1-Luke Wanders, Mei Computes 2.06
2-Annie's Dead 2.07
3-Han's Arrival 2.14
4-Bedtime 1.12
5-The Russians Capture Mei 1.14
6-Negotiations 4.02
7-Luke Rescues Mei 3.04
8-Luke Kills Chemyakin 1.22
9-Escaping the Russians 1.48
10-Chang and Mei 1.17
11-Mei Follows Luke 1.58
12-The Insider 1.59
13-The Triads Capture Mei 2.28
14-The Number 2.36
15-Luke and Alex 2.32
16-Luke and Cpt. Wolf 3.02
17-The Safe 1.50
18-Got the Money 1.30
19-Here's The Deal 0.52
20-The Disk 1.18
21-The Showdown 4.03
22-Han Undone 0.58

Musique  composée par:

Mark Mothersbaugh

Editeur:

Pale Blue PB108

Produit par:
Mark Mothersbaugh
Producteur exécutif album:
Laura Katz
for Cutting Edge Music Services, LLC.
Legal Executive:
Charles M.Barsamian
for Cutting Edge Music Services, LLC.
Supervision musique:
Liz Gallacher

Artwork and pictures (c) 2011 Safe Productions, LLC/Lionsgate. All rights reserved.

Note: ***1/2
SAFE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Mark Mothersbaugh
Enfermé dans le registre du film d’action bien bourrin et décérébré, Jason Statham a bien du mal à voir sa carrière évoluer aujourd’hui. L’acteur britannique enchaîne ainsi les films de tatane comme d’autres collectionneraient les timbres. Malgré un choix de carrière simpliste et pas toujours très valorisant pour l’acteur, « Safe » reste pour Statham un film d’action plutôt bien troussé et assez réussi. Réalisé par Boaz Yakin (réalisateur de « Remember the Titans »), « Safe » voit son intrigue entièrement construite autour d’une petite fille chinoise, Mei (Catherine Chan), enlevée très jeune par les Triades parce qu’elle possède une mémoire exceptionnelle. Lorsque Mei réussit à mémoriser un important code censé ouvrir un précieux coffre-fort, la petite fille devient la cible des triades, de la mafia russe, de politiciens véreux et de flics new-yorkais corrompus. Luke Wright (Jason Statham) est un ancien flic dont la femme a été assassinée par des gangsters et qui se retrouve rejeté par ses collègues car il les a dénoncé. C’est par un pur hasard que Luke, qui n’est plus que l’ombre de lui-même, croise la route de la petite Mei en ville et va tenter de redonner un sens à sa vie en décidant d’aider la fillette à échapper à ses poursuivants. Lorsqu’il apprend que Mei possède la combinaison du mystérieux coffre-fort très convoité, Luke reprend les choses en main et protège la petite fille de ses agresseurs en s’associant temporairement avec ses anciens collègues pour trouver le coffre-fort et tenter de récupérer le précieux contenu. « Safe » est donc une énième série-B d’action à rajouter au palmarès de Jason Statham. Car, derrière sa photographie soignée tendance polar 70’s et son montage très rythmé à base de faux raccords libres et d’effets particuliers de narration (on doit le montage au français Frédéric Thoraval, un habitué des productions Luc Besson), montage inspiré aux dires de Thoraval par les films de la Nouvelle Vague française de Jean-Luc Godard ou François Truffaut (rien que ça !), « Safe » n’est rien de plus qu’un banal film d’action qui multiplie fusillades, règlements de compte et thème habituel du dur à cuir qui protège un enfant – scénario similaire à celui du film « Mercury Rising » avec Bruce Willis - le tout avec une bonne dose de violence bien proportionnée, de scènes d’action étonnamment lisibles et de quelques punchlines musclées très années 80 (Statham, après une fusillade dans un restaurant, qui rétorque avec un infime sérieux « j’ai passé la soirée au restau, mais on y servait que du plomb », ou alors « t’as de sacrées couilles Luke ! », et ce dernier de répondre : « Ouais, mes cuisses se touchent pas ! »). Pas de quoi sauter au plafond, même si ce « Safe » reste suffisamment divertissant pour nous maintenir en haleine pendant 1h30.

Inattendu sur un film d’action de ce genre, le compositeur Mark Mothersbaugh se voit confier les rênes de la partition de « Safe » et va à l’encontre de bon nombre de musiques d’action modernes en optant de façon étonnante pour une approche résolument orchestrale. Ainsi donc, à l’esthétique très années 70/80 du film de Boaz Yakin, Mark Mothersbaugh répond par une musique à mi-chemin entre les musiques thriller du David Shire des 70’s et celles du Jerry Goldsmith des 80’s. En plus de l’orchestre symphonique habituel, Mothersbaugh fait appel à quelques sonorités asiatiques/ethniques évoquant la petite Mei, et de quelques percussions électroniques et éléments synthétiques discrets. Dans « Luke Wanders, Mei Computes », Mark Mothersbaugh pose le ton résolument symphonique de sa partition avec un premier motif confié à un violoncelle et associé à Luke Wright dans le film, tandis que la partie intitulée « Mei Computes » introduit au début du film un motif de sept notes confié aux instruments asiatiques/ethniques pour la petite Mei. La musique reste sombre et tendue, annonçant clairement les ennuis à venir pour les deux individus. Et des ennuis, notre héros n’en est qu’au commencement dans le lugubre « Annie’s Dead », accompagnant la mort de la femme de Luke. Les cordes, lentes et dissonantes, rappellent clairement ici l’atonalité brumeuse des musiques thriller des années 70, avec un climat plus dramatique et amer, et un rappel du motif asiatique de Mei à la flûte ethnique à 1:44. Ces dissonances se prolongent dans « Han’s Arrival », pour lequel Mothersbaugh n’hésite pas à basculer dans un style plus avant-gardiste et agressif en privilégiant ici aussi le pupitre des cordes. Les percussions ethniques/asiatiques sont de la partie pour créer une tension évidente à l’écran, le tout ponctué de quelques cuivres plus musclés. A noter une très belle partie de violoncelle élégiaque dans « Bedtime », instrument déjà présent au début de « Luke Wanders » et qui apporte un semblant d’émotion à un score somme toute nerveux, sombre et incisif. Mothersbaugh développe aussi les percussions et instruments asiatiques dans « The Russians Capture Mei », pour un premier passage musclé du score de « Safe », démontrant le savoir-faire évident du compositeur dans le domaine des musiques d’action.

« Negotiations » prolongent ce climat de tension avec une accumulation des dissonances, de ponctuations instrumentales agressives, de percussions ethniques tonitruantes et de rythmes nerveux. L’utilisation du piano dans le grave n’est pas sans rappeler par moment ici les musiques d’action 70/80 de Jerry Goldsmith, qui semble avoir quelque peu influencé Mothersbaugh sur le score de « Safe ». Les orchestrations restent d’ailleurs assez riches et fournies, car même si les bois sont relativement discrets, le compositeur parvient à maîtriser sa palette instrumentale en variant les couleurs, notamment dans le pupitre des percussions, très impressionnant. Le thème de flûte de Mei est aussi de la partie, rappelant le danger et la menace qui pèse sur la petite fille. Vous aimez les musiques d’action orchestrales façon Jerry Goldsmith ou James Newton Howard ? Mark Mothersbaugh a pensé à vous avec « Luke Rescues Mei » : 3 minutes d’action pure et dure durant l’affrontement dans le métro, lorsque Luke sauve Mei. L’utilisation du clavier dans le grave et les rythmes syncopés rappellent aussi bien Goldsmith que JNH voire David Shire, Mothersbaugh s’acquittant de sa tâche avec une énergie et une efficacité redoutable, à l’écran comme sur l’album ! Sa musique apporte le punch nécessaire aux scènes d’action sans jamais verser dans le cacophonique ou le sound design. Dans « Luke Kills Chemyakin », le compositeur dévoile le second thème du score, un motif de 5 notes martelé dans le grave par un piano, des timbales et une contrebasse. Ce motif plutôt fun évoque clairement la détermination de Luke, bien décidé à reprendre son destin en main en protégeant Mei tout en réglant quelques comptes au passage (à noter que les premières notes du « Luke’s Theme » rappellent curieusement le thème de « Mission: Impossible » de Lalo Schifrin). Le retour du piano scandé dans le grave dans « Escaping the Russians » nous permet là aussi de faire une connexion évidente avec Goldsmith et Shire, notamment dans la façon dont le compositeur utilise un clavier synthétique un brin cheap et très connoté années 80. A noter qu’au niveau de l’enregistrement, Mothersbaugh joue de façon intéressante et inventive sur une véritable spatialisation des percussions, profitant pleinement de la stéréo, avec des timbales très centrées comme le piano ou des percussions asiatiques très excentrées. Le thème de Luke est développé dans « Escaping the Russians » mais aussi dans « Mei Follows Luke », pour lequel Mothersbaugh utilise quelques sonorités électroniques discrètes et inventives apportant une atmosphère particulière à la musique.

« The Insider » nous propose un bref passage jazzy plutôt fun et réussi, prouvant à quel point le compositeur semble s’être fait plaisir sur le film de Boaz Yakin. L’action reprend de plus belle dans les déchaînements percussifs de « The Triads Capture Mei », autre morceau d’action-clé du score de « Safe », et redoutable tour de force orchestral/percussif de la part de Mothersbaugh. L’atmosphère thriller/action rétro de « Luke and Alex » et « Luke and Cpt. Wolf » et son utilisation systématique du piano dans le grave renvoie ici aussi aux influences musicales évidentes de la partition de Mark Mothersbaugh. Maîtrisant ses références avec une réelle envie de bien faire, le compositeur rappelle qu’il est encore possible d’écrire une musique d’action orchestrale qui ne doive rien aux mastodontes synthético-orchestraux de chez Remote Control, surtout lorsqu’il cite quasi explicitement Jerry Goldsmith dans « Got the Money » ou « Here’s the Deal » et « The Disk », sans oublier la coda musclée et sombre de la confrontation finale du film dans « The Showdown ». Vous l’aurez donc compris, Mark Mothersbaugh signe une partition d’action résolument orchestrale pour « Safe », teintée de quelques références appréciables et d’une certaine inventivité dans le maniement des percussions. Située quelque part entre les années 70 et 80, la partition de « Safe » semble surgir d’une autre époque mais n’en conserve pas moins le punch habituel des musiques d’action orchestrales modernes, apportant une énergie et un rythme indispensable au film de Boaz Yakin, tout en personnifiant de façon remarquable les exploits virils de Jason Statham à l’écran : les fans de musique d’action des 80’s seront certainement aux anges avec le score rétro de « Safe » !



---Quentin Billard