1-Carol O'The Bells/
Christmas Shopping/
I'm Innocent 3.44
2-F.A.A. 214 2.47
3-The Take-Off 2.45
4-Storm Clouds/Marty's Mistake 1.15
5-Stubbs' Attack/
Gunfire on Board 4.24
6-Ryan Saves Teri/No Pulse 2.58
7-Ident Switch 5.15
8-Maggie Confronts Ryan/Nobody 3.09
9-Level Six/Last Breath 3.33
10-Don't Trust Him, Teri/
Teri Looks for Maggie 6.16
11-Getting Acquainted 3.41
12-Topsy Turvy 2.53
13-Teri Says No 2.20
14-Buffalo Gals/Ryan's Left Foot 3.45
15-Auto Pilot Landing 4.09
16-The Next Sound You Hear 1.07
17-747 Flyby 2.00
18-Fighter Escort 3.15
19-Here's Johnny 3.09
20-The Landing/
Welcome Home, Teri 5.02
21-End Credits
(extended film version) 4.37

Bonus Track:

22-End Credits
(Shirley Walker Suite) 5.16

Musique  composée par:

Shirley Walker

Editeur:

La La Land Records LLLCD 1268

Score produit par:
Shirley Walker
Préparation musique:
Frank Macchia
Monteur musique:
Thomas Milano
Orchestrations:
Larry Rench, Kristopher Carter,
Lolita Ritmanis

Programmation musique:
David G. Russell
Assistant monteur musique:
Terry Wilson
Music proof reader:
Seth Wittner
Producteur soundtrack:
Dan Goldwasser
Producteurs exécutifs de l'album:
Matt Verboys, MV Gerhard

Edition limitée à 2000 exemplaires.

Artwork and pictures (c) 1997 Paramount Pictures. All rights reserved.

Note: ****
TURBULENCE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Shirley Walker
La mode des thrillers aériens est revenue au goût du jour au cours des années 80/ 90 : on ne compte plus durant ces décennies les blockbusters se déroulant à bord d’avions en perdition : « Air Force One », « Executive Decision », « Die Hard 2 », « Con Air », « Passenger 57 », sans oublier les classiques des seventies comme « Airport », « The Concorde : Airport 79 » ou « Airport 77 ». Sorti dans la masse des thrillers hollywoodiens de l’année 1997, « Turbulence » nous ramène lui aussi à bord d’un appareil en perdition dans lequel une malheureuse hôtesse de l’air se retrouve confrontée à un dangereux psychopathe prêt à tout pour détruire l’appareil. Réalisé par Robert Butler (un vétéran des séries TV qu’il réalise depuis le début des années 60), « Turbulence » débute en pleine nuit de Noël, alors que Ryan Weaver (Ray Liotta) est arrêté par le lieutenant Aldo Hines (Hector Elizondo), pour un meurtre qu’il prétend ne jamais avoir commis. Transporté vers Los Angeles, Weaver embarque à bord d’un Boeing 747 accompagné d’un dangereux criminel, Stubbs (Brendan Gleeson) et de quatre agents de la police aérienne, sans oublier huit civils. Mais alors que le vol semble se dérouler sans imprévu, Stubbs réussit à se libérer et déclenche une fusillade à bord de l’avion, abattant plusieurs policiers, ainsi que le pilote et le co-pilote de l’appareil. Ray Weaver réussit à son tour à se libérer et essaie de sauver le dernier policier encore en vie, mais en vain : Stubbs et le flic sont finalement tous les deux abattus. L’hôtesse de l’air Teri Halloran (Lauren Holly) se retrouve alors seule avec Ray Weaver et les autres passagers, persuadés que Weaver est réellement innocent des crimes qu’on l’accuse. Désormais, Teri est la seule capable de piloter l’appareil et se rend alors dans le cockpit, où elle sera guidée par radio par les opérateurs de la tour de contrôle et le commandant Samuel Bowen (Ben Cross). C’est alors que Weaver décide de tomber le masque et de révéler sa vraie personnalité : un meurtrier obsédé par Teri, qui, après avoir enfermé tous les autres passagers dans la cabine d’équipage et étranglé Maggie (Catherine Hicks), la collègue de Teri, Weaver se rend alors au cockpit et essaie d’y déloger Teri. Pour l’hôtesse de l’air harassée, la situation devient extrêmement tendue, entre un appareil sur le point de s’écraser et un dangereux maniaque prêt à tout pour l’assassiner. Avec un spitch rabâché des centaines de fois auparavant, « Turbulence » va directement là où on l’attend et ne parvient que très rarement à convaincre, hormis un casting de qualité mené tambour battant par Lauren Holly et Ray Liotta, excellent dans le rôle du psychopathe manipulateur. Les effets spéciaux restent corrects et les scènes de suspense dans l’avion plutôt réussies, même si le film n’arrive pas vraiment à la cheville des thrillers aériens sortis à la même époque (« Executive Decision » paraissait beaucoup plus captivant dans son genre). La mise en scène du vétéran Robert Butler peine à s’élever au dessus des standards télévisuels des années 90, d’autant que le public de l’époque ne s’y est pas trompé puisque le film a été un monumental échec commercial au box-office 1997, car avec un budget conséquent de 55 millions de dollars, « Turbulence » n’en a rapporté qu’à peine 12, en plus d’avoir été nominé à 2 reprises aux Razzie Awards 97 (dont « pire actrice » pour Lauren Holly).

Malgré l’échec critique et commercial du film, « Turbulence » est aussi connu pour son excellente partition symphonique composée par la regrettée Shirley Walker. Après des débuts modestes à la fin des années 70 en tant qu’interprète des synthétiseurs sur la musique de « Apocalypse Now » de Carmine Coppola, Shirley Walker se distingua en 1992 en tant que première femme à composer une partition originale en solo pour un film hollywoodien : « Memoirs of an Invisible Man » de John Carpenter. Par la suite, Walker se distingua sur des films tels que la trilogie « Final Destination », « Escape from L.A. », « Batman : The Mask of the Phantasm », « The Black Stallion » ou bien encore « Willard », etc. Très à l’aise dans le registre de l’action et du suspense, Shirley Walker composa pour « Turbulence » un grand score d’action particulièrement énergique et intense, avec ses rythmes trépidants, ses cuivres musclés et son incroyable énergie à toute épreuve. Tout le paradoxe si cher à Shirley Walker est présent dans « Turbulence », dans le sens où la compositrice a souvent été décrite par ses paires comme une grande dame de la musique de film, souriante, sympathique et accessible, mais dont la musique a toujours recelé une énergie masculine et une noirceur étonnante. Véritable montagne russe d’action, la partition de « Turbulence » est un sommet de la musique d’action des années 90, au même titre que les travaux de Jerry Goldsmith, Basil Poledouris ou Michael Kamen à la même époque. Le score débute sur l’introduction de « Carol of the Bells », célèbre chant de noël composé par Mykola Leontovych sur des paroles de Peter J. Wilhousky (reconnaissable à son fameux ostinato mélodique de 4 notes), adapté par Shirley Walker pour l’orchestre. Elément thématique majeur du score de « Turbulence », « Carol of the Bells » permet à l’auditeur de se replacer dans l’histoire du film qui se déroule en pleine nuit de Noël, la compositrice développant la mélodie de façon entêtante durant une bonne partie du film, parfois de façon calme comme au début du film, parfois de façon plus nerveuse et tendue durant les passages d’action/suspense (par exemple, aux cors à 0:28 dans « Level Six/Last Breath »). L’inclusion d’une mélodie populaire au sein d’une partition d’action n’est d’ailleurs pas sans rappeler ce que Michael Kamen avait lui-même fait sur « Die Hard » en 1988, dans lequel le compositeur avait lui aussi intégré un air populaire de noël au sein de ses propres musiques.

Hormis « Carol of the Bells », le score de « Turbulence » possède aussi d’autres thèmes et motifs, à commencer par un motif sinistre en glissando dissonant de cordes pour le dangereux Stubbs (glissando qui se termine par une note grave de piano), introduit vers la fin de « Storm Clouds/Marty’s Mistake » et repris dès les premières secondes du brutal « Stubbs’ Attack ». Teri a droit elle aussi à son propre motif, moins évident à reconnaître dans le score, mais bien présent dans « Ident Switch » aux vents à partir de 0:38 puis au piano à 0:51. Un autre thème plus optimiste apparaît vers la fin du film à partir de « Auto Pilot Landing », apportant un peu d’espoir alors que Teri tente de piloter l’avion avec l’aide du commandant Bowen. Quand à Ryan Weaver, plutôt que de lui attribuer une mélodie ou un motif particulier (hormis une série de deux notes répétées, entendues vers la fin de « I’m Innocent »), la compositrice opte davantage pour une approche plus sonore et complexe à base de trois éléments musicaux caractéristiques : des dissonances stridentes de bois (flagrant dès « Ryan Saves Teri/No Pulse »), un mélange de glockenspiel, chimes et célesta reprenant vaguement le motif de « Carol of the Bells » de façon sinistre (dans « Getting Acquainted », « Buffalo Gals », « Teri Says No », etc.) et un effet d’échoplex de cordes qui rappelle Jerry Goldsmith, effet que l’on retrouve notamment dans « Ryan Saves Teri » et « Don’t Trust Him, Teri/Teri Looks For Maggie » (qui introduit un thème secondaire de cordes associé à Teri, évoquant sa détermination à sauver la situation). Dès la première écoute, on reste subjugué par la force impressionnante de la musique à l’écran, par la puissance des assauts orchestraux durant les scènes d’action ou la richesse spectaculaire des orchestrations et l’inventivité de certains détails instrumentaux, plus évidents sur l’album de La La Land qu’à l’écran. Si « Carol O’ The Bells/Christmas Shopping/I’m Innocent » pose les bases avec une série de développements insouciants et légers autour de « Carol of the Bells » (partagé ici entre piano, glockenspiel, bois et cordes), les notes plus sombres du final de « I’m Innocent » (lors de l’arrestation de Weaver au début du film) annoncent clairement la tension à venir. Le motif de noël est repris de façon plus énergique dans « F.A.A. 214 » avec des percussions, des cuivres et des rythmes plus présents, Shirley Walker utilisant aussi quelques percussions synthétiques qu’elle rajoute à l’orchestre. On reste ici subjugué par la puissance martiale et l’énergie rythmique de « F.A.A. 214 » si chère à Shirley Walker, énergie décuplée dans le magistral « The Take-Off » pour le décollage de l’avion (premier grand moment du score de « Turbulence » !).

La compositrice fait ensuite preuve d’une certaine inventivité dans les passages à suspense, arborant un style résolument atonal, avant-gardiste et complexe dans « Storm Clouds/Marty’s Mistake » et surtout « Stubb’s Attack ». N’hésitant pas à verser dans le langage avant-gardiste des musiciens contemporains du XXe siècle, Walker développe ici son lot de glissandi, stridences, quarts de ton (aux vents) et effets multiples de cordes pour arriver à ses fins. Mais c’est l’excellent « Gunfire on Board » qui attire ici plus particulièrement notre attention : premier passage d’action majeur de « Turbulence », « Gunfire on Board » accompagne la première scène de fusillade dans l’avion avec un renfort impressionnant de cuivres, percussions synthétiques et rebondissements rythmiques multiples. La scène est entièrement accompagnée par un motif d’action de quatre notes de cuivres qui apporte un punch particulier à la scène. Les orchestrations restent solides, tout comme l’écriture riche et généreuse de l’orchestre, typique de Shirley Walker. La complexité rythmique de « Gunfire on Board » et la brutalité ahurissante des cuivres apportent une richesse aux images et à la musique qui s’apprécie encore plus sur l’album de La La Land, qui nous permet enfin d’apprécier tous les détails de la partition. Après la scène de la fusillade, Shirley Walker joue sur l’ambiguïté de Ryan Weaver : est-il un innocent ou bien un redoutable criminel manipulateur et psychopathe ? Telle est la question que semble poser les nombreux passages à suspense qui suivent, dont « Ident Switch » (avec ses percussions synthétiques suggérant une atmosphère d’espionnage/infiltration), qui développe particulièrement le motif de 4 notes de Teri, « Maggie Confronts Ryan/Nobody » avec son ouverture de cuivres syncopés impressionnante, ou le sinistre « Level Six/Last Breath » et son lot de dissonances, incluant le motif de Weaver (une série de deux notes répétées reprises de « I’m Innocent »). Il faut souligner l’inventivité de Shirley Walker qui n’hésite pas à manipuler les sons avec une aisance remarquable, comme lorsqu’elle mélange dissonances en quarts de tons des cuivres, des bois (avec un élément synthétique discret entre les deux) ou des effets d’accords mineurs de harpe brusquement étouffés à la main entre 1:58 et 2:14, instrument auquel répond le piano par une série de clusters graves et menaçants. Ce genre de détail, peu perceptible à l’écran, s’apprécie d’autant plus sur l’album qu’il permet aussi de mieux appréhender le travail de Shirley Walker autour des orchestrations et du traitement des instruments.

On appréciera aussi la tension incroyable du martèlement entêtant des toms et de la grosse caisse dans « Don’t Trust Him, Teri » sur fond d’arpèges rapides de piano, ou les effets instrumentaux complexes de la fin de « Teri Looks For Maggie ». Walker suggère clairement la folie de Weaver dès « Getting Acquainted », qui débute sur un rappel du motif de Teri puis propose des variations autour du matériau sonore du bad guy campé par Ray Liotta : le motif de 2 notes répétées de cordes, les dissonances stridentes (incluant des nappes sonores de synthétiseurs), les allusions ‘cristallines’ étranges au chant de noël et les effets d’échoplex à la Jerry Goldsmith. La folie de Ryan Weaver prend ici tout son sens, comme dans le sinistre « Teri Says No », offrant l’opportunité à Shirley Walker d’expérimenter autour des sons et des effets instrumentaux divers. L’action se déchaîne ensuite dans « Topsy Turvy », avec ses percussions agressives et ses cuivres virtuoses et robustes (incluant des effets de flatterzunge impressionnants !), sans oublier des allusions au motif d’action de « Gunfire on Board ». Evidemment, comme beaucoup de compositeurs hollywoodiens, Shirley Walker n’échappe pas ici à l’influence des temp tracks, qui sont flagrants dans « Auto Pilot Landing » : le morceau est clairement inspiré du « Air Force One » (1997) de Jerry Goldsmith, flagrant dans l’écriture rythmique des cordes/piano et de la caisse claire martiale, et encore plus flagrant dans « Fighter Escort » qui rappelle aussi bien « Air Force One » que le score de « Executive Decision » (1996). Mais si l’influence de Jerry Goldsmith ou d’autres compositeurs est quelque peu manifeste sur la fin du film, Walker parvient malgré tout à conserver sa propre personnalité, notamment dans le jeu caractéristique de ses cuivres et des percussions acoustiques/électroniques dans l’entraînant « The Next Sound You Hear », indissociable du style de la compositrice. Idem pour le superbe « 747 Flyby » qui débute sur un brillant ostinato de cordes/xylophone particulier, qui apporte un punch remarquable au morceau, malgré une légère influence du score de « The Fugitive » de James Newton Howard (très à la mode à cette époque dans les scores d’action orchestraux hollywoodiens). La confrontation finale entre Teri et Ryan donne lieu à un ultime déchaînement orchestral violent et dissonant dans « Here’s Johnny », où la virtuosité de l’écriture orchestrale de Walker est plus que jamais dominante, avec une culmination des différents éléments musicaux associés au serial killer dans le film.

La partition débouche enfin sur le superbe « The Landing/Welcome Home, Teri », dernier morceau d’action trépidant et complexe lors de l’atterrissage final de l’appareil à la fin du film. Ici, le thème de Teri est repris de façon plus musclée aux cuivres (à 2:19) pour suggérer les efforts incroyables de l’hôtesse de l’air pour poser l’avion. Le score se conclut ainsi de façon plus optimiste avec le retour de tonalités plus lumineuses et un rappel du thème héroïque de Teri (à 3:28), déjà entendu vers la fin de « Teri Looks For Maggie » et repris ici de façon plus majestueuse triomphante pour le final. Le générique de fin offre aussi l’occasion de réentendre les principales idées musicales de « Turbulence » dans « End Credits (Extended Film Version) », avec une série de variations autour du thème de 4 notes de Teri (le « End Credits (Shirley Walker Suite) » n’étant qu’un repiquage du générique de fin du DVD, avec un son assez décevant). Vous l’aurez donc compris, la partition de « Turbulence » est une véritable aventure musicale que l’on doit avant tout au talent incroyable de Shirley Walker, l’une des grandes dames de la musique de film hollywoodienne et une compositrice redoutable en ce qui concernant les déchaînements orchestraux débridés, les orchestrations généreuses et les musiques d’action virtuoses et musclées. « Turbulence » contient de tout cela à la fois, et même plus, car la musicienne nous offre aussi une poignée de thèmes difficiles à cerner à la première écoute car trop souvent dilués dans les variations orchestrales et dynamiques, mais pourtant bien présents et indissociables des principaux protagonistes du récit. Grâce à la récente édition officielle du score, les fans de Shirley Walker pourront enfin apprécier l’une des meilleures partitions d’action de la compositrice américaine, un hit dans le domaine des musiques d’action orchestrales des années 90, à découvrir dans le film sans plus tarder pour ceux qui ne connaîtraient pas encore !




---Quentin Billard