1-Return of the Piranhas 3.05
2-Piranhas in the Pool 1.50
3-Trident Aria 1.41
4-Barry's Heroic Rescue 4.04
5-Kiss of Life 1.51
6-Eaten in Van 2.23
7-Searching for the Cow 3.17
8-Shelby and Josh 1.45
9-Sheriff's Redemption 1.56
10-Goodman's Laboratory 5.07
11-Family's Photo 2.25
12-Struggle at the Pier 2.44
13-Inspecting Lake 2.17
14-Bathtub Dream 1.43
15-Confronting Chet 1.27
16-Depths of the Lake 2.49
17-School of Piranhas 1.03
18-Battle for the Water Park 2.51

Musique  composée par:

Elia Cmiral

Editeur:

Lakeshore Records LKS-342632

Producteurs soundtrack:
Richard Glasser, Eric Craig,
Elia Cmiral

Mixage musique:
Wolfgang Amadeus
Coordinateur score:
Eric Jasper
Percussion, synchro et
sound design:
John Samuel Hanson,
Elia Cmiral

Producteur exécutif album:
Richard Glasser
Producteurs exécutifs pour
Lakeshore Records:
Skip Williamson, Brian McNelis
Directeur A&R:
Eric Craig

Artwork and pictures (c) 2012 The Weinstein Company. All rights reserved.

Note: ***
PIRANHA 3DD
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Elia Cmiral
Après un premier opus sexy, gore, trash et vulgaire, les producteurs de « Piranha 3D » rempilent pour un second opus qui reprend les mêmes formules. C’est John Gulager qui succède à Alexandre Aja à la réalisation de « Piranha 3DD » qui repousse encore une fois les limites du trash et de la bienséance avec une nouvelle histoire de lac touristique envahi par de redoutables piranhas affamés. Suite à l’attaque du lac Victoria, les piranhas carnassiers ont survécu dans des marais et des canalisations d’une ville voisine. Alors qu’un nouveau parc aquatique vient tout juste d’ouvrir ses portes, Maddy (Danielle Panabaker), la fille du propriétaire, découvre que les canalisations du parc sont reliées à un lac où des piranhas ont attaqué plusieurs adolescents. Maddy tente alors d’avertir en vain son beau-père, Chet (David Koechner), qui refuse de l’écouter. Les piranhas finissent alors par rejoindre le parc aquatique en passant par les canalisations et déciment à nouveau les touristes et les baigneurs. Le long-métrage de John Gulager s’avère être une sympathique série-B horrifique sans grande prétention, à peine digne d’un direct-to-video. Réalisé sans brio et sans réelle passion, « Piranha 3DD » vaut surtout par son humour redoutable et loufoque, avec certaines scènes parodiques qui prouvent à quel point l’équipe du film ne s’est pas vraiment prise au sérieux sur cette énième histoire de piranhas sanguinaires. Tourné à la manière d’une comédie horrifique tendance années 80 (on retrouve au casting deux stars des eighties, Christopher Lloyd et Gary Busey), « Piranha 3DD » nous offre quelques jolis moments de gore et de dérision en perspective, avec au programme, une attaque inédite qui repousse les limites du vulgaire (un piranha dévore le pénis d’un ado en sortant du vagin de sa compagne), un shérif handicapé qui se greffe un fusil dans la jambe pour flinguer du piranha, des scènes redoutablement sexy, et un guest-star geek et hilarant en la personne de David Hasselhoff qui s’auto-caricature lui-même en se moquant de son rôle dans la série TV « Alerte à Malibu » et de sa carrière en général (l’acteur demande à un jeune enfant qui semble ne pas le reconnaître s’il a déjà vu ses films, en citant de façon hilarante des ‘perles’ telles que « Anaconda 3 » ou « Hop » !). Ainsi donc, malgré un scénario inexistant et une 3D passable, « Piranha 3DD » se rattrape par son humour geek irrésistible et un sens de la dérision permanent (cf. les faux ralentis mélodramatiques vers la fin du film) : le générique de fin se conclut d’ailleurs carrément sur un bêtisier, chose rarissime pour un film d’horreur.

Elia Cmiral, habitué aux musiques de films à suspense/horrifiques, signe pour « Piranha 3DD » un score plutôt sombre, intense et mouvementé, réalisé avec un budget somme toute très limité, obligeant ainsi le compositeur à utiliser un orchestre réduit avec une pléiade d’instruments samplés, un brin cheap. A noter que l’album crédite pourtant un orchestre, le KMC Orchestra, enregistré à Prague, en République Tchèque (Elia Cmiral est né en Tchécoslovaquie), mais à l’écoute du score, difficile de s’imaginer que le compositeur a pu arriver à un tel résultat avec un orchestre à sa disposition. A la partie symphonique habituelle s’ajoute une section rythmique constituée d’une batterie, d’une basse, d’une guitare électrique et d’une pléiade de sound design et effets synthétiques habituels conçus par Elia Cmiral lui-même et John Samuel Hanson. « Return of the Piranhas » pose ainsi d’emblée le ton du score avec un orchestre ample dominé par cordes, cuivres et percussions synthétiques et acoustiques en tout genre. Cmiral crée un sentiment d’urgence et de danger en suggérant la présence des piranhas de façon quasi martiale et guerrière, là où Michael Wandmacher avait opté pour une approche purement agressive et très premier degré. Evidemment, le compositeur n’évite pas les traditionnelles dissonances horrifiques propres à ce type de bande son, mais sa musique est teintée malgré tout d’un certain second degré qui manquait cruellement dans le score de « Piranha 3D ». « Return of the Piranhas » prend ainsi une tournure étonnamment dramatique à la limite de l’épique, là où un film de ce genre n’en méritait pas autant. Cmiral se fait plaisir et répond à l’humour du film par une dérision musicale quasi constante : les choeurs féminins (samplés) entendus à la fin de « Return of the Piranhas » renforcent à leur tour ce côté étrangement épique et décalé sur les images, avec un vrai sens de la dérision. Idem pour « Piranhas in the Pool » qui illustre l’attaque des piranhas dans la piscine à grand renfort de cordes dissonantes survoltées, de batterie et de rythmes agressifs et martelés. Mais lorsqu’on vous dit que l’humour est omniprésent, il faut écouter « Trident Aria » pour s’en convaincre pleinement, pastiche totalement décalée du « C’era una volta il west » d’Ennio Morricone, écrit sous la forme d’une aria d’opéra pour soprano et orchestre. L’envolée lyrique de la soprano rompt totalement avec le climat horrifique du film et impose un humour totalement décalé à l’écran, un formidable exemple de contre-emploi de la musique plutôt rare de nos jours à Hollywood. Idem pour le duo vocal de « Sheriff’s Redemption », lors de la scène où le shérif est tué de façon gore lors de la bataille finale : ici aussi, décalage total de la musique sur la scène, avec un lyrisme classique inattendu et hilarant à l’écran, avec des vocalises opératiques à des années lumière des musiques horrifiques habituelles. Le travail d’Elia Cmiral pour « Piranha 3DD » reflète ainsi la volonté de la production du film, désireuse de ne jamais trop se prendre au sérieux, flirtant continuellement avec le registre délicat de la parodie ou du pastiche.

Elia Cmiral s’essaie au registre de la musique d’action en évoquant la présence des piranhas à l’aide d’un motif de 4 notes staccato répétées rapidement au violon solo, et qui rappelle d’ailleurs le motif des piranhas du premier score de Michael Wandmacher. Désireux de varier les ambiances avec un plaisir constant, Cmiral nous offre même une hilarante caricature de Theme pour « Kiss of Life » extrêmement kitsch, confié aux cordes sur fond de piano et de batterie/basse, dans un style très années 80. Le motif de violon des piranhas revient dans « Eaten in Van », pour évoquer l’amoncellement des carnassiers affamés lors de l’attaque des deux jeunes dans le van. Dommage qu’ici aussi le morceau soit gâché par une utilisation souvent très cheap et pas très convaincante des samples et des synthétiseurs. Le suspense est aussi très présent, comme le confirme le sinistre et dissonant « Searching for the Cow », qui accompagne la séquence d’ouverture du film (avec un Gary Busey inattendu dans le rôle d’un vieux bouseux dont on devine aisément le destin...). Cmiral reprend les rythmes pop kitsch de « Kiss of Life » dans « Shelby and Josh », où il illustre une scène plutôt hot entre deux jeunes avec un étrange mélange de batterie, clavier électrique, basse et orchestre (à noter l’utilisation des pizzicati), qui cède très vite la place au motif de violon entêtant des piranhas, pour l’une des scènes les plus trash du film. La musique devient même plus intime dans « Family Photo » tandis que l’action reprend le dessus dans le frénétique « Struggle at the Pier », lorsque les deux jeunes filles subissent l’attaque de piranhas survoltés sur le pont : on notera ici le caractère plus expérimental des percussions, que ce soit dans l’utilisation d’enclume ou d’un piano préparé. Cmiral n’hésite pas à expérimenter quand l’occasion s’en présente, comme c’est le cas pour la scène du cauchemar de Maddy dans « Bathtub Dream », avec son piano filtré aux sonorités étranges, qui rappelle parfois le son de certaines partitions horrifiques kitsch des années 80. En parlant de kitsch, à noter l’utilisation d’un sample de saxophone assez laid dans « Confronting Chet », qui apporte ici aussi un humour inattendu au film. La musique bascule dans la fantaisie pure quand l’occasion s’en présente, entre suspense, frissons et grands moments de dérision. On appréciera par exemple le travail du violon solo frénétique autour du motif des piranhas dans « School of Piranhas », pour lequel Cmiral a enregistré une petite formation à cordes dans une sorte de collage étrange autour de l’entêtant « ta da da da » aigu de violon associé aux piranhas. Enfin, ne manquez pas le retour de Ving Rhames dans « Battle for the Water Park », avec une envolée de trompette martiale à la limite du western spaghetti.

Pari réussi donc pour Elia Cmiral qui, s’il ne marquera pas les esprits avec son travail sur « Piranha 3DD », a au moins le mérite de sortir des sentiers battus en apportant un véritable humour rafraîchissant à sa musique, dans un registre qui laisse habituellement peu de place à l’ironie ou à la dérision. Non seulement son travail ne jure en aucune façon avec les images du film de John Gulager, mais en plus, elle apporte cet humour nécessaire à une production horrifique qui ne se prend pas la tête, pour le meilleur comme pour le pire ! Quand à Elia Cmiral, il se fait plaisir en variant les styles et les ambiances à loisir, bien que le manque de moyens évident de certains morceaux empêche la musique d’atteindre son réel potentiel. Mais une partition aussi drôle et aussi loufoque pour un film de ce genre est une chose bien rare de nos jours à Hollywood, un score très sympathique à découvrir donc, surtout de la part d’un compositeur autrefois très inspiré, mais très vite retombé dans l’anonymat depuis qu’il aligne les musiques horrifiques à vitesse grand V (et souvent sans grand intérêt, hélas !). Une jolie surprise, donc !



---Quentin Billard