-The Man Of My Dreams 1.42
8-Return To The Present 4.10
9-Theme From
"Somewhere In Time" 3.24**

*Composé par Serguej Rachmaninoff
Piano solo de Chet Swiatkowski
**Interprété au piano par
Roger Williams.

Musique  composée par:

John Barry

Editeur:

MCA Records MCAD-10954

Album produit par:
John Barry
Co-produit par:
Michael Lloyd

Artwork and pictures (c) 1980 Universal Studios. All rights reserved.

Note: ****
SOMEWHERE IN TIME
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by John Barry
« Somewhere in Time » (Quelque part dans le temps) est l’adaptation cinématographique d’un roman de Richard Matheson, porté à l’écran par Jeannot Szwarc en 1980. Le film raconte une histoire d’amour improbable à travers le temps, entre le présent, le passé et le futur. L’histoire débute en 1972. Richard Collier (Christopher Reeve) est un auteur de pièce de théâtre à succès de Chicago qui savoure un soir le triomphe de sa toute dernière pièce. Soudainement, une vieille femme l’aborde en coulisse et lui remet une montre en le suppliant de revenir. Collier ne reverra plus jamais cette mystérieuse dame par la suite. Huit ans plus tard, alors qu’il cherche de l’inspiration pour écrire sa nouvelle pièce, Richard se rend au ‘Grand Hôtel’. Il découvre par hasard le portrait d’une séduisante jeune femme sur une vieille photographie accrochée dans la galerie de l’hôtel, et reste étrangement captivé et obsédé par ce portrait. Avec la complicité du vieux Arthur Biehl (Bill Erwin), qui travaille à l’hôtel depuis 1910, Richard découvre que la mystérieuse femme du portrait n’est autre qu’Elise McKenna (Jane Seymour), une célèbre actrice de théâtre des années 1920 qui séjourna dans cet hôtel en 1912 précisément. Il comprend alors que la vieille femme qu’il rencontra huit ans plus tôt était en réalité Elise McKenna, et qu’elle est morte le soir de leur rencontre. Cherchant à élucider ce mystère, Richard contacte un professeur d’université spécialisé dans l’autosuggestion, qui lui explique alors sa théorie personnelle sur les voyages dans le temps. Richard décide alors d’appliquer cette étrange théorie et réussira à convaincre son esprit qu’il voyage dans le passé, afin de revenir en 1912 et de retrouver Elise McKenna, avec qui il vivra une histoire d’amour forte mais hors de son époque. « Somewhere in Time » est un drame romantique réalisé avec sensibilité et sobriété par Jeannot Szwarc, cinéaste français à qui l’on doit quelques nanars comme « Supergirl » ou l’insupportable « Les soeurs soleil ». Fort heureusement, « Somewhere in Time » n’est pas de cette catégorie et reste à n’en point douter l’un des meilleurs films du réalisateur. L’interprétation poignante de Christopher Reeve et de Jane Seymour dans cette histoire d’amour bouleversante à travers le temps n’a guère convaincu le public et les critiques de 1980. Pourtant, le film a acquit une certaine notoriété au fil du temps, en particulier grâce à la splendide partition de John Barry, et a même eu droit à son propre fan club dans les années 90 intitulé le « International Network of Somewhere in Time Enthusiasts » (INSITE) fondé par Bill Shepard en 1990. Même s’il s’agit d’un petit film intime et sans grande prétention, « Somewhere in Time » raconte une histoire magnifique – bien que totalement improbable - servie par un casting de qualité et une mise en scène sobre et élégante, mélangeant science-fiction (le voyage dans le temps) et romance avec un doigté rare.

La partition symphonique de John Barry a, à l’instar du même, acquit une grande notoriété au fil des années, certains considérant d’ailleurs la musique de « Somewhere in Time » comme l’une des plus belles musiques de film de John Barry pour le cinéma américain. Le score repose essentiellement sur un Love Theme poignant et bouleversant à l’image du film, évoquant l’idée de la romance à travers le temps. Ce thème est confié à la flûte, aux cordes et au piano dans « Somewhere in Time » et « Theme from Somewhere in Time », et se distingue par sa mélodie lyrique poignante et élégante, qui reviendra à plusieurs reprises dans le film. A noter que la BO de « Somewhere in Time » inclut aussi la « Rhapsodie sur un thème de Paganini » de Rachmaninov, très belle pièce classique pour piano et orchestre, entendue aussi à plusieurs reprises tout au long du film et associée à l’histoire d’amour entre Richard et Elise. Le morceau de Rachmaninov fait d’ailleurs office de Love Theme secondaire dans le récit, bien que l’on retiendra surtout le thème passionné de John Barry, pur moment de lyrisme et de romantisme musical, mélancolique et profond, d’une beauté désarmante. La musique reste assez simple et sans aucun artifice particulier. John Barry pose d’ailleurs dans « Somewhere in Time » les bases de son style lyrique et romantique qu’il développera à loisir durant les années 80/90 : impossible de ne pas reconnaître l’influence majeure qu’aura par la suite cette très belle partition dans des scores tels que « Out of Africa », « Raise the Titanic », « Swept from the Sea » ou bien encore « Dances with Wolves », avec une utilisation souvent constante des mêmes formules musicales. Dans « The Old Woman », la musique oscille ainsi entre passages mélancoliques pour cordes, harpe et violon soliste, et reprise émouvante du Love Theme. Les choses changent dans « The Journey Back in Time », illustrant le voyage de Richard Collier dans le temps. La musique devient soudainement plus sombre et nuancée, avec une utilisation tendue des cordes et du piano. Ici, l’accent est mis sur des violons plus lugubres et les violoncelles sur fond d’harmonies mineures – traditionnellement associées à l’idée du drame et de la tension chez John Barry.

Ce sentiment de drame se prolonge dans « A Day Together », alors que Richard et Elise passent un peu de temps ensemble dans le passé. Le morceau est dominé par l’écriture raffinée et élégante d’un violoncelle soliste introductif, tandis que l’on retrouve une harmonie majeure avec un thème de cordes plus léger et optimiste, évoquant les jours heureux pour le couple. Niveau orchestration, comme souvent chez John Barry, cela reste simple et sans artifice : les cordes sont largement valorisées, avec la harpe, le piano et les accords de cuivres qui renforcent les sonorités graves des cordes (un tic récurrent chez le compositeur anglais). Le Love Theme est aussi à nouveau présent, comme une sorte de leitmotiv entêtant rappelant le souvenir impérissable des deux amants qui n’appartiennent pas à la même époque. Dans « Is He The One ? », John Barry met en avant un petit groupe de cordes solistes et plus particulièrement un alto soliste rappelant vaguement le style musical du début du XXe siècle. Dommage que le score reprenne de façon quasi systématique le Love Theme, omniprésent du début jusqu’à la fin de l’album (et du film), car à chaque nouvelle phrase musicale que Barry développe, la seconde partie reprend quasi systématiquement le thème romantique, qui finit par rendre l’écoute monotone et lassante – pourquoi ne pas avoir prévu un deuxième thème ? Il s’agit d’ailleurs ici du défaut majeur de la partition de « Somewhere in Time », qui se contente bien trop souvent de reprendre le fameux thème romantique sans alternative particulière. Seul « The Man Of My Dreams » tente de sortir du lot en développant une série d’accords dramatiques de cordes (incluant un accompagnement agité en trémolos) plutôt intenses et mélancoliques, tandis que « Return To The Present » renoue à nouveau avec le Love Theme, confié cette fois-ci à la flûte et aux cordes, lorsque Richard revient brusquement dans le présent. Ici aussi, Barry ne semble trouver aucune autre solution sur les images que celle de reprendre systématiquement le même thème ad nauseum. Le concept – typique des scores monothématiques du musicien – trouve ici ses limites, et ce malgré le statut culte de cette magnifique partition et l’interprétation sensible et délicate des musiciens de l’orchestre (à noter par exemple la très belle reprise du Love Theme au violon dans « Return To The Present »). Malgré ses défauts et sa trop grande simplicité, la musique de « Somewhere in Time » continue d’exercer son pouvoir de fascination sur les auditeurs trois décennies plus tard, comme un rappel à la beauté intemporelle de cette histoire d’amour au-delà du temps, au-delà des normes et des conventions : sans aucun doute la plus belle partition de John Barry écrite au cours des années 80, et dans le registre romantique/lyrique, un score incontournable malgré ses défauts !




---Quentin Billard