1-Jack and Isabelle (Theme From
"Jack the Giant Slayer") 3.56
2-Logo Mania 1.00
3-To Cloister 1.28
4-The Climb 2.41
5-Fee Appears 3.16
6-How Do You Do 2.23
7-Why Do People Scream? 3.17
8-Story of the Giants 3.22
9-Welcome to Gantua 4.12
10-Power of the Crown 1.21
11-Not Wildy Keen
On Heights 2.19
12-Top Of The World 2.30
13-The Legends Are True/
First Kiss 3.43
14-Roderick's Demise/
The Beanstalk Falls 5.36
15-Kitchen Nightmare 3.24
16-Onward and Downward! 3.19
17-Waking A Sleeping Giant 2.21
18-Chase To Cloister 5.19
19-Goodbyes 2.29
20-The Battle 5.31
21-Sniffing Out Fear/
All Is Lost 5.07
22-The New King/Stories 4.17

Musique  composée par:

John Ottman

Editeur:

WaterTower Music no label number

Musique conduite par:
Jeffrey Schindler
Préparation musique:
JoAnn Kane Music Services
Enregistrée à:
Abbey Road Studios,
London, England

Monteur musique:
Amanda Goodpaster
Assistant montage:
Joseph Bonn
Recherches musique:
Roman Deppe
Coordinateur score:
Deborah Streeter
Choeur:
The Bach Choir
Album produit par:
John Ottman
Direction de la musique pour
New Line Cinema:
Erin Scully
Direction de la musique
pour WaterTower Music:
Jason Linn
Music business affairs:
Dirk Hebert
Coordinateur album score:
Kim Baum

Artwork (c) 2013 Warner Bros. Entertainment Inc. All rights reserved.

Note: ****1/2
JACK THE GIANT SLAYER
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by John Ottman
Soucieux de se renouveler constamment et véritable touche-à-tout, Bryan Singer tente de sortir temporairement de son registre habituel des films de super héros qu’il instaura lui-même au début des années 2000 avec « X-Men » en adaptant cette fois-ci à l’écran deux célèbres contes populaires anglais : « Jack the Giant Slayer » (Jack le chasseur de géants) et « Jack and the Beanstalk » (Jack et le haricot magique). L’histoire se déroule au Moyen-âge, dans les Cornouailles. Jack (Nicholas Hoult), un jeune paysan modeste, travaille dans la ferme de son père et se passionne pour les histoires fantastiques que lui racontent son père le soir avant d’aller dormir, celles d’une terrifiante race de géants qui vivent dans un autre monde aux portes du royaume terrestre, et qui ont juré de revenir dans notre monde suite à leur défaite infligée par leur ennemi juré, le légendaire roi Erik. Un soir, Jack reçoit la visite d’une mystérieuse jeune femme cagoulée qui tente d’échapper à son destin : il découvre alors qu’il s’agit de la princesse Isabella (Eleanor Tomlinson), lasse de sa vie luxueuse au château, et bien décidée à changer de vie. Jack a fait récemment l’acquisition de mystérieux haricots qu’un moine lui avait remis avant d’être rattrapé par les gardes du maléfique Lord Roderick (Stanley Tucci), qui convoitait à son tour ces haricots magiques aux immenses pouvoirs. Mais lors d’une dispute avec son oncle, ce dernier jeta les haricots qui tombèrent sous les planches de la ferme de Jack. Le soir où Jack reçoit la princesse, une pluie commence à s’abattre sur la ferme de Jack, et l’eau finit par toucher les haricots : ces derniers se transforment alors en immenses grappes géantes qui surgissent violemment du sol et emportent la maison de Jack et la princesse très loin dans le ciel, au-delà des nuages. Dès lors, le roi Brahmwell (Ian McShane) et ses proches organisent une expédition pour escalader l’immense grappe du haricot magique et retrouver la princesse qui se trouve désormais perdue dans un royaume au-delà des nuages, celui des terrifiants géants. Jack décide alors de rejoindre l’expédition menée par le vaillant Elmont (Ewan McGregor), leader de la garde royale, accompagné de l’usurpateur Lord Roderick et de quelques uns de ses sbires. Pour Jack, ce sera l’occasion d’accomplir quelque chose de grand dans sa vie et de découvrir le monde extraordinaire et immensément dangereux des géants, qui n’attendent qu’une seule occasion pour se venger des hommes et reconquérir le monde d’en bas.

« Jack the Giant Slayer » est donc une énième adaptation d’un conte populaire à l’écran, un genre revenu au goût du jour depuis le succès de « Red Riding Hood » (2011), « Snow White and the Huntsman » (2012) ou « Alice in Wonderland » (2010). Ici comme pour la plupart des autres films, le conte de fée se transforme en aventure sombre et épique dans laquelle un jeune garçon va apprendre à devenir un homme en vivant une aventure incroyable dans un monde plein de dangers et de créatures immenses, puissantes et repoussantes, les géants. Entièrement tourné en 3D à l’aide des caméras numériques Red Epic – nouvelle technologie révolutionnaire – « Jack and the Giant Slayer » est l’un des blockbusters majeurs du début de l’année 2013, une superproduction au budget totalement démesuré (près de 195 millions de dollars) produit par la Warner mais dont la sortie prévue initialement en janvier 2012, a été repoussée à plusieurs reprises pour éviter la concurrence directe avec d’autres grosses productions hollywoodiennes de l’époque. Le résultat est bien évidemment spectaculaire et visuellement épatant, avec ses géants entièrement conçus en ‘performance capture’, et des effets spéciaux colossaux bien qu’un peu trop omniprésents tout au long du film. On regrettera le manque d’émotion de l’histoire, qui aligne les scènes d’action/d’aventure à un rythme élevé et les effets spéciaux 3D sans grande subtilité. Quand à Bryan Singer, on a connu le réalisateur plus inspiré, visiblement peu à l’aise dans ce film de commande un peu aseptisé, destiné à être vu par le plus grand nombre (le film s’avère être pourtant assez sombre par moment).

Qui dit Bryan Singer dit bien évidemment John Ottman à la musique, qui retrouve ainsi le réalisateur après « Public Access » (1993), « Usual Suspects » (1995), « Apt Pupil » (1998), « X-Men 2 » (2003), « Superman Returns » (2006) et « Valkyrie » (2008). Pour sa septième collaboration à un film de Bryan Singer, John Ottman – qui opère aussi comme monteur et producteur sur le film – signe une grande partition symphonique épique, riche et colossale, à l’image de cette aventure évoquant l’affrontement démesuré entre les humains et une race de terrifiants géants. Ecrite pour un orchestre symphonique et une formation chorale massive, le score de John Ottman est une surprise de taille pour tous ceux qui désespéraient de retrouver un jour le compositeur dans un registre symphonique épique proche de « Superman Returns » ou « Astro Boy » : bien plus abouti que ces deux précédents scores, « Jack the Giant Slayer » semble être aussi l’opus de la maturité pour le compositeur, qui, bien qu’influencé ici par des grands noms de la musique de film (John Williams, Jerry Goldsmith, Alan Silvestri, James Horner), parvient à écrire une partition monumentale, épique et splendide pour le film de Bryan Singer. Le score repose essentiellement sur une série de thèmes largement valorisés par des orchestrations bétonnées et des mélodies soignées. Introduits dans « Jack and Isabelle (Theme from Jack the Giant Slayer) », le thème principal de Jack et le Love Theme pour Jack et Isabelle sont les deux mélodies principales du score, présentés ici dans une version concert écrite spécifiquement pour l’album. Le thème de Jack est une fanfare héroïque et triomphante, évoquant aussi bien l’idée de l’aventure que la noblesse et la détermination de Jack, avec ce sentiment de merveilleux et de magie propre aux grandes aventures. Le thème est suffisamment flexible pour pouvoir s’adapter à chaque scène et ambiance du film, tout en restant très présent et reconnaissable sur les images. Moins reconnaissable, le Love Theme est une très jolie mélodie romantique noble et élégante que n’aurait certainement pas renié James Horner ou un Jerry Goldsmith : exposé dès 1:23 à la harpe et aux cordes, le thème évoque la romance entre Jack et Isabelle dans le film. Pour John Ottman, c’est surtout l’occasion rêvée d’écrire un grand thème romantique pour le cinéma, une aubaine pour le musicien qui a toujours déclaré vouloir écrire une musique romantique pour un film. On appréciera ici le charme et l’élégance de la mélodie, soutenue par des orchestrations au classicisme incroyable pour un compositeur autodidacte de formation, à la manière des grandes musiques romantiques hollywoodiennes d’antan. Avec le générique de début et l’apparition du titre (« Logo Mania »), Ottman suggère le thème héroïque de Jack au hautbois dès 0:09 puis aux cuivres à 0:40, sur fond d’arpèges survoltés de cordes et de ponctuations percussives imposantes à base de tambours taïkos japonais.

Niveau thématique, on relèvera un bref motif magique et mystérieux pour les haricots magiques (souvent partagé entre le glockenspiel et les choeurs comme pour la fin quasi impressionniste de « Welcome to Gantua »), un motif plus menaçant pour Roderick, le bad guy du film, confié à un tympanon (dans « Roderick’s Demise », à 0:30, ou à 3:28 dans « The New King/Stories ») mais malheureusement quasi absent de l’album, sans oublier un thème féerique et plein d’espoir entendu pour la première fois à l’orchestre et aux choeurs dans « The Climb », entre 0:16 et 0:55, thème lyrique et puissant mais malheureusement trop vite délaissé par le compositeur par la suite. On notera aussi un motif d’action entendu dans « Roderick’s Demise/The Beanstalk Falls » à 3:37 aux cors, repris à 3:11 dans « The Legends are True/First Kiss », un motif que les béophiles ont souvent comparé au style de certains thèmes d’action de Jerry Goldsmith (notamment dans « Rambo II » et « Rambo III »). Quand aux géants, ils n’ont pas de thème à proprement parler, mais sont davantage caractérisés dans la musique par des effets percussifs des tambours taïkos frappés avec des baguettes sur la peau du tambour puis sur les côtés (d’où le surnom « boom/clack » de ce motif rythmique), doublés par un jeu de grosse caisse et de bois dissonants. Avec la musique des géants, on rentre là dans le deuxième axe majeur de la partition de « Jack the Giant Slayer » : une approche résolument agressive, brutale et dissonante pour les scènes avec les géants, dans un genre proche des musiques horrifiques/thriller. Cet aspect atonal et agressif contraste fortement avec la partie symphonique plus classique et conventionnelle du score, le mélange des deux axes apportant un vrai relief au film et au travail d’Ottman, qui témoigne d’un véritable souci du détail, avec une complexité épatante de la part du compositeur. Dans « Power of the Crown », on découvre une longue phrase mélodique/harmonique pour la couronne des géants, dominée par une série d’accords majeurs/mineurs ambigus, magiques et très mystérieux, soutenus par des choeurs grandioses. Le thème de la couronne magique revient ainsi à 2:27 dans le dramatique et imposant « Roderick’s Demise/The Beanstalk Falls », où il prend une tournure incroyablement puissante et grandiose avec l’orchestre et les choeurs, une démesure orchestrale/chorale ahurissante voire apocalyptique. On retrouve cet aspect choral quasi religieux et mystique dans plusieurs passages-clé du score, que ce soit durant la bataille finale épique (le démesuré « The Battle »), pour l’histoire des géants (« Story of the Giants ») ou lors de la scène où Roderick pose la couronne sur sa tête (« Power of the Crown »). Pour en revenir à la musique dissonante des géants, difficile de ne pas être bousculé par la force et la sauvagerie incroyable de la musique dans « Fee Appears » (avec ses bassons grotesques à 0:30), dans l’agressif « Why Do People Scream ? » qui semble surgir tout droit d’un film d’horreur, dans « Not Wildly Keen on Heights », l’ahurissant « Chase to Cloister » ou dans « Welcome to Gantua », des passages d’une complexité incroyable, malmenant les musiciens de l’orchestre qui livrent une performance musicale redoutable, avec force et conviction.

Au rayon des influences, impossible de ne pas remarquer une très large référence à Alan Silvestri dans « Kitchen Nightmare », et notamment dans le passage très herrmannien aux cordes staccatos à partir de 1:42, emprunté indubitablement au score de « Death Becomes Her » de Silvestri (influence des temp-tracks du film ?). « Story of the Giants » contient à son tour son lot d’influences, et notamment dans l’anthem solennel développé à partir de 1:34 avec son ostinato de cordes, qui rappelle clairement les thèmes majestueux habituels d’Hans Zimmer, façon « Chevalier de Sangreal » du final de « Da Vinci Code ». Les thèmes restent présents, comme pour l’envolée héroïque de « Onward and Downward ! » alors que Jack réussit à sauver Isabelle durant la chute de la grappe du haricot magique, ou les reprises du magnifique Love Theme dans le très beau « How Do You Do » à la harpe et aux cordes ou dans « The Legends Are True/First Kiss » pour le premier baiser échangé entre Jack et la princesse Isabelle, avec une reprise douce, simple et émouvante du thème de Jack à la clarinette et aux cordes à 2:11 – on notera aussi un magnifique passage pour piano et orchestre très classique et élégant dans « The New King/Stories » - L’action explose dans « Chase to Cloister » pour la bataille finale, morceau dominé par des percussions surpuissantes et des rythmes tribaux suggérant l’attaque finale des géants sur le château, sans aucun doute l’un des morceaux les plus impressionnants de « Jack the Giant Slayer », avec les monumentaux et démesurés « The Battle » et « Sniffing Out Fear/All Is Lost ». Impossible de ressortir de marbre de l’écoute du score de John Ottman : du début jusqu’à la fin, on est littéralement soufflé et subjugué par la puissance extraordinaire de cette musique à l’écran comme sur l’album, la musique étant d’une richesse ahurissante pour une musique de film hollywoodienne de 2013. Avec le retour des grandes musiques symphoniques rétro, du « John Carter » de Michael Giacchino en passant par le « Journey 2 The Mysterious Island » d’Andrew Lockington ou le « Hobbit » d’Howard Shore, difficile pour les amateurs de musique de film de bouder une partition aussi spectaculaire, complexe et épique que « Jack the Giant Slayer ». Peu inspiré ces derniers temps, John Ottman semble enfin avoir retrouvé toute son inspiration et sa verve créatrice d’autrefois avec le nouveau long-métrage de son complice Bryan Singer, confectionnant une énorme partition symphonique épique et démesurée, magique, agressive et féerique à la fois, teintée d’influences de Jerry Goldsmith, John Williams, Alan Silvestri, Howard Shore ou James Horner. Entre le classicisme symphonique d’antan et l’atonalité dissonante et tonitruante des géants, la musique de « Jack the Giant Slayer » est un vrai accomplissement musical pour John Ottman qui signe là ce qui pourrait être en passe de devenir une nouvelle oeuvre majeure dans sa filmographie, l’opus de la maturité pour le compositeur : à ne rater sous aucun prétexte !




---Quentin Billard