1-Main Title/A Desert Truce 6.34
2-Horizon To Horizon 3.59
3-The Wonders of Wealth 1.49
4-"I Have Chosen You" 3.22
5-"You Were A Prince" 1.47
6-Leaving As An Emissary 5.19
7-Father and Son 1.50
8-Phantom Army 1.48
9-"So This Is War" 1.56
10-The Blowing Sands 4.27
11-Fresh Water 1.51
12-One Brother Lives,
One Brother Dies 6.44
13-Battle in the Oil Fields 5.13
14-A Kingdom of Oil 8.43

Musique  composée par:

James Horner

Editeur:

Varèse Sarabande VSD-7134

Album produit par:
Simon Rhodes, James Horner
Producteur exécutif:
Simon Franglen
Producteur excécutif pour
Varèse Sarabande:
Robert Townson
Monteurs musique:
Dick Bernstein, Jim Henrikson
Arrangeur musique électronique:
Simon Franglen
Vocalises solos et oud de:
Dhafer Youssef
Piano solos de:
James Horner
Vocalises additionnelles de:
Fahad Al-Kubaisi,
Susheela Raman

Préparation musique:
Bob Bernstein, Vic Fraser

(c) 2011 Quinta Communications/Prima TV/France 2 Cinéma/Carthago Films. All rights reserved.

Note: ***1/2
BLACK GOLD
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by James Horner
Grande fresque d’aventure signée Jean-Jacques Annaud, « Black Gold » (Or Noir) raconte l’histoire de deux émirs arabes qui s’affrontent pour la possession d’un précieux territoire nommé le Corridor Jaune dans le désert d’Arabie en 1930. L’émir Nessib (Antonio Banderas) ressort victorieux de cette bataille et récupère ainsi le Corridor jaune. Pour mettre fin à la guerre des tribus, Nessib décide de créer un no man’s land et garde avec lui les deux fils de son adversaire l’émir Amar (Mark Strong), Auda (Tahar Rahim) et Saleeh (Akin Gazi). 19 ans plus tard, des américains employés par la Texan Oil débarquent dans le corridor jaune et découvrent du pétrole. Comprenant qu’il tient là une nouvelle source d’enrichissement, Nessib décide de rompre l’accord passé avec Amar et déclenche à nouveau une guerre entre les deux tribus. Saleeh tente alors de s’enfuir mais se fait abattre par des hommes de main de Nessib. Ce dernier décide ensuite de marier Auda à sa fille Leyla (Freida Pinto), et envoie alors son otage à Amar pour tenter de le raisonner et trouver ensemble un terrain d’entente. C’est le début d’une longue bataille durant laquelle le jeune Auda va prendre son destin en main et unifiera les différentes tribus du désert ralliées à sa cause, pour tenter de reprendre ensemble le corridor jaune et chasser les pétroliers américains. Avec ses quelques 40 millions de dollars, « Black Gold » est une grosse production d’aventure qui rappelle les classiques de David Lean des années 60 – on pensera d’emblée à « Lawrence of Arabia » - Adapté du roman « La soif noire » d’Hans Ruesch publié en 1961, « Black Gold » prend donc les traits d’une grande fresque épique et grandiose qui permet à Jean-Jacques Annaud de retrouver son goût pour les productions historiques après « Le Nom de la Rose » et « Enemy at the Gates » (Stalingrad). Le film évoque la bataille des tribus pour la conquête du pétrole dans l’Arabie des années 30 avec un casting de luxe (Banderas, Strong, Rahim, Pinto, etc.), des paysages désertiques grandioses, des batailles épiques, des personnages mémorables (mention spéciale à l’excellent Tahar Rahim, révélé par Jacques Audiard dans « Un Prophète » en 2009), et bien sûr, une mise en scène classique, académique mais indéniablement élégante, une fresque old school très réussie et divertissante, à mi-chemin entre le « Lawrence of Arabia » de David Lean et le « Wind and the Lion » de John Milius.

« Black Gold » marque par la même occasion les retrouvailles entre Jean-Jacques Annaud et James Horner, après « Le Nom de la Rose » (1986) et « Enemy at the Gates » (2001). Pour sa troisième participation à un film d’Annaud, Horner signe une grande partition symphonique classique pour « Black Gold », absolument typique des musiques d’aventure épiques du compositeur américain. S’inspirant des touches orientales/arabisantes de sa partition pour le film « The Four Feathers », James Horner élabore pour « Black Gold » un score orchestral qui souligne parfaitement l’idée de la guerre des tribus, de la conquête du désert et de la détermination du jeune Auda. Pour parvenir à ses fins, James Horner a fait appel à l’orchestre symphonique habituel, enregistré à Londres, avec un ensemble de solistes vocaux incluant le talentueux chanteur tunisien Dhafer Youssef, et les vocalises orientales éthérées du chanteur qatare Fahad Al-Kubaisi et de la chanteuse anglaise Susheela Raman, dont les voix mystérieuses évoquent aussi bien le monde arabe que les mystères du désert d’Arabie. Cet univers musical du désert arabe, Horner l’introduit brillamment dès le « Main Titles/A Desert Truce », dont les tremolos sombres de cordes, les notes graves de piano et les tensions harmoniques traduisent clairement le contexte de la guerre des tribus arabes au début du film. Avec l’introduction des vocalises orientales de Fahad Al-Kubaisi qui évoque l’Adhan (l’appel traditionnel à la prière musulmane), le ton est donné : mystérieuse, sombre, l’introduction ne tarde pas à faire entendre les premières notes du thème principal au piano à 0:53, repris plus loin au hautbois à 4:24 – thème qui n’est pas sans rappeler les premières notes du thème de « Enemy At The Gates » (précédente collaboration entre Horner et Jean-Jacques Annaud datant de 2001) – L’apparition des vocalises de Susheela Raman à 1:14 apporte alors une poésie orientale impressionnante à cette introduction, sans oublier la présence d’un motif de cinq notes de cors, très présents dans ce « Main Titles » (à partir de 0:30), personnifiant le désert arabe. Après avoir posé brillamment les bases de sa partition, Horner a tout le loisir de développer pleinement son matériau thématique et instrumental à partir de « Horizon To Horizon », qui reprend le thème principal dans son intégralité aux violoncelles, dont le jeu plutôt léger et élégant cache en réalité une tension plus dramatique qui ne tardera pas à éclater par la suite.

Les personnages d’Auda et de son frère Saleeh sont au coeur de la partition d’Horner, qui évoque aussi bien le parcours de ces personnages que l’univers aussi magique qu’impitoyable du désert d’Arabie. On appréciera l’envolée du thème principal à 2:09 lorsque l’avion survole la cité de l’émir Nesib, le thème prenant alors une tournure plus majestueuse mais aussi plus orientale dans ses harmonies qui rappelleront inévitablement le « Lawrence of Arabia » de Maurice Jarre. On retrouve ici le lyrisme symphonique cher à James Horner avec des harmonies et des sonorités instrumentales qui nous renvoient clairement dix voire quinze ans en arrière – un gage de qualité, probablement – A ce sujet, on retrouve quasiment le James Horner des années 80 dans « The Wonders of Wealth », alors que Nesib se réjouit de sa fortune grandissante avec l’exploitation de l’or noir. Le compositeur verse ici dans l’humour et la dérision avec un morceau énergique, jovial et survitaminé, personnifiant l’ivresse du pouvoir de l’émir et son insouciance quasi infantile dans une série d’envolées instrumentales euphorisantes avec cordes bondissantes, bois légers, percussions ironiques et cuivres facétieux. Si « The Wonders of Wealth » fait office de boutade musicale au sein d’une partition somme toute très sérieuse et plutôt dramatique, « I Have Chosen You » remet les pendules à l’heure pour la romance naissante entre Leyla et Auda. Horner personnifie cette idylle balbutiante avec ses notes délicates de piano dont lui seul en possède le secret, et une pudeur extrême et touchante, typique du compositeur. Mais les choses se gâtent radicalement dans « You Were A Prince », alors qu’Horner dévoile enfin l’ensemble des instruments et percussions ethniques du score : sombre et agressive, la pièce suggère le meurtre de Saleeh assassiné pour trahison. L’idée du deuil est alors au coeur de « You Were A Prince », avec le retour de la voix de Dhafer Youssef, qui suggère ici la mort et la tragédie. Dans « Leaving As An Emissary », on retrouve des harmonies de cordes typiques d’Horner (entre 1:40 et 1 :49, bref rappel d’un matériau harmonique hérité de « Legends of the Fall ») et une superbe reprise passionnée et noble du thème principal oriental à 2:11. Les retrouvailles entre Auda et son père sont suggérées avec émotion dans « Father and Son », marqué par un ostinato rythmique de percussions légères, la voix de Dhafer Youssef et un accompagnement pour piano, harpe et violoncelle, un morceau bref mais très réussi dans le film.

La musique prend une tournure résolument dramatique dans « Phantom Army », surtout avec les deux vocalises, celle grave et sombre de l’homme, l’autre, aigue et tourmentée de la femme, une dualité magnifique qui évoque les choix et le dilemme d’Auda, pris entre son amour pour Leyla et son choix de ralier la cause de son vrai père Amar. L’émotion devient véritablement intense dans « So This Is War », dans lequel la voix de Dhafer Youssef apporte une mélancolie et une nostalgie impressionnante au morceau, personnifiant le début de la guerre et la perte de l’innocence. Et c’est ainsi que l’on arrive au sombre et tourmenté « The Blowing Sands », qui contient une large citation quasi note pour note au « Sacre du Printemps » de Stravinsky, et plus particulièrement à l’Introduction de la deuxième partie du « Sacre » (le Sacrifice). La citation vient accompagner les images de la scène où Auda et son armée traversent le désert brûlant sous une chaleur accablante. Les harmonies en tierces parallèles des flûtes et des cordes – empruntées à Stravinsky – et l’harmonie polytonale permettent à Horner d’évoquer la chaleur écrasante et le malaise des hommes assoiffés et livrés à eux-mêmes, aux bords de l’agonie. On regrettera simplement le caractère trop évident et trop dévoilé de cette citation (comme souvent chez Horner !), qui ne revient d’ailleurs nulle part ailleurs dans le film. L’espoir renaît dans l’exaltant « Fresh Water » qui marque le retour exubérant du thème principal, avant la longue bataille finale qui débute avec les sursauts percussifs agressifs et tragiques de « One Brother Lives, One Brother Dies », ponctué de cuivres et de percussions guerrières, et de moments d’émotion – la reprise poignante et pudique du thème au violon à 2:57 – Et la confrontation a enfin lieu dans « Battle in the Oil Fields » : l’assaut final mené par Auda sur les champs pétroliers de Nesib est accompagné par un ostinato rythmique martial typique des musiques d’action/aventure habituelles d’Horner. Des cuivres imposants développent un motif d’action aux cors basé sur les premières notes du thème principal, qui prend ici une tournure résolument guerrière. L’accélération rythmique à 1:46 permet d’intensifier l’ampleur des combats, jusqu’à l’envolée épique et dramatique du thème aux cuivres à 2:39. Le motif de « I Have Chosen You » revient après 4:09 pour suggérer un retour au calme et la fin de la bataille, avant la longue coda finale de « A Kingdom of Oil », qui reprend le thème principal avec une série de développements majestueux et très réussis à l’orchestre et aux solistes, sans oublier les indispensables vocalises finales de Dhafer Youssef.

Vous l’aurez donc compris, c’est avec plaisir que nous retrouvons un James Horner inspiré sur « Black Gold », qui, à défaut de nous offrir un nouveau chef-d’oeuvre, nous livre malgré tout une partition symphonique, ample, riche et généreuse, qui séduira les fans du compositeur et ceux qui apprécient les musiques épiques et dramatiques du compositeur et les univers musicaux inspirés du monde arabe. Entre passages tragiques, moments poétiques délicats et morceaux d’action guerriers et spectaculaires, « Black Gold » possède tous les ingrédients d’une grande partition, malheureusement gâchée par les tics habituels agaçants du compositeur (et notamment une propension incroyable à s’inspirer de ses anciennes mélodies/harmonies ou à faire de larges citations ‘classiques’ dont on pourrait se passer volontiers). Malgré tout, la magie semble opérer, aussi bien à l’écran que sur l’album, apportant un vrai souffle épique et émotionnel au film d’Annaud. « Black Gold », un chef d’oeuvre musical ? Pas vraiment...Plutôt une jolie réussite de la part d’Horner et un score assez inspiré qui parvient à effacer le souvenir d’un « Enemy At the Gates » plutôt tiède et décevant.




---Quentin Billard