1-The Sword and the
Sorcerer Overture 3.13
2-Main Title/Tomb Island/
Xusia Stabbed 6.57
3-Tavis's Death/Battlefield 2.33
4-Black Sorcery/
Kingdom of Edhan 3.33
5-Young Talon's Fight 3.22
6-Talon and the Mercenaries 1.29
7-Xusia's Cave 1.57
8-The Innkeeper 1.12
9-Rebel Headquarters/
Alana's Rape 4.01
10-Alana's Theme 1.42
11-Skull Cave/Red Dragon/Fire 4.19
12-The Rat Attack 1.11
13-Castle Chase Parts 1&2 3.41
14-Talon vs. Cromwell/The Fight
in The Water 2.47
15-The Bordello 1.06
16-Elizabeth's Death 1.52
17-The Feast 1.36
18-Vows Exchanged/
Talon on the Cross/
The Rebellion Begins 5.03
19-Round Room Fight 2.19
20-Transformation 3.26
21-Talon Kills Xusia
(Not Used in Film) 1.02
22-Fight to the Death/Aftermath 4.50
23-Love Theme/Epilogue/
End Credits 6.12

Musique  composée par:

David Whitaker

Editeur:

BSX Records BSXCD 8910

Musique produite et conduite par:
David Whitaker
Montage musique:
Fred Aronow

(c) 1982 Sorcerer Productions. All rights reserved.

Note: ****
THE SWORD AND THE SORCERER
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by David Whitaker
Depuis le succès de « Star Wars » en 1977, Hollywood exploita à fond pendant près d’une décennie le registre du film d’aventure épique médiéval/fantastique, genre qui connut son heure de gloire dans les eighties avant de tomber rapidement en désuétude au début des années 90. Si « Conan the Barbarian » a été le point de départ de cette série de films, certains imitateurs philippins ou italiens se sont rapidement cassés les dents sur des projets similaires fauchés et dénués de talent (on pense à « Thor Il Conquistatore » de Tonino Ricci sorti aussi en 1982, ou « Ator : The Fighting Eagle » de Joe D’Amato en 1983), qui feront par la suite le bonheur des amateurs de nanars et des fans du site Nanarland. Pourtant, tout avait bien commencé avec un premier classique du genre tourné un an auparavant, « Excalibur » (1981), grande fresque historique/épique de John Boorman et chef-d’oeuvre du cinéma d’aventure U.S. des eighties. Ont suivi par la suite des films similaires trop nombreux pour pouvoir être tous cités (« The Archer : Fugitive From the Empire », « The Beastmaster », « Hawk the Slayer », « Dragonslayer », « Fire and Ice », « The Barbarians », « Conquest », « Deathstalker »), sans oublier des films d’aventure/science-fiction plus proches de « Star Wars » comme « Krull », autre grand échec commercial de l’année 1983. C’est ainsi que l’on oublie très souvent de citer « The Sword and the Sorcerer » (L'épée sauvage), qui exploita à son tour le genre de l’heroic-fantasy médiévale avec un budget misérable et un casting modeste, réunissant quelques pointures des séries-B eighties fauchés (on pense notamment à Richard Lynch, grand adepte des rôles de bad guys dans les années 80). D’un point de vue esthétique, le film a particulièrement mal vieilli, et la maigreur de son budget est flagrante à l’écran, mais qu’importe, pour son premier film, Albert Pyun surfe efficacement sur le genre en mélangeant tous les ingrédients habituels de l’heroic-fantasy : un héros intrépide qui manie l’épée comme un as et cherche à se venger, une princesse naïve et indéniablement jolie, un méchant chef de guerre usurpateur du trône qui a pris le pouvoir par la force, des compagnons d’armes rigolos, mais aussi des bagarres, de l’humour tendance ‘cartoon’ eighties, un peu de gore et même un soupçon d’érotisme : rien n’y manque ! Si le scénario est plutôt classique, les rebondissements sont bien amenés, et le film progresse sans surprise vers une dernière demi heure qui enchaîne les scènes de bataille et de bagarres à un rythme effréné, malgré un milieu plus terne et un peu ennuyeux. Pyun alterne ainsi humour grand public, moments plus sombres et gore (le réveil du sorcier au début du film, la mort de la sorcière tuée par Xusia, le bourreau qui se fait déchiqueter la tête sur une ponceuse, la réapparition de Xusia vers la fin du film, etc.) et un peu d’érotisme en filmant régulièrement des jolies filles dévêtues et quelques attributs féminins fort charmants – à vrai dire, le film est d’une incroyable misogynie typique des années 80, filmant les femmes comme de simples objets sexuels livrés à des bêtes sauvages – Même la jolie princesse Alana (Kathleen Beller), censée être l’instigatrice de la rébellion contre le tyrannique Titus Cromwell (Richard Lynch), n’a qu’un rôle mineur dans l’histoire, se contenant de jouer la jeune vierge captive délivrée par le héros campé par le rigolo et intrépide prince Talon (Lee Horsley), sorte d’ersatz d’Errol Flynn version 80’s. A vrai dire, tout le film est un bric-à-brac bordélique de plusieurs influences, que ce soit des films de cape et d’épée de l’âge d’or hollywoodien (ceux de Michael Curtiz), des films d’heroic-fantasy post-« Conan », des productions d’aventure à grand spectacle façon « Excalibur » ou des sagas épiques façon « Star Wars », et tant pis si le ton du film hésite trop souvent entre toutes ces influences (sans oublier des dialogues risibles et misogynes du genre « vers de nouveaux royaumes à libérer et de nouvelles femmes à aimer ! »), le divertissement est assuré malgré un budget inexistant et des moye
ns très limités.

Le réalisateur Albert Pyun décida de confier la musique de « The Sword and the Sorcerer » au compositeur anglais David Whitaker, musicien plus connu pour ses quelques partitions pour des films fantastiques de la Hammer comme « Vampire Circus » (1972) ou « Doctor Jekyll and Sister Hyde » (1971) et ses collaborations en tant qu’arrangeur pour de nombreux artistes du rock ou de la variété (Whitaker a notamment travaillé avec Air, Etienne Daho, Serge Gainsbourg, Johnny Hallyday, les Rolling Stones, Jimmy Page, Sylvie Vartan, Marianne Faithfull, etc.), sans oublier une brève incursion dans le cinéma français avec une excellente partition symphonique pour le thriller « Harry, un ami qui vous veut du bien » en 2000 et pour « Lemming » en 2005. Son travail sur « The Sword and the Sorcerer » est remarquable sur plus d’un point, tant le compositeur y démontre avec une aisance rare une science d’écriture devenue rarissime à l’époque, alors que la musique de film hollywoodienne des années 80 commence à être envahie par le rock, la pop et les synthétiseurs. A contrario, et à l’instar de Basil Poledouris sur « Conan the Barbarian » ou de Lee Holdridge sur « The Beastmaster », David Whitaker compose pour « The Sword and the Sorcerer » une grande partition symphonique extrêmement classique, très inspirée du langage musical post-romantique du 19e siècle, selon la tradition revenue au goût du jour depuis l’énorme succès du « Star Wars » de John Williams en 1977. Une première écoute de la musique dans le film nous permet de constater très vite à quel point Whitaker a été influencé d’Erich Wolfgang Korngold, duquel le compositeur anglais se rapproche manifestement sur le film d’Albert Pyun par son goût pour des fanfares cuivrées héroïques et exaltées, pour un symphonisme riche et généreux et des orchestrations amples et fouillées, multipliant les détails avec une aisance remarquable. Adoptant un ton ‘swashbuckling’ qui nous renvoie plusieurs décennies en arrière sur des musiques de Korngold telles que « The Sea Hawk » (1940), « The Adventures of Robin Hood » (1938) ou « The Prince and the Pauper » (1937), la musique de « The Sword and the Sorcerer » apporte une énergie et un fun indéniable aux images, avec une musique parfois même plus colorée et vivante que les images elles-mêmes.

Anecdote intéressante : l’enregistrement de la musique du film à Munich avec le Graunke Symphony Orchestra ne s’est pas fait sans heurt, l’interprétation des musiciens allemands étant teintée de quelques faiblesses qui s’expliquent en particulier par un nombre très limité de répétitions (à cause d’un budget très modeste !) et le fait que la plupart des musiciens prenaient régulièrement des pauses durant l’enregistrement pour aller boire un coup dans le pub d’à côté (notamment pour les cornistes de l’orchestre), et revenaient un peu éméchés lors de la session suivante, une anecdote révélée par Whitaker lui-même à l’époque. Du coup, il n’est pas rare d’entendre quelques fausses notes par-ci par-là ou certains instruments désynchronisés à certains endroits, même si, rassurons-nous, l’ensemble reste très correct pour un orchestre de cette envergure. Autre souci de taille : la qualité de l’enregistrement est assez variable d’une édition à une autre, la meilleure version du score restant l’intégrale publiée par BSX Records en 2012. La musique de Whitaker établit une série de leitmotive au sens wagnérien du terme, avec les traditionnels thèmes associés aux personnages principaux. Ainsi, le prince Talon se voit attribuer le thème principal du score, mélodie héroïque et entraînante très Korngoldienne, inspirée des fanfares héroïques du Golden Age hollywoodien. La princesse Alana se voit attribuer quand à elle l’inévitable thème romantique dans le magnifique « Alana’s Theme », composé dans un style romantique 19èmiste très élégant et raffiné, repris aussi au début de « Love Theme-Epilogue-End Credits ». Le maléfique Cromwell n’a pas de thème à proprement parler mais se voit plutôt attribuer une série d’ambiances sonores sombres, tout comme le sinistre Xusia, accompagné d’orchestrations sombres privilégiant violoncelles/contrebasses, tuba et clarinette basse durant la première scène du film (« Main Title/Tomb Island/Xusia Stabbed ») ou dans « Xusia’s Cave ». En revanche, un troisième thème, plus solennel, majestueux et héroïque, dévoilé vers la fin de « Overture », fait son apparition au cours de la seconde partie du film, thème de la rébellion, entendu notamment vers la fin de « Vows Exchanged/Talon on the Cross/Rebellion Begins », un très beau thème ample et généreux dans la plus pure tradition Korngoldienne, morceau hélas gâché par une qualité sonore très moyenne et quelques approximations des cuivres.

Si le film débute de façon sombre sur des harmonies menaçantes et des orchestrations pesantes dans « Main Title/Tomb Island/Xusia Stabbed », pour le réveil de Xusia, « Travis’ Death/Battlefield » introduit l’aspect plus guerrier du score avec un ostinato rythmique de tambours qui rappelle inévitablement l’habituel « Mars » de Holst. Les orchestrations, riches et généreuses, font la part belle aux cuivres mais n’oublient jamais les cordes, les bois et les percussions. Si le thème principal est à nouveau présent dans sa forme solennelle (aux cors à 1:51), il sera surtout décliné à volonté dans la dernière partie du film. Les harmonies sombres de « Tomb Island/Xusia Stabbed » sont reprises au début de « Black Sorcery/Kingdom of Eh-Dan » pour suggérer la présence du maléfique Xusia, avec des orchestrations plus sombres – à noter ici les effets de trilles de cordes ou les glissandi de trombones – sonorités menaçantes reprises aussi dans le très herrmannien « Xusia’s Cave ». Inversement, les morceaux associés aux exploits du vaillant prince Talon sont beaucoup plus légers et funs, avec entre autre l’envolée héroïque du thème dans « Young Talon’s Fight » à 2:03 aux trompettes, ou du thème de la rébellion dans « Talon and the Mercenaries », qui reprend le thème héroïque dans une version plus lente et pleine d’espoir. Evidemment, il y a aussi les passages de bataille à grand renfort de percussions martiales ou de cuivres guerriers comme « Skull Cave/Red Dragon/Fire », « Castle Chase », « Talon vs. Cromwell/The Fight in the Water » ou « Round Room Fight » et leurs accents de swashbuckling à la Korngold, et les moments plus sombres comme « Transformation » ou le dissonant « The Rat Attack » (scène d’attaque des rats dans les tunnels, totalement inutile dans le film et expédiée à la va-vite !), avec ses effets instrumentaux étranges, sans oublier les passages de danse médiévale comme « The Innkepper » ou « The Feast ». Evidemment, la confrontation finale sert de prétexte à David Whitaker pour nous rappeler son goût certain pour la musique du Golden Age hollywoodien, à mi-chemin entre Korngold, Rozsa ou Newman, comme le rappelle « Round Room Fight » ou le duel final entre Talon et Cromwell dans « Fight to the Death/Aftermath », avec ses cuivres et ses quelques accents martiaux scandés qui rappellent par moment le « Raiders of the Lost Ark » de John Williams (influence flagrante dans ce morceau !).

David Whitaker signe donc une excellente partition d’aventure riche et colorée pour « The Sword and the Sorcerer », bien plus passionnante que le film lui-même. Avec une écriture orchestrale totalement maîtrisée, des thèmes de qualité, des orchestrations généreuses et un style emprunté aux grandes heures du Golden Age hollywoodien (et plus particulièrement aux musiques héroïques d’Erich Wolfgang Korngold), David Whitaker opte pour un style old school totalement assumé pour le film d’Albert Pyun, quitte à jouer la carte du symphonisme 19èmiste rétro là où le film s’avère déjà trop typique de son époque (les années 80) dans ses travers et ses excès (notamment dans la violence et l’érotisme misogyne). L’association des deux aboutit finalement à un résultat parfois hasardeux, qui donne bien souvent envie de découvrir la musique en dehors des images, étant donné que le score n’est pas toujours bien mixé dans certaines séquences (notamment lorsqu’il y a des dialogues ou des bruitages), empêchant l’auditeur de découvrir pleinement les détails de cette partition d’aventure riche et généreuse. Car effectivement, si le film mélange les tons de façon complètement maladroite, la musique de David Whitaker s’avère être résolument innocente dans son héroïsme bon enfant, dans ses envolées guerrières optimistes ou ses quelques rares élans romantiques savoureux comme dans « Alana’s Theme » ou au début de « Love Theme/Epilogue/End Credits » pour le final du film. Evidemment, il y a aussi les quelques approximations des musiciens de l’orchestre (pas si catastrophiques que certains l’ont prétendu !) et la qualité moyenne du son, mais le tout est écrit avec une telle sincérité et un tel amour du métier qu’il paraît difficile de ne pas résister à cette solide partition symphonique qui reste un hit incontournable dans la carrière de David Whitaker, qui marquera une longue pause dans sa carrière pour le cinéma après « The Sword and the Sorcerer ».




---Quentin Billard