1-The Dark 3.26
2-Imprisoned 2.34
3-Sarah's Drowned 3.01
4-Ebrill 4.34
5-Behind Closed Doors 2.46
6-Father and Daughter 2.56
7-Chased to Barn 3.24
8-History Tells Us So 3.16
9-Welsh Legends 2.45
10-Sea Rescue 2.24
11-Torture 3.31
12-Can You Be My Daddy? 3.06

Musique  composée par:

Edmund Butt

Editeur:

Movie Score Media MMS-06013

Musique produite par:
Edmund Butt
Orchestrée et conduite par:
Geoff Alexander
Producteur exécutif de l'album:
Mikael Carlsson
Monteurs musiques
et programmations:
Allan Jenkins, Kirstie Whalley

Motion Picture Artwork courtesy of Constantin Film. (c) 2005 Impact Pictures LLC. All rights reserved.

Note: ***1/2
THE DARK
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Edmund Butt
Adapté de la nouvelle « Sheep » de Simon Maginn, « The Dark » est un film d’épouvante sorti en 2005, une modeste co-production germano-britannique réalisée par le canadien John Fawcett mettant en scène Maria Bello et Sean Bean dans une intrigue surnaturelle évoquant les esprits de l’au-delà sur fond de légendes celtiques lugubres. Adelle (Maria Bello) part avec sa fille Sarah (Sophie Stuckey) dans un coin isolé du Pays-De-Galles afin d’y retrouver son ex-mari James (Sean Bean) pendant les vacances, et de renouer le contact avec Sarah, une ado difficile qui semble détester sa mère. A leur arrivée dans la cabane de James située près de la mer, Adelle et Sarah découvrent un étrange mémorial gravé dans la pierre aux bords de la falaise : la pierre contient l’inscription « Annwyn », qui signifie ‘au-delà’ en gallois. C’est alors qu’un vieil homme du coin, Dafydd (Maurice Roëves), explique à Adelle, Sarah et James l’origine du Annwyn selon les croyances locales. Peu de temps après, Sarah disparaît mystérieusement sur la plage, alors qu’une autre petite fille qui lui ressemble réapparaît de façon étrange. La petite fille s’appelle Ebrill (Abigail Stone), et se trouve être la fille disparue d’un vieux berger qui fut le pasteur du village 50 ans auparavant. Il y a bien longtemps, alors qu’Ebrill décéda suite à de graves problèmes de santé, le berger décida de jeter son corps dans l’océan vers le mythique Annwyn. En échange, il réussit à convaincre ses partisans de se jeter à leur tour dans l’océan, après leur avoir fait croire qu’ils iraient tous ainsi au Paradis. En fait, le berger/pasteur espérait que le sacrifice de ses partisans lui permette de ramener sa fille Ebrill à la vie, de retour d’Annwyn. La jeune fille revint effectivement, mais en ramenant quelque chose de terrible avec elle. Essayant par tous les moyens de faire disparaître le mal qui se trouvait en elle en la trépanant, le berger échoua à sauver sa fille du mal. Dafydd était l’un de ses partisans qui refusa de se jeter dans l’océan. C’est alors qu’Adelle et James vont découvrir une vérité bien terrible qui ébranlera leurs convictions les plus profondes : se pourrait-il qu’il existe une façon de ramener à son tour Sarah du monde des morts ? « The Dark » est au final un film d’épouvante plutôt modeste et sans grand éclat – le film a été produit par Paul W.S. Anderson – L’interprétation reste solide, à commencer par une Maria Bello en contre-emploi, parfaite dans la peau d’une mère violente et impulsive en quête de rédemption, tandis que Sean Bean campe un père dépassé par les événements, mais aussi très affecté par la disparition de sa fille. Le film ne laisse guère un souvenir impérissable, mais repose avant tout sur une atmosphère glauque et immersive plutôt réussie : cette atmosphère de légendes celtiques, de disparitions mystérieuses, d’esprits et de revenants fonctionne à l’écran, même si l’on a bien souvent l’impression d’avoir déjà vu cela des centaines de fois auparavant (notamment dans les films d’épouvante japonais, bien que l’on pense parfois aussi aux jeux vidéos « Silent Hill »). L’ambiance est donc très réussie, mais la mise en scène de John Fawcett manque cruellement d’épaisseur, d’idées : les quelques ‘scare jumps’ disséminés ici et là ne suffisent pas à rehausser un suspense un peu moribond, d’autant que le rythme est plutôt lent et les quelques rebondissements sans grand génie.

Le compositeur anglais Edmund Butt est un spécialiste des musiques pour le cinéma et la télévision, pour lesquels il travaille déjà depuis près de deux décennies. Sa partition symphonique pour « The Dark » est une jolie réussite dans son genre, combinant toutes les recettes habituelles des musiques horrifiques à suspense avec un savoir-faire évident et une maîtrise des orchestrations et de l’écriture orchestrale. Il faut dire qu’Edmund Butt a évolué très tôt dans la musique et suivi une brillante carrière au sein du prestigieux London Symphony Orchestra dès l’âge de 18 ans. Musicien d’orchestre hollywoodien, Butt a été notamment interprète sur des partitions emblématiques telles que « Basic Instinct » de Jerry Goldsmith ou « The English Patient » de Gabriel Yared. Ce n’est que quelques années plus tard qu’il comprit que son credo était de composer à son tour de la musique de film. Orchestrateur de George Fenton et Trevor Jones sur des films tels que « Merlin », « Desperate Measures » ou « Dark City », Butt travailla aussi comme directeur artistique pour Madonna, Puff Daddy ou George Martin, avant de travailler régulièrement pour le cinéma et la télévision britannique – on lui doit entre autre des scores tels que « Murphy Law », « Life on Mars » ou bien encore « Afterlife » - Pour « The Dark », le compositeur prend les rennes de l’orchestre Londonien et nous offre une partition mystérieuse, envoûtante et ténébreuse pour le film de John Fawcett. Dès l’ouverture du film, Butt donne le ton avec « The Dark », un générique de début dominé par des cordes lugubres, des vocalises féminines fantomatiques, des sonorités synthétiques mystérieuses, des percussions agressives et la voix d’un enfant en duo avec la chanteuse soliste. Exit ici le sound design habituel des musiques horrifiques contemporaines, place à une musique richement écrite, savamment orchestrée et résolument élégante, sombre et intense. Le thème principal est une mélodie simple de 4 notes, confiée ici aux cuivres, cordes et aux vocalises de l’enfant (évoquant dans le film Sarah et Ebrill), un thème mystérieux, à la fois sombre et beau, une mélodie envoûtante, fantomatique, inquiétante et pourtant fascinante à la fois. La dimension fantomatique/occulte du film est suggérée brillamment dans l’ouverture par le choix des synthétiseurs et les effets étranges de chuchotements de voix lointains, dans un style qui n’est pas sans rappeler les travaux de Christopher Young sur les films d’épouvante hollywoodiens.

« Imprisoned » nous plonge irrémédiablement dans une atmosphère sombre et oppressante dans laquelle on retrouve les percussions agressives de l’ouverture, les synthétiseurs mystérieux et les cordes dissonantes, dans un style résolument atonal aux techniques instrumentales avant-gardistes. Il règne dans la musique une véritable atmosphère d’effroi et de mystère brumeux, un climat qu’Edmund Butt intensifie à l’écran par l’ajout de textures électroniques oppressantes et d’un vrai travail intense autour de l’orchestre. La musique prend même une tournure plus tragique et dramatique dans l’amer et sombre « Sarah’s Drowned », dans lequel Butt exprime la disparition mystérieuse de Sarah avec des cordes mélancoliques et torturées, une voix fantomatique et des notes plaintives et délicates de piano. A noter que le final de « Sarah’s Drowned » reprend les effets de chuchotements de « The Dark », avec un sursaut orchestral/percussif plus sauvage et agressif. Les voix fantomatiques planent de façon inquiétante sur « Ebrill », des voix qui semblent surgir de l’au-delà, d’un autre monde, à l’instar du retour de l’énigmatique Ebrill, revenue du royaume des morts. Le compositeur accentue ici le rôle des voix et de l’électronique en déformant ses sons, le tout ponctué de sursauts percussifs agressifs et de cuivres dissonants. La musique n’échappe pas aux traditionnels « scare jumps » chers aux musiciens des films d’horreur, mais ici, le tout est réalisé avec un goût certain et un classicisme d’écriture élégant, n’excluant pas une certaine modernité dans le choix plus inventif et quasi expérimental des atmosphères électroniques brumeuses. Le thème principal est repris à 2:00 par des violoncelles élégiaques et tourmentés, entre noirceur et lyrisme torturé. La seconde partie de « Ebrill » bascule même dans la terreur avec ses percussions sauvages et ses cordes cacophoniques. Ici aussi, Edmund Butt joue sur l’idée des sursauts, de l’incertitude, avec une musique tendue sur le fil du rasoir, prête à exploser à n’importe quel comment. La reprise puissante du thème principal à la fin de « Ebrill » est d’ailleurs l’un des grands moments de la partition de « The Dark » !

Impossible de résister à la noirceur envoûtante de « Behind Closed Doors », véritable musique de suspense gothique et ténébreux, personnifié par l’inventivité de l’utilisation des voix fantomatiques, de cordes stridentes/dissonantes et d’effets sonores oppressants. Butt dévoile ici une facette plus expérimentale de son univers musical en manipulant les sons et les instruments avec brio, quitte à frôler la cacophonie pure lorsqu’il entame un terrifiant crescendo angoissant assez redoutable. La musique sait aussi se faire plus chaleureuse et contemplative dans « Father & Daughter », évoquant la relation entre James et Sarah à grand renfort de cordes, bois et piano, pour ce qui reste l’un des plus beaux passages du score, lyrique et émouvant. Pourtant, les sonorités lugubres du début ne tardent pas à revenir pour chasser l’émotion et réinstaller une tension ambiante, notamment dans le jeu plus nuancé des synthétiseurs à la fin de « Father & Daughter ». La terreur culmine dans la traque dans l’étable de « Chased to Barn », avec ses percussions meurtrières ou ses voix fantomatiques/chuchotements qui planent dans l’air de façon angoissante, sur fond de cordes dissonantes. Le mystère et la tension s’intensifient avec « History Tells Us So » et « Welsh Legends », qui plonge le spectateur dans une atmosphère cauchemardesque/horrifique assez dense, sans oublier la grande reprise du thème principal dans « Sea Rescue » ou la terreur macabre de « Torture » pour la fin du film, suggérant les tourments d’Adelle dans le film, confrontée à ses propres pêchés. Enfin, l’émotion et le mystère tentent de rivaliser intelligemment dans la coda du score, « Can You Be My Daddy ? », alors que Sarah est enfin revenue du royaume des morts, mais visiblement changée. Edmund Butt suggère cette ambiguïté soudaine par un mélange d’harmonies tonales (mineures), par un jeu plus lyrique et nuancé des cordes et un ultime retour du thème principal. Edmund Butt signe donc une partition horrifique sombre et envoûtante pour « The Dark », dans la lignée des travaux de Christopher Young ou Marco Beltrami. Entre écriture orchestrale classique et expérimentations électroniques plus abstraites, la partition de « The Dark » est une formidable plongée dans une atmosphère noire et oppressante où règnent mystère, terreur et envoûtement, à l’image du film de John Fawcett, une musique apportant une dimension fantomatique intense au film, tout en demeurant réussie de bout en bout à défaut d’être particulièrement originale dans son genre : à réserver aux fans de musiques horrifiques intelligentes et bien écrites !




---Quentin Billard