1-Sleepless Night: Main Title 3.46
2-Crime Scene 1.40
3-Raw Simplicity 8.20*
4-Restroom Trap 1.41
5-Super Tits 5.12**
6-Flour in the Kitchen 1.32
7-Elecrock 3.14
8-Tic Tac 1.58
9-Bangladesch 10.30*
10-Separation 2.01
11-Pop the Shot 5.10**
12-Hallucination 3.40
13-Stairwell 1.32
14-Paternity 3.50

*Interprété par Ionic Benton
**Interprété par Valgun.

Musique  composée par:

Nicolas Errèra

Editeur:

Movie Score Media MMD0015

Album produit par:
Mikael Carlsson
Producteur exécutif musique:
Valérie Lindon
Musique additionnelle de:
Artaban, Yannick Ciancanelli,
Ionic Benton, D.J. Yenn

(c) 2011 Chic Films/Paul Thiltges Distributions/Saga Film (I)/Canal+/Ciné+/uFilm/Film Fund Luxembourg/CNC/Procirep/Programme MEDIA de la Communauté Européenne/Le Tax Shelter du Gouvernement Fédéral de Belgique. Distribué par BAC Films en France. Tous droits réservés.

Note: ***
NUIT BLANCHE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Nicolas Errèra
Le réalisateur français Frédéric Jardin est essentiellement connu pour avoir tourné trois comédies, « La Folie douce » en 1994, « Les Frères Soeur » en 2000 et « Cravate Club » en 2002. Après cela, Jardin ne tournera plus rien jusqu’en 2011, date à laquelle il décide de revenir à la réalisation en tournant son tout premier polar, « Nuit Blanche », scénarisé par Nicolas Saada et produit par Guillaume Canet. Le film raconte l’histoire de Vincent (Tomer Sisley), un policier infiltré qui dérobe un gros sac de cocaïne à des trafiquants de drogue durant une opération de police. Malheureusement pour lui, les gangsters à qui appartenaient la drogue réussissent à l’identifier et prennent en otage son jeune fils, Thomas (Samy Seghir), en lui proposant un échange équitable : son fils contre le sac. L’échange doit avoir lieu dans une immense boîte de nuit tenue par le mafieux en question, Jose Marciano (Serge Riaboukine). Vincent décide alors de cacher la drogue dans les toilettes pour hommes avant de conclure le deal. Mais lorsqu’il retourne là où il a planqué la drogue, le sac a mystérieusement disparu. Dés lors, Vincent sait qu’il va devoir affronter la plus longue nuit de sa vie, et peut-être même la dernière, car avec Lacombe (Julien Boisselier), un ripoux lancé à ses trousses, Feydek (JoeyStarr), un trafiquant de drogue de mèche avec Marciano, et son collègue policier Manuel (Laurent Stocker) sur le point de le trahir, Vincent va devoir affronter des dizaines d’obstacles et se battre toute la nuit au péril de sa vie pour espérer sortir son fils vivant de la boîte de nuit. « Nuit Blanche » est donc un polar musclé et immersif, dont l’action se déroule quasi exclusivement à l’intérieur d’une immense boîte de nuit. Le film a rencontré un certain succès lors de sa présentation au festival international du film de Toronto en 2011, et aussi en France, bien qu’il ait été paradoxalement assez mal distribué (les spectateurs n’ont pu le voir que dans deux salles de cinéma en région parisienne !). Malgré cela, « Nuit Blanche » reste un bon succès français – un remake hollywoodien est déjà en préparation – et prouve à quel point le polar musclé à la française a encore de beaux jours devant lui. Certes, on pourra toujours reprocher la maigreur du scénario ou la faiblesse des dialogues, mais le film reste suffisamment rythmé, immersif et divertissant pour nous maintenir en haleine jusqu’au dénouement final. On appréciera aussi la qualité du casting, de l’excellent Tomer Sisley dans un rôle très physique à celui des bad guys aux « gueules » pas possibles (Serge Riaboukine et JoeyStarr) sans oublier Julien Boisselier, qui, on ne le répètera jamais assez, est toujours aussi impressionnant dans les rôles de pourris manipulateurs (le comédien n’est jamais aussi bon que lorsqu’il abandonne son registre habituel de la comédie pour tourner dans des films plus sombres, comme dans « Gardiens de l’ordre » par exemple). Le film est aussi assez violent et contient quelques séquences de bagarre mémorables, notamment durant l’affrontement entre Vincent et Lacombe dans les cuisines, séquence de combat durant laquelle Tomer Sisley retrouve sa forme physique étincelante de « Largo Winch » et sa maîtrise évidente des arts martiaux. Série-B musclée pour certains, bon polar français pour d’autre, chacun devrait finalement y trouver son compte !

Nicolas Errèra retrouve Frédéric Jardin après avoir composé la musique de son précédent film « Cravate Club » en 2002. Avec « Nuit Blanche », Errèra renoue avec le style électronique moderne qu’il affectionne tant, et compose pour le film une partition plutôt intense, rythmée et nerveuse. Le compositeur accentue la dimension urbaine et contemporaine du film par le biais de parties électro/techno nerveuses, de sections orchestrales et de rythmes survoltés. Le ton du film est donné avec « Sleepless Night : Main Title » dans lequel Errèra expérimente autour de violons staccatos dont il manipule les sons pour obtenir une résonance artificielle étrange et nerveuse, sur fond de cordes agitées et de rythmes/loops électro agressifs. Errèra déforme ainsi ses sons pour obtenir un climat musical plus étrange, une atmosphère sonore un brin abstraite, sur fond de ligne de basse entêtante, de piano déformé et de cordes rapides créant un sentiment d’urgence dès le générique de début du film. Le « Main Title » suggère clairement l’idée du compte à rebours et de la nuit de folie que va vivre Vincent tout au long du film, avec une série de loops/rythmes entêtants qui rappellent les « Jason Bourne » de John Powell. « Crime Scene » calme le jeu en introduisant des cordes plus lentes avec un piano intime et des loops électro plus calmes mais toujours très présents. D’une façon générale, Nicolas Errèra conserve une pulsation constante tout au long de la musique du film afin de renforcer l’idée du compte à rebours mortel, de la course contre la montre durant la pire nuit de sa vie. Errèra n’hésite d’ailleurs pas à verser dans de l’atonal avant-gardiste en utilisant par exemple des gargouillis aléatoires de pizzicati des violons dans « Crime Scene », qui renforcent l’aspect thriller du score de « Nuit Blanche ». Le suspense est à son comble dans « Restroom Trap », alors que Vincent découvre que l’argent qu’il a caché dans les toilettes a mystérieusement disparu. Errèra suggère ici aussi la tension à l’aide de loops omniprésents, de nappes synthétiques menaçantes, de cordes sombres et de sons manipulés.

On retrouve les pulsations entêtantes du « Main Title » dans « Flour in the Kitchen », avec ses contrebasses agressives et martelées et ses loops entêtants. Minimaliste, l’approche musicale urbaine voulue par Nicolas Errèra lui permet d’expérimenter autour de l’électro sans jamais en faire des tonnes, même dans les passages d’action, qui s’éloignent du style hollywoodien habituel en optant pour une approche synthétique parfois plus abstraite et inventive. Le compositeur évoque aussi l’univers musical de la boîte de nuit où se déroule l’histoire dans le très urbain « Elecrock », avec sa guitare trash et ses samples électro à mi-chemin entre Daft Punk et Aphex Twin. On notera aussi la contribution musicale des DJ Ionic Benton et Valgun qui signent respectivement les pièces électro/house « Raw Simplicity », « Bangladesch » et « Super Tits », « Pop the Shot » (morceaux que l’on entend en fait en source music durant certaines scènes en boîte de nuit). L’idée de la course contre la montre domine « Tic Tac » avec son utilisation inventive de violons, de martèlements de cordes à la manière d’une horloge ou d’une montre qui suggère le temps qui passe. Inventif, « Tic Tac » va même jusqu’à inclure des sons de violons en train de s’accorder et de chuchotements de personnes en arrière-fond sonore, une approche résolument expérimentale qui permet ici aussi à Nicolas Errèra d’éviter les conventions musicales habituelles pour une musique plus personnelle, plus originale dans sa forme. On notera le rôle des cordes dans le dramatique « Separation », adagio poignant de cordes et guitare qui apporte un éclairage plus mélancolique et tragique vers la fin du film, alors que Vincent va tout faire pour sauver son fils Thomas. L’action domine dans l’agressif « Hallucination », avec ses cordes martelées violemment et ses rythmes/loops électro façon John Powell. Ici aussi, la musique conserve ce ton à la fois urgent, menaçant mais aussi mélancolique, alors que Vincent sait qu’il ne survivra probablement pas à la nuit mais que son fils sera sauvé. L’action explose dans les rythmes électro survoltés de « Stairwell » pour la poursuite finale dans la boîte, suivi du tragique « Paternity », dont l’écriture mélancolique/intime de cordes et piano nous permet de retrouver la sensibilité habituelle du compositeur de « L’Outremangeur » et de « Shaolin », avec le retour de l’adagio dramatique de « Separation », pour rappeler le lien familial entre Vincent et Thomas.

Nicolas Errèra signe donc une partition thriller urbaine et moderne pour « Nuit Blanche », entre rythmes électro survoltés, ostinati entêtants, cordes mélancoliques et nappes synthétiques oppressantes. Sans briller d’une quelconque originalité, le score d’Errèra apporte une vraie tension aux images du film de Frédéric Jardin et contribue à maintenir une pulsation permanente, comme pour rappeler l’idée que s’il veut revoir son fils vivant, Vincent devra survivre à la plus longue nuit de sa vie et retrouver l’argent qu’il doit aux malfrats avant qu’il ne soit trop tard. Le résultat est à la hauteur du sujet, sans briller pour autant d’une quelconque originalité particulière. Nicolas Errèra reste fidèle à son goût habituel pour les expérimentations électroniques et les atmosphères sonores plus abstraites, en jouant sur le timbre de certains instruments (violons, notamment) qu’il manipule à sa guise pour obtenir des textures sonores plus élaborées, plus recherchées aussi. Il évite ainsi l’approche orchestrale habituelle des productions hollywoodiennes et privilégie l’électronique de A à Z. S’il manque un thème mémorable au score de « Nuit Blanche » pour pouvoir laisser une impression durable dans l’esprit de l’auditeur/spectateur, le score d’Errèra reste malgré tout assez réussi et parfaitement adapté à l’atmosphère électrique et violente du film de Frédéric Jardin. Quoiqu’il en soit, les fans du compositeur français devraient probablement apprécier le nouvel effort du musicien sur « Nuit Blanche » : action, suspense et émotions garantis !




---Quentin Billard