Grande comédie de Jean-Marie Poiré, deux ans avant son grand succès'Les Visiteurs', 'L'Opération Corned Beef' décrit avec humour une opération d'espionnage loufoque dans laquelle le capitaine de la DGSE Philippe Boulier (Jean Reno, toujours aussi fort!) doit tenter de stopper les agissements malsains d'un certain Burger (Marc De Jonge), consul allemand qui se prépare à vendre les plans d'un missile français à un trafiquant d'arme colombien nommé Zargas (André Schmit). Pour mener à bien sa mission, Boulier introduit un micro dans la bague de Marie-Laurence Granianski (Valérie Lemercier), la traductrice française de Burger. Mais au moment où le trafiquant d'arme arrive à Paris, Boulier découvre avec horreur que Marie-Laurence ne va pas travailler auprès du consul et prépare son mariage avec Jean-Jacques (Christian Clavier). Evidemment, pour que l'opération réussisse, il est absolument nécessaire que Marie-Laurence soit aux côtés de Burger durant la transaction. Sa seule façon de remettre les choses en ordre est de casser le couple Marie-Laurence/Jean-Jacques. Afin d'arriver à ses fins, Boulier a l'idée folle de demander à son chef d'envoyer une agent de la DGSE pour draguer Jean-Jacques et provoquer la rupture du couple. La situation se complique lorsqu'il découvre que l'agent en question n'est autre qu'Isabelle, la compagne de Boulier. Fou de jalousie, ce dernier se rue chez Granianski, prêt à faire échouer l'opération. Jean-Marie Poiré marque un point en associant à l'écran Jean Reno/Christian Clavier, un duo comique explosif qui trouvera son apogée deux ans plus tard sur 'Les Visiteurs'. On retrouve aussi dans cette hilarante parodie de film d'action tout ce qui fait le style du réalisateur: personnages survoltés, séquences rapides et fluides, montage speedé, rythme soutenu, gags non-stop, etc. Le tout mélangeant action et comédie pour notre plus grand plaisir! Ca ne vaut pas 'les Visiteurs', mais cela reste tout autant divertissant!

Eric Levi, qui a signé les musiques des deux 'Visiteurs' et 'Les Anges Gardiens', a composé pour 'L'opération Corned Beef' une musique électronique intéressante sans être vraiment grandement mémorable. Quelque part entre Eric Serra et le Hans Zimmer des années 80, Levi a crée une musique suivant le déroulement de l'action et de l'opération. Il n'y a pas vraiment de thème principal, à part la pièce entendue lorsque Boulier et son chef rentrent dans leur cachette secrète souterraine. Cette pièce de synthé rythmée possède évoque à merveille l'ambiance d'espionnage, d'infiltration et d'organisation secrète. On ne peut en revanche pas passer à côté de l'excellent 'Passion for War/Love', dont la version instrumentale de la chanson est utilisé dans le générique de début. Il s'agit probablement de la pièce la plus marquante de toute la BO du film de Jean-Marie Poiré, une très belle pièce de synthé avec une batterie 'pop' évoquant le personnage à la fois espion (donc, quelque part, guerrier, d'où la sémantique de la guerre dans la chanson - rajoutons aussi que le personnage est très impulsif donc violent) et amoureux (sa femme Isabelle est chargé de séduire Jean-Jacques Granianski -Christian Clavier- afin que l'opération réussisse. Mais, fou amoureux d'elle, il fera tout échouer par jalousie), une pièce assez mémorable et en tout cas assez supérieure d'un point de vue musical à ce qui va se dérouler pendant tout le reste du film.

On aurait presque l'impression que le compositeur a juste voulu se faire plaisir en nous livrant cette excellente pièce 'fun' entraînante dès le générique de début du film. On ne retrouve en tout cas cette pièce que dans le générique de fin, cette fois-ci sous la forme d'une chanson. 'Passion for War/Love' est donc la pièce majeure de la BO de 'L'Opération Corned Beef', aussi bien la version instrumentale que sa version vocale, une très belle pièce vraiment intéressante qui apporte un petit 'plus' au film de Poiré.

Pour le reste, Eric Levi se contente de suivre l'action avec une musique assez proche des oeuvres de Serra et du Zimmer des années 80, même si l'ombre d'Eric Serra plane incontestablement sur certains morceaux de ce score. On trouvera tout de même un passage s'apparentant au style du Hans Zimmer des années 80 dans la séquence où Boulier avec sa complice et Granianski, sont poursuivi en voiture dans un champ de maïs par les hommes de Zargas. Levi utilise une guitare électrique avec la batterie rock et des synthétiseurs pour apporte un aspect "cool" à la scène, tout en rappelant qu'il s'agit avant tout d'une comédie d'action. Cela n'empêche pas le compositeur de ponctuer le film de quelques passages plus sombres malgré la trop courte durée de certains morceaux (plages 13 à 16 par exemple).

Comme souvent dans ce genre de production française, on trouve finalement assez peu de musique tout au long du film, comme c'est aussi malheureusement le cas dans 'Les Visiteurs' et surtout 'Les Anges Gardiens'. Comme d'habitude, la musique a souvent tendance à passer au second plan alors qu'elle pourrait donner à l'image de bien meilleurs résultats si les réalisateurs savaient mieux l'exploiter. On touche ici du doigt le problème de la mentalité française vis-à-vis de la musique de film, certains réalisateurs pensant que la musique de film est accessoire et qui n'ont de toute évidence pas compris qu'il s'agit d'un art majeur à part entière, avec son potentiel et ses enjeux cinématographiques.

En conclusion, 'L'Opération Corned Beef' aurait gagné en intérêt si la musique avait été un peu plus longue, mieux développé et approfondie dans le film. Il y'a des idées intéressantes, mais l'ensemble semble avoir été stoppé net dans son développement, empêchant vraiment la musique de s'épanouir musicalement dans le film ou même sur le CD. Dommage!


---Quentin Billard