1-Axis' Birth 2.53
2-The Village 1.02
3-Introducing the Queen 2.09
4-Sharken Attacks 1.56
5-Ilpo's Story 2.46
6-The Priest 0.58
7-The Offering 2.52
8-The Escape 1.36
9-Fear the Gods 1.30
10-The Flying Sap 2.53
11-Forbidden Land 1.44
12-The Great Oblivion 1 2.00
13-The Great Oblivion 2 1.34
14-Above the Clouds 2.04
15-Maruder Attacks 4.01
16-The Middle People 2.04
17-Meeting the Gods 2.17
18-Opaz's Theme 2.48
19-Face Your Destiny 1.42
20-The Resolution 4.51
21-Axis' Birth (A Capella) 2.36
22-Kaena - The Song(End Title) 4.45*

*Ecrit et interprété par
Jérôme Collet.

Musique  composée par:

Farid Russlan

Editeur:

Sony/ATV Music
Publishing Fran

Musique dirigée par:
Farid Russlan
Orchestrations de:
Lawrence Ashmore, James Sherman
Musique enregistrée à Sofia
avec l'Orchestre Symphonique de
Bulgaire - SIF309
Direction d'orchestre:
Deyan Pavlov
Enregistrement et mixage musique:
Bruno Mercère
Mixage de la musique:
Plus XXX Studio
Production exécutive de la musique:
France Tarpinian
pour Grand Large Music
Patrick Aumigny
pour StudioCanal Musique
Choeurs:
Ensemble Vocal Stéphane Caillat

Artwork and pictures (c) 2003 Xiam Films/Studio Canal/Groupe TVA Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
KAENA, LA PROPHÉTIE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Farid Russlan
« Kaena, la prophétie » est le premier long-métrage d’animation français à avoir été entièrement réalisé en 3D et en images de synthèse. A l’origine de ce projet monumental, il y a la détermination acharnée d’un homme, Chris Delaporte, réalisateur français qui travailla pour le compte d’Amazing Studio dans les années 90 : il participa ainsi à l’animation du jeu vidéo « Heart of Darkness » d’Eric Chahi sorti en 1998. Peu de temps après la sortie du jeu, Delaporte quitte le studio et s’associe avec Patrick Daher pour monter ensemble leur propre projet : « Gaïna », un premier pilote télévisé de 52 minutes sur lequel les deux hommes ont travaillé pendant un an et qui rencontre un franc succès. En 1997, les deux compères réunissent une petite équipe d’une dizaine de personnes avec un budget modeste (à peine 18 millions de francs) mais le projet de faire de « Gaïna » un long-métrage animé avance difficilement. Le scénario est conçu au bout d’un an et demi, après une dizaine de remaniements en tout genre. L’équipe du film travaille d’arrache-pied, bientôt rejointe par des recrues canadiennes qui s’occupent de l’animation, le tout conçu sur ordinateur en 3D. En 2002, Chaman, le studio qui finance le projet – spécialisé dans les jeux vidéo – dépose le bilan pour de bon, suite à une série de pertes financières irréversibles. Alors que le projet (rebaptisé entre temps « Axis ») semble s’écrouler, Xilam, le studio de Marc du Pontavice, se montre finalement intéressé par le film et rachète les droits du long-métrage et de son jeu vidéo pour une somme dérisoire. Objectif réussi : après six ans d’un travail acharné, « Kaena, la prophétie » voit enfin le jour et sort en salles en 2003, en France et dans 35 autres pays. Techniquement parlant, « Kaena » est une réussite incontestable, surtout pour un film de cette époque – s’il est sorti en 2003, il ne faut pas oublier que la production du film débuta en 1997 - l’animation fluide, les expressions des visages, les décors grandioses et insolites du monde d’Axis, le jeu particulier des couleurs (qui tournent autour de l’orange/marron et du bleu), l’univers sombre et biomécanique des Selenites inspiré de H.R. Giger, tout est fait pour faire de « Kaena, la prophétie » un projet hors du commun. Pourtant, l’animation 3D du long-métrage de Chris Delaporte et Pascal Pinon n’est pas exempt de défauts : les graphismes sont parfois un peu trop fouillis (notamment les scènes avec les Selenites), l’animation saccade étrangement à quelques reprises, les liquides sont très artificiels et certains personnages manquent encore de réalisme dans leur animation (les expressions des visages sont encore trop artificielles).

D’une façon générale, les concepteurs du film sont restés très proches de l’univers des jeux vidéo, le film ressemblant ainsi à une vaste cinématique de jeu d’1h30. On regrettera aussi la faiblesse des dialogues et la médiocrité de certains seconds rôles (les vers qui servent Opaz font office d’insupportables side-kicks qui rivaliseraient sans problème avec le Jar Jar de « Star Wars Episode I »). En revanche, niveau casting vocal, le film s’offre les services prestigieux de stars telles que Cécile de France, Michael Lonsdale ou bien encore Victoria Abril, et carrément Kirsten Dunst, Richard Harris (dans son tout dernier rôle pour le cinéma) et Anjelica Huston pour la version anglaise du film. Malgré le côté artificiel du visuel, « Kaena » reste pourtant un défi technique incontestablement réussi, surtout pour une production française. L’héroïne, Kaena, est une jeune rebelle intrépide, sexy et attachante, bien décidée à braver les interdits pour partir à la découverte d’un autre monde, au-delà d’Axis, sur une gigantesque planète-arbre de 150 kilomètres de racines et de branches entrelacées née il y a 600 ans suite au crash du vaisseau Vecanoi. Le coeur du vaisseau a conçu Axis et ses habitants, mais aujourd’hui, la reine maléfique des Selenites accuse Vecanoi d’avoir pillé les ressources de leur monde et cherche par tous les moyens à le détruire, quitte à sacrifier son peuple pour y parvenir. De son côté, le peuple humain de Kaena est réduit à l’esclavage, obligé de récolter la précieuse sève pour calmer la colère de leurs dieux (qui sont en réalité les Selenites) dans un monde en train d’agoniser lentement mais sûrement, jusqu’au jour où, bravant l’autorité du grand prêtre, Kaena se lance dans l’aventure, attirée par ses mystérieux rêves prophétiques dans lesquels elle a aperçu un autre monde avec un soleil bleu et de vastes océans. Influencé par Giger, Miyazaki, Otomo, Laloux, les mangas japonais (les courbes sexy et très fantasmées de Kaena rappellent celles de l’héroïne de « Gunnm ») et l’heroic-fantasy en général, « Kaena, la prophétie » est essentiellement destiné aux ados et aux jeunes adultes, un univers de science-fiction très particulier, un peu sombre sans être vraiment violent, plein de mystères, de péripéties, de créatures et de mondes étranges, qui captivera votre imagination et vous transportera dans un autre monde.

La partition musicale du compositeur français Farid Russlan reste l’élément le plus apprécié du film de Chris Delaporte et Pascal Pinon. Il s’agit aussi du premier travail majeur du compositeur pour le cinéma. Né dans une famille de mélomanes, Russlan débuta sa carrière de musicien en composant pour des documentaires TV de l’INRA puis pour des musiques de téléfilms, de ballet et de CD-ROM. Disposant de moyens modestes et composant essentiellement sur ordinateur à ses débuts avec des logiciels de banques de sons, Farid Russlan perfectionne son art, maîtrisant ses références (John Williams, Chostakovitch, Herrmann, Prokofiev, Rimski-Korsakov), attendant patiemment le jour où LE projet se montrerait enfin, celui qui lui permettrait d’accomplir son rêve : écrire pour un vrai orchestre symphonique. En 1990, le compositeur saisit enfin l’occasion d’écrire pour l’orchestre de l’Opéra de Paris lors d’une composition de commande pour un film d’entreprise produit par Bouygues. En 2000, Farid Russlan se lance dans la musique d’un jeu vidéo, « Egypte II : la prophétie d’Héliopolis ». Et c’est ainsi que le compositeur finit par être remarqué par les réalisateurs de « Kaena, la prophétie », pour lequel Russlan se voit enfin confier des moyens à la hauteur de ses ambitions : enregistrée à Sofia avec l’orchestre de Bulgarie et l’ensemble vocal Stéphane Caillat, la partition musicale de « Kaena » est une première oeuvre remarquable de la part de Farid Russlan, une musique qui démontre déjà le potentiel et le savoir-faire évident du musicien, apportant une vraie émotion et une certaine grandeur aux images du film (on regrettera simplement le fait que la musique soit légèrement sous mixée sur les images). Dès les premières notes de la musique, « Axis’ Birth » fait résonner une puissance chorale à l’écran, épique et lyrique, dont les harmonies dramatiques s’imposent par leur noblesse et leur force évidente. Les harmonies de la chorale a cappella de « Axis’ Birth » apportent un vrai mysticisme à la création du monde d’Axis au début du film, et témoignent du savoir-faire évident de Farid Russlan. A 1:30, le thème principal fait son apparition, porté par des cuivres imposants sur fond de choeurs grandioses et de quelques roulements de timbales.

Après une introduction aussi épique, c’est avec une certaine envie que l’on découvre l’univers musical d’Axis et du village de Kaena dans « The Village ». Russlan utilise ici un ensemble de percussions ethniques/tribales pour les scènes au village, avec un orchestre toujours aussi présent et imposant dans ses orchestrations. Et cette allure symphonique imposante se prolonge dans le massif « Introducing the Queen », pour l’apparition de la reine des Selenites. On retrouve ici le thème choral introductif de « Axis’ Birth », avec ses harmonies mystiques impressionnantes et des orchestrations riches et variées, incluant quelques sonorités plus cristallines pour le monde aquatique étrange des Selenites avec l’utilisation de notes ascendantes au célesta/glockenspiel associé aux Selenites dans le film. Farid Russlan prouve aussi avec « Sharken Attacks » qu’il maîtrise le domaine des musiques d’action avec un premier déchaînement orchestral percussif impressionnant, incluant quelques éléments synthétiques bien adaptés. Dans « Ilpo’s Story », les orchestrations reflètent un certain savoir-faire classique tout à fait appréciable et rafraîchissant, que ce soit dans l’utilisation quasi impressionniste ici des bois, du glockenspiel ou des cordes. L’action reprend le dessus durant la fuite de Kaena (« The Escape »), avec le retour des effets sonores synthétiques et d’un glockenspiel omniprésent au milieu de la masse orchestrale. « The Great Oblivion 1 » s’affirme par son caractère grandiose, sombre et imposant, alors que « The Great Oblivion 2 » mise davantage sur les atmosphères synthétiques sonores pour évoquer les terres désolées au-delà d’Axis. Les touches impressionnistes prennent une toute autre tournure dans le magnifique « Above the Clouds », alors que Kaena découvre enfin ce qu’il y au dessus des nuages d’Axis, après avoir fait la rencontre d’Opaz et de ses vers. C’est l’occasion pour le compositeur de nous offrir un nouveau morceau d’action tonitruant pour « Maruder Attack », lors de la séquence de l’attaque du marauder contrôle par les Selenites. Après une introduction dissonante et inquiétante, « Maruder Attack » évolue rapidement vers un nouveau déchaînement orchestral agrémenté de percussions synthétiques, de choeurs dissonants aux effets quasi avant-gardistes (glissandi), et même de quelques samples de choeurs plutôt bien placés, sans aucun doute l’un des passages les plus impressionnants du score de « Kaena, la prophétie ». On appréciera enfin le souffle choral épique et pesant de « The Resolution », reprenant une dernière fois le thème principal et le retour d’un instrument-clé du score, le glockenspiel. Le générique de fin se termine avec la chanson « Kaena The Song », écrite et interprétée par Jérôme Collet, chanson magnifique qui évoque la détermination et l’espoir apporté par Kaena. Farid Russlan signe donc une première oeuvre symphonique de qualité pour « Kaena, la prophétie », une musique d'atmosphère imposante pleine de promesse et d’ambition, qui apporte un certain potentiel épique au film, un score plus harmonique que réellement mélodique, avec une vraie maturité et un savoir-faire impressionnant pour un jeune compositeur français. La musique de « Kaena » est donc une superbe carte de visite pour Farid Russlan qui, s’il sait saisir les bonnes opportunités, devrait se voir ouvrir les portes de la musique de film en Europe ou à Hollywood grâce à cette excellente partition.




---Quentin Billard