1-Main Titles 5.59
2-To Judas' 1.35
3-The Alone Kid 0.49
4-Daily Life 0.38
5-First Cold Hour 2.43
6-The Expedition 5.08
7-Death of Pablo 1.00
8-Ana and Mateo 3.05
9-Pablo's Funeral 1.37
10-Judas Tells the Story 2.21
11-Magda's Confession 1.23
12-A Stranger and the Children 1.06
13-Jesus Infected 1.58
14-Ana and Magda at the Lab 2.13
15-Judas Wraps Them Up 0.54
16-Epiphany 7.08
17-Home Delivery (bonus track) 8.36

Musique  composée par:

Alfons Conde

Editeur:

Movie Score Media MMS-08009

Produit par:
Alfons Conde

Edition limitée à 500 exemplaires.

Artwork and pictures (c) 2006 Eqlipse. All right reserved.

Note: ****
THE DARK HOUR
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Alfons Conde
Film d’épouvante espagnol réalisé par Elio Quiroga et sorti en 2007, « The Dark Hour » nous plonge dans un huis clos claustrophobique sur fond d’intrigue de survival post-apocalyptique. Un petit groupe de survivants a réussi à échapper à une terrible guerre bactériologique en se réfugiant à l’intérieur d’un immeuble délabré. A l’extérieur, toute la population a été transformée en zombies contagieux dont le moindre contact provoque une mort quasi instantanée. Ces zombies sont appelés les « étrangers ». La petite communauté vit de façon précaire à l’intérieur de l’immeuble avec des vivres, de l’eau et de l’électricité. Néanmoins, chaque nuit, afin de préserver les ressources, les survivants sont obligés de couper l’électricité, baissant ainsi la température durant une période nocturne appelée « l’heure froide ». C’est durant cette période que de mystérieuses créatures invisibles se faufilent dans les couloirs à la recherche des survivants. « The Dark Hour » impose d’emblée un univers clos assez particulier, sans jamais voir une seule fois la lumière du jour. Evidemment, l’impression de suffoquer est palpable dès le début du métrage, et c’est cette atmosphère lente et pesante qui ressort particulièrement ici, amplifiée par le jeu des couleurs verdâtres et l’aspect totalement froid et déshumanisée des décors. Série-B espagnole oblige, le budget n’est pas à la hauteur d’un long-métrage hollywoodien – on sent clairement ici la réalisation de type « téléfilm » - mais le réalisateur Elio Quiroga parvient néanmoins à créer un univers froid, sombre et oppressant avec une bonne brochette d’acteurs espagnols, le principal souci de « The Dark Hour » provenant surtout de son rythme lent et monotone, où il ne se passe pas grand chose durant les 20 premières minutes, qui servent surtout à introduire les principaux protagonistes (chose étonnante, ce sont ici les femmes qui gouvernent la communauté, s’éloignant ainsi des stéréotypes habituels). Les amateurs de twist apprécieront certainement le dénouement final, coda pessimiste aussi spectaculaire qu’inattendue, tandis que l’intrigue de la survie en temps de guerre et de la destruction du monde porte à réfléchir sur l’humanité et sa folie nihiliste, tout en s’interrogeant au passage sur le pouvoir des médias en temps de crise – les dessins animés qui passent régulièrement à la télévision en assénant systématiquement le même discours guerrier et revanchard, les films qui évoquent les horreurs perpétrés par les ennemis – « The Dark Hour » n’est certes pas un film clé dans le cinéma d’épouvante espagnol, un cinéma toujours aussi riche, varié et surprenant, mais il n’en demeure pas moins une jolie réussite qui satisfera à coup sûr les amateurs de huis clos froids et oppressants.

Le compositeur barcelonais Alfons Conde fait partie de ces talents émergents dans la musique de film espagnole, aujourd’hui dominée par des musiciens tels que Roque Baños ou Alberto Iglesias. Alfons Conde a étudié dans les années 90 auprès de Conrad Pope à Los Angeles et obtenu de nombreuses distinctions tout au long des 90’s. Conde s’est fait remarquer grâce à ses premières musiques de film pour des productions espagnoles telles que « The Abandoned », « No-Do » ou bien encore « Viento en Contra », publiées par le label suédois MovieScore Media. Le travail d’Alfons Conde sur « The Dark Hour » reflète autant le savoir-faire évident du jeune compositeur que son goût prononcé pour les atmosphères orchestrales lugubres et lyriques influencées de son apprentissage hollywoodien auprès de Conrad Pope. Ainsi donc, la partition de « The Dark Hour » met en avant des orchestrations riches et élaborées avec un savant mélange de suspense et de terreur, le tout brillamment interprété par le Bratislava Symphony Orchestra, agrémenté d’un orgue aux consonances résolument gothiques et de quelques solistes incluant un basson et une clarinette. Dès l’ouverture (« Main Titles »), Alfons Conde nous plonge immédiatement dans l’univers froid et oppressant de « The Dark Hour » avec l’exposition de son thème principal, mélodie mystérieuse et envoûtante confiée aux cordes sur fond de vents graves (cuivres, bassons/contrebasson, clarinette) et de quelques notes d’orgue. A noter ici l’emploi des violons dans le registre aigu, qui renforcent cette sensation d’attente angoissante et de mystère troublant, le tout ponctué de quelques dissonances passagères. Alfons Conde explique au sujet de son oeuvre qu’il souhaitait renforcer la sensation de solitude, d’isolement mais aussi l’atmosphère claustrophobique du film d’Elio Quiroga. Pari réussi pour cette ouverture immersive et prenante assez impressionnante dans son atmosphère troublante, froide et lugubre.

« To Judas’ » débute avec un ensemble de flûtes en flatterzunge (effets de roulements de langue) sur fond de trémolos aigus de cordes. On pense immédiatement ici à Christopher Young, qui semble avoir quelque peu inspiré Alfons Conde sur « The Dark Hour ». L’accent est mis ici aussi sur les sonorités graves de l’orchestre (cors, timbales) tandis que les cordes restent essentiellement cantonnées au registre aigu pour renforcer cette sensation d’attente et de tension. Un bref sursaut orchestral vient renforcer la tension, alors que Jesus (Omar Muños) et la jeune Ana (Nadia de Santiago) se rendent chez Judas (Pepo Oliva). L’incertitude des lieux et de l’environnement servent de prétexte à Alfons Conde pour nous offrir une série d’atmosphères à suspense brumeuses et suffocantes du plus bel effet. La sensation d’isolement claustrophobique est largement valorisée dans le sinistre « The Alone Kid », où le compositeur a recours à un langage atonal avant-gardiste hérité de la musique atonale savante du XXe siècle : cordes dissonantes, clusters, glissandi de cordes, tout est mis en oeuvre pour renforcer ici l’atmosphère d’épouvante et d’angoisse du film. On retrouve le motif descendant de « To Judas » dans « Daily Life », toujours accompagné de quelques cordes dissonantes qui renforcent la tension à l’écran. Dans « First Cold Hour », Alfons Conde évoque la première séquence de l’heure froide en accentuant davantage le recours aux techniques instrumentales avant-gardistes et aux dissonances multiples : le morceau est partagé entre des cordes lugubres, stridentes, et un bloc de bois dissonants et sinistres, ponctué d’effets percussifs (roulements de cymbales) et de clusters de cuivres. On pense encore une fois à Christopher Young mais aussi Krzysztof Penderecki au niveau des influences. Ces brefs passages orchestraux chaotiques accompagnent dans le film les apparitions des « invisibles », ces créatures étranges qui surgissent mystérieusement dans les couloirs lors des heures froides. « The Expedition » accentue quand à lui le rythme avec quelques roulements de caisse claire, une série de développements du thème principal et même l’inclusion surprise d’une pièce classique en plein milieu du morceau. Les orchestrations sont ici plus colorées et diversifiées, notamment dans l’emploi plus cristallin du célesta, du piano et de la harpe pour la séquence où les survivants partent en expédition pour rechercher des munitions et des médicaments. Alfons Conde renoue très vite avec l’horreur dans « Ana and Mateo » et son atmosphère d’épouvante rappelant parfois le « Aliens » de James Horner. Ici aussi, le morceau fait intervenir un bref passage de « source music » du film couplé à la musique originale du compositeur espagnol.

Alfons Conde n’oublie pas pour autant la dimension humaine du récit en accentuant le lyrisme et l’émotion dans le poignant « Pablo’s Funeral », où domine un hautbois élégiaque sur fond de cordes douces et mélancoliques, d’une grande beauté. Evidemment, le contraste avec la froideur générale de la musique est assez saisissant, mais l’effet est impeccable, à l’écran comme sur l’album. On devine ensuite un soupçon d’enthousiasme et d’exubérance dans les orchestrations plus colorées et vives de « Judas Tells the Story », avec un classicisme d’écriture typique du compositeur espagnol, notamment ici dans l’emploi des cordes et des bois. Evidemment, cette petite pause ne dure qu’un temps, car l’épouvante gagne à nouveau du terrain dans le chaotique « A Stranger and the Children » et ses clusters dissonants de cuivres lugubres, sans oublier la violence extrême de « Jesus Infected » et son utilisation brutale des percussions et de l’ensemble orchestral (à noter que le thème principal est toujours omniprésent) pour une scène d’attaque des étrangers. Enfin, la partition de « The Dark Hour » touche à sa fin dans les 7 minutes intenses et incroyables de « Epiphany », où se mélangent rythmes martiaux pressants, cordes agitées, cuivres agressifs et même choeurs mystérieux et conclusion orchestrale grandiose pour le très pessimiste dénouement final (qui nous laisse néanmoins sans aucune forme d’explication quand à la signification de tout ceci !). Alfons Conde remplit donc parfaitement le cahier des charges et offre à « The Dark Hour » une superbe partition symphonique d’une virtuosité incroyable pour un jeune musicien. Certes, le travail de Conde est encore soumis à des influences, mais le résultat est tout simplement épatant dans sa maîtrise des couleurs orchestrales et dans son savoir-faire indéniable. Visiblement, Alfons Conde a des idées et il n’hésite pas à les valoriser, même s’il lui manque encore une personnalité forte et affirmée. Son travail sur « The Dark Hour » reste en tout cas une réussite incontestable et encourageante pour la suite, à découvrir grâce à l’excellente édition CD publiée par Movie Score Media !




---Quentin Billard