1-Part 1 Orchestral Suite 21.57
2-The Winds of Change 3.17*
3-Part 2 Synthesizer Suite 13.54

*Ecrit par Frederic Talgorn
et Harriet Schock
Interprété par Lee Greenwood.

Musique  composée par:

Frédéric Talgorn

Editeur:

Alhambra A 8921

Producteur exécutif de l'album:
Joachim H. Hansch
Score synthétique séquencé par:
Jeff Morrow

Artwork and pictures (c) 1990 Cannon Films. All rights reserved.

Note: ***
DELTA FORCE 2 :
OPERATION STRANGLEHOLD
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Frédéric Talgorn
Après un premier épisode généralement considéré comme un pur nanar d’action des années 80 produit par la Cannon (du tandem Menahem Golan/Yoran Globus), Chuck Norris décida de rempiler avec « Delta Force 2 : The Colombian Connection » (aussi connu sous le titre « Operation Stranglehold »), dans un deuxième opus sorti en 1990 et réalisé par Aaron Norris, le frère de l’acteur. Le film met en scène un trafiquant de drogue colombien, Ramon Cota (Billy Drago), qui contrôle le trafic de cocaïne et répand ses substances en Amérique, menaçant la jeunesse américaine. Mais alors que la DEA ne parvient pas à arrêter le dangereux criminel, qui multiplie les prises d’otages se soldant bien souvent sur la mort d’innocents, il est décidé de faire à nouveau appel à la section de la Delta Force, toujours placée sous les ordres du colonel Scott McCoy (Chuck Norris) qui parvient, avec l’aide du major Bobby Chavez (Paul Perri), à arrêter le criminel et à l’emmener par avion aux Etats-Unis (après un saut en parachute !). Mais un juge américain libère Ramon Cota sous prétexte que son arrestation n’était pas légale (Chuck Norris aurait dû savoir qu’on n’arrête pas les gens en sautant en parachute !). Afin de se venger, Ramon Cota fait exécuter la femme du major Chavez qui, furieux, part au San Carlos pour y tuer Ramon. Mais ce dernier capture alors le major Chavez et l’exécute à son tour. Enragé et fou de colère, le colonel McCoy décide qu’il est grand temps d’agir, réunit une équipe et se rend à son tour au San Carlos (la production a changé le nom du pays, probablement pour éviter des critiques en retour de la part du gouvernement colombien !) afin d'y rétablir la justice et d'éliminer pour de bon Ramon Cota. Mais McCoy n’est pas au bout de ses peines, car le San Carlos est un pays souverain et l’armée locale est dirigée par le puissant Ramon. Le colonel organise alors un plan visant à atterrir dans le pays avec son équipe en se faisant passer pour des observateurs, l'objectif étant d’attendre le moment propice pour sortir leurs armes et dévaster la forteresse imprenable de Ramon Cota.

Avec un scénario lourdingue et une intrigue plate comme une limande, « Delta Force 2 » échoue clairement dans la catégorie du nanar militariste et revanchard typique du cinéma hollywoodien des années 80. Mais si le premier film de 1986 réussissait encore à tenir la route grâce à son rythme soutenu et ses séquences d’action survoltées (et la présence du vétéran Lee Marvin au casting), ce deuxième opus se vautre littéralement dans la nanardise absolue, avec des incohérences en pagaille, un rythme mal géré, des acteurs qui surjouent à l’extrême (l’interprète du général Taylor est un génie dans son genre !), des scènes d’action molles et des répliques nullissimes (« t’es pire qu’une mouche à merde, Ramon ! »), digne des plus grands films de Chuck Norris (de la part de l’auteur du cultissime « je mets les pieds où je veux Little John, et c’est souvent dans la gueule ! », on n’en attendait pas moins). Norris reste quand à lui égal à lui-même : monolithique, sans expression, il est une machine de guerre impossible à arrêter (normal : Chuck Norris peut encercler ses ennemis. Tout seul !), capable de tout pour tuer les méchants et se faire lui-même vengeance (re-normal : Dans une pièce ordinaire, il y a en moyenne 1242 objets avec lesquels Chuck Norris peut vous tuer, en incluant la pièce elle-même !), etc. En bref, vous l’aurez donc compris, « Delta Force 2 » est un sommet du nanar d’action revanchard et pro-U.S. Vous cherchiez un moyen de lutter contre le trafic de drogue ? Vous l’avez trouvé : faites appel à Chuck Norris, ménage et explosions garantis !

On se demande parfois comment Frédéric Talgorn choisissait ses films lorsqu’il travaillait encore à Hollywood dans les années 80/90. Le compositeur toulousain a enchaîné quelques somptueuses séries-B nanardes durant cette époque, qu’il s’agisse de « Robot Jox » (1989) ou de « Fortress » (1992). « Delta Force 2 » est de loin l’un des pires projets du compositeur dans son genre, et pourtant, Talgorn, en grand professionnel qu’il est, ne se laisse pas démonter par la vacuité ahurissante du film et livre une composition orchestrale/synthétique plutôt énergique, rythmée et soutenue. Le score de « Delta Force 2 » se divise en fait en deux axes musicaux principaux : une partie entièrement symphonique, enregistrée à Paris avec le European Symphony Orchestra, et une partie entièrement synthétique enregistrée à Los Angeles. La partie orchestrale reste ici assez impressionnante, regroupée sous la forme d’une longue suite de 21 minutes sur l’album, débutant avec « Skyjacking » pour la scène de l’arrestation parachutée de Ramon Cota au début du film : cuivres héroïques, rythmes martiaux, percussions, cordes, bois, l’effectif orchestral est utilisé ici au grand complet pour illustrer cette première scène d’action du film avec brio. Les orchestrations restent très soignées et l’écriture orchestrale riche et soutenue, comme toujours avec Talgorn. On admire d’ailleurs la façon avec laquelle le compositeur reste maître de son écriture éminemment classique et élégante, même sur des films qui n’en valent pas la peine (en ce sens, la philosophie musicale sincère du compositeur rejoint celle de Jerry Goldsmith, qui a toujours considéré lui aussi que le plus mauvais des films avait aussi droit à une bonne musique !). « Skyjacking » dévoile par la même occasion le thème principal associé à la Delta Force, thème héroïque et guerrier du plus bel effet, largement dominé par les cuivres et les percussions martiales. Dans « Bobby’s Family Killed » et « Bobby Finds Dead », Talgorn évoque la mort de Bobby et de sa famille avec un ton lyrique assez poignant, dominé par des cordes élégantes, dramatiques et élégiaques, avec un soupçon de romantisme typique du musicien français. Même un passage sombre et plus dissonant comme « Bobby Finds Dead » reste magnifiquement écrit (c’est d’ailleurs une constante dans les productions Cannon de l’époque, qui ont toujours accordé une place importante aux musiques de qualité même sur leurs films les plus modestes).

Niveau action, le score nous promet quelques bons déchaînements orchestraux martiaux, à commencer par la marche implacable qui débute dès 8 :30 avec sa caisse claire, son piano martelé mécaniquement dans le grave ou ses martèlements de col legno des cordes, tandis que le thème musclé de la Delta Force est développé ici dans un superbe contrepoint de cuivres en canon (cors, trombones, trompettes, etc.), qui rappelle les musiques belliqueuses de John Williams façon « Star Wars ». Talgorn utilise aussi des sonorités menaçantes et sombres pour évoquer Ramon Cota dans le film, sonorités souvent constituées de cordes dissonantes, de percussions agressives ou de flûte ethnique pour les origines latino du personnage. Le final du film permet à Talgorn de nous offrir un grand morceau d’action martial et guerrier traversé d’envolées héroïques du thème principal, tout comme le militaire « Training Montage » pour la scène de l’entraînement (durant lequel Norris massacre ses hommes, pour passer sa colère sur eux suite au meurtre de Bobby : sympa, le Chuck !). A noter que Talgorn a aussi écrit la chanson du générique de fin, « The Winds of Change », brillamment orchestrée par le compositeur et interprétée par Len Greenwood, une chanson héroïque et majestueuse typique des films d‘action des années 80. Enfin, la partie électronique du score est elle aussi regroupée sous la forme d’une suite de 13 minutes, durant laquelle Talgorn développe le thème principal ou des sonorités plus latino/exotiques pour évoquer le pays de Ramon Cota. C’est le cas dès « Cota’s Plane Lands », qui développe son lot de flûte samplée et de percussions latinos/ethniques, bien que l’on regrette parfois le côté cheap des banques de son orchestrales du compositeur. Dommage qu’un morceau héroïque comme celui à 4:28 soit malheureusement gâché par le côté artificiel et atrocement cheap des samples orchestraux (notamment dans les cuivres, qui sont affreux !), alors que le compositeur avait pourtant un vrai orchestre à sa disposition (on peut s’imaginer qu’il s’agit probablement d’un choix imposé par les contraintes budgétaires du film). Talgorn développe par la même occasion un motif de flûte exotique mystérieux associé au San Carlos, et que l’on entendra à quelques reprises pour les scènes chez Ramon dans le film. Le compositeur utilise aussi un motif d’action entendu à plusieurs reprises, dans la partie orchestrale mais surtout dans la partie synthétique, illustrant les exploits de Chuck Norris tout au long du film, motif qui est en fait basé sur les premières notes du thème principal (on l’entend clairement dans « Delta Force Arrival » à partir de 13:19).

Frédéric Talgorn reste donc fidèle à lui-même et livre un score martial et musclé pour « Delta Force 2 », partagé entre l’orchestre et les synthétiseurs pour les besoins du film. A l’écran, les deux parties du score se mélangent et se complètent efficacement même si l’on regrettera l’écart de styles et de qualité entre les deux sections dans le film, où l’on passe bien souvent de l’un vers l’autre sans réelle transition ni logique particulière. Le film est médiocre, certes, mais Frédéric Talgorn s’en tire plutôt à bon compte et livre une partition assez entraînante et rythmée, bien que la partie synthétique s’avère être décidément bien faible en comparaison de la partie symphonique, bien plus convaincante et incisive dans ses rythmes belliqueux et ses cuivres héroïques. Talgorn signe au final un score d’action militaire assez réussi, sans être pour autant d’une folle originalité ni même particulièrement mémorable dans son genre. Il apparaît donc clairement que « Delta Force 2 » est un effort sympathique mais mineur dans la filmographie du compositeur toulousain.



---Quentin Billard